S. f. (Histoire ancienne) ancienne monnaie d'argent qui avait cours parmi les Grecs. Voyez MONNOIE.

Plusieurs auteurs croient que la dragme des Grecs était la même chose que le denarius ou denier des Romains, qui valait quatre sesterces. Voyez DENIER.

Budée est de ce sentiment dans son livre de asse, et il s'appuie sur l'autorité de Pline, Strabon et Valere Maxime, qui tous font le mot dragme synonyme à denarius.

Mais cela ne prouve pas absolument que ces deux pièces de monnaie fussent précisément de la même valeur ; car comme ces auteurs ne traitaient pas expressément des monnaies, il a pu se faire qu'ils substituassent le nom d'une pièce à celui d'une autre, lorsque la valeur de ces pièces n'était pas fort différente. Or c'est précisément ce qui arrivait ; car comme il y avait 96 dragmes attiques à la livre, et qu'on comptait 96 deniers à la livre romaine, on prenait indifféremment la dragme pour le denier, et le denier pour la dragme. Il y avait pourtant une différence assez considérable entre ces deux monnaies, puisque la dragme pesait neuf grains plus que le denier ; mais on les confondait, puisqu'on recevait l'une pour l'autre dans le commerce ; et c'est apparemment en ce sens que Scaliger, dans la dissertation de re nummariâ, ne dit point absolument que le denier et la dragme fussent la même chose, mais il rapporte un passage grec d'une ancienne loi, ch. xxvj. mandati, où il est dit que la dragme était composée de six oboles ; et il en conclut qu'au moins du temps de Sevère, le denier et la dragme étaient la même chose, et voici en quel sens la dragme et le denier étaient à-peu-près égaux dans le commerce. Cent dragmes étaient égales pour le poids à cent douze deniers, et le huitième de cent douze est quatorze ; ainsi on donnait à la monnaie quatre-vingt-dix-huit deniers pour cent dragmes ; et la dragme et le denier étant ainsi à-peu-près de même valeur, se recevaient indifféremment dans le commerce des denrées, dans le payement des ouvriers, et dans toutes les affaires journalières et de peu de conséquence. Il fallait en effet que cette différence fût bien légère, puisque Fannius qui avait étudié à fond, et évalué avec la dernière précision les monnaies grecques et latines, confond la dragme attique avec le denier romain, comme il parait par ces vers :

Accipe praeterea parvo quam nomine Graii.

vocitant, nostrique minam dixêre priores.

Centum hae sunt drachmae ; quod si decerpseris illis

Quatuor, efficies hanc nostram denique libram.

Quatre-vingt-seize dragmes attiques faisaient la livre romaine ; or il est démontré que la livre romaine était de quatre-vingt-seize deniers, et par conséquent la dragme attique et le denier romain étaient donc précisément la même chose.

Cette conséquence nous conduira naturellement à évaluer la dragme ancienne avec nos monnaies. Le denier romain, comme nous l'avons dit, valait dix sous de France : la dragme attique ne valait donc que dix sous. Six mille dragmes attiques valaient donc trois mille livres : or il fallait six mille dragmes pour faire le talent attique ; et il est constant par le témoignage des auteurs qui ont le plus approfondi cette matière, que le talent attique valait trois mille livres de notre monnaie.

Que la dragme après cela contienne sept onces, ou qu'elle ne soit que la huitième partie de l'once, comme M. Chambers l'insinue en rapportant des noms d'auteurs pour et contre ; cela est très-propre à ne rien apprendre. On a dit, par ex. que la dragme contenait sept onces, au lieu de dire que sept dragmes du poids requis, pesaient une once moins douze grains. Les médecins qui ont retenu cet ancien poids, comptent une dragme pour la huitième partie d'une once ; ce qui réduit la dragme poids à la même valeur que notre gros, qui fait la huitième partie de l'once, avec cette différence qu'on divise diversement l'once. Elle est dans plusieurs endroits, comme à Paris, de soixante-douze grains ; mais en Allemagne, en Angleterre, et dans les provinces méridionales de la France, elle ne se divise qu'en soixante. C'est à quoi il faut faire une attention particulière, quand on lit les pharmacopées anglaises et allemandes. On dit plus communément à Paris gros que dragme. Voyez GROS.

La dragme était aussi une ancienne monnaie chez les Juifs, qui portait d'un côté une harpe, et de l'autre une grappe de raisin : il en est fait mention dans l'Evangile. Cette pièce valait un demi-sicle, et la didragme valait le double d'une dragme, ou un sicle. Voyez SICLE. (G)