S. m. (Histoire moderne) homme préposé à l'inspection, à la conduite, et à la direction de quelques affaires qui forment son district.

Il y en a en France de plusieurs sortes. Voyez les articles suivants.

INTENDANS et COMMISSAIRES départis pour S. M. dans les provinces et généralités du royaume ; ce sont des magistrats que le roi envoie dans les différentes parties de son royaume, pour y veiller à tout ce qui peut intéresser l'administration de la justice, de la police, et de la finance ; leur objet est, en général, le maintien du bon ordre dans les provinces qui forment leur département, ou ce qu'on appelle généralités, et l'exécution des commissions dont ils sont chargés par S. M. ou par son conseil. C'est de-là qu'ils ont le titre d'intendants de justice, police, et finance, et commissaires départis dans les généralités du royaume, pour l'exécution des ordres de S. M.

Ce qu'on appelle généralités, est la division qui a été faite de toutes les provinces du royaume, en 31 départements, qui forment autant d'intendances, et n'ont aucuns rapports avec la division du royaume en gouvernements ou en parlements. Outre ces 31 intendants, il y en a encore six dans les colonies françaises.

L'intendant fait le plus ordinairement son séjour dans la ville principale de son département ; mais il fait au-moins une fois l'année, une tournée dans les villes et autres lieux de ce département, qui est aussi divisé en élections, ou autres sièges qui connaissent des impositions. M. Colbert avait réglé qu'ils feraient deux tournées par an ; l'une dans toute la généralité, l'autre dans une des élections, dont ils rendraient compte en détail au contrôleur général ; en sorte qu'au bout d'un certain nombre d'années, ils prenaient une connaissance détaillée, et rendaient compte de chaque élection, et par conséquent de toutes les villes, et villages, et autres lieux qui composaient leur généralité.

Les intendants sont presque toujours choisis parmi les maîtres des requêtes ; cependant il y a eu quelquefois des officiers des cours qui ont rempli cette fonction, comme actuellement les intendants de Bretagne et de Roussillon ; elles ont aussi été réunies d'autres fois à des places de premier président. Actuellement les intendances d'Aix et de Roussillon, sont remplies par les premiers présidents du parlement de Provence, et du conseil supérieur de Roussillon.

Sous la première et la seconde race, le roi envoyait dans les provinces des commissaires appelés missi dominici, ou missi regales, avec un pouvoir fort étendu, pour réformer tous les abus qui pouvaient se glisser, soit dans l'administration de la justice et de la police, soit dans celle des finances.

On en envoyait souvent deux ensemble dans chaque province ; par exemple Fardulphus et Stephanus faisaient la fonction d'intendants de Paris en 802, sous le règne de Charlemagne. Cet usage fut conservé par les rois successeurs de Charlemagne pendant plusieurs siècles ; ils continuèrent d'envoyer dans chaque province deux intendants ; et dans les cas extraordinaires, on envoyait un plus grand nombre de commissaires.

Une ordonnance de Charlemagne de 812 porte, que les commissaires qui sont envoyés par le roi dans les provinces, pour en corriger les abus, tiendront les audiences avec les comtes, en hiver, au mois de Janvier ; au printemps, en Avril ; en été, au mois de Juillet ; et en automne, au mois d'Octobre.

Louis-le-Débonnaire ordonna en 819, que les commissaires par lui envoyés dans les provinces, ne feraient pas de long séjour, ni aucune assemblée dans les lieux où ils trouveraient que la justice serait bien administrée par les comtes.

Ce même prince en 829 enjoignit à ces commissaires d'avertir les comtes et le peuple que S. M. donnerait audience un jour toutes les semaines, pour entendre et juger les causes de ses sujets, dont les commissaires ou les comtes n'auraient voulu faire justice, exhortant aussi ces mêmes commissaires ou les comtes, s'ils voulaient mériter l'honneur de ses bonnes grâces, d'apporter un fort grand soin, que par leur négligence les pauvres ne souffrissent quelque préjudice, et que S. M. n'en reçut aucune plainte.

Vers la fin de la seconde race, et au commencement de la troisième, temps où les fiefs et les justices seigneuriales furent établies, les rois envoyèrent aussi dans les provinces des commissaires choisis dans leur conseil, pour y maintenir leur autorité, connaître des cas royaux, et protéger le peuple, recevoir les plaintes que l'on avait à faire contre les seigneurs ou leurs officiers. Ces plaintes se devaient juger sommairement, si faire se pouvait, sinon être renvoyées aux grandes assises du roi. Les seigneurs se plaignirent de cette inspection, qui les rappelait à leur devoir, et contestait leurs officiers ; on cessa quelque temps d'en envoyer, et nos rois se contentèrent d'en fixer quatre ordinaires sous le titre de baillifs, qui étaient les quatre grands baillifs royaux. Saint Louis et ses successeurs envoyèrent néanmoins des enquêteurs, pour éclairer la conduite de ces quatre grands baillifs eux-mêmes, et des autres officiers. En Normandie, on devait en envoyer tous les trois ans : on les appelait aussi commissaires du roi ; ils devaient aller prendre leurs lettres à la chambre des comptes, qui leur donnait les instructions nécessaires, et taxait leurs gages. Mais ces commissaires n'avaient pas chacun à eux seuls le département d'une province entière, comme ont aujourd'hui les intendants.

Il y avait dans une même province autant de commissaires qu'il y avait d'objets différents que l'on mettait en commission, pour la justice, pour les finances, pour les monnaies, pour les vivres, pour les aides, etc. mais il ne devait point y avoir de commissaires pour la levée des revenus ordinaires du roi. Chacune de ces différentes commissions était donnée, soit à une seule personne ou à plusieurs ensemble, pour l'exercer conjointement.

Ceux qui étaient chargés de l'administration de quelque portion de finance, rendaient compte à la chambre des comptes, aussi-tôt que leur commission était finie ; et elle ne devait pas durer plus d'un an ; si elle durait davantage, ils rendaient compte à la fin de chaque année : il leur était défendu de recevoir ni argent, ni autre rétribution pour leurs sceaux.

Les commissaires avaient quelquefois le titre de réformateurs généraux ; et dans ce cas la commission était ordinairement remplie par des prélats et des barons ; c'est pourquoi l'ordonnance de Charles IV. du mois de Novembre 1323, taxe les gages que devaient prendre ceux qui étaient chargés de commissions pour le service du roi.

Les maîtres des requêtes auxquels les commissions d'intendants de province ont depuis été en quelque sorte affectées, étaient dejà institués ; mais ils étaient d'abord en très-petit nombre, et ne servaient qu'auprès du roi.

Dans la suite, la moitié allait faire des visites dans les provinces, et l'autre restait auprès du roi. Ceux qui avaient été dans les provinces revenaient rendre compte au roi et à son chancelier des observations qu'ils y avaient faites pour le service de Sa Majesté, et le bien de ses peuples ; ils proposaient aussi au parlement ce qui devait y être réglé, et y avaient entrée et séance.

Les ordonnances d'Orléans et de Moulins leur enjoignirent de faire tous les ans des chevauchées. L'ordonnance de 1629 renouvelle cette disposition ; mais ces tournées n'étaient que passageres, et ils ne résidaient point dans les provinces.

Ce fut Henri II. qui en 1551, établit les intendants de province, sous le titre de commissaires départis pour l'exécution des ordres du roi.

En 1635 Louis XIII. leur donna celui d'intendant du militaire, justice, police et finance.

L'établissement des intendants éprouva d'abord plusieurs difficultés. Sous la minorité de Louis XIV. la levée de quelques nouveaux impôts dont ils furent chargés, ayant excité des plaintes de la part des cours assemblées à Paris, elles arrêtèrent en 1648, que le roi serait supplié de révoquer les commissions d'intendants ; et par une déclaration du 15 Juillet suivant, elles le furent pour quelques provinces seulement, dans d'autres elles furent limitées à certains objets, mais elles furent ensuite rétablies ; elles ne l'ont été cependant en Béarn qu'en 1682, et en Bretagne qu'en 1689.

La fonction d'un intendant ne concerne en général, que ce qui a rapport à l'administration. Il a une inspection générale sur tout ce qui peut intéresser le service du roi, et le bien de ses peuples. Il doit veiller à ce que la justice leur soit rendue, à ce que les impositions soient bien reparties, à la culture des terres, à l'augmentation du commerce, à l'entretien des chemins, des ponts et des édifices publics ; en un mot à faire concourir toutes les parties de son département au bien de l'état, et informer le ministre de tout ce qu'il peut y avoir à améliorer ou à reformer dans sa généralité.

Les intendants sont souvent consultés par les ministres sur des affaires qui s'élèvent dans leur département, et ils leur envaient les éclaircissements et les observations dont ils ont besoin pour les terminer.

Quelquefois ils sont commis par des arrêts du conseil pour entendre les parties, dresser procès-verbal de leurs prétentions, et donner leur avis sur des affaires qu'il serait trop long et trop dispendieux d'instruire à la suite du conseil. Quelquefois même, quoique plus rarement, ils sont commis par arrêt pour faire des procédures et rendre des jugements, avec un nombre d'officiers ou de gradués, même en dernier ressort ; mais leur objet est plutôt de faire rendre la justice par ceux qui y sont destinés, que de juger les affaires des particuliers.

Une de leurs principales fonctions, est le département des tailles dans les pays où elle est personnelle. Ils font aussi les taxes d'office, et ils peuvent nommer d'office des commissaires pour l'assiette de la taille.

Les communautés ne peuvent intenter aucune action, sans y être autorisés par leur ordonnance.

Ils font les cottisations ou répartitions sur les possesseurs des fonds, pour les réparations des églises et des presbytères ; mais s'il survient à cette occasion des questions qui donnent lieu à une affaire contentieuse, ils sont obligés de la renvoyer aux juges ordinaires.

On leur expédie des commissions du grand sceau, qui contiennent tous leurs pouvoirs. Autrefois elles étaient enregistrées dans les parlements, et alors c'était les parlements qui connaissaient de l'appel de leurs ordonnances ; mais l'usage ayant changé, l'appel des ordonnances et jugements des intendants se porte au conseil, et y est instruit et jugé, soit au conseil des parties, soit en la direction des finances, soit au conseil royal des finances, selon la nature de l'affaire.

Mais comme ces ordonnances ne concernent ordinairement que des objets de police, elles sont de droit exécutoires par provision, et nonobstant l'appel, à-moins que le conseil n'ait jugé à propos d'accorder des défenses ; ce qu'il ne fait que rarement et en connaissance de cause.

Les intendants nomment des subdélégués dans les différentes parties de leur généralité ; ils les chargent le plus souvent de la discussion et instruction des affaires sur lesquelles ils font des procès-verbaux, et donnent des ordonnances pour faire venir devant eux les personnes intéressées, ou pour autres objets semblables.

Mais leurs ordonnances ne sont réputées que des avis à l'intendant ; et si les parties ont à s'en plaindre, elles ne se peuvent adresser qu'à lui. Il n'est permis de se pourvoir par appel, que contre celles que l'intendant rend sur ces procès-verbaux de ses subdélégués ; il n'y a que les ordonnances d'un subdélégué général, dont l'appel puisse être reçu au conseil, parce qu'il a une commission du grand sceau, qui l'autorise à remplir toutes les fonctions de l'intendant ; mais ces commissions ne se donnent que quand l'intendant est hors d'état de vaquer à ses fonctions par lui-même, comme en temps de guerre, lorsqu'il est obligé de suivre les armées en qualité d'intendant d'armée. (A)

L'autorité des intendants est, comme on le voit, très-étendue dans les pays d'élection, puisqu'ils y décident seuls de la répartition des impôts, de la quantité et du moment des corvées, des nouveaux établissements de commerce, de la distribution des troupes dans les différents endroits de la province, du prix et de la répartition des fourrages accordés aux gens de guerre ; qu'enfin c'est par leur ordre et par leur loi que se font les achats des denrées, pour remplir les magasins du roi ; que ce sont eux qui président à la levée des milices, et décident les difficultés qui surviennent à cette occasion ; que c'est par eux que le ministère est instruit de l'état des provinces, de leurs productions, de leurs débouchés, de leurs charges, de leurs pertes, de leurs ressources, etc. qu'enfin sous le nom d'intendants de justice, police et finances, ils embrassent presque toutes les parties d'administration.

Les états provinciaux sont le meilleur remède aux inconveniens d'une grande monarchie ; ils sont même de l'essence de la monarchie, qui veut non des pouvoirs, mais des corps intermédiaires entre le prince et le peuple. Les états provinciaux font pour le prince une partie de ce que feraient les préposés du prince ; et s'ils sont à la place du préposé, ils ne veulent ni ne peuvent se mettre à celle du prince ; c'est tout au plus ce que l'on pourrait craindre des états généraux.

Le prince peut avoir la connaissance de l'ordre général, des lois fondamentales, de sa situation par rapport à l'étranger, des droits de sa nation, etc.

Mais sans le secours des états provinciaux, il ne peut jamais savoir quelles sont les richesses, les forces, les ressources ; ce qu'il peut, ce qu'il doit lever de troupes, d'impôts, etc.

En France l'autorité du roi n'est nulle part plus respectée que dans les pays d'états ; c'est dans leurs augustes assemblées où elle parait dans toute sa splendeur. C'est le roi qui convoque et révoque ces assemblées ; il en nomme le président, il peut en exclure qui bon lui semble : il est présent par ses commissaires. On n'y fait jamais entrer en question les bornes de l'autorité ; on ne balance que sur le choix des moyens d'obéir, et ce sont les plus prompts que d'ordinaire on choisit. Si la province se trouve hors d'état de payer les charges qu'on lui impose, elle se borne à des représentations, qui ne sont jamais que l'exposition de leur subvention présente, de leurs efforts passés, de leurs besoins actuels, de leurs moyens, de leur zèle et de leur respect. Sait que le roi persévère dans sa volonté, soit qu'il la change, tout obéit. L'approbation que les notables qui composent ces états, donnent aux demandes du prince, sert à persuader aux peuples qu'elles étaient justes et nécessaires ; ils sont intéressés à faire obéir le peuple promptement : on donne plus que dans les pays d'élection, mais on donne librement, volontairement, avec zèle, et on est content.

Dans les pays éclairés par la continuelle discussion des affaires, la taille sur les biens s'est établie sans difficulté ; on n'y connait plus les barbaries et les injustices de la taille personnelle. On n'y voit point un collecteur suivi d'huissiers ou de soldats, épier s'il pourra découvrir et faire vendre quelques lambeaux qui restent au misérable pour couvrir ses enfants, et qui sont à peine échappés aux exécutions de l'année précédente. On n'y voit point cette multitude d'hommes de finance qui absorbe une partie des impôts et tyrannise le peuple. Il n'y a qu'un trésorier général pour toute la province ; ce sont les officiers préposés par les états ou les officiers municipaux qui, sans frais, se chargent de la régie.

Les trésoriers particuliers des bourgs et des villages ont des gages modiques ; ce sont eux qui perçoivent la taille dont ils répondent ; comme elle est sur les fonds, s'il y a des délais, ils ne risquent point de perdre leurs avances, ils les recouvrent sans frais ; les délais sont rares, et les recouvrements presque toujours prompts.

On ne voit point dans les pays d'états trois cent collecteurs, baillis ou maires d'une seule province, gémir une année entière et plusieurs mourir dans les prisons, pour n'avoir point apporté la taille de leurs villages qu'on a rendus insolvables. On n'y voit point charger de 7000 liv. d'impôts un village, dont le territoire produit 4000 livres. Le laboureur ne craint point de jouir de son travail, et de paraitre augmenter son aisance ; il sait que ce qu'il payera de plus sera exactement proportionné à ce qu'il aura acquis. Il n'a point à corrompre ou à fléchir un collecteur ; il n'a point à plaider à une élection de l'élection, devant l'intendant de l'intendant au conseil.

Le roi ne supporte point les pertes dans les pays d'états, la province fournit toujours exactement la somme qu'on a exigée d'elle ; et les répartitions faites avec equitté, toujours sur la proportion des fonds, n'accable point un laboureur aisé, pour soulager le malheureux que pourtant on indemnise.

Quant aux travaux publics, les ingénieurs, les entrepreneurs, les pionniers, les fonds enlevés aux particuliers, tout se paye exactement et se lève sans frais. On ne construit point de chemins ou de ponts, qui ne soient utiles qu'à quelques particuliers, on n'est point l'esclave d'une éternelle et aveugle avarice.

S'il survient quelques changements dans la valeur des biens ou dans le commerce, toute la province en est instruite, et on fait dans l'administration les changements nécessaires.

Les ordres des états s'éclairent mutuellement, aucun n'ayant d'autorité, ne peut opprimer l'autre ; tous discutent, et le roi ordonne. Il se forme dans ces assemblées des hommes capables d'affaires ; c'est en faisant élire les consuls d'Aix, et exposant à l'assemblée les intérêts de la Provence, que le cardinal de Janson était devenu un célèbre négociateur.

On ne traverse point le royaume sans s'apercevoir de l'excellente administration des états, et de la funeste administration des pays d'élection. Il n'est pas nécessaire de faire de questions ; il ne faut que voir les habitants des campagnes, pour savoir si on est en pays d'état, ou en pays d'élection ; de quelle ressource infinie ces pays d'états ne sont-ils pas pour le royaume !

Comparez ce que le roi tire de la Normandie, et ce qu'il tire du Languedoc, ces provinces sont de même étendue, les sables et l'aridité de la dernière envaient plus d'argent au trésor royal que les pacages opulents et les fertiles campagnes de la première. Que serait-ce que ces pays d'états, si les domaines du roy y étaient affermés et mis en valeur par les états mêmes ? C'était le projet du feu duc de Bourgogne ; et à ce projet il en ajoutait un plus grand, celui de mettre tout le royaume en provinces d'état.

Si le royaume a des besoins imprévus, subits, et auxquels il faille un prompt remède, c'est des pays d'état que le prince doit l'attendre. La Bretagne, malgré ses landes et son peu d'étendue, donna dans la dernière guerre un tiers de subsides de plus que la vaste et riche Normandie. La Provence, pays stérile, donna le double du Dauphiné, pays abondant en toutes sortes de genre de production.

La Provence, dévastée par les armées ennemies, surchargée du fardeau de la guerre, propose de lever et d'entretenir une armée de trente mille hommes à ses dépens. Le Languedoc envoye deux mille mulets au prince de Conti pour le mettre en état de profiter de ses victoires et du passage des Alpes.

Ce que je dis est connu de tout le monde, et chez l'étranger nos provinces d'état ont la réputation d'opulence ; elles ont plus de crédit que le gouvernement ; elles en ont plus que le roi lui-même.

Souvenons-nous que Gènes, dans la dernière guerre, ne voulut prêter au roi que sous le cautionnement du Languedoc.

Il y a des intendants dans ces provinces, il est à désirer qu'ils n'y soient jamais que des hommes qui y veillent pour le prince ; il est à désirer qu'ils n'y étendent jamais leur autorité, et qu'on la modere beaucoup dans les pays d'élection.

INTENDANS DU COMMERCE ; ce sont des magistrats établis en titre d'office pour s'appliquer aux affaires de commerce, et qui ont entrée et séance au conseil royal du Commerce, où ils font le rapport des mémoires, demandes, propositions et affaires qui leur sont renvoyées chacun dans leur département, et pour rendre compte des délibérations qui y ont été prises au contrôleur général des finances, ou au secrétaire d'état ayant le département de la marine, suivant la nature des affaires, lorsque leurs emplois ne leur ont pas permis d'y assister.

Toutes les nations policées ont reconnu la nécessité d'établir des officiers qui eussent une inspection sur le commerce, tant pour en perfectionner les différentes parties et le rendre plus florissant, que pour prévenir les inconvénients qui peuvent se présenter, réprimer les abus et y faire régner la bonne foi, qui en doit être l'âme. On ne voit pas néanmoins qu'il y eut anciennement des officiers établis particulièrement pour avoir inspection sur tout le commerce intérieur et extérieur d'une nation ; cette inspection générale était réservée uniquement à ceux qui avaient part au gouvernement général de l'état ; il y avait seulement dans chaque ville quelques personnes chargées de la police, et en même-temps de veiller sur le commerce, comme étant un des principaux objets de la police.

Chez les Hébreux, dans chaque quartier de Jérusalem, il y avait deux préfets ou intendants qui, sous l'autorité des premiers magistrats, tenaient la main à l'exécution des lais, au bon ordre et à la discipline publique. Ils avaient l'inspection sur les vivres et sur toutes les autres provisions dont le peuple avait besoin, tant pour sa subsistance que pour son commerce. " Les Hébreux, dit Arianus lib. I. ont des préfets ou intendants des quartiers de leurs villes, qui ont inspection sur tout ce qui s'y passe ; la police du pain, celle des autres vivres et du commerce est aussi de leurs soins ; ils règlent eux-mêmes les petits différends qui s'y présentent, et des autres ils en réfèrent au magistrat ".

La ville d'Athènes avait aussi des officiers appelés , c'est-à-dire, conservateurs des vivres, des marchés et du commerce. Leur emploi était de procurer l'abondance de toutes les choses nécessaires à la vie, d'entretenir la perfection des arts et la bonne foi dans le commerce, tant de la part des vendeurs, que de celle des acheteurs, auxquels la fraude et le mensonge étaient entr'autres défendus sous de très-grosses peines. Ils tenaient aussi la main à l'exécution des lois dans les temps de stérilité ; faisaient ouvrir en ces occasions les magasins, et ne permettaient pas à chaque citoyen de garder en sa maison une plus grande quantité de vivres qu'il n'était nécessaire pour l'entretien de sa famille pendant un an. Platon et Théophraste, en leurs traités de leg. Aristote, Denis d'Halicarnasse, Démosthènes, Hypérides, Plaute, Ulpien, Postel, Polybe et Harpocrate font mention de ces officiers en divers endroits de leurs ouvrages.

Chez les Romains les Préteurs avaient d'abord seuls toute inspection sur le commerce. On institua dans la suite deux Préteurs particuliers pour la police des vivres. Jules César établit aussi deux édiles, qui furent surnommés ceréales, parce que sous l'autorité du Préteur ils veillaient à la police des vivres, dont le pain est le plus nécessaire. Ils prenaient soin de l'achat des blés que l'on faisait venir d'Afrique pour distribuer au peuple, de la voiture de ces blés, de leur dépôt dans les greniers, et de la distribution qui s'en faisait au peuple. Auguste, après avoir réformé le nombre excessif des Préteurs et des édiles, établit au-dessus des Préteurs un magistrat, qui fut appelé praefectus urbis, le préfet de la ville. Il était seul chargé de toute la police et du soin de tout ce qui concernait le bien public et l'utilité commune des citoyens. Il mettait le prix à la viande, faisait les règlements des marchés et de la vente des bestiaux ; il prenait aussi le soin que la ville fût suffisamment pourvue de blé et de toutes les autres provisions nécessaires à la subsistance des citoyens. Il avait l'inspection sur tout le commerce, pour le faciliter, le permettre ou l'interdire ; le droit d'établir des marchés ou de les supprimer pour un temps ou pour toujours, ainsi qu'il jugeait à-propos pour le bien public. Il faisait les règlements pour les poids et les mesures, et punir ceux qui étaient convaincus d'y avoir commis quelque fraude. Les arts libéraux, et en général tous les corps de métier étaient soumis à sa juridiction pour tout ce qui concernait leurs professions.

Quelque temps après, Auguste voulant soulager le préfet de la ville, qui était surchargé de différentes affaires, établit sous lui un préfet particulier, appelé praefectus annonae, c'est-à-dire, préfet des vivres. Celui-ci fut choisi dans l'ordre des chevaliers ; il fut chargé du soin de faire venir du blé et de l'huîle d'Afrique, et de tirer de ces provinces éloignées ou d'ailleurs toutes les autres provisions nécessaires à la subsistance des citoyens, dans les temps et les saisons convenables. Il donnait ses ordres pour faire décharger les grains et les autres vivres sur les ports, pour les faire voiturer à Rome, et serrer les blés dans les greniers publics. C'était lui qui faisait distribuer ces grains aux uns à juste prix, aux autres gratuitement, selon les temps et les ordres qui lui étaient donnés par le premier magistrat de police. Il eut aussi l'inspection de la vente du pain, du vin, de la viande, du poisson et des autres vivres ; il fut même dans la suite mis au nombre des magistrats : sa juridiction s'étendait sur tous ceux qui se mêlaient du commerce des vivres.

En France, pendant très-longtemps les seules personnes qui eussent inspection sur le commerce, étaient les ministres du roi, les commissaires du roi départis dans les provinces ; et pour la manutention, les officiers de police, les prévôts des marchands et échevins, chacun en ce qui était de leur district.

Il fut néanmoins créé par édit du mois d'Octobre 1626, un office de grand-maître, chef et surintendant général de la navigation et commerce de France : le cardinal de Richelieu en fut pourvu. Après sa mort, arrivée en 1642, cette charge fut donnée à Armand de Mailli, marquis de Brezé, et en 1650 à César, duc de Vendôme ; elle fut supprimée par l'édit du 14 Novembre 1661, et depuis ce temps il n'y a point eu de surintendant du commerce.

Il n'y avait point eu de conseil particulier pour le commerce jusqu'en 1700, que Louis XIV. pensant que rien n'était plus propre à faire fleurir et étendre le commerce, que de former un conseil qui fût uniquement attentif à connaître et à procurer tout ce qui pourrait être de plus avantageux au commerce et aux manufactures du royaume, par un édit du 29 Juin 1700 il ordonna qu'il serait tenu à l'avenir un conseil de commerce une fois au moins dans chaque semaine. Il composa ce conseil de deux conseillers au conseil royal des finances, dont l'un était le sieur Chamillart, contrôleur général, un secrétaire d'état et un conseiller d'état, un maître des requêtes et douze des principaux négociants du royaume, ou qui auraient fait longtemps le commerce.

Au mois de Mai 1708 le roi donna un édit par lequel, après avoir rappelé les motifs qui l'avaient engagé à établir un conseil de commerce, et l'avantage que l'état avait reçu et recevait tous les jours de cet établissement, il dit que pour le rendre solide et durable, qu'il avait cru ne pouvoir rien faire de plus convenable que de créer en titre six commissions, dont les premiers choisis entre les maîtres des requêtes de l'hôtel du roi, et engagés par le titre et les fonctions qui y seraient attachées, à s'appliquer aux affaires de commerce, pussent aider à sa majesté à procurer à ses sujets tout le bien qui devait leur en revenir.

Le roi créa donc par cet édit, et érigea en titre six commissions d'intendants du commerce pour demeurer unies à six offices de maîtres des requêtes, à l'instar et de la même manière que l'étaient ci-devant les huit commissions de présidents au grand conseil, et pour être exercées par six des maîtres des requêtes qui seraient choisis par sa majesté sous le titre de conseillers en ses conseils, maîtres des requêtes ordinaires de son hôtel, intendants du commerce.

Le roi déclare par le même édit qu'il entend que ceux qui seront pourvus de ces commissions aient entrée et séance dans le conseil de commerce établi par le règlement du conseil, du 29 Juin 1700, pour y faire le rapport des mémoires, demandes, propositions et affaires qui leur seront renvoyées chacun dans le département qui leur sera distribué ; rendre compte des délibérations qui y auront été prises au contrôleur général des finances, ou au secrétaire d'état ayant le département de la marine, suivant la nature des affaires, lorsque leurs emplois ne leur auront pas permis d'y assister, pour y être pourvu par sa majesté ainsi qu'il appartiendra.

L'édit porte qu'ils seront reçus et installés dans ces fonctions après une simple prestation de serment entre les mains du chancelier, sans qu'ils soient obligés de se faire recevoir aux requêtes de l'hôtel ni ailleurs.

Enfin, le roi permet à ceux qui seront agréés, après avoir exercé les charges de maîtres des requêtes pendant vingt années, et lesdites commissions pendant dix années, de les desunir, et de garder la commission d'intendant du commerce, pour en continuer les fonctions et jouir des gages, appointements et droits y attribués.

Ces commissions d'intendants du commerce furent supprimées par le Roi à présent régnant lors de son avenement à la couronne, par rapport aux changements qui furent faits alors dans les différentes parties du gouvernement.

Mais par un édit du mois de Juin 1724, les intendants du commerce ont été rétablis au nombre de quatre. Le Roi déclare que les raisons pour lesquelles ils avaient été supprimés ne subsistant plus, et le bureau du commerce ayant été rétabli à l'instar de celui qui avait été formé précédemment, il ne restait plus, pour mettre la dernière main à cet ouvrage, que de rétablir les intendants du commerce, et à les ériger en titre d'office, au nombre de quatre seulement, ce nombre ayant paru nécessaire et suffisant pour remplir les fonctions qui leur sont attribuées.

Le Roi a donc rétabli par cet édit ces quatre offices sous le titre de conseillers en ses conseils, intendants du commerce, pour par les pourvus de ces offices, les exercer aux mêmes fonctions qui étaient attribuées aux intendants du commerce créés par l'édit du mois de Mai 1708, dans lesquelles fonctions il est dit qu'ils seront reçus et installés après la prestation de serment par eux fait en la forme prescrite par l'édit de 1708. Le Roi veut que ces quatre offices soient du corps de son conseil, qu'ils jouissent des mêmes honneurs, prérogatives, privilèges, exemptions, droit de committimus au grand sceau, et franc-salé, dont jouissent les maîtres des requêtes de son hôtel. Il ordonne que les pourvus de ces offices posséderont leurs charges à titre de survivance, ainsi que les autres officiers de son conseil et de ses cours, qui ont été exceptés du rétablissement de l'annuel par la déclaration du 9 Aout 1722 ; lequel droit de survivance, ensemble celui du marc d'or dans les cas où ils sont dû., sera réglé pour lesdits offices sur le même pied qu'il est réglé présentement pour les maîtres des requêtes ordinaires de l'hôtel. Les premiers pourvus de ces offices furent néanmoins dispensés du droit de survivance pour cette première fois seulement. Enfin, pour être plus en état de choisir les sujets que sa majesté trouvera les plus propres à remplir ces places, il est dit qu'elles pourront être possédées et exercées sans incompatibilité avec tous autres offices de magistrature. Cet édit fut registré au parlement le 16 des mêmes mois et an.

Les intendants du commerce ont chacun dans leur département un certain nombre de provinces et généralités ; ils ont en outre chacun l'inspection sur quelques objets particuliers du commerce dans toute l'étendue du royaume. Présentement M. de Quincy a les manufactures de bas et autres ouvrages de bonnetterie. M. de Montaran a les manufactures de toiles et toileries. M. Potier, les papeteries et les tanneries. M. Decotte, les manufactures de soie : mais ces départements sont sujets à changer ainsi qu'il plait au Roi.

L'intendance générale du commerce intérieur du royaume, et extérieur par terre appartient toujours au contrôleur général des finances.

Le secrétaire d'état qui a le département de la marine, a l'intendance générale du commerce extérieur et maritime, et en conséquence il prend connaissance de tout ce qui concerne les îles françaises de l'Amérique, et en général de tout ce qui regarde l'Amérique ; de la pêche de la morue, du commerce de la méditerranée ; ce qui comprend les échelles du levant et tous les états du grand-seigneur, la Barbarie, les côtes d'Italie et les côtes d'Espagne dans la méditerranée. Il a pareillement inspection sur le commerce avec la Hollande, l'Angleterre, l'Ecosse et l'Irlande, la Suéde, le Danemarck, Dantzik, la Russie, et autres pays du nord dans la mer baltique. Il a aussi l'intendance de la pêche du hareng, de celle de la morue et de celle de la baleine. (A)

INTENDANS DES FINANCES, (Finance) ce sont eux qui en ont la direction, chacun dans son département. Ils ont été établis par François I. Leurs fonctions se faisaient auparavant par les trésoriers de France. Ils travaillent sous le contrôleur général.

INTENDANS DES BATIMENS, (Histoire moderne) est l'ordonnateur général des bâtiments du roi, des arts et manufactures.

INTENDANS ET CONTROLEURS DE L'ARGENTERIE ET DES REVENUS, (Histoire moderne) ces officiers sont constitués pour toutes les dépenses de la chambre, de la garde-robe, et autres employés sur les états de l'argenterie et des revenus.

Il y a aussi un intendant et contrôleur des meubles de la couronne, un intendant des devises des édifices royaux.

INTENDANT dans une armée, c'est ordinairement en France un maître des requêtes qui remplit l'intendance de la province voisine du lieu où se fait la guerre, que le roi nomme pour veiller à l'observation de la police de l'armée ; c'est-à-dire, au payement des troupes, à la fourniture des vivres et des fourrages, au règlement des contributions, au service des hôpitaux, à l'exécution des ordonnances du roi, etc.

L'intendant doit avoir le secret de la cour comme le général. Il a sous lui un nombre de commissaires des guerres qu'il emploie aux détails particuliers. Il arrête toutes les dépenses ordinaires et extraordinaires de l'armée. Il a son logement de droit au quartier général. L'infanterie lui fournit une garde de dix hommes, commandés par un sergent. Lorsqu'un intendant a toute la capacité que demande son emploi, il est d'un grand secours au général, qui se trouve débarrassé d'une infinité de soins qui ne peuvent que le distraire des projets qu'il peut former contre l'ennemi.

INTENDANT DE MARINE, (Histoire moderne) c'est un officier instruit de tout ce qui concerne la Marine, qui réside dans un port, et qui a soin de faire exécuter les règlements concernant la Marine, pourvoir à la fourniture des magasins, veiller aux armements et desarmements des vaisseaux, faire la revue des équipages, etc. l'ordonnance de la Marine de 1689, liv. XII. tit. j. règle les fonctions de l'intendant.

INTENDANT DES ARMEES NAVALES, (Histoire moderne) officier commis pour la justice, police et finance d'une armée navale. Ses fonctions sont réglées par l'ordonnance de 1689, lib. I. tit. IVe

INTENDANT DE LA FONTE, (Monnaie) officier chargé de l'alliage des matières à monnoyer, et de voir à ce qu'elles ne soient point altérées, après qu'on les a livrées au fondeur. Voyez MONNOIE et COIN.

INTENDANT DE MAISON, (Histoire moderne) c'est un officier qui a soin, dans la maison d'un homme riche et puissant, de son revenu, qui suit les procès, qui fait les baux, en un mot qui veille à toutes les affaires.