S. f. (Grammaire) l'action de supplier. Voyez SUPPLIER et SUPPLIQUE.

SUPPLICATION, (Antiquité romaine) les supplications chez les Romains étaient ou publiques ou particulières.

Les supplications publiques se faisaient ou dans les occasions pressantes, comme dans le temps de peste ou de quelque maladie populaire, ou, comme nous le dirons dans la suite, après quelque victoire inespérée, lorsque celui qui venait d'être élu général, demandait au sénat sa confirmation, et en même temps la supplication, pour se rendre les dieux favorables, et pour d'autres sujets encore.

Ces supplications étaient des jours solennels, où il n'était pas permis de plaider pour quelque sujet que ce fût, et on les célebrait par des sacrifices, des prières et des festins publics. Quelquefois le sénat bornait à un jour la durée de cette fête ; quelquefois on y en employait plusieurs ; et l'histoire nous apprend qu'il y en a eu qui ont duré jusqu'à cinquante jours.

Il y avait une autre espèce de supplication publique, qu'on nommait le lectisterne. Voyez LECTISTERNE.

Les supplications particulières n'étaient autre chose que les prières que chacun faisait aux dieux, ou pour obtenir la santé, une bonne récolte, etc. ou pour les remercier des biens qu'on en avait reçus. Une seule formule des prières des payens, suffira pour en donner quelque idée : je trouve celle-ci, qui a été conservée dans une inscription que Camilla Amata fait à la fièvre pour son fils malade. Divinae febri, sanctae febri, magnae febri, Camilla Amata pro filio malè affecto. P. Camilla Amata offre ses prières pour son fils malade, à la divine fièvre, à la sainte fièvre, à la grande fièvre ".

Les vœux peuvent encore être regardés comme des supplications particulières. Voyez VOEUX.

Les supplications publiques qu'on faisait dans les féries impératives des Romains, avaient beaucoup de rapport à nos processions, car il s'y trouvait un nombre indéterminé, mais assez considérable d'ensans de l'un et de l'autre sexe, nés libres, ayant encore leurs pères et leurs mères, patrimi et matrimi, couronnés de fleurs et de verdure, ou tenant à la main droite une branche de laurier, qui marchaient à la tête, et chantaient des hymnes à deux chœurs.

Dianam tenerae dicite virgines,

Intonsum pueri dicite Cynthium.

Ils étaient suivis des pontifes, après lesquels on voyait les magistrats, les sénateurs, les chevaliers, les plébéïens, tous habillés de blanc, et avec les marques les plus éclatantes du rang que chacun tenait dans la république : les dames mêmes, séparées des hommes, et avec leurs plus beaux atours, faisaient quelquefois le plus brillant ornement de ces fêtes. Il y a eu des temps où il ne leur était permis de porter de l'or et des habits de diverses couleurs, que dans ces grandes solennités : ces jours-là n'étaient point compris dans la loi oppia.

On allait dans cet ordre se présenter devant les dieux de la première classe, diis majorum gentium, qu'on trouvait couchés sur des lits dressés exprès, et rehaussés de paquets ou gerbes de verveine, ou bien debout sur des estrades, d'où ils paraissaient respirer l'encens qu'on leur brulait, et accepter les victimes qu'on leur immolait. Toute cette cérémonie est exprimée dans Tite-Live par ces mots, ire supplicatum ad omnia pulvinaria.

Ces supplications s'ordonnaient pour deux raisons tout à fait opposées, pour le bien et pour le mal. Par exemple, un général d'armée qui avait remporté une victoire signalée, ne manquait pas d'envoyer au sénat des lettres ornées de feuilles de laurier, par lesquelles il lui rendait compte du succès de ses armes, et lui demandait qu'il voulut bien décerner en son nom des supplications en actions de grâce aux dieux ; et le decret du sénat était souvent une assurance du triomphe pour le vainqueur, triumphi praerogativa.

On ne doit pas s'étonner du grand nombre de jours que duraient ces fêtes, surtout vers la fin de la république. Le sénat en ordonna quinze au nom de Jules-César pour les victoires qu'il avait remportées sur les Gaulois ; et ce qui n'avait encore été fait pour personne, il en ordonna cinquante en faveur de D. Brutus, qui avait vaincu Marc-Antoine, dont l'ambition devenait aussi pernicieuse à la république que l'avait été celle de Jules-César.

Cicéron en fit ordonner autant au nom de C. Octavien, d'Hirtius et de Pansa, comme il le dit dans la philippique xiv. mais environ vingt ans auparavant il avait eu le plaisir de voir décerner des supplications en son nom, pour autant de jours qu'on en eut jamais accordé aux plus grands capitaines, et cela pour avoir étouffé la conjuration de Catilina, et remis le calme dans toute l'étendue de l'empire romain. L'orateur consul ne manqua pas de faire valoir cette distinction, en exhortant tout le peuple à célebrer ces fêtes avec toute la joie qu'on est capable de goûter, lorsqu'on connait la grandeur du péril qu'on a couru, et le miracle par lequel on a été préservé.

L'autre occasion de faire des supplications n'était pas si fréquente ; mais comme l'on est plus sensible au mal qu'au bien, quand il était question de parer les traits de la colere céleste, on redoublait son zèle, on n'épargnait ni peine, ni dépense ; les prières, les vœux, les sacrifices, les spectacles mêmes, pour lesquels on s'imaginait que les dieux ne devaient pas avoir moins de sensibilité que les hommes, tout était mis en usage. (D.J.)