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Catégorie : Grammaire
subs. fém. (Grammaire) c'est la treizième lettre et la dixième consonne de notre alphabet : nous la nommons emme ; les Grecs la nommaient mu, , et les Hébreux men. La facilité de l'épellation demande qu'on la prononce me avec un e muet ; et ce nom alors n'est plus féminin, mais masculin.

L'articulation représentée par la lettre M est labiale et nasale : labiale, parce qu'elle exige l'approximation des deux lèvres, de la même manière que pour l'articulation B ; nasale, parce que l'effort des lèvres ainsi rapprochées, fait refluer par le nez une partie de l'air sonore que l'articulation modifie, comme on le remarque dans les personnes fort enrhumées qui prononcent b pour m, parce que le canal du nez est embarrassé, et que l'articulation alors est totalement orale.

Comme labiale, elle est commuable avec toutes les autres labiales b, p, Ve f ; c'est ainsi que scabellum vient de scamnum, selon le témoignage de Quintilien ; que fors vient de , que pulvinar vient de pluma : cette lettre attire aussi les deux labiales b et p, qui sont comme elle produites par la réunion des deux lettres ; ainsi voit-on le b attiré par m dans tombeau dérivé de tumulus, dans flambeau formé de flamme, dans ambigo composé de am et ago ; et p est introduit de même dans promptus formé de promotus, dans sumpsi et sumptum qui viennent de sumo.

Comme nasale, la lettre ou articulation M se change aussi avec N : c'est ainsi que signum vient de , nappe de mappa, et natte de matta, en changeant m en n ; au contraire amphora vient de , amplus de , abstemius d'abstineo, sommeil de somnus, en changeant n en m.

M obscurum in extremitate, dit Priscien (lib. I. de accid. lit.) ut templum : apertum in principio, ut magnus : mediocre in mediis, ut umbra. Il nous est difficîle de bien distinguer aujourd'hui ces trois prononciations différentes de m, marquées par Priscien : mais nous ne pouvons guère douter qu'outre sa valeur naturelle, telle que nous la démêlons dans manie, mœurs, etc. elle n'ait encore servi, à peu-près comme parmi nous, à indiquer la nasalité de la voyelle finale d'un mot ; et c'est peut-être dans cet état que Priscien dit, M obscurum in extremitate, parce qu'en effet on n'y entendait pas plus distinctement l'articulation m, que nous ne l'entendons dans nos mots français nom, faim. Ce qui confirme ce raisonnement, c'est que dans les vers toute voyelle finale, accompagnée de la lettre m, était sujette à l'élision, si le mot suivant commençait par une voyelle :

Divis um imperium cum Jove Caesar habet :

dants ce temps-là même, si l'on en croit Quintilien, Inst. IX. 4. ce n'est pas que la lettre m fût muette, mais c'est qu'elle avait un son obscur : adeo ut penè cujusdam novae litterae sonum reddat ; neque enim eximitur, sed obscuratur. C'est bien là le langage de Priscien.

" On ne saurait nier, dit M. Harduin, Rem. div. sur la prononc. p. 40. que le son nasal n'ait été connu des anciens. Nicod assure, d'après Nigidius Figulus, auteur contemporain et ami de Cicéron, que les Grecs employaient des sons de ce genre devant les consonnes y, x ". Mais Cicéron lui-même et Quintilien nous donnent assez à entendre que m à la fin était le signe de la nasalité. Voici comme parle le premier, Orat. XLV. Quid illud ? non olet unde sit, quod dicitur cum illis ? cum autem nobis non dicitur, sed nobiscum ? Quia si ita diceretur, obscaenius concurrèrent litterae, ut etiam modò, nisi autem interposuissem, concurrissent. Quintilien, Instit. VIII. 3. s'exprime ainsi dans les mêmes vues, et d'après le même principe : Vitanda est junctura deformiter sonans, ut si cum hominibus notis loqui nos dicimus, nisi hoc ipsum hominibus medium sit, in videmur incidere : quia ultima prioris syllabae littera (c'est la lettre m de cum) quae exprimi nisi labris coèuntibus non potest, aut ut intersistère nos indecentissimè cogit, aut continuata cum N insequente in naturam ejus corrumpitur. Cette dernière observation est remarquable, si on la compare avec une autre remarque de M. Harduin : ibid. " Le même Nigidius, dit-il, donne à entendre que chez les Latins n rendait aussi la voyelle nasale dans anguis, increpat, et autres mots semblables : in his, dit-il, non verum n ; sed adulterinum ponitur ; nam si ea littera esset, lingua palatum tangeret ". Si donc on avait mis de suite cum nobis ou cum notis, il aurait fallu s'arrêter entre deux, ce qui était, selon la remarque de Quintilien, de très-mauvaise grâce ; ou, en prononçant les deux mots de suite, Ve que le premier était nasal, on aurait entendu la même chose que dans le mot obscène, cunno, où la première était apparemment nasale conformément à ce que nous venons d'apprendre de Nigidius.

Qu'il me soit permis, à cette occasion, de justifier notre orthographe usuelle, qui représente les voyelles nasales par la voyelle ordinaire suivie de l'une des consonnes m ou n. J'ai prouvé, article H, qu'il est de l'essence de toute articulation de précéder le son qu'elle modifie ; c'est donc la même chose de toute consonne à l'égard de la voyelle. Donc une consonne à la fin d'un mot doit ou y être muette, ou y être suivie d'une voyelle prononcée, quoique non écrite : et c'est ainsi que nous prononçons le latin même dominos, crepat, nequit, comme s'il y avait dominose, crepate, nequitte avec l'e muet français ; au contraire, nous prononçons il bat, il promet, il fit, il crut, sabot, etc. comme s'il y avait il ba, il promè, il fi, il cru, sabo sans t. Il a donc pu être aussi raisonnable de placer m ou n à la fin d'une syllabe, pour y être des signes muets par rapport au mouvement explosif qu'ils représentent naturellement, mais sans cesser d'indiquer l'émission nasale de l'air qui est essentielle à ces articulations. Je dis plus, il était plus naturel de marquer la nasalité par un de ces caractères à qui elle est essentielle, que d'introduire des voyelles nasales diversement caractérisées : le mécanisme de la parole m'en parait mieux analysé ; et l'on vient de voir, en effet, que les anciens Grecs et Latins ont adopté ce moyen suggéré en quelque sorte par la nature.

Quoi qu'il en sait, la lettre m à la fin du mot est en français un simple signe de la nasalité de la voyelle précédente ; comme dans nom, pronom, faim, thim, etc. il faut excepter l'interjection hem, et les noms propres étrangers, où l'm finale conserve sa véritable prononciation ; comme Sem, Cham, Jérusalem, Krim, Stockholm, Salm, Surinam, Amsterdam, Rotterdam, Postdam, etc. Il y en a cependant quelques-uns où cette lettre n'est qu'un signe de nasalité, comme Adam, Absalom : et c'est de l'usage qu'il faut apprendre ces différences, puisque c'est l'usage seul qui les établit sans égard pour aucune analogie.

M au milieu des mots, mais à la fin d'une syllabe, est encore un signe de nasalité, quand cette lettre est suivie de l'une des trois lettres m, b, p ; comme dans emmener, combler, comparer. On en excepte quelques mots qui commence par imm, comme immodeste, immodestie, immodestement, immaculée conception, immédiat, immédiatement, immatriculé, immatriculation, immense, immensité, immodéré, immunité, etc. on y fait sentir la réduplication de l'articulation m.

On prononce aussi l'articulation m dans les mots où elle est suivie de n, comme indemniser, indemnité, amnistie, Agamemnon, Memnon, Mnémosine, etc. excepté damner, solennel, et leurs dérivés où la lettre m est un signe de nasalité.

Elle l'est encore dans comte venu de comitis, dans compte venu de computum, dans prompt venu de promptus, et dans leurs dérivés.

M. l'abbé Regnier, Grammaire franç. in-12. p. 37. propose un doute sur quatre mots, contemptible, qui n'est, dit-il, plus guère en usage, exemption, rédemption et rédempteur, dans lesquels il semble que le son entier de m se fasse entendre. A quoi il répond : " Peut-être aussi que ce n'est qu'une illusion que fait à l'oreille le son voisin du p rendu plus dur par le t suivant. Quoi qu'il en sait, la différence n'est pas assez distinctement marquée pour donner lieu de décider là-dessus ". Il me semble qu'aujourd'hui l'usage est très-décidé sur ces mots : on prononce avec le son nasal exemt, exemption, exemtes sans p ; et plusieurs même l'écrivent ainsi, et entr'autres le rédacteur qui a rendu portatif le dictionnaire de Richelet ; le son nasal est suivi distinctement du p dans la prononciation et dans l'orthographe des mots contempteur, contemptible, rédemption, rédempteur.

M en chiffres romains signifient mille ; une ligne horizontale au-dessus lui donne une valeur mille fois plus grande, M vaut mille fois mille ou un million.

M, dans les ordonnances des Médecins, veut dire misce, mêlez, ou manipulus, une poignée ; les circonstances décident entre ces deux sens.

M, sur nos monnaies, indique celles qui sont frappées à Toulouse.




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