S. m. (Littérature) nom d'un poème épique, le premier et le plus parfait de tous ceux qu'Homère a composés. Voyez EPIQUE.

Ce mot vient du grec , ilium, nom de cette fameuse ville que les Grecs tinrent assiégée pendant dix ans, et qu'ils ruinèrent à la fin, à cause de l'enlévement d'Helene, et qui fait l'occasion de l'ouvrage dont le véritable sujet est la colere d'Achille.

Le dessein d'Homère dans l'iliade a été de faire concevoir aux Grecs divisés en plusieurs petits états, combien il leur importait d'être unis et de conserver entr'eux une bonne intelligence. Pour cet effet, il leur remet devant les yeux les maux que causa à leurs ancêtres la colere d'Achille, et sa mésintelligence avec Agamemnon ; et les avantages qu'ils retirèrent de leur union. Voyez FABLE, ACTION.

L'iliade est divisée en vingt-quatre livres, que l'on désigne par les lettres de l'alphabet. Pline parle d'une iliade écrite sur une membrane si petite et si déliée, qu'elle pouvait tenir dans une coque de noix.

Pour la conduite de l'iliade, voyez le P. le Bossu, Madame Dacier et M. de la Motte.

Les critiques soutiennent que l'iliade est le premier et le meilleur poème qui ait paru au monde. Aristote en a presqu'entiérement tiré les règles de sa poétique ; et il n'a eu autre chose à faire que d'établir des règles sur la pratique d'Homère. Quelques auteurs disent qu'Homère a non-seulement inventé la Poésie, mais encore les Arts et les Sciences, et qu'il donne dans son poème des marques visibles qu'il les possédait toutes à un degré éminent. Voyez POESIE.

M. Barus de Cambridge Ve mettre un ouvrage sous presse, dans lequel il prouve que Salomon est l'auteur de l'iliade.

L'iliade, dit M. de Voltaire dans son essai sur la poésie épique, est pleine de dieux et de combats. Ces sujets plaisent naturellement aux hommes ; ils aiment ce qui leur parait terrible. Ils sont comme les enfants qui écoutent avidement ces contes de sorciers qui les effraient. Il y a des fables pour tout âge, et il n'y a point eu de nation qui n'ait eu les siennes.

De ces deux sujets qui remplissent l'iliade, naissent deux grands reproches que l'on fait à Homère. On lui impute l'extravagance de ses dieux et la grossiéreté de ses héros. C'est reprocher à un peintre d'avoir donné à ses figures les habillements de leur temps. Homère a peint les dieux tels qu'on les croyait, et les hommes tels qu'ils étaient. Ce n'est pas un grand mérite de trouver de l'absurdité dans la théologie payenne, mais il faudrait être bien dépourvu de gout, pour ne pas aimer certaines fables d'Homère. Si l'idée des trois grâces qui doivent toujours accompagner la déesse de la Beauté, si la ceinture de Venus sont de son invention, quelles louanges ne lui doit-on pas pour avoir ainsi orné cette religion que nous lui reprochons ? et si ces fables étaient déjà reçues avant lui, peut-on mépriser un siècle qui avait trouvé des allégories si justes et si charmantes ?

Quant à ce qu'on appelle grossiéreté des héros d'Homère, on peut rire tant qu'on voudra de voir Patrocle au neuvième livre de l'iliade, mettre trois gigots de mouton dans une marmite, allumer et souffler le feu, et préparer le diner avec Achille. Achille et Patrocle n'en sont pas moins éclatants. Charles XII. roi de Suède, a fait six mois sa cuisine à Demir-Tocca, sans rien perdre de son héroïsme ; et la plupart de nos généraux qui portent dans un camp tout le luxe d'une cour efféminée, auront bien de la peine à égaler ces héros.

Que si on reproche à Homère d'avoir tant loué la force de ses héros, c'est qu'avant l'invention de la poudre, la force du corps décidait de tout dans les batailles. Les anciens se faisaient une gloire d'être robustes, leurs plaisirs étaient des exercices violents. Ils ne passaient point leurs jours à se faire trainer dans des chars à couvert des influences de l'air, pour aller porter languissamment d'une maison à l'autre, leur ennui et leur inutilité. En un mot, Homère avait à représenter un Ajax et un Hector, et non un courtisan de Versailles ou de Saint-James. Essai sur la poésie épique.

On peut également excuser les défauts de style ou de détail qui se trouvent dans l'iliade ; ses censeurs n'y trouvent nulle beauté, ses adorateurs n'y avouent nulle imperfection. Le critique impartial convient de bonne foi qu'on y rencontre des endroits faibles, défectueux, trainans, quelques harangues trop longues, des descriptions quelquefois trop détaillées, des répétitions qui rebutent, des épithetes trop communes, des comparaisons qui reviennent trop souvent, et ne paraissent pas toujours assez nobles. Mais aussi ces défauts sont couverts par une foule infinie de grâces et de beautés inimitables, qui frappent, qui enlèvent, qui ravissent, et qui sollicitent pour les taches légères dont nous venons de parler, l'indulgence de tout lecteur équitable et non prévenu.

Madame Dacier a traduit l'iliade en prose, M. de la Mothe l'a imitée en vers. L'une de ces traductions n'atteint pas la force de l'original, l'autre affecte en quelque sorte de le défigurer.