S. f. (Géométrie) ligne droite qui joint les deux extrémités d'un arc. Voyez ARC. Ou bien c'est une ligne droite qui se termine par chacune de ses extrémités à la circonférence du cercle, sans passer par le centre, et qui divise le cercle en deux parties inégales qu'on nomme segments : telle est A B, Planche géomét. fig. 6. Voyez SEGMENT.

La corde du complément d'un arc est une corde qui soutend le complément de cet arc, ou ce dont il s'en faut que cet arc ne soit un demi-cercle. Voyez COMPLEMENT.

La corde est perpendiculaire à la ligne C E, tirée du centre du cercle au milieu de l'arc dont elle est corde ; et elle a, par rapport à cette droite, la même disposition que la corde d'un arc à tirer des flèches, a par rapport à la flèche. C'est ce qui a servi de motif aux anciens géomètres pour appeler cette ligne corde de l'arc, et l'autre flèche du même arc. Le premier de ces noms s'est conservé, quoique le second ne soit plus si fort en usage. Ce que les anciens appelaient flèche, s'appelle maintenant sinus verse. Voyez FLECHE et SINUS.

La demi-corde B o du double de l'arc est ce que nous appelons maintenant sinus droit de cet arc ; et la partie o E du rayon, interceptée entre le sinus droit B o et l'extrémité E du rayon, est ce qu'on nomme sinus verse. Voyez SINUS.

La corde d'un angle et la corde de son complement à quatre angles droits ou au cercle entier, sont la même chose ; ainsi la corde de 50 degrés et celle de 310 degrés sont la même chose.

On démontre, en Géométrie, que le rayon C E qui coupe la corde B A en deux parties égales au point D, coupe de même l'arc correspondant en deux parties égales au point E, et qu'il est perpendiculaire à la corde A B, et réciproquement : on démontre de plus, que si la droite N E coupe la corde A B en deux parties égales et qu'elle lui soit perpendiculaire, elle passera par le centre, et coupera en deux parties égales l'arc A E B, aussi bien que l'arc A N B. On peut tirer de-là plusieurs corollaires utiles : comme 1°. la manière de diviser un arc A B en deux parties égales ; il faut pour cela tirer un perpendiculaire au milieu D de la corde A B, et cette perpendiculaire coupera en deux parties égales l'arc donné A B.

2°. La manière de décrire un cercle qui passe par trois points donnés quelconques, A, B, C, fig. 7. pourvu qu'ils ne soient pas dans une même ligne droite.

Décrivez pour cela des points A et C, et d'un même rayon des arcs qui se coupent en D, E ; et des points C, B, et encore d'un même rayon, décrivez d'autres arcs qui se coupent en G et H : tirez les droites D E, G H, et leur intersection I sera le centre du cercle cherché qui passe par les points A, B, C.

Démonstration. Par la construction la ligne E I a tous ses points à égale distance des extrémités A, C de la ligne A C ; c'est la même chose de la ligne G I par rapport à C B : ainsi le point I d'intersection étant commun aux deux lignes E I, G I, sera également éloigné des trois points proposés A, C, B ; il pourra donc être le centre d'un cercle, que l'on fera passer par les trois points A, C, B.

Ainsi prenant trois points dans la circonférence d'un cercle ou d'un arc quelconque, on pourra toujours trouver le centre, et achever ensuite la circonférence.

De-là il s'ensuit aussi, que si trois points d'une circonférence de cercle conviennent ou coïncident avec trois points d'un autre, les circonférences totales coïncident aussi ; et ainsi les cercles seront égaux, ou le même. Voyez CIRCONFERENCE et CERCLE.

Enfin on tire de-là un moyen de circonscrire un cercle à un triangle quelconque.

La corde d'un arc A B, fig. 6. et le rayon C E étant donnés, trouver la corde de la moitié A E de cet arc. Du carré du rayon C E, ôtez le carré de la moitié A D de la corde donnée A B, le reste sera le carré de o C ; et tirant la racine carrée, elle sera égale à C D : on la soustraira du rayon E C, et il restera D E : on ajoutera les carrés de A D et de E D, et la somme sera le carré de A E ; dont tirant la racine, on aura la corde de la moitié A E.

Ligne des cordes, c'est une des lignes du compas de proportion. Voyez COMPAS DE PROPORTION. Wolf et Chambers. (E)

* CORDE, s. f. ouvrage du Cordier. C'est un corps long, flexible, résistant, rond, composé de filaments appliqués fortement les uns contre les autres par le tortillement. Il y a des cordes de plusieurs espèces, qu'on distingue par leur grosseur, leur fabrication, leurs usages et leurs matières.

On peut faire des cordes avec le lin, le coton, le roseau, l'écorce de tilleul, la laine, la soie, le chanvre, etc. mais celles de chanvre sont les plus communes de toutes ; elles ont plus de force que celles de roseau et d'écorce d'arbre, et les autres matières ne sont pas assez abondantes pour qu'on en put faire toutes les cordes dont on a besoin dans la société, quand il serait démontré par l'expérience que ces cordes seraient meilleures que les autres.

Des cordes de chanvre. On fait avec le chanvre quatre sortes de cordes ; les unes qui sont composées de brins, et qu'on ne commet qu'une fais, comme le merlin et le bitord, voyez BITORD et MERLIN ; d'autres qui sont composées de torons, et qu'on ne commet qu'une fais, comme les aussières à deux, trois, quatre, cinq et six torons, voyez AUSSIERES et TORONS. Il y en a de composées d'aussières, et commises deux fois ; on les appelle grelins, voyez GRELINS. On peut commettre des grelins ensemble, et la corde qui en proviendra sera commise trois fais, et s'appellera archigrelins, voyez ARCHIGRELINS. Il y a encore une espèce de corde plus menue par un bout que par l'autre, qu'on appelle par cette raison corde en queue de rat, voyez pour cette corde et pour la fabrication des précédentes, l'article CORDERIE.

Si l'on fabriquait des cordes de coton, de crin, de brins, etc. on ne s'y prendrait pas autrement que pour celles de chanvre ; ainsi on peut rapporter à cette main-d'œuvre tout ce qui concernerait celle de ces cordes. Mais il n'en est pas de même des cordes qu'on tire de substances animales, comme les cordes à boyau, les cordes de nerfs, les cordes d'instruments de musique, etc. celles-ci demandent des préparations et un travail particuliers : nous en allons traiter séparément.

Des cordes à boyau, ou faites de boyaux mis en filets, tortillés et unis avec la presle. Il y en a de deux espèces ; les unes grossières, qu'on emploie soit à fortifier, soit à mouvoir des machines : nous en avons donné la fabrication à l'article Boyaudier, voyez BOYAUDIER. Elle se réduit au lavage, première opération. Ce lavage consiste à démêler à terre les boyaux ; ce qui se fait avec quelque précaution, pour ne pas les rompre. A la seconde opération on les jette dans un baquet d'eau claire ; on les lave réellement, et le plus qu'il est possible. A la troisième on les vide dans un autre baquet ; à la quatrième on les tire de ce baquet, et on les gratte en les faisant passer sous un couteau qui n'est tranchant que vers la pointe. Cette opération se fait sur un banc plus haut que le baquet d'un bout, et appuyé sur le baquet par le bout qui est plus bas : à la cinquième on coupe les boyaux grattés, par les deux bouts et de biais, et on les jette dans une autre eau : à la sixième on les en tire un à un, et on les coud avec une aiguille enfilée de filaments enlevés de la surface du boyau. On observe, pour empêcher la grosseur de la couture, que les biais des coupures se trouvent en sens contraires, c'est-à-dire l'une en dessus et l'autre en dessous. A la septième on noue chaque longueur à un lacet qui tient à une cheville fixe, et l'on attache l'autre bout aux nelles du rouet, voyez NELLE, ROUET, LACET, etc. A la huitième on tord le boyau au rouet jusqu'à un certain point, on en tord toujours deux à la fois : on a des brins de presle ; on entrelace ces brins de presle entre les deux boyaux ; on les serre entre cette presle, et on tire sur toute leur longueur la presle serrée, en les frottant fortement. A la neuvième on leur donne plus de tors ; on les frotte avec un frottoir ; on les épluche ou l'on enlève leurs inégalités avec un couteau ordinaire, et on leur donne le troisième et dernier tors. A la dixième, on les détache des nelles ; on les attache par un autre lacet à une autre cheville ; on les laisse sécher ; on les détache quand ils sont secs ; on coupe la partie de chaque bout qui a formé les nœuds avec les lacets ; on les endouzine, on les engrossit, et la corde est faite. Il faut travailler le boyau le plus frais qu'il est possible ; le délai en été le fait corrompre ; en tout temps il lui ôte de sa qualité. Il ne faut jamais dans cette manœuvre employer d'eau chaude, elle ferait crisper le boyau. Il y a quelqu'adresse dans le travail de ces cordes, à estimer juste leur longueur, ou ce que le boyau perdra dans ses trois tors. On n'a jusqu'à présent fait des cordes à boyau que de plusieurs boyaux cousus. Le sieur Petit Boyaudier, qui a sa manufacture au Croissant rue Mouffetard, prétend en fabriquer de bonnes de toute longueur, et sans aucune couture. Nous avons répeté ici la manière de travailler le boyau, parce qu'en consultant plusieurs ouvriers, on trouve souvent une grande différence, tant dans la manière de s'exprimer que dans celle d'opérer, et qu'il importe de tout savoir en ce genre, afin de connaître par la comparaison de plusieurs mains-d'œuvres, quelle est la plus courte et la plus parfaite. Voyez ENDOUZINER, ENGROSSIR, etc.

Des cordes à boyau propres à la Lutherie. On dit qu'il ne se fabrique de bonnes cordes d'instruments qu'en Italie, celles qui viennent de Rome passant pour les meilleures ; on les tire par paquets assortis, composés de 60 bottes ou cordes, qui sont toutes pliées en sept ou huit plis. On les distingue par numéro, et il y en a depuis le n°. 1. jusqu'au n°. 50. Ce petit art qui contribue tant à notre plaisir, est un des plus inconnus : les Italiens ont leur secret, qu'ils ne communiquent point aux étrangers. Les ouvriers de ce pays qui prétendent y entendre quelque chose, et qui font en effet des cordes d'instruments, que les frondeurs jugeront assez bonnes pour la musique qu'on y compose, ont aussi leurs secrets qu'ils gardent bien, surtout quand ils sont consultés. Voici tout ce que nous en avons pu connaître, avec le secours de quelques personnes qui n'ont pu nous instruire selon toute l'étendue de leur bonne volonté. On se pourvait de boyaux grêles de moutons, qu'on nettoye, dégraisse, tord et seche de la manière qui suit. On a un baquet plein d'eau de fontaine, on y jette les boyaux comme ils sortent du corps de l'animal ; on ne peut les garder plus d'un jour ou deux, sans les exposer à se corrompre : au reste cela dépend de la chaleur de la saison, le mieux est de les nettoyer tout de suite. Pour cet effet on les prend l'un après l'autre par un bout, de la main droite, et on les fait glisser entre le pouce et l'index, les serrant fortement. On les vide de cette manière, et à mesure qu'ils sont vuidés, on les laisse tomber dans l'eau nette. On leur réitère cette opération deux fois en un jour, en observant de les agiter dans l'eau de temps en temps pendant cet intervalle, afin de les mieux laver ; on les passe ensuite dans de nouvelle eau de fontaine, pour y macérer pendant deux ou trois jours, selon la chaleur du temps : chacun de ces jours on les racle deux fais, et on les change d'eau trois fais. Pour les racler on les étend l'un après l'autre sur une planche ou banc incliné au bord du baquet, on a un morceau de roseau divisé longitudinalement ; il faut que les côtés de la division ne soient pas tranchans, mais ronds. C'est avec ce roseau qu'on les ratisse, et qu'on parvient à les dépouiller de l'épiderme grasse qui les rend opaques ; on les fait passer dans des eaux nouvelles à mesure qu'on les ratisse : alors le boyau est nettoyé, et le voilà en état d'être dégraissé. Les ouvriers font un premier secret de la manière dont ils dégraissent les boyaux ; mais il est constant qu'indépendamment de leur secret, si l'on n'apporte les plus grandes précautions au dégraissage des boyaux, les cordes n'en vaudront rien. Il faut préparer une lessive que les ouvriers appellent eau-forte, et qui s'emploie au quart forte, au tiers forte, demi-forte, trois quarts forte, et toute forte. Pour la faire on a un vaisseau de grais ou cuve de pierre contenant demi-barrique, ou le poids de 250 liv. d'eau ; on la remplit d'eau, on y jette environ deux livres et demie de cendres gravelées, qu'on y remue bien avec un bâton. N'y met-on que cela ? Il y en a qui prétendent qu'il y entre de l'eau d'alun en petite quantité ; mais on ne sait, par la manière dont ils s'expriment, si l'eau d'alun sert avant le dégraissage, si elle entre dans la lessive du dégraissage, si elle y entre seule, ou en mélange avec la cendre gravelée, ou si cette façon d'eau d'alun ne se donne pas après le dégraissage même avec la cendre gravelée. Quoi qu'il en sait, on a des tinettes ou terrines de grais, qui peuvent tenir environ dix livres d'eau, on met les boyaux par douzaines dans ces vaisseaux ; on prend dans la cuve environ deux livres et demie de lessive ; quelle que soit cette lessive, on la verse dans la tinette sur les boyaux, et on acheve de la remplir avec de l'eau de fontaine : on dit qu'alors les boyaux sont dans la lessive au quart, ce qui signifie que le liquide dans lequel ils trempent, est composé d'une partie de lessive et de trois parties d'eau de fontaine. On les laisse blanchir dans cette eau une demi-journée dans un lieu frais ; on les en retire l'un après l'autre, pour leur donner la façon suivante. On a à l'index une espèce d'ongle de fer blanc qu'on met au doigt comme un dé à coudre ; on nomme cet instrument dégraissoir. On applique le pouce contre le bord de son calibre, à son extrémité, et l'on presse le boyau contre ce bord, tandis qu'on le tire de la main droite : on le jete, au sortir de cette opération, dans une autre tinette ou terrine, dont la lessive est au tiers forte, c'est-à-dire de deux parties d'eau de fontaine, sur une partie de lessive. On revient à cette manœuvre du dégraissoir quatre à cinq fais, et elle dure deux ou trois jours, suivant la chaleur de la saison. Chaque demi-journée on augmente la force de la lessive. Les boyaux se dégraissent plus promptement en été qu'en hiver. Les augmentations de la lessive en hiver sont du quart au tiers, du tiers au demi, du demi aux trois quarts, des trois quarts à l'eau toute forte ; et en été du quart au demi, du demi aux trois quarts, et des trois quarts à l'eau toute forte. Dans le premier cas, les degrés d'eau se donnent en trois jours, et en deux jours dans le second ; mais tantôt on abrege, tantôt on prolonge cette opération : c'est à l'expérience de l'ouvrier à le déterminer. Il faut avoir grande attention à ne point écorcher les boyaux avec le dégraissoir Le dégraissage se fait sur un lavoir haut de deux pieds et demi, large de deux, et long d'environ dix ou douze, suivant l'emploi de la fabrique ; il est profond d'environ six pouces, et les eaux peuvent s'en écouler aux deux bouts par les ouvertures, et au moyen de la pente qu'on y a pratiquée. Après ce dégraissage, au sortir des lessives que nous avons dites, on en a une autre qu'on appelle double-forte ; elle est composée de la même quantité d'eau de fontaine, c'est-à-dire de 250 livres ou environ ; mais on y met cinq livres de cendres gravelées. Je demanderai encore : n'y met-on que cela ? et l'on sera bien fondé à avoir sur cette lessive double forte, les mêmes doutes que sur la lessive simple forte. Au reste, on est bien avancé vers la découverte d'une manœuvre, quand on connait les expériences qu'on a à faire. On laisse les boyaux dans cette seconde lessive une demi-journée, une journée entière, et même davantage, selon la saison, et toujours par douzaines, et dans les mêmes tinettes ou terrines de grais. On les en tire, pour passer encore une fois sur le dégraissoir de fer, d'où on les jette dans de l'eau fraiche ; les boyaux sont alors en état d'être tordus au rouet. On les tire de l'eau ; il est encore incertain si cette eau est pure, ou si elle n'est pas un peu chargée d'alun, et tout de suite on les double. Les gros boyaux servent à faire les grosses cordes, les boyaux plus petits et plus clairs servent à faire les cordes plus petites ; mais il est bon de savoir qu'on ne les tord presque jamais simples ; la plus fine chanterelle est un double. On les fait environ de cinq pieds et demi, ou huit pouces. Chaque boyau en fournit deux. Il peut arriver que le boyau double n'ait pas la longueur requise pour la corde. Alors on en prend deux qu'on assemble de cette manière ; on porte un des bouts à un émerillon du rouet ; on passe le boyau doublé sur une cheville de la grosseur du doigt, qui est fichée dans un des côtés d'un châssis, à quelque distance de l'émerillon, et qui fait partie d'un instrument appelé le talart ou l'attelier. Il faut observer que le bout de la corde qui est à l'émerillon, a aussi sa cheville, et que cette cheville est passée dans le crochet de l'émerillon. Si la corde est trop courte pour cet intervalle, on l'allonge, comme on l'a indiqué plus haut, en assemblant l'un des deux boyaux avec un autre boyau plus long ; s'il y a du superflu, on le coupe, et l'on tord le boyau en douze ou quinze tours de rouet. La roue du rouet a trois pieds de diamètre, et les bobines qu'elle fait mouvoir ont deux pouces. On détache les deux petites chevilles, l'une de l'émerillon, l'autre du côté du châssis, et on les transporte dans des trous faits exprès à l'autre extrémité du talart placé à côté du rouet. Le talart est un châssis de bois de sapin long de deux aunes, large de deux ; à l'une de ses extrémités il y a vingt trous garnis d'autant de chevilles de la grosseur du doigt, et à l'autre quarante plus petites : ainsi un boyau tord pour un instrument de musique, et tendu sur le talart, a ses deux extrémités attachées, l'une à une des petites chevilles des quarante, et l'autre à une des vingt grosses. Voyez Planche V. de Corderie. b est le baquet où s'égoutte l'eau ; d est une table avec rebords qui reçoit l'eau, et qui par sa pente et ses gouttières conduit l'eau dans le baquet ; c, c sont des treteaux qui la soutiennent ; u, rangées de chevilles où l'on attache les cordes quand on les tord ; a, a, a, a, est un châssis oblong, de deux aulnes sur une de ses dimensions, et de deux pieds et demi sur l'autre ; Xe sont des trous à recevoir les chevilles des cordes, lorsqu'elles sont tordues ; z, corde que l'on tord à l'aide d'une roue et de deux poulies, avec un petit crochet k, auquel on adapte la cheville qui doit remplir un des trous du châssis quand la corde sera torse. Mais la manœuvre que nous venons de décrire ne suffit pas pour donner à la corde l'élasticité convenable, et lui faire rendre du son, il y a, dit-on, encore un autre secret. C'est celui-là surtout qu'il faudrait obtenir des ouvriers. Ne consiste-t-il que dans la manœuvre suivante ? Nous l'ignorons. Lorsque le talart est garni de boyaux tords, on les frotte les uns après les autres avec des cordes de crin ; on passe dessus la corde de crin cinq ou six fois de suite, ce qui acheve de les dégraisser et de les dégrossir en les arrondissant. Lorsque chaque boyau ou corde aura été frottée ainsi à deux reprises de la corde de crin, et qu'on la trouvera fort nette, on portera le talard tout garni de ses cordes, dans une étuve proportionnée à sa grandeur, c'est-à-dire d'un peu plus de deux aulnes de long, et d'environ une demi-aulne pour ses autres dimensions ; on les y laissera tendues pendant cinq ou six jours, pour y sécher lentement à la vapeur du soufre et y prendre de l'élasticité. L'étuve est échauffée par un peu de feu de charbon, qu'on y introduit dans un réchaud sur lequel on jette deux onces de fleur de soufre. Cet ensoufrement se donne toujours en mettant le talart dans l'étuve, et se répète deux jours après. On a soin de tenir l'étuve fermée, afin que la fumée du soufre ne s'échappant point, produise son effet. Au bout de cinq à six jours on sort les talarts de l'étuve ; on frotte chaque corde avec un peu d'huîle d'olive ; on les plie à l'ordinaire, après les avoir coupées de la longueur de deux aulnes aux deux extrémités du talart. C'est de la même manière que se préparent les grosses cordes à boyau, avec cette différence qu'on apporte un peu moins de précautions pour les dégraisser, qu'on les tord et fîle comme le chanvre ; qu'on y emploie les boyaux les plus communs, et qu'on les laisse plus longtemps à l'étuve. Nous n'avons pu nous procurer des connaissances plus étendues sur cet objet. Peut-être n'y a-t-il rien de plus à savoir, peut-être aussi n'est-ce là que le gros de l'art, que ce dont les ouvriers ne se cachent point, et n'avons-nous rien dit des tours de main particuliers, des préparations singulières, et des manœuvres requises pour la perfection des cordes. Au reste, celui qui portera ces instructions préliminaires dans un atelier, y acquérera d'autant plus facilement les autres, si en effet il en reste quelques-unes à suppléer ; car j'ai toujours remarqué que les ouvriers se livraient facilement aux gens dont ils espéraient tirer quelque lumière. On ne trouvera que le rouet, le châssis et le talart dans nos planches, parce que les autres instruments n'ont rien de particulier. Le rouet est, comme on voit, un rouet de cordier ; le talart n'est qu'un châssis ordinaire, et le lavoir se connait assez facilement sur ce que nous en avons dit ; une table commune y suppléerait. Ce sont les nœuds qu'on fait aux cordes, quand les boyaux sont trop courts, qui ordinairement les rendent fausses, par l'inégalité qu'ils occasionnent. Quand on choisit des cordes d'instruments, il faut d'abord prendre les plus claires, les plus rondes et les plus égales, et ensuite faire tendre par quelqu'un la corde de la longueur convenable pour l'instrument, en la tirant par les deux bouts ; se placer en face du jour, et la pincer. Si en la pinçant on n'aperçoit dans ses oscillations que deux cordes, c'est une preuve certaine qu'elle est juste ; si on en aperçoit trois, cette preuve qu'elle est fausse n'est pas moins assurée. Cette seconde apparence peut venir de ce que toutes les parties de la corde n'arrivent pas en même temps à la situation horizontale, et qu'elle oscille en deux temps différents. On tord deux cordes à la fais, quoiqu'on n'en voie qu'une dans le dessein, où l'on n'a pu en montrer davantage.

Des cordes de nerfs, ou, pour parler plus exactement, de tendons ou de ligaments. Les anciens, qui faisaient grand usage de ces cordes dans leurs machines de guerre, désignaient en général les veines, artères, tendons, ligaments, nerfs, par le mot de nerf, et ils appelaient corde de nerf, une corde filée de ligaments. Ils ont ordonné de choisir entre les tendons, ceux des cerfs et des bœufs ; et sur ces animaux les tendons les plus exercés, comme ceux du col dans les bœufs, et ceux de la jambe du cerf. Mais comme il est plus facîle de se pourvoir de ceux-là que de ceux-ci, c'est de cette matière qu'on a fait à Paris les premières cordes de nerfs, sous les ordres et la direction de M. le comte d'Herouville, qui fut engagé dans un grand nombre d'expériences sur cet objet, par l'exactitude et l'étendue de ses recherches sur tout ce qui appartient à l'Art militaire. Voici comment ces cordes ont été travaillées. On prend chez le boucher les tendons des jambes, on les fait tirer le plus entiers et le plus longs qu'il est possible. Ils se tirent de l'animal assommé, quand il est encore chaud. On les expose dans des greniers ; on fait en sorte qu'ils ne soient point exposés au soleil, de peur qu'ils ne sechent trop vite, et qu'ils ne durcissent trop. Il ne faut pas non plus que l'endroit soit humide, et qu'ils puissent souffrir de la gelée en hiver ; ces accidents les feraient corrompre. Il y a aussi un temps propre à prendre pour les battre : quand ils sont trop secs, ils se rompent ; quand ils sont trop frais, on en épure la graisse. Il faut éviter ces deux extrêmes. Avant que de les battre, il en faut séparer les deux bouts qui sont trop durs et trop secs : le reste d'ailleurs s'en divisera plus facilement sous le marteau. Le nerf ou ligament n'est filé fin qu'autant que ses extrémités se divisent facilement, ce qui ne peut arriver quand on lui laisse les deux bouts qui sont durs et secs comme du bois.

Les outils de cette espèce de corderie se réduisent à un marteau de fer, une pierre et un peigne. Le bloc de pierre doit être un cube, dont la surface polie du côté qu'il doit servir, ait huit à dix pouces en carré. Le marteau peut peser une demi-livre, et le peigne a huit ou dix dents éloignées les unes des autres d'environ six lignes, et toutes dans la même direction. Le ligament ne doit point être dépouillé de ses membranes ; on les bat ensemble jusqu'à ce qu'on s'aperçoive que la membrane est entièrement séparée des fibres. Sept à huit ligaments battus et fortement liés ensemble, suffisent pour faire une poignée ; on passe la poignée dans les dents du peigne : cette opération en sépare la membrane, et divise les fibres les unes des autres. Le point le plus important dans tout ce qui précède, est de bien battre, c'est de-là que dépend la finesse du nerf. Si le nerf n'est pas assez battu, on a beau le peigner ; on l'accourcit en en rompant les fibres, sans le rendre plus fin. Le seul parti qu'il y ait à prendre dans ce cas, est de l'écharpir avec les mains, en séparant les fibres des brins qui ont résisté au peigne, pour n'avoir pas été suffisamment travaillés sous le marteau.

Quant au cordelage de cette matière, il n'a rien de particulier. On fîle le nerf comme le chanvre, et on le commet soit en aussière, soit en grelin. V. l'article CORDERIE. Avant que de se servir de ces cordes, il faut les faire tremper dans l'huîle la plus grasse : elles sont très-élastiques et très-fortes. Voici une expérience dans laquelle M. d'Herouville a fait comparer la force d'une corde de chanvre, d'une corde de crin, et d'une corde de nerf. On prit le nerf le plus long qu'on put trouver ; on le peigna avec beaucoup de douceur ; on en fila du fil de carret ; on prit six bouts de ce fil, de neuf pieds chacun ; on les commit au tiers, c'est-à-dire que ces neuf pieds se réduisirent à six dans le commettage. Cette corde se trouva de quinze lignes de circonférence, et tout à fait semblable à une corde de chanvre très-parfaite qui avait servi à quelques expériences de M. Duhamel sur la résistance des cordes, et qui avait été faite du chanvre d'Italie le mieux choisi. On tint aussi toute prête une corde de crin de même poids, et commise au même point que la corde de nerf, mais qui se trouva de dix-huit lignes de circonférence. On fit rompre ces cordes, et l'on éprouva que la corde de nerf était une fois plus forte que celle de crin, et d'un sixième plus que la corde de chanvre la plus parfaite. La corde de nerf soutint 780 livres avant sa rupture. On remarqua qu'en s'allongeant par les charges successives qu'on lui donnait, les pertes que faisait son diamètre étaient à-peu-près en même raison que les accroissements que prenait sa longueur, et qu'après la rupture elle se restitua exactement à sa longueur et grosseur premières.

On a substitué ces cordes aux ressorts des chaises de poste et d'autres voitures, et elles y ont très-bien réussi. Elles n'ont pas encore toute la vogue qu'elles méritent et qu'elles obtiendront, parce qu'il en est dans ce cas comme dans une infinité d'autres ; on consulte toujours des ouvriers intéressés à faire prévaloir les anciens usages. C'est à un serrurier qui fait des ressorts qu'on s'adresse pour savoir si les cordes de nerfs sont ou ne sont pas meilleures que les ressorts. M. de Lanore, dont M. le comte d'Herouville s'est particulièrement servi, soit à recueillir ce que les anciens tacticiens grecs et latins avaient écrit des catapultes, ballistres, et autres machines de guerre auxquelles ils employaient les cordes de nerf, soit à fabriquer les premières, en a obtenu le privilège exclusif ; et il serait à souhaiter que les ouvriers allassent prendre des instructions chez un homme à qui cet objet est très-bien connu, ils s'épargneraient aussi à eux-mêmes tout le temps et le travail qu'on perd nécessairement en essais.

On dit que ces cordes sont facilement endommagées par l'humidité, mais on peut les en garantir en très-grande partie par des fourreaux : on présume qu'une lessive, telle que celle que les ouvriers en cordes à boyau, soit pour machines, soit pour instruments de musique, donnent à leurs boyaux avant que de les tordre, pourrait ajouter et à l'élasticité et à la durée des cordes de nerf, si on faisait passer par cette lessive le nerf, soit avant que de le battre, soit après qu'il est battu et peigné. Pourquoi ne suppléerait-elle pas au rouir du chanvre, en séparant la membrane des fibres, de même que le rouir separe l'écorce de la chenevotte. C'est à l'expérience à confirmer ou détruire cette idée qui nous a été communiquée par un homme que sa fortune et son état n'empêchent point de s'occuper de la connaissance et de la perfection des Arts ; ainsi qu'il vient de le prouver par quelques vues qu'il a communiquées au public sur le tirage des voitures ; c'est de la même personne que nous tenons le dessein du rouet des faiseurs de cordes d'instruments de musique, et des éclaircissements sur l'art de les fabriquer.

Des cordes de cheveux. Les anciens ont aussi fait filer des cordes de cheveux, dans des circonstances fâcheuses qui les y déterminaient. Les dames de Carthage se coupèrent les cheveux, pour fournir des cordes aux machines de guerre qui en manquaient. Les femmes Romaines en firent autant dans une extrémité semblable : maluerunt pudicissimae matronae, deformato capite, liberè vivère cum maritis, quam hostibus, integro decore, servire. Je ne cite que ces deux exemples, entre un grand nombre d'autres que j'omets, et dont je ne ferais qu'un éloge très-modéré si je les rapportais, le sacrifice des cheveux me paraissant fort au-dessous de ce que des femmes honnêtes et courageuses ont fait en tout temps et font encore tous les jours.

Les Mécaniciens se proposent sur les cordes en général plusieurs questions, telles que les suivantes ; quelle est la force des cordes en elle-même ? quel est leur effet dans les machines ? quelles sont leurs vibrations quand elles sont frappées. Voyez là-dessus les articles suivants.

CORDE, (Mécanique) Quelle est la force d'une corde relativement à celle des fils dont elle est composée, si on en prend la somme, en les éprouvant séparément ? Le tortillement ajoute-t-il à la force des cordes ou la diminue-t-il ? Voyez l'article CORDERIE.

CORDE, (Mécanique) De la résistance des cordes. La résistance des cordes est fort considérable, et doit par toutes sortes de raisons entrer dans le calcul de la puissance des machines. M. Amontons remarque dans les mém. de l'académie royale des Sciences, 1699, qu'une corde est d'autant plus difficîle à courber 1°. qu'elle est plus roide et plus tendue par le poids qu'elle porte : 2°. qu'elle est plus grosse : et 3°. qu'elle est plus courbée, c'est-à-dire qu'elle enveloppe un plus petit cylindre.

Il rapporte des expériences qu'il a faites pour s'assurer des proportions dans lesquelles ces différentes résistances augmentent ; ces expériences apprennent que la roideur de la corde occasionnée par le poids qui la tire, augmente à proportion du poids, et que celle qui vient de l'épaisseur de la corde augmente à proportion de son diamètre : enfin que celle qui vient de la petitesse des poulies autour desquelles elle doit être entortillée, est plus forte pour les petites circonférences que pour les grandes, quoiqu'elle n'augmente pas dans la même proportion que ces circonférences diminuent.

D'où il s'ensuit que la résistance des cordes dans une machine, étant estimée en livres, devient comme un nouveau fardeau qu'il faut ajouter à celui que la machine devait élever : et comme cette augmentation de poids rendra les cordes encore plus roides, il faudra de nouveau calculer cette augmentation de résistance. Ainsi on aura plusieurs sommes décroissantes, qu'il faudra ajouter ensemble comme quand il s'agit du frottement, et qui peuvent se monter très-haut. Voyez FROTTEMENT.

En effet, lorsqu'on se sert de cordes dans une machine, il faut ajouter ensemble toutes les résistances que leurs roideurs produisent, et toutes celles que le frottement occasionne ; ce qui augmentera si considérablement la difficulté du mouvement, qu'une puissance mécanique qui n'a besoin que d'un poids de 1500 liv. pour en élever un de 3000 liv. par le moyen d'une moufle simple, c'est-à-dire d'une poulie mobîle et d'une poulie fixe, doit, selon M. Amontons, en avoir un de 3942 livres, à cause des frottements et de la résistance des cordes.

Ce que nous venons de dire des poulies doit servir de règle dans l'usage des treuils, des cabestants, etc. et des autres machines pour lesquelles on se sert de cordes : si on négligeait de compter leur roideur, ou tomberait infailliblement dans des erreurs considérables, et le mécompte se trouverait principalement dans les cas où il est très-important de ne se point tromper, je veux dire dans les grands effets ; car alors les cordes sont nécessairement fort grosses et fort tendues.

C'est d'après ce principe, qu'on examine dans les mémoires de l'académie de 1739, quelle est la meilleure manière d'employer les seaux pour élever de l'eau. Car il est certain que de la manière dont on les emploie ordinairement, le poids de la corde s'ajoute à celui du seau ; de sorte que si le puits a 150 pieds, par exemple, de profondeur, on aura un plus grand effort à faire au commencement de l'action ou de l'élevation du seau que vers la fin, parce qu'au commencement on aura à soutenir le poids du seau, plus celui de toute la corde, qui, si elle pese deux livres par taise, en pesera 50 pour ce puits de 25 taises de profondeur ; augmentation très-considérable au poids du seau plein et sortant de l'eau, dont il aura peut-être puisé 24 livres. Il est vrai que cette première difficulté de l'élevation du seau ira toujours en diminuant, et sera nulle au bord du puits ; mais en ce cas l'action de l'homme qui tirera le seau sera fort inégale ; et dans cette supposition il est impossible qu'il ne se fatigue pas trop, qu'il ne perde du temps, et qu'il ne fasse moins qu'il n'aurait pu, parce qu'il est presqu'impossible qu'il ne donne précisément que ce qu'il faudra de force pour surmonter à chaque instant la résistance décroissante du seau et de la corde. Il serait plus avantageux et plus commode pour la puissance, d'avoir une machine qui réduisit à l'égalité une action inégale par elle-même, de sorte que l'on eut jamais à soutenir que le même poids, ou à employer le même effort quoique la résistance de la corde fût toujours variable. Pour cela le seul moyen est, que quand le poids de la corde sera plus grand, ou ce qui est le même, quand il y aura plus de corde à tirer, la puissance agisse par un plus long bras de levier, plus long précisément à proportion de ce besoin, et par conséquent il faudra que les leviers soient toujours changeants et décroissants pendant toute l'élevation du seau. C'est pourquoi il faudra donner à la poulie dont on se servira, une forme pareille à-peu-près à celle des fusées des montres, qui sont construites sur le même principe, ou plutôt il faudra que cette poulie soit comme un assemblage de plusieurs poulies concentriques et inégales : on peut voir sur cette matière un plus grand détail dans l'hist. de l'acad. de 1739, p. 51.

Il s'ensuit de ce que nous avons dit sur la résistance des cordes, 1°. qu'on doit préférer autant que faire se peut les grandes poulies aux petites, non-seulement parce qu'ayant moins de tours à faire, leur axe a moins de frottement, mais encore parce que les cordes qui les entourent y souffrent une moindre courbure, et ont par conséquent moins de résistance. Cette considération est d'une si grande conséquence dans la pratique, qu'en évaluant la roideur de la corde selon la règle de M. Amontons, on voit clairement que, si on voulait enlever un fardeau de 800 livres avec une corde de 20 lignes de diamètre, et une poulie qui n'eut que 3 pouces, il faudrait augmenter la puissance de 212 livres pour vaincre la roideur de la corde, au lieu qu'avec une poulie d'un pied de diamètre, cette résistance céderait à un effort de 22 livres, toutes choses d'ailleurs égales.

On peut juger par-là que les poulies moufflées, c'est-à-dire les poulies multiples, ne peuvent jamais avoir tout l'effet qui devrait en résulter suivant la théorie. Car dans ces sortes de machines, les cordes ont plusieurs retours ; et quoique les puissances qui les tendent, chargent d'autant moins les axes qu'il y a plus de poulies, cependant comme il n'y a point de cordes parfaitement flexibles, on augmente leur résistance en multipliant les courbures.

Cet inconvénient, qui est commun à toutes les mouffles, est encore plus considérable dans celles où les poulies rangées les unes au-dessus des autres doivent être de plus en plus petites, pour donner lieu aux cordes de se mouvoir sans se toucher et se frotter. Car une corde a plus de peine à se plier quand elle enveloppe un cylindre d'un plus petit diamètre. Ainsi les poulies moufflées, qui sont toutes de même grandeur, sont en général préférables aux autres.

Les cordes qui sont le plus en usage dans la mécanique, celles dont il s'agit principalement ici, sont des assemblages de fil que l'on tire des végétaux, comme le chanvre, ou du règne animal comme la soie, ou certains boyaux que l'on met en état d'être filés. Si ces fibres étaient assez longues par elles-mêmes, peut-être se contenterait-on de les mettre ensemble, de les lier en forme de faisceaux sous une enveloppe commune. Cette manière de composer les cordes eut peut-être paru la plus simple et la plus propre à leur conserver la flexibilité qui leur est si nécessaire ; mais comme toutes ces matières n'ont qu'une longueur fort limitée, on a trouvé moyen de les prolonger en les filant, c'est-à-dire en les tortillant ensemble ; le frottement qui nait de cette sorte d'union est si considérable, qu'elles se cassent plutôt que de se glisser l'une sur l'autre : c'est ainsi que se forment les premiers fils dont l'assemblage fait un cordon ; et de plusieurs de ces cordons réunis et tortillés ensemble, on compose les plus grosses cordes. On juge aisément que la qualité des matières contribue beaucoup à la force des cordes ; on conçoit bien aussi qu'un plus grand nombre de cordons également gros, doit faire une corde plus difficîle à rompre ; mais quelle est la manière la plus avantageuse d'unir les fils ou les cordons ? Voyez là-dessus l'article CORDERIE.

Les câbles et autres gros cordages que l'on emploie, soit sur les vaisseaux, soit dans les bâtiments, étant toujours composés de plusieurs cordons, et ceux-ci d'une certaine quantité de fils unis ensemble, il est évident qu'on n'en doit point attendre toute la résistance dont ils seraient capables s'ils ne perdaient rien de leur force par le tortillement ; et cette considération est d'autant plus importante, que de cette résistance dépend souvent la vie d'un très-grand nombre d'hommes.

Mais si le tortillement des fils en général rend les cordes plus faibles, on les affoiblit d'autant plus qu'on les tord davantage ; il faut donc éviter avec soin de tordre trop les cordes.

Lorsqu'on a quelque grand effort à faire avec plusieurs cordes en même temps, on doit observer de les faire tirer le plus également qu'il est possible ; sans cela, il arrive souvent qu'elles cassent les unes après les autres, et mettent quelquefois la vie en danger. Voyez les leçons de Phys. expér. de M. l'abbé Nollet. (O)

CORDES, (Mécanique) De la tension des cordes. Si une corde A B est attachée à un point fixe B (figure 45. Mécaniq.), et tirée suivant sa longueur par une force ou puissance quelconque A, il est certain que cette corde souffrira une tension plus ou moins grande, selon que la puissance A qui la tire, sera plus ou moins grande. Il en est de même, si au lieu du point fixe B, on substitue une puissance égale et contraire à la puissance A ; il est certain que la corde sera d'autant plus tendue, que les puissances qui la tirent seront plus grandes. Mais voici une question qui a jusqu'ici fort embarrassé les Mécaniciens. On demande si une corde A B, attachée fixement en B et tendue par une puissance quelconque A, est tendue de la même manière qu'elle le serait, si au lieu du point fixe B, on substituait une puissance égale et contraire à la puissance A. Plusieurs auteurs ont écrit sur cette question, que Borelli a le premier proposée. Je crois qu'on peut la résoudre facilement ; en regardant la corde tendue A B, comme un ressort dilaté dont les extrémités A, B, font également effort pour se rapprocher l'une de l'autre. Je suppose donc d'abord que la corde soit fixe en B, et qu'elle soit tendue par une puissance appliquée en A, dont l'effort soit équivalent à un poids de dix livres ; il est certain que le point A sera tiré suivant A D avec un effort de dix livres : et comme ce point A, par l'hypothèse, est en repos ; il s'ensuit que par la résistance de la corde, il est tiré suivant A B avec une force de dix livres, et fait par conséquent un effort de dix livres pour se rapprocher du point B. Or le point B, par la nature du ressort, fait le même effort de dix livres suivant B A, pour se rapprocher du point A, et cet effort est soutenu et anéanti par la résistance du point fixe B. Qu'on ôte maintenant le point fixe B, et qu'on y substitue une puissance égale et contraire à A ; je dis que la corde demeurera tendue de même : car l'effort de dix livres que fait le point B, suivant B A, sera soutenu par un effort contraire de la puissance B suivant B C. La corde restera donc tendue, comme elle l'était auparavant : donc une corde A B, fixe en B, est tendue par une puissance appliquée en A, comme elle le serait, si au lieu du point B, on substituait une puissance égale et contraire à la puissance A. Voyez TENSION. (O)

CORDES, (Vibrations des) Mécaniq. Si une corde tendue A B (fig. 71. Mécanique), est frappée en quelqu'un de ses points par une puissance quelconque, elle s'éloignera jusqu'à une certaine distance de la situation A B, reviendra ensuite, et fera des vibrations comme un pendule qu'on tire de son point de repos. Les Géomètres ont trouvé les lois de ces vibrations. On savait depuis longtemps par l'expérience et par des raisonnements assez vagues, que toutes choses d'ailleurs égales, plus une corde était tendue, plus ses vibrations étaient promptes ; qu'à égale tension, les cordes faisaient leurs vibrations plus ou moins promptement, en même raison qu'elles étaient moins ou plus longues ; de sorte que deux cordes, par exemple, étant de la même grosseur, également tendues, et leurs longueurs en raison de 1 à 2, la moins longue faisait dans le même temps un nombre de vibrations double du nombre des vibrations de l'autre ; un nombre triple, si le rapport des longueurs était celui d'1 à 3, etc. M. Taylor célèbre géomètre Anglais, est le premier qui ait démontré les différentes lois des vibrations des cordes avec quelque exactitude, dans son savant ouvrage intitulé, methodus incrementorum directa et inversa, 1715 ; et ces mêmes lois ont été démontrées encore depuis par M. Jean Bernoulli dans le tome II. des mémoires de l'académie impériale de Petersbourg. On n'attend pas sans-doute de nous, que nous rapportions ici les théories de ces illustres auteurs, qu'on peut voir dans leurs ouvrages, et qui ne pourraient être à la portée que d'un très-petit nombre de personnes. Nous nous contenterons de donner la formule qui en résulte, et au moyen de laquelle tout homme tant soit peu initié dans le calcul, pourra connaître facilement les lois des vibrations d'une corde tendue.

Avant que d'exposer ici cette formule, il faut remarquer que la corde fait des vibrations en vertu de l'élasticité que sa tension lui donne. Cette élasticité fait qu'elle tend à revenir toujours dans la situation rectiligne A B ; et quand elle est arrivée à cette situation rectiligne, le mouvement qu'elle a acquis, en y parvenant, la fait repasser de l'autre côté, précisément comme un pendule. Voyez PENDULE.

Or cette force d'élasticité peut toujours être comparée à la force d'un poids, puisqu'on peut imaginer toujours un poids qui donne à la corde la tension qu'elle a. Cela posé, si on nomme L la longueur de la corde, M la masse de la corde ou la quantité de sa matière, P la force du ressort de la corde, ou plutôt un poids qui représente la force avec laquelle la corde est tendue, D la longueur d'un pendule donné, par exemple, d'un pendule à secondes, p le rapport de la circonférence d'un cercle à son diamètre, le nombre des vibrations faites par la corde durant une vibration du pendule donné D, sera exprimé par p .

De-là il s'ensuit, 1° que si les longueurs L, et les masses M de deux cordes sont égales, les nombres de leurs vibrations en temps égaux seront comme , ou (à cause que D est le même pour tous les deux) comme P, c'est-à-dire, comme les racines des nombres qui expriment le rapport des tensions. 2°. Que si les tensions P et les longueurs L sont égales, les nombres des vibrations en temps égal seront comme , c'est-à-dire en raison inverse des racines des masses, et par conséquent en raison inverse des diamètres, si les cordes sont de la même matière. 3°. Que si les tensions P sont les mêmes, et que les cordes soient de la même matière et de la même grosseur, les nombres des vibrations en temps égaux seront en raison inverse des longueurs ; car ces nombres de vibrations seront alors comme ; or quand les cordes sont de même grosseur et de même matière, les masses M sont comme les longueurs L, dont est alors comme , ou comme 1/ L.

Il est visible que l'on peut déduire de la formule générale p , autant de theoremes qu'on voudra sur les vibrations des cordes. Ceux que nous venons d'indiquer, suffisent pour montrer la route qui y conduit.

Les mêmes géomètres dont nous avons parlé, ne se sont pas contentés de déterminer les vibrations de la corde tendue A B ; ils ont cherché aussi quelle est la figure que prend cette corde, en faisant ses vibrations ; et voici, selon eux, quelle est la nature de la courbe A C B que forme cette corde. Sait D le point de milieu de A B, C D la distance du point de milieu C de la corde au point B, dans un instant quelconque : ayant décrit le quart de cercle C E du rayon C D, soit pris par-tout F N à l'arc correspondant C M comme D B est à l'arc C E, le point N sera à la courbe C B ; de sorte que la courbe A C B que forme la corde tendue, est une courbe connue par les Géomètres sous le nom de courbe des arcs ou compagne de la cycloïde extrêmement allongée. Voyez COMPAGNE DE LA CYCLOÏDE et TROCHOÏDE.

MM. Taylor et Bernoulli ont déterminé cette courbe d'après la supposition que tous les points de la corde arrivent en même temps à la situation rectiligne A B. C'est ce que l'expérience parait prouver, du moins autant qu'on peut en juger, en examinant des vibrations qui se font presque toujours très-promtement. M. Taylor prétend même démontrer, sans le secours de l'expérience, que tous les points de la corde A C B doivent arriver en même temps dans la situation rectiligne A B. Mais dans une dissertation sur les vibrations des cordes tendues, imprimée parmi les mémoires de l'académie royale des Sciences de Prusse, pour l'année 1747, j'ai démontré que M. Taylor s'est trompé en cela, et j'ai fait voir de plus, 1° qu'en supposant que tous les points de la corde A C B arrivent en même temps à la situation rectiligne A B, la corde A C B peut prendre une infinité d'autres figures que celle d'une courbe des arcs allongée ; 2° qu'en ne supposant pas que tous les points arrivent en même temps à la situation rectiligne, on peut déterminer en général la courbure que doit avoir à chaque instant la corde A B, en faisant ses vibrations. Cependant il est bon de remarquer, ce que personne n'avait encore fait, que quelque figure que prenne la corde A C B, en faisant ses vibrations, le nombre de ces vibrations dans un temps donné doit toujours être le même, pourvu que ses points arrivent en même temps à la situation rectiligne ; c'est ce qu'on peut déduire fort aisément de la théorie dont nous venons de parler. Je crois donc avoir résolu le premier, d'une manière générale, le problême de la figure que doit prendre une corde vibrante ; M. Euler l'a résolu après moi, en employant presque exactement la même méthode, avec cette différence seule que sa méthode semble un peu plus longue. V. les mém. de l'acad. de Berlin, 1748. Dans les mémoires de la même académie, pour l'année 1750, p. 355 et suiv. j'ai donné encore quelques recherches sur cette matière, et observations sur le mémoire de M. Euler, et sur les vibrations des cordes. Nous y renvoyons nos lecteurs. (O)

CORDE DU TAMBOUR, (Anatomie) Voyez TYMPAN.

* CORDE NOUEE, (Histoire moderne) Les Chinois et d'autres peuples, comme les Peruviens, se sont servis de cordes nouées au lieu de caractères. Chez les Chinois, le nombre des nœuds de chaque corde formait un caractère, et l'assemblage des cordes tenait lieu d'une espèce de livre qui servait à rappeler ou à fixer dans l'esprit des hommes le souvenir de choses qui sans cela s'en seraient effacées. Les Peruviens, lorsque les Espagnols conquirent leurs pays, avaient des cordes de différentes couleurs, chargées d'un nombre de nœuds plus ou moins grands, et diversement combinées entr'elles à l'aide desquelles ils écrivaient. Voyez CALCUL et ARITHMETIQUE.

CORDES DE DEFENSE, (Marine) ce sont des paquets de grosses cordes, ou bouts des vieux câbles, qu'on fait pendre le long des côtés des chaloupes et autres petits bâtiments, pour rompre le choc et empêcher qu'ils ne se brisent contre de plus gros bâtiments. Voyez Pl. XVI. de Marine, fig. 4. cordes de défense, cotées R. (Z)

CORDE A FEU : les Artificiers appellent ainsi les meches de corde dont on se sert pour conserver longtemps une petite quantité de feu, et en allumer dans le besoin. On donne aussi ce nom à une espèce d'étoupille, qui porte le feu plus lentement que les autres.

CORDE A PUITS, en termes de Boutonnier ; c'est un enjolivement composé de deux brins de bouillon entortillés autour l'un de l'autre, qui se place sur différentes parties du bouton, selon sa figure et la volonté de l'ouvrier. Voyez BOUILLON.

CORDE, (Commerce) c'est ainsi qu'on nomme les chapelets de verroteries enfilées, qu'on envoye au Sénégal et autres côtes d'Afrique.

* CORDE, (Manuf. d'étoffes) se dit en général du tissu de toute étoffe, lorsqu'il est dépouillé du velouté qui fait sa beauté, et auquel on reconnait qu'il est neuf ; mais surtout des étoffes de laine, lorsque le lainage est entièrement perdu.

CORDE, (Gazier) Le gazier ayant à-peu-près le même métier que l'ouvrier en soie, a presque les mêmes cordes Voyez ci-après CORDES (Manufacture en soie).

CORDE DU ROULEAU, (Imprimerie) La corde du rouleau d'une presse d'Imprimerie, est une corde à quatre brins d'environ un pouce de diamètre, qui sert à mouvoir le train. Il y en a ordinairement deux, celle de devant et celle de derrière. Celle de devant, après avoir fait deux tours et demi ou trois tours sur le rouleau où elle est arrêtée par une de ses extrémités, Ve se terminer à la partie antérieure du coffre, où son autre extrémité est arrêtée à un petit piton de fer qui s'y trouve : elle sert à faire dérouler le train, c'est-à-dire à le faire revenir de dessous la platine. Celle de derrière ne fait qu'un demi-tour sur le rouleau, passe au-travers de la table, et Ve passer et est arrêtée sur un autre petit rouleau qui est dessous le chevalet qui soutient le tympan : cette corde fait rouler le train, c'est-à-dire le fait avancer sous la platine. Voyez nos planches d'Imprimerie.

Les cordes employées dans les machines, ont presque toutes leurs noms pris de leur fonction, ou des parties de la machine, ou de leur grosseur. Nous avons cru qu'au lieu d'en grossir cet article, il fallait mieux les renvoyer aux machines auxquelles elles appartiennent.

CORDE : on appelle ainsi, en terme de Manège, la grande longe qu'on tient autour du pilier où le cheval est attaché pour le dégourdir, le dénouer, lui assouplir le corps, lui apprendre à fuir la chambrière, à ne pas galoper à faux ni desuni, et pour le faire manier. Dans les manèges qui n'ont point de piliers, un homme tient le bout de la corde, et se met au milieu du terrain.

On appelle aussi les cordes des deux piliers, les longes du cavesson, lorsque le cheval travaille entre deux piliers ; et on dit qu'on le fait donner dans les cordes, afin que la contrainte du cavesson lui fasse plier les hanches, lui apprenne à se soutenir dessus, et à lever le devant, pour le dresser par-là à être bon sauteur. Voyez SAUTEUR.

On dit aussi des chevaux qu'ils font la corde, pour dire que par la respiration ils retirent la peau du ventre à eux au défaut des côtes. On dit encore que les chevaux ont une corde de farcin, quand ils en ont plusieurs boutons de suite qui forment comme une corde. (V)

CORDE A SAIGNER, en termes de Maréchallerie, est une petite corde qui sert à serrer le cou du cheval lorsqu'on le saigne. (V)

CORDE, terme de jeu de Paume, c'est une grosse corde qu'on attache en travers des deux côtés d'un jeu de paume, précisément dans le milieu de sa longueur, et à environ quatre pieds de hauteur. La corde baisse toujours vers le milieu de sa longueur, à cause de son poids. Depuis la corde jusqu'à terre est attaché un filet ou rézeau de ficelle, pour arrêter les balles qu'on y jete. Les joueurs qui ne font pas passer la balle par-dessus la corde, perdent un quinze. Voyez PAUME.

CORDE, au jeu de Billard, ce sont deux clous attachés sur les bandes des côtés, en deçà desquels le joueur qui commence à jouer doit placer sa bille.

CORDES, (Relieur) ficelles de différentes grosseurs, dont ces ouvriers se servent pour faire les nervures des livres. Les livres étant de différents formats, il faut que les nervures soient différentes et les cordes aussi.

CORDE A ENCORDER, est une corde double dont le bout porte un petit vergeon, qui entre dans l'entaille de l'ensuple de devant ; de-là cette corde passe sur le rouleau de la poitrinière, ensuite sur le chevalet, et se termine par un autre vergeon qui passe au travers du bout de la chaîne. L'usage de cette corde est d'amener l'ouvrage que l'on Ve commencer sur l'ensuple de devant : la corde à encorder sert encore aux ensuples de derrière. Lorsque la chaîne est finie, c'est-à-dire que le vergeon se trouve arrêté par les brasselets de l'ensuple ; alors on ôte ce vergeon de son entaille, sans le dépasser de dedans les soies qu'il porte ; on passe les boucles de la corde à encorder dans les deux bouts du vergeon ; le vergeon propre de la corde à encorder se met dans l'entaille de l'ensuple qui enroule cette corde : par ce moyen la soie de la chaîne est employée jusqu'auprès des lisses, et il n'y en a qu'un petit bout de perdu que l'on appelle pêne. Voyez PENE.

* CORDE, (Manufacture en soie) Il y en a de plusieurs sortes. Voici les principales.

La corde encordée, grosse corde qui se roule double sur l'ensuple de derrière, dont les deux bouts sont bouclés, afin d'y passer un bois garni de crochets qui arrêtent et retiennent le composteur sur lequel sont enfilées les portées de la chaîne, pour fixer la soie autant près du corps que la tire peut le permettre. Ainsi la corde encordée de ces ouvriers, est la même que la corde à encorder des Rubaniers. Voyez l'article précédent, et l'article VELOURS.

La corde de calqueron est assez grosse ; elle sert à faire lever les lisses du fond, et à rabattre les autres. Voyez CALQUERON.

La corde de jointe est celle dans laquelle sont enfilés les canons de la jointe. Voyez JOINTE.

Corde de gavassine, voyez GAVASSINE.

Corde de gavassinière, corde dans laquelle sont enfilées les gavassinières. Voyez GAVASSINIERE.

Corde de rame, corde de fil à trois bouts, plus grosse que celle de semple, au bout de laquelle, au-dessous des poulies du cassin où elle est passée, est attachée l'arcade.

Corde de rouet : il y a celle des rouets à canettes, à devider, etc.

Corde de semple, corde de fil à trois bouts, dont le semple est composé. Voyez SEMPLE.

Corde de boyau pour l'ourdissoir ; elle se roule et se déroule de dessus une branche de fer posée à l'arbre de l'ourdissoir, pour faire monter ou descendre le plot qui conduit les fils de la cantre, selon que la broche fixe qui tourne perpendiculairement se meut sur elle même, ou de droite à gauche, ou de gauche à droite. Voyez OURDIR et OURDISSOIR.

Corde de valet, grosse corde arrêtée par un bout et d'un côté au pied de derrière du métier, autour duquel elle se roule trois ou quatre fais, ainsi que dans la moulure de l'ensuple, et dont l'autre bout est arrêté au valet de l'ensuple, afin de tenir la chaîne tendue.

Cordes de trop, cordes de semples qui n'étant pas suffisamment tendues, passent dans les entrelassements du fil qui forme le lac où elles ne se doivent point trouver, sont prises avec celles qui composent la figure, et causent un défaut à l'étoffe.

Cordes qui suivent, cordes qui ne doivent point être tirées, mais qui le sont, parce qu'elles s'accrochent avec celles qu'on tire : cet inconvénient arrive surtout, quand le lac est composé d'un nombre considérable de cordes.

Corde de l'ourdissoir : outre celle dont nous avons parlé, il y en a encore une qui passe dans la cavité de la roue, qui enveloppe la cage de l'ourdissoir et lui donne le mouvement dans les barres fixes : lorsque la corde est trop tendue, on la place sur une cavité de la roue, où le diamètre est moins grand ; et quand elle ne l'est pas assez, on la place sur une cavité où le diamètre est plus grand. Voyez OURDISSOIR.

CORDE, (Commerce) tabac en corde, est fait de feuilles un peu humectées d'eau de mer, et tordues ensemble, ou filées au rouet : le fil très-long qui en provient, se dévide sur un bâton pour en faire ensuite un rouleau.

CORDE SANS FIN, est la corde qui entoure la roue des Tourneurs, Couteliers, et la poulie qui est montée sur l'arbre, par le moyen de laquelle on fait tourner l'ouvrage. Voyez les planches du Tourneur.

On l'appelle corde sans fin, à cause que les deux bouts sont joints ensemble ou épissés, comme les Cordiers épissent ensemble deux pièces de câbles. Voyez CORDERIE.

* CORDE, instrument de Pêche : il y en a de petites et de grosses ; elles ont les unes et les autres à leur extremité un ain ou hameçon. Les grosses servent à prendre de gros poissons, comme morues, turbots, raies, etc. Pour cet effet, les pêcheurs amarrent au bout d'une corde d'un pied de long une torche de paille, qu'ils enfouissent dans le sable ; ils en frappent à l'autre bout une plus légère longue de trois pieds, au bout de laquelle est un gros ain de fer, garni de son appas. Ils tendent ces pièces où bon leur semble : la marée venant à monter, amène avec elle des poissons qui mordent aux appas qui couvrent les hameçons, y restent attachés, demeurent à sec sur le sable quand la marée se retire, et sont ramassés par les pêcheurs. Les petites cordes différent de celles-ci en ce qu'elles sont toutes fixées sur une grande corde, qu'on amare par deux torches d'herbe ou de paille à son extrémité, et de quelques autres dispersées sur la longueur de distance en distance ; on enfouit toutes ces torches dans le sable. Les ains dont les cordelettes sont garnies étant très-petits, il ne s'y prend que de petits poissons, ceux qui n'ont pas la force d'entraîner les torches enfouies, et rompre la cordelette. On fait aussi la pêche des cordes en mer ; mais elles sont amarrées à des chaloupes, d'où elles descendent dans les eaux : en ce cas elles ne diffèrent guère du libouret. Voyez LIBOURET SIMPLE. Les petites cordes de cette espèce prennent des soles, des merlans, des limandes, etc. En été, les ains ou hameçons sont amorcés de vers ; en hiver de crabes, chevrettes, et autres qu'on prend à la chausse. Il y a des endroits où l'on tend des petites cordes sur des piquets, le long des rivages, au moyen de la longue corde sur laquelle elles sont frappées. On a recours à cet expédient pour empêcher, dans les chaleurs surtout, le crabe de manger le poisson pris, avant qu'on ait eu le temps de le relever. Il y a d'autres cordes qu'on nomme dans l'amirauté de Saint-Brieux, trajets ou cordées ; elles se tendent à pied à la basse eau, et ne diffèrent des autres que dans la manière de les tendre. On les dispose en-travers de la marée montante ; et quand le pêcheur imagine que le poisson a mordu l'ain dont chaque pîle est garni, il relève les trajets en les halant par le bout de la ligne qu'il a mise à terre, et empêche ainsi les crabes et araignées de s'y jetter. Les lignes des pêcheurs du Craisic, dans l'amirauté de Nantes, sont armés autrement que celles des pêcheurs du canal : leurs lignes ont depuis trente jusqu'à quarante brasses de long ; au bout est frappé un morceau de plomb, que les pêcheurs nomment calle, parce qu'il fait tomber la ligne ; il pese environ une livre et demie ; il a la forme du corps d'une petite chaloupe haute à l'arrière, et obtuse par-devant, en sorte que la grande épaisseur du plomb est à l'arrière ; un petit organeau de cordage passe dans le petit bout, et est frappé sur la ligne qui a trente-six à quarante brasses de long. Sur cette ligne, au-dessus du plomb, à environ une brasse, est frappé l'hameçon sur une pile, échampeau, ou coublette, de trois quarts de brasse au plus ; à l'autre organeau qui est au gros bout du plomb, sont frappées deux autres coublettes, armées d'un ain chacune ; de ces coublettes, l'une a seulement demie-brasse de long, et l'autre brasse, afin que ces hameçons étant de longueurs inégales, le poisson puisse les rencontrer plus facilement. Les petites lignes à doubles ains sont montées en libouret, avec un plomb d'environ une demie-livre ou trois quarterons, afin qu'elles calent ; la pîle amarrée au-dessus du plomb est double, avec un ain ou claveau.

Les cordes ou lignes de pied à pile, en usage dans l'amirauté de Boulogne, sont des espèces de lignes qui se tendent sur les sables qui bordent le pied des falaises. Chaque pièce de lignes est de cinquante à soixante brasses de longueur. Les piles ou ficelles qui tiennent les hameçons, sont frappées sur le bauffe ou la grosse ligne, de distance en distance ; chaque pîle est chargée d'un petit corceron ou flotteron de liège. Les pêcheurs étendent ces lignes de toute leur longueur sur les sables, où ils enfouissent le bauffe ou la grosse ligne, d'environ trois pouces : ainsi la marée qui survient soulève les piles, et fait voltiger les appas. Dans les temps chauds où la côte est couverte de bourbe et d'araignées, cette pêche cesse, les araignées s'attachant aux poissons pris.

Dans le ressort de l'amirauté de Poitou, ou des sables d'Olone, les pêcheurs font des lignes avec lesquelles ils font la pêche des chiens de mer, plies, claires, posteaux, et autres gros poissons. Ils n'emploient les petites qu'à la pêche des moindres espèces : mais les vases empêchant les pêcheurs du Poitou d'étendre leurs hameçons de plat en cordées ou trajets, comme font les pêcheurs Bretons, ils soutiennent les pièces de leurs applets de 30 brasses de long ; et les ains en sont frappés de brasse en brasse avec des perches par les bouts, pour que la boite ou l'appié flotte à la marée, et que les poissons qui s'y prennent ne trainent pas de basse-mer sur vases où ils seraient attaqués aussi-tôt par les araignées et les chancres. Cette précaution est surtout nécessaire pour la pêche des poissons qui se prennent aux plus petits ains.

Les gros temps qui empêchent les pêcheurs de sortir du port, rendant impossible l'usage des cordes en mer, ceux de l'amirauté du Bougd'ault se sont avisés, pour ne pas perdre leurs appas, de tendre en cordes ou lignes de pied, à la côte et sur les greves qui bordent le rivage.

Dans le ressort de l'amirauté de Saint-Brieux, on appelle arrouelles les cordes, lignes, ou trajets de pieds.

CORDE DE BOIS, (Marchand de bois) certaine quantité de bois à bruler, ainsi appelée parce qu'autrefois on la mesurait avec une corde. Voyez MESURE.

Ce bois doit avoir quatre pieds de long : on le mesure présentement entre deux membrures de quatre pieds de haut, éloignées l'une de l'autre de huit.