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Catégorie : Littérature
S. f. (Littérature) L'invention de la flute, que les Poètes attribuent à Apollon, à Pallas, à Mercure, à Pan, fait assez voir que son usage est de la plus ancienne antiquité. Alexandre Polihystor assure que Hyagnis fut le plus ancien joueur de flute, et qu'il fut succédé par Marsyas, et par Olympe premier du nom, lequel apprit aux Grecs l'art de toucher les instruments à cordes. Selon Athénée, un certain Seiritès, Numide, inventa la flute à une seule tige, Silene celle qui en a plusieurs, et Marsyas la flute de roseau, qui s'unit avec la lyre.

Quoi qu'il en sait, la passion de la musique répandue par-tout, fut non-seulement cause qu'on gouta beaucoup le jeu de la flute, mais de plus qu'on en multiplia singulièrement la forme. Il y en avait de courbes, de longues, de petites, de moyennes, de simples, de doubles, de gauches, de droites, d'égales, d'inégales, etc. On fit de ces instruments de tout bois et de toute matière. Enfin les mêmes flutes avaient différents noms chez divers peuples. Par exemple, la flute courbe de Phrygie était la même que le tityrion des Grecs d'Italie, ou que le pheution des Egyptiens, qu'on appelait aussi monaule.

Les flutes courbes sont au rang des plus anciennes ; telles sont celles de la table d'Isis : la gyngrine lugubre ou la phénicienne, longue d'une palme mesurée dans toute son étendue, était encore de ce genre. Parmi les flutes moyennes, Aristide le musicien met la pythique et les flutes de chœur. Pausanias parle des flutes argiennes et béotiennes. Il est encore fait mention dans quelques auteurs de la flute hermiope, qu'Anacréon appelle tendre ; de la lysiade, de la cytharistrie ; des flutes précentoriennes, corynthiennes, égyptiennes, virginales, milvines, et de tant d'autres dont nous ne pouvons nous former d'idée juste, et qu'il faudrait avoir vues pour en parler pertinemment. On sait que M. le Fèvre désespérant d'y rien débrouiller, couronna ses veilles pénibles sur cette matière, par faire des vers latins pour louer Minerve de ce qu'elle avait jeté la flute dans l'eau, et pour maudire ceux qui l'en avaient retirée.

Mais loin d'imiter M. le Fèvre, je crois qu'on doit au moins tâcher d'expliquer ce que les anciens entendaient par les flutes égales et inégales, les flutes droites et gauches, les flutes sarranes, phrygiennes, lydiennes, tibiae pares et impares, tibiae dextrae et sinistrae, tibiae sarranae, phrygiae, lydicae, etc. dont il est souvent fait mention dans les comiques, parce que la connaissance de ce point de Littérature est nécessaire pour entendre les titres des pièces dramatiques qui se jouaient à Rome. Voici donc ce qu'on a dit peut-être de plus vraisemblable et de plus ingénieux pour éclaircir ce point d'antiquité.

Dans les comédies romaines qu'on représentait sur le théâtre public, les joueurs de flute jouaient toujours de deux flutes à-la-fais. Celle qu'ils touchaient de la main droite, était appelée droite par cette raison ; et celle qu'ils touchaient de la gauche, était appelée gauche par conséquent. La première n'avait que peu de trous, et rendait un son grave ; la gauche en avait plusieurs, et rendait un son plus clair et plus aigu. Quand les musiciens jouaient de ces deux flutes de différent son, on disait que la pièce avait été jouée tibiis imparibus, avec les flutes inégales : ou tibiis dextris et sinistris, avec les flutes droites et gauches : et quand ils jouaient de deux flutes de même son, de deux droites ou de deux gauches, comme cela arrivait souvent, on disait que la pièce avait été jouée tibiis paribus dextris, avec des flutes égales droites, si c'était avec celles du son grave ; ou tibiis paribus sinistris, avec des flutes égales gauches, si c'était avec des flutes de son aigu.

Une même pièce n'était pas toujours jouée avec les mêmes flutes, ni avec les mêmes modes ; cela changeait fort souvent. Il arrivait peut-être aussi que ce changement se faisait quelquefois dans la même représentation, et qu'à chaque intermède on changeait de flute ; qu'à l'un on prenait les flutes droites, et à l'autre les gauches successivement. Donat prétend que quand le sujet de la pièce était grave et sérieux, on ne se servait que des flutes égales droites, que l'on appelait aussi lydiennes, et qui avaient le son grave ; que quand le sujet était fort enjoué, on ne se servait que des flutes égales gauches, qui étaient appelées tyriennes ou sarranes, qui avaient le son aigu, et par conséquent plus propre à la joie ; enfin que quand le sujet était mêlé de l'enjoué et du sérieux, on prenait les flutes inégales, c'est-à-dire la droite et la gauche, qu'on nommait phrygiennes.

Madame Dacier est au contraire persuadée que ce n'était point du tout le sujet des pièces qui reglait la musique, mais l'occasion où elles étaient représentées. En effet, il aurait été impertinent qu'une pièce faite pour honorer des funérailles, eut eu une musique enjouée ; c'est pourquoi quand les Adelphes de Térence furent joués la première fais, ils le furent tibiis lydiis, avec les flutes lydiennes, c'est-à-dire avec deux flutes droites ; et quand ils furent joués pour des occasions de joie et de divertissement, ce fut tibiis sarranis, avec les deux flutes gauches. Ainsi quand une pièce était jouée pendant les grandes fêtes, comme la joie et la religion s'y trouvaient mêlées, c'était ordinairement avec les flutes inégales ; ou une fois avec deux droites, et ensuite avec deux gauches, ou bien en les prenant alternativement à chaque intermède.

Au reste, ceux qui jouaient de la flute pour le théâtre, se mettaient autour de la bouche une espèce de ligature ou bandage composé de plusieurs courroies qu'ils liaient derrière la tête, afin que leurs joues ne parussent pas enflées, et qu'ils pussent mieux gouverner leur haleine et la rendre plus douce. C'est cette ligature que les Grecs appelaient ; Sophocle en parle, quand il dit :




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