(Géographie moderne) en latin Pisaurum, ville d'Italie, capitale d'une seigneurie de même nom, et la plus grande du duché d'Urbin. Elle est riante, fertile, produisant des olives, des figures exquises, et toutes les commodités de la vie. Son évêché est suffragant d'Urbin. Sa position est agréable, sur une hauteur, à l'embouchure de la Foglia, dans la mer Adriatique, au-dessous de plusieurs coteaux, à 7 lieues N. E. d'Urbin, 50. N. E. de Rome. Long. 30. 35. latit. 43. 56.

Cette ville que l'on croit colonie romaine, fut détruite par Totila, et rétablie quelque temps après par Belisaire, plus belle qu'elle n'était auparavant. On peut lire sur les antiquités de Pesaro l'ouvrage intitulé Marmora Pisaurensia, imprimé dans cette ville en 1738, in-folio.

Jean François Albani naquit à Pesaro, devint cardinal ; et étant âgé de 51 ans, il succéda en 1700 à Innocent XI. Il prit alors le nom de Clement XI. et fut sacré évêque après son exaltation, ce qu'on n'avait pas Ve depuis Clément VIII.

Dans la guerre entre Louis XIV. et l'empereur, il se détermina suivant les événements de la fortune. L'empereur, dit le poète historien du siècle de Louis XIV, força Clément XI. en 1708 à reconnaître l'archiduc pour roi d'Espagne. Ce pape, dont on disait qu'il ressemblait à S. Pierre, parce qu'il affirmait, niait, se repentait et pleurait, avait toujours reconnu Philippe V. à l'exemple de son prédécesseur ; et il était attaché à la maison de Bourbon. L'empereur l'en punit, en déclarant dépendants de l'empire beaucoup de fiefs qui relevaient jusqu'alors des papes, et surtout Parme et Plaisance, en ravageant quelques terres ecclésiastiques, en se saisissant de la ville de Comachio.

Autrefois un pape eut excommunié tout empereur qui lui aurait disputé le droit le plus léger, et cette excommunication eut fait tomber l'empereur du trône. Mais la puissance des clés étant réduite au point où elle doit l'être, Clément XI. animé par la France, avait osé un moment se servir de la puissance du glaive. Il arma, et s'en repentit bientôt. Il vit que les Romains, sous un gouvernement tout sacerdotal, n'étaient pas faits pour manier l'épée. Il désarma, il laissa Comachio en dépôt à l'empereur ; il consentit à écrire à l'archiduc, à notre très-cher fils roi catholique en Espagne.

Une flotte anglaise dans la Méditerranée et les troupes allemandes sur ses terres le forcèrent bientôt d'écrire à notre très-cher fils roi des Espagnes. Ce suffrage du pape, qui n'était rien dans l'empire d'Allemagne, pouvait quelque chose sur le peuple espagnol, à qui on avait fait accroire que l'archiduc était indigne de régner, parce qu'il était protégé par des hérétiques qui s'étaient emparés de Gibraltar.

Le même Clément XI. avait admiré le livre du P. Quesnel, prêtre de l'Oratoire, mais il le condamna sans peine, quand Louis XIV. l'en sollicita, donna la bulle Vineam domini, et la constitution Unigenitus. Les censures suivirent ses éloges, et l'Angleterre n'avait point armé de flotte dans la Méditerranée pour soutenir les Jansénistes.

Au reste, ce pape aimait les savants, et l'était lui-même, quoique la France ne regarde point ses œuvres comme un trésor de grand prix. Il mourut le 19 Mars 1721, à 72 ans, et eut pour successeur Innocent XIII. le huitième pape de la famille de Conti.

Pesaro est aussi la patrie de quelques gens de lettres, et entr'autres de Mainus (Jason), un des premiers jurisconsultes de son siècle. Après avoir perdu dans sa jeunesse son bien et ses livres au jeu, il prit le goût de l'étude, et y fit de si grands progrès, qu'il avait à la-fais jusqu'à deux mille disciples. L'empereur le combla de présents ; mais on peut comparer l'accueil que Louis XII lui fit en Italie, aux honneurs rendus par Pompée au philosophe Possidonius. Il étudiait en plein jour à la chandelle, parce qu'il lui fallait pour prévenir les distractions dans ses travaux littéraires, dérober à ses yeux la diversité des objets que le grand jour présente ; et ce n'est pas le seul homme de lettres qui, pour composer des ouvrages, ait été obligé de se concentrer en lui-même. On estime ses commentaires sur les pandectes et sur le code de Justinien. Il devint aveugle d'assez bonne heure, et imbécile sur la fin de sa vie qu'il termina en 1519, âgé de 84 ans.

Je ne dois pas oublier de nommer Collenuccio (Pandolfo) parmi les gens de lettres, natif de Pesaro. Il est connu par une histoire de Naples, une apologie de Pline, un traité latin sur la vipere, et plus encore par sa mort tragique en 1507. Jean Sforce, tyran de Pesaro, ou, selon d'autres, César Borgia, duc de Valentinais, le fit étrangler en prison. Ange Politien, Lilio Giraldi, Pierius Valerianus, et autres écrivains ont consacré des éloges funèbres à sa mémoire. (D.J.)