S. f. (Jurisprudence) est une exception par laquelle on refuse de reconnaître un juge ou autre officier, ou un expert, ou même un témoin.

Un juge peut être récusé tant en matière civîle que criminelle ; mais il faut pour cela qu'il y ait juste cause. Ces causes sont :

1°. Si le juge est parent ou allié de l'une des parties, savoir en matière civile, jusqu'aux enfants de cousin issu de germain, qui sont le quatrième degré inclusivement, et en matière criminelle jusqu'au cinquième.

Ces degrés se comptent suivant le droit canonique, et les degrés d'alliance se comptent comme ceux de parenté.

En outre en matière criminelle, si le juge porte le nom et les armes, et qu'il soit de la famille de l'accusateur ou de l'accusé, il est obligé de s'abstenir, en quelque degré de parenté ou alliance qu'il sait.

La récusation a aussi lieu, quoique le juge soit parent ou allié des deux parties.

La parenté ou alliance du juge avec la femme de l'une des parties, dans les degrés ci-dessus expliqués, donne aussi lieu à la récusation, supposé que la femme soit vivante, ou qu'il y ait des enfants.

Mais si la femme est décédée sans enfants, il est seulement défendu au beau-pere, aux gendres et aux beaux-frères d'être juges des parties.

2°. Le juge est récusable lorsqu'il est prouvé par écrit, qu'il a un différend semblable à celui des parties.

3°. S'il a donné conseil, ou s'il a connu auparavant du différend comme juge arbitre, ou s'il a sollicité ou recommandé l'affaire, s'il a ouvert son avis hors la visite et jugement du procès ; mais dans tous ces cas, il est cru à sa déclaration, à moins qu'il y ait preuve par écrit au contraire.

4°. Si le juge a un procès en son nom dans un tribunal où l'une des parties est juge.

5°. S'il a menacé une des parties verbalement ou par écrit, depuis l'instance, ou dans les six mois qui ont précédé la récusation, ou s'il a eu inimitié capitale.

6°. Si le juge ou ses enfants, son père, ses frères, oncles, neveux, ou ses alliés en pareil degré, ont obtenu quelque office, bénéfice ou autre emploi de l'une des parties, pourvu que la nomination ait été volontaire et non forcée.

7°. Si le juge est protecteur, chef ou syndic de l'ordre, corps, collège ou communauté contre lequel on plaide.

Il en est de même s'il est tuteur honoraire ou onéraire, subrogé tuteur ou curateur, héritier présomptif ou donataire, maître ou domestique de l'une des parties.

Enfin il peut y avoir encore d'autres causes de récusation, quoique non prévues par l'ordonnance, lesquelles se tirent des moyens de fait et de droit ; par exemple, s'il était prouvé que le juge est en grande familiarité avec l'une des parties, etc.

Le juge qui est dans le cas de récusation doit se récuser lui-même sans attendre que la récusation soit proposée.

Si le juge ne se récuse pas lui-même, la partie qui a quelque moyen de récusation doit le proposer aussitôt qu'il est venu à sa connaissance, et dans la huitaine de la déclaration du juge ou de la partie, la récusation doit être formée.

Toute cause de récusation doit être proposée avant contestation en cause, si ce n'est que la cause soit survenue depuis, ou qu'elle ne soit venue à la connaissance de la partie que depuis que la cause a été contestée.

Si l'on veut récuser un juge commis pour faire une descente, il faut le faire trois jours avant son départ, pourvu que le transport ait été signifié huit jours auparavant.

Les causes de récusation doivent être spécifiées dans la requête.

Le juge qui est récusé ne doit point être présent au jugement de la récusation.

Pour juger une récusation, les juges doivent être au nombre de cinq, ou du-moins au nombre de trois, s'il y a moins de six juges dans le siege. A défaut de juges en nombre suffisant pour juger la récusation, on prend des avocats ou praticiens du siege.

Les jugements qui interviennent en matière de récusation sont exécutoires, nonobstant opposition ou appelation, si ce n'est qu'il s'agisse de descente, information ou enquête, auquel cas le juge récusé ne peut passer outre, et il doit être procédé à l'acte qui est à faire par un autre juge ou praticien du siege, à moins que l'intimé ne déclare qu'il veut attendre le jugement de l'appel.

Les juges présidiaux jugent sans appel les récusations dans les matières dont la connaissance leur est attribuée, pourvu qu'ils soient au nombre de cinq.

Dès qu'un juge est récusé il doit s'abstenir de paraitre au siege, soit à l'audience ou au conseil ; il ne lui est même pas permis de solliciter pour ses parents, ou autres personnes dont il prend les intérêts.

Quand la récusation est déclarée impertinente et inadmissible, la partie qui l'a proposée doit être condamnée en l'amende ; le juge peut même demander réparation des faits qui ont été proposés contre lui ; mais il ne peut pas non plus assister au jugement de la réparation. Voyez l'ordonnance de 1539, artic. 10. celle de Roussillon, artic. 12. celle de Blais, artic. 118 et suivants ; celle de 1667, tit. 24. et Bornier sur ce titre ; Julius Clarus, lib. V. sentent. quaest. 43. Peleus, quaest. 134. La Rocheflavin, des parlem. liv. XIII. ch. lxxxiij. Despeisses, tom. II. pag. 450. Bouvot, tome II. au mot récusation. Dufail, liv. III. ch. xxj. xxviij. lxvij. cij. cdxxx et cdxcviij. Papon, liv. VII. tit... Le traité des récusations par Ayrault, dans son instruction judiciaire, et celui de Bruneau, en son traité des matières criminelles. Voyez JUGE.

Les experts peuvent être récusés comme les juges. Voyez l'ordonnance de 1667, tit. 21. artic. 9 et 11.

On récuse aussi des témoins par forme de reproche. Voyez REPROCHE et TEMOIN. (A)