ou PONT-OYSE, (Géographie moderne) c'est-à-dire pont sur la rivière d'Oyse, en latin Brivisara, selon l'Itinéraire d'Antonin, et Brivaisara, selon la Table de Peutinger ; ville de France, capitale du Vexin français, sur la rivière d'Oyse, qu'on passe sur un pont à 20 lieues au sud-est de Rouen, et à 7 au nord-ouest de Paris. Il y a un bailliage et une élection, une collégiale, une abbaye d'hommes de l'ordre de saint Benait, plusieurs paroisses et communautés : l'archevêque de Rouen y tient un grand-vicaire.

Cette ville fut prise d'assaut sur les Anglais en 1442. Les états généraux y furent assemblés en 1561. Le parlement de Paris y a été transféré trois fais, savoir en 1652, en 1720, et en 1753 ; mais de telles translations ne peuvent jamais être de longue durée, parce que les affaires publiques en souffriraient un trop grand dommage. Long. 19d. 45'. lat. 49d. 3'.

Pontaise était autrefois appelé Briva-Isarae ; on sait que briva, breva ou briga dans la langue des Celtes signifiait un pont ; ainsi Briva-Isaurae, signifie pont sur Oyse. Les écrivains du moyen âge l'ont nommée Pons-Isarae, Pontisara, Pontisera, Pons-Juisae, Pons-Oesiae, Pontesia, etc. car le nom Isara, l'Oyse, fut changé en celui de Oesia, selon le témoignage de Vibius Sequester.

Cette rivière fut aussi appelée Inisa, comme nous l'apprenons de l'auteur de la vie de saint Ouen. Cet anonyme vivait au commencement du huitième siècle, et il assure que Thierry, roi de France, avec la reine et tous les grands, allèrent conduire le corps de saint Ouen, mort à Clichy, près de Paris, jusqu'au pont de l'Oyse, usque ad pontem Inisae. Il ajoute que les prélats et le clergé ayant pris le corps du saint, le portèrent à la ville du Vexin, ad oppidum Vulgassinum, qui est Pontaise, et de-là le convoi alla à Rouen, où le saint fut enterré.

La voie romaine, de Rouen à Paris, passait par Pontaise ; l'ancienne chaussée a même subsisté jusqu'à ces derniers temps, entre Magny et Pontaise ; on la nomme encore la chaussée de César. On attribue assez ordinairement à Jules-César plusieurs monuments anciens de la Gaule, quoiqu'il n'ait aucune part à leur construction. Cette chaussée faisait autrefois la séparation des anciennes châtellenies de Meulan, et de Chaumont-en-Vexin.

Philippe, duc de Bourgogne, quatrième fils de Jean de Valais roi de France, naquit à Pontaise le 15 de Janvier 1341. Il fut blessé et fait prisonnier à la bataille de Poitiers l'an 1356, après avoir donné des marques d'un grand courage en combattant auprès de son père. On sait combien sa rivalité avec le duc d'Orléans pour le gouvernement de l'état fut funeste au royaume. Il mourut à Hal le 26 d'Avril 1404, et laissa tant de dettes que sa veuve se crut obligée de frustrer les créanciers. " Ses meubles, dit M. le Laboureur, liv. XXIV. ch. IIe ne suffirent pas pour les payer ; et c'est ce qui fit faire à sa veuve ce que les plus chetives femmes ne font pas sans regret, non plus que sans injure, c'est-à-dire de se servir du privilège de la renonciation, pour se délivrer de toute demande ". Elle observa les cérémonies ordinaires dans cette renonciation, " car elle desceignit sa ceinture avec ses clés et sa bourse sur le cercueil de son mari ". Pontus Heuterus nous apprend que cet acte arrêtait les intérêts, et ôtait tout droit aux créanciers sur les meubles.

Cependant Philippe de Bourgogne n'avait été adonné ni au jeu, ni au vin, ni à l'amour ; on ne trouve point qu'il ait eu ni de maîtresses, ni de bâtards ; mais il fit des dépenses folles pour entretenir des troupes, et pour fortifier des villes ; il suça le peuple à ce métier, et ruina ses créanciers pour enrichir d'autres personnes, sans justice et sans raison.

D'un autre côté, sa femme impérieuse lui rendit la vie dure et amère. Tandis qu'il ne trouvait presque rien dans le royaume qu'il ne soumit à sa loi, non pas même le propre frère de son souverain, il se vit obligé de plier sous l'empire d'une femme orgueilleuse de son naturel, et par sa fécondité, et par son beau patrimoine. Il vérifia ce mot des anciens : " recevoir un bienfait, c'est perdre sa liberté ".

Cette femme, après la mort de son mari, tint sa petite cour à part, dit Mézerai, " mêlant bizarrement les voluptés et la dévotion, l'amour des lettres et celui de la vanité, la charité chrétienne et l'injustice : car comme elle se piquait d'être vue souvent à l'église, d'entretenir des savants, et de donner la dixme de ses revenus aux moines ; elle faisait gloire d'avoir toujours quelque galanterie, d'inventer de nouveaux divertissements, et de ne payer jamais ses dettes ".

Il faut à présent nommer quelques hommes de lettres nés à Pontaise. Chevillier (André), bibliothécaire de Sorbonne, est du nombre : il était savant et charitable. Il mourut en Sorbonne en 1700, à soixante-quatre ans. On a de lui une Dissertation latine sur le concîle de Chalcédoine, l'origine de l'Imprimerie de Paris in-4°. et quelques autres ouvrages peu importants.

Deslyons (Jean), docteur de Sorbonne comme Chevillier, fut doyen et théologal de Senlis, où il mourut le 26 Mars 1700, à quatre-vingt-cinq ans. Il est auteur de quelques ouvrages singuliers, et entre autres d'un intitulé, le paganisme du roi-bait. Il mit au jour d'autres ouvrages polémiques, qui péchent plus par des idées bizarres que par l'érudition. Enfin il alla jusqu'à se persuader que le monde allait bientôt finir ; on lui aurait passé de croire que le monde allait de mal en pis.

Duval (André), autre docteur de Sorbonne, mais qui en abandonna les principes, en soutenant les opinions des Ultramontains par la théologie qu'il publia, et par son traité intitulé, de supremâ romani pontificis in Ecclésiastesiam potestate. Il mourut doyen de la faculté de Théologie de Paris en 1638, à soixante-quatorze ans.

Flamel (Nicolas), n'était point docteur de Sorbonne, mais si habîle à acquérir du bien, qu'il est resté pour constant parmi quelques alchimistes, qu'il avait trouvé la pierre philosophale, comme il le feignit lui-même, quand il craignit d'être recherché avec Jean de Montaigu, qui eut la tête tranchée en 1409. Ils s'enrichirent vraisemblablement l'un et l'autre dans les finances, et dans l'art de profiter des confiscations des Juifs. Pour racheter ses péchés il fit diverses fondations, comme à sainte Génevieve des Ardents, à saint Jacques de la Boucherie où l'on voit sa statue de demi-relief, et au cimetière des Innocens, où l'on dit qu'il fut enterré avec sa femme nommée Perronelle.

Vaillant (Sébastien), très-habîle botaniste, naquit près de Pontaise le 26 Mai 1660, et mourut le 26 Mai 1722. C'est M. Boerhaave qui a acheté de ses héritiers le Botanicum parisiense de Vaillant, et qui l'a fait imprimer à Ley de en 1727, in-fol.

Villon (Français), ainsi qu'il se nomme lui-même dans ses poésies, et non pas Corbueil, comme l'ont écrit vingt auteurs depuis Fauchet, naquit selon plusieurs auteurs en 1431, à Auvers, près de Pontaise, et selon d'autres plus probablement, à Paris.

Quoi qu'il en sait, Villon avait beaucoup d'esprit et un génie propre à la poésie ; mais se livrant sans mesure à son tempérament voluptueux, il se jeta impétueusement dans la débauche, et par une suite presque inévitable de la débauche, dans la friponnerie. Il en fit de si grandes qu'il fut condamné à être pendu par sentence du châtelet ; mais le parlement de Paris commua la peine de mort en celle de simple bannissement. Il est vraisemblable que son crime était quelque vol d'église, de sacristie, pour avoir dérobé les ferrements de la messe, et les avoir mussez soubs le manche de la paroece, ainsi que s'exprime plaisamment le satyrique Rabelais. Villon mourut vers la fin du quinzième siècle ou le commencement du seizième, soit à Paris, soit à Saint-Maixent en Poitou.

On a donné plusieurs éditions de ses Oeuvres ; la première est à Paris, chez Antoine Verard, sans date et en caractère gothique ; la seconde est à Paris chez Guillaume Nyverd, sans date également, et pareillement en caractère gothique ; ensuite chez Gaillot du Pré en 1532 et 1533, in-16. Enfin les deux meilleures éditions sont celles de Paris en 1723, chez Coustelier, in-8°. et à la Haye plus complete ment, en 1742, in-8°.

Les ouvrages de Villon consistent dans ses deux testaments, ses requêtes, des rondeaux, des ballades, etc. Le style simple, léger, naïf et badin en fait le caractère. Despréaux dit en parlant de ce poète :

Villon sut le premier, dans ces siècles grossiers,

Débrouiller l'art confus de nos vieux romanciers.

(D.J.)