sub. f. (Métaphysique) La création est l'acte d'une puissance infinie qui produit quelque chose, sans la tirer d'une matière préexistante. C'est une question assez problématique, si le dogme de la création a été soutenu par quelques philosophes payens, ou si les docteurs Juifs et les Chrétiens sont les premiers qui l'aient enseigné. Les savants sont partagés là-dessus : le sentiment de ceux qui soutiennent la négative par rapport aux payens, parait le plus vraisemblable. Nous ne craindrons point d'avancer sur la foi de leurs ouvrages, que tous les philosophes anciens ont cru que la matière première avait été de toute éternité. Cela parait en ce qu'ils n'avaient même aucun terme dans leurs langues, ni aucune façon de parler, qui exprimassent la création et l'anéantissement. " Y a-t-il un seul physicien, demande
Cicéron, qui saisisse, qui conçoive ce que c'est que créer et qu'anéantir " ?
Aristote, en poussant ses spéculations plus loin, ajoute que les premiers habitants du monde ont toujours jugé que la matière existait par elle-même, et sans dépendre d'aucune cause extérieure. Si elle en dépendait, disaient-ils, on ne pourrait la connaître que par quelqu'idée qui lui serait étrangère, qui n'aurait aucun rapport avec elle ; et cette idée dégraderait certainement la matière du titre de substance qui lui appartient. L'éternité de la matière leur servait à sauver la bonté de Dieu aux dépens de sa puissance, et à expliquer d'une manière en apparence moins révoltante l'origine du mal moral et du mal physique. " Peut-on croire, disait Platon dans son Timée, que ce qui est mauvais et déreglé soit l'ouvrage de Dieu ? N'est-il pas le principe et la source de toute vertu, tant en lui-même que hors de lui ? S'il avait trouvé plus de docilité dans la terre, plus de disposition à l'ordre, sans doute qu'il l'aurait remplie de toute sorte de bien. Tel est en effet son caractère, à moins qu'il ne trouve des obstacles invincibles ". Ils étaient persuadés en général, que si Dieu avait tiré la matière du néant, il l'aurait aisément pliée à sa volonté, au lieu de trouver en elle un sujet rébelle. Il avait fait cependant, disaient-ils, pour mettre l'ordre dans le monde, tout ce qui pouvait dépendre de sa sagesse ; mais elle se trouva trop contrariée, et ne put empêcher cet amas de désordres qui inondent l'univers, et de miseres, et de disgraces, auxquelles les hommes sont assujettis.
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