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Catégorie parente: Beaux-arts
Catégorie : Architecture
S. f. (Architecture) ouverture en terre creusée en long et carrément, pour fonder un édifice, ou pour poser et reparer des conduites de plomb, de fer ou de terre.

Tranchée de mur. Ouverture en longueur hachée dans un mur pour y recevoir et sceller une solive, ou un poteau de cloison, ou une tringle qui sert à porter de la tapisserie.

On appelle encore tranchée de mur, une entaille dans une chaîne de pierre au-dehors d'un mur, pour y encastrer l'ancre du tiran d'une poutre, et la recouvrir de plâtre. On fait aussi de ces tranchées pour retenir les tuyaux de cheminées, qu'on adosse contre un mur. Daviler. (D.J.)

TRANCHEE, fosse que l'on a creusée dans la terre pour faire écouler les eaux d'un marais, d'un pré, d'un étang, etc. ou pour détourner le cours d'une rivière. Voyez FOSSE. Chambers.

TRANCHEES, (Fortification) dans l'attaque des places, sont des espèces de chemins creusés dans la terre pour arriver à la place sans être Ve de ses défenses.

Lorsque la tranchée est parallèle à la place ; on la nomme parallèle ou place d'armes. Voyez LIGNES PARALLELES ou PLACE D'ARMES.

Lorsqu'elle sert de chemin pour arriver à la place, elle se nomme boyau. Voyez BOYAU.

Il y a plusieurs espèces de tranchées ; savoir :

La tranchée à crochet, la tranchée double, la directe et la tranchée tournante.

La tranchée à crochet est la tranchée ordinaire qui Ve en zig-zags vers la place.

La tranchée double est celle qui étant vue des deux côtés a un paravant de chaque côté.

La tranchée directe est celle qui Ve directement aux ouvrages où elle se dirige, parce que le terrain ou la situation ne permet pas de la conduire autrement. On la défîle par de fréquentes traverses, et en la faisant plus profonde que la tranchée ordinaire. Voyez ces différentes tranchées, Pl. XVI. de fortification, fig. 1. n°. 2, 3 et 4.

La tranchée tournante est celle qui entoure ou qui forme une espèce d'enveloppe autour des ouvrages attaqués ; telle est celle qu'on fait pour le logement du glacis ou du chemin-couvert, Pl. XVI. fig. 1. n°. 1. Cette tranchée F est défilée des ouvrages qui les découvrent par des traverses intérieures G, et des extérieures T.

La tranchée s'ouvre ordinairement lorsque les lignes de circonvallation et de contrevallation sont à-peu-près aux deux tiers de leur façon. Dès que ces lignes sont tracées, l'ingénieur qui a la principale direction du siege, examine le côté le plus favorable pour les approches et le moins susceptible de défense. Il règle sur le plan de la place et de ses environs la disposition et le nombre des attaques ; après quoi le terrain qu'elles doivent occuper étant bien reconnu, il se met en état de faire travailler à la tranchée, c'est-à-dire, d'en faire commencer l'ouvrage. C'est ce commencement de travail qui se nomme l'ouverture de la tranchée.

Pour se diriger dans ce travail, on prolonge dans la campagne les capitales des bastions du front de l'attaque. Pour cet effet on plante hors de la portée du fusil des piquets dans le prolongement de l'angle flanqué des bastions, et de l'angle saillant du chemin-couvert opposé. Ces deux points pouvant être remarqués aisément de loin ; ils donnent le moyen de planter facilement plusieurs piquets dans leur alignement. On peut avoir de même le prolongement des capitales de tous les autres ouvrages qu'on peut avoir à attaquer, ou qui couvrent ou forment le front de l'attaque. On attache des bouchons de paille aux piquets qui donnent ces alignements, afin de les distinguer ou remarquer plus facilement dans la nuit.

Le général règle aussi l'état des gardes d'infanterie et de cavalerie qui doivent être de service chaque jour, et de manière qu'elles aient au-moins trois ou quatre jours de repos, et qu'elles soient aussi suffisantes pour repousser les sorties que peuvent faire les troupes de la garnison.

On détermine aussi en même temps la cavalerie qui doit porter la fascine, et les travailleurs de jour et de nuit, qui doivent être en fort grand nombre les premières et secondes gardes, ce qui se fait un jour ou deux avant l'ouverture de la tranchée, à la diligence du major général et du maréchal général des logis de la cavalerie. Ces deux officiers ont soin de faire avertir les troupes de bien reconnaître la situation des gardes. Ils doivent aussi s'entendre et se concerter avec le directeur général de la tranchée, recevoir de lui les demandes journalières qu'il est obligé de leur faire sur les besoins de la tranchée, et avoir soin qu'il ne lui manque rien.

Tout cela préparé, le directeur règle son détail avec les ingénieurs. Il les instruit du lieu où il veut ouvrir la tranchée, et il a besoin de leur faire prendre de la méche ou des cordeaux, des piquets et des maillets pour la tracer. On fait porter tout cela en paquets par des soldats, qui ont soin de tenir toutes ces choses en état de s'en servir lorsqu'il en est besoin.

Lorsque tout est réglé, on pose une petite garde près des lieux où le travail doit commencer, afin d'empêcher qu'on n'y dérange rien, et qu'on ne les fréquente pas trop, car il est important de cacher son dessein autant qu'on le peut.

Le jour de l'ouverture étant venu, les gardes s'assemblent sur les deux ou trois heures après midi, elles se mettent en bataille, après quoi on leur fait la prière. Le général les voit défiler si bon lui semble. Les travailleurs s'assemblent aussi près de-là, étant tous munis de fascines, de piquets, et outre cela d'une pelle et d'une pioche.

Quand la nuit approche, et que le jour commence à tomber, les gardes se mettent en marche, chaque soldat portant une fascine avec ses armes, ce qui doit se pratiquer à toutes les gardes. A l'égard des outils, il suffit d'en faire prendre aux travailleurs les deux premières gardes, et de les faire laisser à la tranchée où on les retrouve.

La garde de cavalerie Ve prendre en même temps les postes qui doivent lui avoir été marqués sur la droite et la gauche des attaques, ou sur l'une des deux, selon qu'il a été jugé convenable : tout cela se fait le premier jour en silence et sans tambour ni trompette. Les grenadiers et les autres détachements marchent à la tête de tout, suivis des bataillons de la tranchée, et ceux-ci des travailleurs, lesquels sont tous disposés par divisions de 50 en 50 ; chaque division est commandée par un capitaine, un lieutenant et deux sergens. On les fait marcher par quatre ou six de front jusqu'à l'endroit où l'on veut commencer le travail. Lorsque la tête de ces travailleurs est arrivée, le brigadier ingénieur du jour, qui a le dessein des attaques projetées, Ve poser les brigades en avant par les lieux où la tranchée doit passer, pendant que les bataillons s'arrangent à droite et à gauche de l'ouverture de la première tranchée derrière les couverts qui s'y trouvent, sinon aux endroits qui auront été marqués à leur major, où ils déchargent leurs fascines.

Ils se reposent ensuite sur leurs armes en silence, toujours prêts à exécuter les ordres qui leur sont donnés.

Pendant cet arrangement, le brigadier ou l'ingénieur qui a posé ces détachements, donne le premier coup de cordeau, et il montre aux sous-brigadiers ce qu'il y a à faire pour continuer à tracer la tranchée. Il fait ensuite défiler les travailleurs un à un portant la fascine sous le bras droit, si la place est à droite, et sous la gauche, quand on la laisse à gauche. Il commence lui-même par poser le premier des travailleurs, puis le deuxième, troisième, quatrième, cinquième, etc. l'un après l'autre, leur recommandant :

1°. Le silence.

2°. De se coucher sur leur fascine.

3°. De ne point travailler qu'on ne le leur commande.

Quand le brigadier en a posé ainsi plusieurs, il cede sa place au premier ingénieur qui le suit et qui continue à poser et faire poser, pendant que lui brigadier Ve prendre garde au tracé. Tout cela se continue de la sorte, jusqu'à ce qu'on ait tout posé, observant bien :

1°. Tous les replis et retours de la tranchée.

2°. De faire avancer les gens détachés, à-mesure qu'on avance le tracé.

3°. De couvrir les brisures des retours par un prolongement de deux ou trois taises en arrière, ce qui se fait au dépens de la ligne en retour, et ainsi de toutes les autres.

4°. De faire jeter la terre de la tranchée du côté de la place, pour s'en former un parapet qui mette à couvert du feu de ses ouvrages.

5°. De prendre bien garde de ne pas s'enfiler ; c'est-à-dire, de diriger les boyaux de la tranchée, de manière que leur prolongement ne donne sur aucun des ouvrages de la place. Car il est évident qu'alors le feu de ces ouvrages découvrirait les boyaux dans toute leur longueur. Il faut prendre garde aussi de trop s'écarter dans la campagne, pour ne pas faire plus de retours ou d'ouvrages qu'il n'est nécessaire. On doit s'attacher à faire en sorte que les prolongements des différentes parties de la tranchée rasent les parties les plus avancées des dehors de la place, ou qu'ils ne donnent qu'environ à dix ou douze taises près ; ce qui ne peut guère se faire que par estime, à-moins qu'on n'ait commencé à tracer avant que le jour soit tout à fait tombé, ce qui est toujours mieux, lorsqu'on le peut sans grand risque.

6°. De ne pas s'éloigner des capitales prolongées, dont il faut renouveller les piquets de temps-en-temps, et les coèffer d'un bouchon de paille afin de les reconnaître, même de quelque bout de meche allumée pendant la nuit ; parce qu'il faut se faire une loi de ne pas s'en éloigner, et de les croiser fréquemment. Il faut être en état de les reconnaître pour se diriger selon leur direction, afin d'éviter les écarts et les retours inutiles, parce que ce sont les vrais guides qui doivent mener à la place.

Pour bien faire, il faut poser les retours à fascines comptées, afin d'en savoir toujours les mesures.

Si la situation des ouvertures est favorable, il ne sera pas impossible qu'on puisse parvenir jusqu'à la première parallèle ou place d'armes dès la première nuit ; mais si on est obligé d'ouvrir la tranchée de fort loin, cela sera moins aisé, et il faudra employer beaucoup plus de travail.

Il est à présumer que le directeur général aura fait son projet sur le pied d'avancer jusque-là la première nuit ; et s'il est possible, il faudrait en commencer le retour, ne fût-ce que par une cinquantaine de travailleurs.

Ce qui est dit ici pour les attaques de la droite, se doit aussi entendre pour celles de la gauche, chacune d'elles devant aller le même train, et toujours marcher de concert ; de sorte que quand l'une trouve quelque difficulté qui la retarde, l'autre la doit attendre pour éviter les inconvéniens, auxquels sont sujets ceux qui allant trop vite, ne se précautionnent pas assez.

Quand le travail est disposé, on fait : haut les bras, et tout le monde travaille, avertissant toujours les travailleurs de jeter la terre du côté de la place. On se diligente tant qu'on peut jusqu'au grand jour : pour lors on fait mettre les détachements à-couvert sur le revers de ce qu'il y a de fait de la place d'armes et derrière les plus proches replis de la tête des tranchées, où on les fait coucher sur le ventre, car elles sont encore bien faibles le matin. Après cela, on congédie les travailleurs de la nuit ; et on les relève par un pareil nombre de jour, commençant par la tête, au contraire de ceux de la nuit qu'on a commencé par la queue.

Il est rare que cette première journée puisse bien achever les ouvrages qu'on a commencés, quelque soin qu'on se donne pour cela, parce que d'ordinaire on entreprend beaucoup.

On ne doit pas cependant congédier les travailleurs de jour qu'ils n'aient à-peu-près achevé l'ouvrage de la largeur et profondeur qu'on veut lui donner, ce qui est bien difficîle à obtenir des ouvriers qui ont toujours grande envie de s'en retourner, et très-peu d'achever. C'est pourquoi il est àpropos de faire parcourir, le second jour, le travail de la première nuit par un détachement de cent ou deux cent hommes qui ne feront autre chose que d'achever et parer ce qui a été commencé la première nuit.

La mesure ordinaire des tranchées est ordinairement de douze pieds de largeur et de trois de profondeur. La terre de la tranchée étant jetée du même côté, forme un parapet de trois pieds ou trois pieds et demi d'élévation au-dessus du terrain de la campagne, ce qui donne pour toute la hauteur du parapet depuis le fond de la tranchée six pieds ou six pieds et demi.

La seconde garde, le masque étant levé, on monte la tranchée, tambour battant, et on pose encore à découvert ; mais il s'en faut bien qu'on entreprenne autant de travail que la première nuit.

La seconde garde doit s'employer par préférence à la continuation de la première place d'armes, à laquelle il faut donner toute l'étendue nécessaire, et pousser cependant en avant ce qu'on pourra en croisant toujours les capitales, dont il faut avoir soin de marquer les prolongements à-mesure qu'on s'avance vers la ville, et les piquer chaque fois qu'on les croise afin de les rendre toujours plus remarquables.

La place-d'armes entreprise sur toute sa longueur, doit être achevée dans toute la perfection qu'on pourra lui donner à la fin de la troisième garde, parce qu'elle doit être la demeure fixe des bataillons jusqu'à ce que la seconde soit faite.

Outre la première ligne parallèle ou place-d'armes, qu'on doit considérer comme l'ouvrage de la deuxième et troisième nuit, quoique commencée dès la première, on doit avoir fait marcher en avant les deux tranchées de la droite et de la gauche, mais non pas jusqu'à la seconde parallèle. Il ne serait pas prudent de s'avancer aussi promptement.

Les travailleurs de jour de cette garde doivent être fournis en nombre égal à ceux de la nuit. Le travail de jour commence par celui de la tête, comme celui de la nuit par la queue.

Tout le monde doit contribuer à presser et perfectionner le travail de jour tant que l'on peut ; après quoi, quand il est en état, il faut faire avancer les premiers bataillons dans la place-d'armes, et ne mettre que des détachements dans les ouvrages de la tête, avec ordre de ne point tenir ferme, si l'ennemi vient à eux.

Le troisième jour il faudra encore faire monter force travailleurs, afin d'en pouvoir employer trois ou quatre cent à perfectionner ce qui manquera des jours précédents, et arriver à la deuxième ligne parallèle ou place-d'armes, à laquelle il faudra travailler aussi avec la même vivacité.

Comme le feu de la place commence alors à devenir dangereux, il faut employer les sappes, non qu'il faille renoncer tout à fait à poser encore à-découvert quelque partie de la troisième nuit ; mais il faut le faire directement, et pour cela trouver quelque terrain favorable qui fournisse un demi-couvert, ou bien prendre le temps que le feu est fort ralenti, comme il arrive souvent après les deux ou trois premières heures que les soldats sont las de tirer. Pour lors on peut dérober un temps pour poser cent ou cent vingt travailleurs, et plus si le feu continue à diminuer ; mais c'est de quoi il ne faut pas abuser, parce qu'il faut tenir pour maxime de ne jamais exposer son monde mal-à-propos, et sans grande raison ; ce qui se fait bien moins souvent qu'il n'est à désirer, et sans qu'on en retire aucun avantage : au contraire rien n'est plus capable de retarder le travail : c'est pourquoi après la seconde nuit il ne faut plus poser à découvert sans grande circonspection. Ainsi il faut nécessairement après cette nuit employer les sappes. Voyez SAPPE.

Il est très-important que le général visite la tranchée, mais de temps-en-temps seulement, et non tous les jours. Il doit y venir peu accompagné, se faire rendre compte sur les lieux de chaque chose en particulier, et donner les ordres sur tout autant qu'il le jugera nécessaire.

Si les attaques sont séparées, le lieutenant-général de jour choisit celle qui lui plait ; si elles sont liées, comme il a le commandement général, il commande aux deux ; et par conséquent il doit occuper le milieu entre les deux, mais non pas à la tête des attaques ; parce que les allées et venues des gens qui ont affaire à lui embarrasseraient le travail ; outre qu'il serait trop éloigné du gros des troupes, le milieu de la tête des bataillons est le lieu qui lui convient le mieux. Il peut, et doit visiter de temps-en-temps la tête des ouvrages.

Le plus ancien maréchal-de-camp doit se mettre à la droite, l'autre à la gauche ; les brigadiers à la queue des détachements les plus avancés.

Le lieutenant-général du jour commande à la cavalerie, infanterie, artillerie, ingénieurs, mineurs et généralement à tout ce qui regarde la sûreté et l'avancement des attaques ; mais il se doit concerter avec le directeur de la tranchée, et ne rien entreprendre ni résoudre sans sa participation ; car ce dernier est l'âme et le véritable mobîle des attaques.

L'application particulière d'un lieutenant-général doit être de bien poster les troupes, régler les détachements, faire servir les têtes de la tranchée, et fournir des travailleurs extraordinaires, quand on lui en demande.

Les maréchaux-de-camp font la même chose que le lieutenant-général, par subordination ; et ils doivent recevoir ses ordres, et les rendre aux brigadiers, et ceux-ci aux colonels qui les distribuent à leurs régiments, à qui ils ont soin de les faire exécuter.

Quand il y a quelques entreprises à faire, c'est le lieutenant-général qui en doit ordonner l'exécution, par l'avis et sur l'exposé du directeur général.

Lorsqu'il y a peu de ces premiers officiers dans une armée, ce n'est pas une nécessité que le lieutenant-général de jour couche à la tranchée, il suffit qu'il la visite pendant le jour, et qu'il y donne ses ordres.

Quatre lieutenans-généraux suffisent pour une armée commandée par un maréchal de France, le double des maréchaux de camp, et le double de ceux-ci en brigadiers ; c'est-à-dire que s'il y a quatre lieutenans-généraux, il doit y avoir huit maréchaux de camp, et seize brigadiers ; un plus grand nombre est inutile, et bien plus à charge que nécessaire dans les armées.

Des rois et des princes. Si des rois ou des princes dont la vie est précieuse aux peuples, étaient en personnes à l'armée, et qu'ils voulussent voir la tranchée, ce qu'on ne peut désapprouver, il faudrait prendre les précautions suivantes :

1°. Que cela n'arrive pas souvent ; mais seulement deux, trois, ou quatre fois tout au plus pendant un siege.

2°. Que ce ne soit qu'à des places considérables, et non à des bicoques.

3°. Que la tranchée soit bonne, et autant assurée qu'on le peut faire.

4°. Qu'ils voient l'ouverture de la tranchée si bon leur semble ; mais qu'ils ne la visitent plus que lorsque le canon se sera rendu maître de celui de la place.

5°. Que la nuit qui précédera les visites qu'ils voudront faire, on envoie partie de leur garde à la tranchée, distribuée par petits pelotons en différents endroits, pour plus grandes sûretés de leurs personnes.

6°. Qu'ils y aillent fort peu accompagnés, et seulement d'un capitaine des gardes, de trois ou quatre de leurs officiers, et de cinq ou six seigneurs de leur cour, ou des officiers généraux, et du directeur de la tranchée, qui doit marcher immédiatement devant eux pour leur servir de guide, et leur rendre compte, en chemin faisant, de toutes choses.

7°. Qu'il ne se fasse aucun mouvement de troupes pendant qu'ils seront à la tranchée ; mais qu'elles se rangent toutes sur le revers, laissant le côté du parapet à sa marche.

8°. Qu'on fasse asseoir tous les soldats, leurs armes à la main ; les officiers se tenir de bout du même côté, le chapeau à la main, sans laisser paraitre leur esponton par-dessus la tranchée.

9°. Qu'ils visitent tout, jusqu'à la troisième place d'armes, même jusqu'à la queue des sappes, afin qu'ils en soient mieux instruits.

10°. Qu'ils montent de petits chevaux, bas de taille, doux, qui ne soient pas ombrageux, pour faire leur tournée, au-moins jusqu'à la seconde parallèle ou place d'armes, n'étant pas possible qu'ils y puissent fournir à pied, quand les tranchées sont un peu avancées.

11°. Qu'on leur fasse un ou deux reposoirs dans les endroits de la tranchée les plus convenables ; ces mêmes lieux pourront servir après de couverts aux officiers généraux de garde.

Après tout ce que nous avons dit sur la tranchée, il faut encore ajouter une vérité constante, c'est qu'il n'y a aucun lieu sur dans la tranchée, quelque soin qu'on se puisse donner pour la bien faire, comme il n'y a rien qui puisse mettre à couvert des bombes et des pierres, quand on est sous leur portée, et que la place en tire ; il n'y a point non plus de parapet de tranchée qui ne puisse être percé par le canon, à huit pieds au-dessous du sommet, et dans l'infinité de coups de mousquets qui se tirent, il y en a toujours quantité dont les balles rasant le haut des parapets, s'amortissent et plongent, la plupart avec encore assez de force pour blesser et tuer ceux qui en sont atteints.

Il y a de plus des coups de biais ou d'écharpe, qui rasant ainsi le parapet de la tranchée, s'amortissent, et ne sont pas moins dangereux, et qu'on ne peut guère éviter.

Quand on est sous la portée des grenades, c'est encore pis ; les coups de feu sont là dans leur force, et bien plus certains, outre que les éclats des grenades et des bombes volent par-tout, et vont le plus souvent tomber où l'on ne les attend pas ; c'est pourquoi je crois qu'il est de la prudence que les grands princes, de la vie desquels dépend le sort des états, dans les visites qu'ils feront dans la tranchée, ne passent point au-delà de la troisième place d'armes ; ils ne doivent pas même aller jusques là. Attaq. des places de Vauban.

La tranchée se monte de jour ou de nuit ; l'avantage qu'on trouve à la monter de jour, consiste en ce que les officiers et les soldats qui voient le terrain, s'instruisent mieux de ce qu'ils auront à faire, que quand l'obscurité sera venue ; mais il y a divers avantages à la monter de nuit.

1°. On perd moins de monde par le canon et les mortiers des assiégés, qui ne cessent de tirer depuis que les nouvelles troupes entrent à la queue de la tranchée, jusqu'à ce que celles qui sont relevées, soient entièrement sorties ; surtout lorsqu'il se trouve quelque morceau de tranchée qui sera enfilé ou commandé ; ce que rarement on peut éviter dans toute cette longue étendue qu'a la tranchée ; comme les artilleurs de la place ne manquent jamais de l'observer, c'est principalement vers cet endroit qu'ils dirigent les batteries ; et les troupes qui entrent, s'embarrassant avec celles qui sortent, n'ont pas assez de terrain pour éviter les bombes, les pierres, et les bonds des boulets de canon.

2°. Si pour donner l'assaut, ou pour vous précautionner contre une sortie à laquelle vous sçavez que les ennemis se préparent, vous voulez conserver les troupes qui devaient être relevées, pour les joindre avec les nouvelles qui entrent ; ou si vous montez la tranchée avec plus de bataillons qu'à l'ordinaire, les ennemis l'observeront, lorsque cela se passera de jour, et ils prendront leurs mesures pour attendre l'assaut, ou pour ne point faire de sortie : au-contraire si après avoir monté la tranchée de jour, vous faites marcher de nuit de nouvelles troupes pour en renforcer la garde, il ne sera pas possible que ce mouvement ne s'entende de la place, surtout quand la tranchée est déjà proche.

3°. Comme c'est la nuit qu'il y a plus à craindre des sorties, les troupes de la tranchée seront bien moins vigilantes et moins en état de combattre, lorsqu'ayant déjà passé tout le jour, elles se trouveront harassées par le soleil et la poussière. Il est vrai qu'on y peut remédier, en ne montant pas la tranchée le matin, mais seulement le soir un peu auparavant la nuit.

Lors même qu'on monte la tranchée de nuit, les généraux, les commandants, et les majors des régiments, y entrent de jour, afin de reconnaître le terrain et voir en quel état toutes les choses se trouvent. Le major de tranchée ou ses aides, devraient les attendre au poste du lieutenant général de tranchée, pour leur faire observer tout ce qui est digne de quelque considération.

Le major général, dès le jour précédent, nomme aux majors de brigade quelles troupes doivent relever chacune de celles de sa tranchée ; et une fois pour toute il assigne l'heure et le lieu de l'assemblée où ce même major général fait ranger les bataillons et les détachements selon l'ordre dans lequel ils doivent marcher et garnir la tranchée.

Deux caporaux de chaque bataillon se trouvent à la queue de la tranchée, l'un pour guider à couvert par le chemin le plus court, le bataillon qui entre ; et l'autre pour conduire les détachements qui vont quelquefois par un chemin différent de celui que prennent les régiments.

Les troupes qui entrent et celles qui sortent, s'approcheront du parapet le plus qu'elles pourront : si c'est de jour, la tranchée se monte tambour battant, et l'on plante les drapeaux au haut de la tranchée, dans quelqu'endroit du parapet qui soit bien renforcé, parce que les cannoniers de la place se divertissent à tirer contre les drapeaux.

Chacun sait que les officiers qui descendent, transmettent à ceux qui les relèvent, les ordres qu'il y a à la tranchée. Le lieutenant général de tranchée les reçoit du général de l'armée, et il les distribue ensuite aux régiments. Pour moi, je voudrais que le général de la tranchée donnât tous les ordres au major, et que celui-ci les distribuât tous les jours aux troupes de la tranchée. De cette manière, on trouverait dans le livre du major de tranchée, une suite exacte de tout ce qui s'est passé pendant tout le cours du siege.

Je voudrais aussi que le lieutenant général et le major de tranchée, les ingénieurs qui entrent et qui sortent, les commandants des batteries, les directeurs des mines, le major général de l'armée, le chef des ingénieurs, et les commandants d'artillerie, conférassent ensemble sur ce qu'il est important de faire ou de représenter au général de l'armée, pour bien exécuter les ordres qu'il a précédemment donnés. Réflexions militaires, par M. le marquis de Santacrux.

Après le détail précédent sur les tranchées, il nous reste à faire observer, en finissant cet article, que l'usage n'en remonte guère, selon le père Daniel, qu'au règne de Charles VII. ou un peu auparavant. Il croit qu'on leur donnait alors le nom de mines, et quelquefois de tranchées ; mais ce dernier nom prévalut bien-tôt sur le premier ; apparemment lorsque les travaux exprimés par ces deux noms, devinrent différents. Le maréchal de Monluc les perfectionna au siege de Thionville, en 1558 ; mais ce n'est que sous M. le maréchal de Vauban, qu'elles devinrent infiniment plus parfaites qu'elles ne l'avaient été jusqu'à ce grand homme. Ce fut au siege de Maèstricht, en 1673, qu'il inventa les fameuses parallèles ou places d'armes, qui donnent tant de supériorité à l'attaque sur la défense. Il imagina ensuite les cavaliers de tranchée, un nouvel usage des sappes et des demi-sappes, les batteries à ricochet, etc. et par-là, comme le dit l'historien de l'académie, " il avait porté les arts à une telle perfection, que le plus souvent, ce qu'on n'aurait jamais osé espérer devant les places les mieux défendues, il ne perdait pas plus de monde que les assiégés ".

Nous devons remarquer ici que M. le chevalier de Folard ne pensait pas que les tranchées aient été inconnues aux anciens ; il prétend même démontrer dans son traité de l'attaque et de la défense des places, qu'ils employaient des parallèles, ou places d'armes, dans leurs approches, et qu'ils avaient pratiqué tout ce qu'on a inventé dans les sieges, depuis la découverte de la poudre à canon. Mais suivant M. Guischardt, le sentiment de M. de Folard, sur ce sujet, ne se trouve fondé que sur l'infidélité des traductions, et sur l'envie de cet habîle officier, de faire de nouvelles découvertes. " J'ai examiné, dit-il, dans la langue originale, les passages dont il appuie son système, et je me sens aisément convaincu que les auteurs n'y représentent rien de tout ce qu'il a vu, et qu'ils s'expriment en termes très-clairs sur tout ce qu'ils veulent faire entendre. Il est certain qu'on n'y trouve rien de ressemblant aux tranchées et aux parallèles ". Dissertation sur l'attaque et la défense des places des anciens. Voyez cette dissertation dans le second volume des mémoires militaires de M. Guischardt, et le traité sur le même sujet, de M. le chevalier de Folard, l. II. et III. de son commentaire sur Polybe. (Q)

TRANCHEE, queue de la, (Génie) c'est le premier travail que l'assiégeant a fait en ouvrant la tranchée, et qui demeure derrière à mesure qu'on pousse la tête de l'attaque vers la place. Il y a toujours du danger à la queue de la tranchée, parce qu'elle est exposée aux batteries de la place, et que le canon logé sur des cavaliers, donne facilement sur les troupes qui montent la garde, ou qui la relèvent. On laisse toujours une garde de cavalerie à la queue de la tranchée, pour être en état de courir au secours des travailleurs de la tête, en cas d'une sortie de la garnison, et cette garde se relève autant de fois qu'on relève la garde de la tranchée. (D.J.)

TRANCHEE, relever la, (Art militaire) c'est monter la garde à la tranchée, et prendre le poste d'un autre corps de troupes qui descend la garde. (D.J.)

TRANCHEE, retour de la, (Génie) ce sont les coudes et les obliquittés qui forment les lignes de la tranchée, qui sont en quelque façon parallèles aux côtés de la place qu'on attaque, pour en éviter l'enfilade. Ces différents retours mettent un grand intervalle entre la tête et la queue de la tranchée, qui par le chemin le plus court, ne sont séparées que par une petite distance. Aussi quand la tête est attaquée par quelque sortie de la garnison, les plus hardis des assiégeants, pour abréger le chemin des retours, sortent de la ligne, et vont à découvert repousser la sortie, et couper l'ennemi en le prenant à dos. Dict. milit. (D.J.)

TRANCHEE, (Jardinage) se dit d'une longue ouverture de terre, pour planter des arbres, de la charmille, ou pour faire un fossé, une rigole : on fait encore des tranchées de recherches, pour amasser des sources.

TRANCHEE, s. f. (Hydraulique) on appelle tranchée de recherche, celle qui reçoit l'eau de plusieurs prairies de communication, ainsi que des rameaux d'eau que des écharpes ramassent de tous côtés, en forme de pattes d'oie. (K)

TRANCHEES, (Médecine) nom vulgaire employé par les femmes, les accoucheurs, les sages-femmes et les nouvelles accouchées, pour désigner les douleurs qu'elles éprouvent souvent après leur accouchement, à l'uterus, au ventre, au nombril, aux reins, aux lombes, aux aines, soit continuellement, soit par intervalles, tantôt d'un côté, tantôt de l'autre. On a indiqué les causes et les remèdes des tranchées au mot DOULEURS et FEMME EN COUCHE, Médec.

TRANCHEES, s. f. pl. terme de Maréchal, c'est une maladie des chevaux qui consiste en douleur dans les boyaux excitée par l'acrimonie des humeurs, ou par des vents, et qu'on doit traiter par les remèdes opposés aux causes du mal. Soleysel. (D.J.)




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