S. m. (Histoire ancienne et moderne) On donnait anciennement ce nom à presque toutes les voitures d'usage, soit à la ville, soit à la campagne, soit dans les batailles, soit dans les triomphes, etc. nous l'avons restreint à celles qui sont trainées avec magnificence dans les carrousels, les courses de prix, et autres fêtes publiques. Voyez CARROUSEL.

Les chars anciens étaient à deux ou quatre roues ; il y en a de ces deux sortes dans les bas-reliefs, et médailles, les arcs de triomphe, et autres monuments qui nous restent de l'antiquité ; on y voit attelés, tantôt des chevaux, tantôt des lions, des tigres, des éléphans : mais la diversité de ces attelages ne signifie rien par elle-même ; il faut, ainsi que le père Jobert jésuite l'a remarqué dans son introduction à la science des médailles, des inscriptions ou d'autres caractères concomitants des précédents, pour désigner ou le triomphe, ou l'apothéose, etc.

On attribue l'invention des chars, les uns à Erichtonius roi d'Athènes, que ses jambes torses empêchaient d'aller à pied ; d'autres à Tlepoleme ou à Trochilus : quelques-uns en font honneur à Pallas ; mais il parait par le ch. xlj. vers. 40. de la Genèse que l'usage des chars était antérieur à tous ces personnages.

Des étymologistes dérivent le mot currus ou carrus, de carr, terme celtique dont il est fait mention dans les commentaires de César. Cette date est ancienne. Le mot carr se dit encore aujourd'hui dans le même sens et avec la même prononciation, dans la langue wallonne.

Les principaux chars des anciens sont les chars pour la course, chez les Grecs, currus chez les Latins ; les chars couverts, currus arcuati ; les chars armés de faux, currus falcati ; les chars de triomphe, currus triumphales.

Les chars de course, , servaient aussi dans d'autres fêtes publiques : c'était une espèce de coquille montée sur deux roues, plus haute par-devant que par-derrière, et ornée de peintures et de sculptures : on était assis dans cette voiture : la différence spécifique qui les distinguait entr'elles, se tirait uniquement de la diversité des attelages ; et ces attelages, ou de deux chevaux ou de quatre, ou de jeunes chevaux, ou de chevaux faits, ou de poulains, ou de mules, formaient différentes sortes de courses, différentes sortes de combats.

Un char attelé de deux chevaux, s'appelait en grec , en latin bigae. L'on prétend que l'un de ces chevaux était blanc, l'autre noir, dans les biges des pompes funèbres. La course des chars à deux chevaux d'un âge fait, fut introduite aux jeux olympiques en la xciij. olympiade ; et par chevaux d'un âge fait, on entendait des chevaux de cinq ans. Il n'est point question chez les Grecs de chars à trois chevaux ; les Latins en ont eu qu'ils appelaient trigae ; mais il ne parait pas qu'ils fussent d'usage dans les fêtes ; ou si l'on s'en servait dans les pompes, c'était seulement dans les pompes funèbres ; car on imagina, dit-on, d'atteler trois chevaux de front, parce qu'il y avait des hommes de trois âges qui descendaient aux enfers. Les chars attelés de quatre chevaux, se nommaient en grec , de , quatre, et de , cheval, et en latin quadrigae, qu'on a rendu par quadriges, terme autorisé seulement en style de lapidaire, et dans la science numismatique. La course à quatre chevaux était la plus magnifique et la plus noble de toutes : elle fut instituée ou renouvellée dans les jeux olympiques, dès la xxv. olympiade ; ainsi elle précéda la course à deux chevaux de plus de 278 ans. Le timon des chars était fort court, et l'on y attelait les chevaux de front, à la différence de nos attelages, où quatre et six chevaux rangés sur deux lignes se gênent et s'embarrassent, au lieu que de front ils déployaient leurs mouvements avec beaucoup plus d'ardeur et de liberté. Les deux du milieu, , jugales, étaient les moins vifs ; les deux autres, , funales ou lorarii, les plus vigoureux et les mieux dressés, étaient l'un à droite et l'autre à gauche ; comme il fallait prendre à gauche pour aller gagner la borne, c'était le cheval qui tirait de ce côté qui dirigeait les autres. Lorsqu'il fallait tourner autour de cette borne fatale où tant de chars se brisaient, le cocher animant son cheval de la droite, lui lâchait les renes et les raccourcissait à celui de la gauche, qui devenait par ce moyen le centre du mouvement des trois autres, et doublait la borne de si près, que le moyeu de la roue la rasait. Avant que de partir, tous les chars s'assemblaient à la barrière. On tirait au sort les places et les rangs ; on se plaçait ; et le signal donné, tous partaient. Voyez dans Homère les courses célébrées aux funérailles de Patrocle. C'était à qui devancerait son concurrent ; plusieurs étaient renversés en chemin : celui qui ayant doublé le premier la borne, atteignait le premier la barrière, avait le premier prix. Il y avait aussi quelquefois des prix pour le second et pour le troisième. Les princes et les rois même, étaient jaloux de cette distinction. Le race des chevaux qui avaient vaincu souvent dans ces combats d'honneur, était illustrée : leur généalogie était connue ; on n'en faisait des présents que dans les occasions les plus importantes ; c'est des richesses qu'Agamemnon fait proposer à Achille pour apaiser sa colere, une des plus précieuses. A Rome, dans le grand cirque, on donnait en un jour le spectacle de cent quadriges, et l'on en faisait partir de la barrière jusqu'à vingt-cinq à la fais. Le départ était appelé en grec, , en latin emissio, missus. On ignore combien il s'assemblait de quadriges à la barrière d'Olympie ; il est seulement certain qu'on en lâchait dans la lice ou dans l'hippodrome plusieurs à la fais. Mém. de l'Académ. des Inscriptions, tomes VIII. et IX. Voyez HIPPODROME, JEUX OLYMPIQUES, CIRQUE, COURSE. On prétend que les attelages de quatre chevaux de front se faisaient en l'honneur du soleil, et marquaient les quatre saisons de l'année. Les Latins avaient des sefiges ou chars à six chevaux de front ; on en voit un au faite du grand arc de Sévère, Il y a dans Gruter une inscription de Dioclès, où il est parlé de septiges. Néron attela quelquefois au même char jusqu'à sept, et même jusqu'à dix chevaux. Ceux qui conduisaient les chars s'appelaient en général agitateurs, agitatores : si c'était une bige, bigarrii ; un quadrige, quadrigarii : on ne rencontre point le nom de trigarii, ce qui prouve que les triges n'étaient qu'emblématiques, ou du moins qu'il n'y avait point de trige pour la course.

Le char couvert ne différait des autres qu'en ce qu'il avait un dome en ceintre : il était à l'usage des flamen, prêtres romains. Voyez FLAMEN.

Le char armé de faulx était armé ainsi que son nom le désigne : des chevaux vigoureux le trainaient ; il était destiné à percer les bataillons, et à trancher tout ce qui se présentait à sa rencontre. Les uns en attribuent l'invention aux Macédoniens, d'autres à Cyrus ; mais l'origine en est plus ancienne, et il parait que Ninus en avait fait courir de pareils contre les Bactriens, et les Chananéens contre les Israélites. Ces chars n'avaient que deux grandes roues, auxquelles les faulx étaient appliquées. Cyrus les perfectionna seulement en fortifiant les roues, et allongeant les essieux, à l'extrémité desquels il adapta encore d'autres faulx de trois pieds de long qui coupaient horizontalement, tandis que d'autres tranchant verticalement, mettaient en pièces tout ce qu'elles ramassaient à terre. Dans la suite on ajouta à l'extrémité du timon deux longues pointes, et l'on garnit le derrière du char de couteaux qui empêchaient qu'on n'y montât. Cette machine terrible en apparence, devenait inutîle lorsqu'on tuait un des chevaux, ou qu'on parvenait à en saisir la bride. Plutarque dit qu'à la bataille de Cheronée sous Sylla, les Romains en firent si peu de cas, qu'après avoir dispersé ou renversé ceux qui se présentèrent, ils se mirent à crier, comme ils avaient coutume dans les jeux du cirque, qu'on en fit paraitre d'autres.

L'usage des chars dans la guerre est très-ancien : les guerriers, avant l'usage de la cavalerie, étaient tous montés sur des chars : ils y étaient deux ; l'un chargé de conduire les chevaux, l'autre de combattre. C'est ainsi qu'on voit presque tous les héros d'Homère ; ils mettent souvent pied à terre, et Diomède ne combat guère sur son char.

Le char de triomphe était attelé de quatre chevaux. On prétend que Romulus entra dans Rome sur un pareil char ; d'autres n'en font remonter l'origine qu'à Tarquin le vieux, et même à Valérius Publicola. On lit dans Plutarque que Camille étant entré triomphant dans Rome sur un char trainé par quatre chevaux blancs, cette magnificence fut regardée comme une innovation blâmable. Le char de triomphe était rond, et n'avait que deux roues ; le triomphateur s'y tenait debout, et gouvernait lui-même les chevaux : il n'était que doré sous les consuls ; on en fit d'or et d'ivoire sous les empereurs. On lui donnait un air martial en l'arrosant de sang. On y attela quelquefois des éléphans et des lions. Quand le triomphateur montait, le cri était : Dii, quorum nutu et imperio nata et aucta est res romana, eamdem placati propitiique servate ! Voyez TRIOMPHE.

Nos chars de triomphe sont décorés de peintures, de sculptures, et de pavillons de différentes couleurs : ils ont lieu dans quelques villes du royaume : à Lille en Flandre, dans les processions publiques où l'on porte le saint Sacrement, on fait marcher à la tête, des chars sur lesquels on a placé de jeunes filles : ces chars sont précédés du fou de la ville, qui a le titre de fou, et la fonction de faire mille extravagances, par charge. Cette cérémonie superstitieuse doit être regardée avec plus d'indulgence que de sévérité : ce n'est point une dérision ; les habitants de Lille sont de très-bons chrétiens.

Les payens avaient aussi des processions et des chars de triomphe pour certaines occasions. Il est fait mention dans la pompe de Ptolemée Philadelphe, d'un char à quatre roues de quatorze coudées de long sur huit de large ; il était tiré par cent quatre-vingt hommes, il portait un Bacchus haut de dix coudées, environné de prêtres, de prêtresses, et de tout l'attirail des fêtes de Bacchus. Voyez FETES, PROCESSIONS. Antiq. expl. et heder. lex.

CHAR, machine d'Opéra, espèce de trône qui sert pour la descente des dieux, des magiciens, des génies, etc. Il est composé d'un châssis de forme élégante sur le devant, d'un plancher sur lequel est un siège, et d'un châssis plus grand qui sert de dossier. Ces châssis sont couverts de toîle peinte en nuages, plus ou moins éclairés selon les occasions. On peint sur la partie du devant, ou un aigle, si c'est le char de Jupiter ; ou des colombes, si c'est celui de Vénus, etc. Ce char est suspendu à quatre cordes qu'on teint en noir, et il descend ou remonte par le moyen du contre-poids.

C'est la machine la plus ordinaire à l'opéra, et par cette raison sans-doute la moins soignée. Pendant le temps qu'on exécute une ritournelle majestueuse, on voit descendre une divinité, l'illusion commence : mais à peine le char a-t-il percé le plafond, que les cordes se montrent, et l'illusion se dissipe.

Il y a plusieurs moyens très-simples de dérober aux yeux du spectateur ces vilaines cordes, qui seules changent en spectacle ridicule le plus agréable merveilleux. Les chapelets de nuages placés avec art, seraient seuls suffisans, et on ne conçoit point pourquoi on ne les y emploie pas. Cette partie trop négligée jusqu'ici, suivra sans-doute le sort de toutes les autres, par la sage administration de la ville de Paris, chargée désormais de ce magnifique spectacle. Voyez OPERA et CHAPELET.

Les Grecs se servaient des chars pour introduire leurs divinités sur le théâtre ; ils étaient d'un usage très-fréquent dans les grands ballets et dans les carrousels. Voyez MACHINE, DECORATION, BALLET.

On exécute plusieurs vols avec les chars : mais il manque presque toujours quelque partie essentielle à ces sortes de machines. Voyez VOL. (B)

CHAR, (Géographie moderne) petite rivière de France en Saintonge ; elle a sa source vers Paillé, et se perd dans la Boutonne à S. Jean-d'Angeli.