RABATTEMENT

RABATTEMENT DE DECRET, (Jurisprudence) est une espèce de regrès ou rachat dont use celui qui a été évincé de ses biens au moyen d'une adjudication par decret, le droit romain accordait deux ans à la partie évincée pour exercer ce rachat, et regardait cette faculté comme très-favorable, comme on voit en la loi dernière au code de jure dominii impetrando.

Cette restitution contre les decrets n'est pourtant point généralement admise, il y a même trois de nos coutumes qui la rejettent formellement ; savoir Auvergne, la Marche et Bourbonnais ; et dans le droit commun, la lésion d'outre-moitié, ni même la lésion énorme, ne font point un moyen de restitution contre un decret.

Quelques auteurs, tels que Dumolin, Gouget et Brodeau, ont prétendu qu'il serait de l'équité dans ces cas d'admettre la restitution, mais la jurisprudence est contraire.

L'ordonnance de 1629 a fait une exception pour les mineurs, et sa disposition est suivie au parlement de Dijon et dans quelques autres parlements, dans lesquels on juge même qu'une lésion considérable suffit pour faire restituer le mineur, mais cela n'a pas lieu au parlement de Paris.

Les statuts de Bresse donnent aux parties saisies six mois pour rentrer dans leurs biens subhastés, en remboursant à l'acquéreur le prix principal et les frais.

Mais le rabattement de decret, proprement dit, n'a lieu que dans le Languedoc : ce rachat ou regrès y est fondé sur le droit romain, mais le parlement de Toulouse en a prorogé la durée jusqu'à dix ans.

Quand le bien avait été adjugé par un arrêt, et quand sur la demande en rabattement il était intervenu un arrêt qui permettait à la partie d'exercer l'action en rabattement, cette action pouvait être exercée pendant trente années, comme étant personnelle : la jurisprudence n'était pas bien certaine sur cette matière, mais elle a été fixée par une déclaration du roi du 16 Janvier 1736.

Suivant cette déclaration, il n'y a que les propriétaires des biens decrétés ou leurs descendants qui puissent se pourvoir en rabattement de decret. Cette action ne dure que dix ans, en quelque juridiction que le decret ait été fait ; le délai ne court que du jour de la mise en possession ; il court contre les pupilles et les mineurs, sauf leur recours, s'il y échait, contre les tuteurs ou curateurs. La demande en rabattement ne peut être formée qu'au parlement de Toulouse ou à la cour des aydes de Montpellier chacun pour ce qui les concerne : quoique les decrets aient été faits devant les juges inférieurs, le demandeur doit faire des offres réelles à l'adjudicataire, et en cas de refus, consigner au greffe, les loyaux-couts se remboursant suivant la liquidation reçue. Les fruits des biens decrétés appartiennent à celui qui a obtenu le rabattement du decret du jour que le prix a été reçu par l'adjudicataire, ou qu'il a été consigné, mais il doit aussi payer les intérêts des loyaux-couts : l'adjudicataire ne peut même être dépossedé qu'en lui payant la somme liquidée pour les loyaux-couts et les intérêts, à-moins qu'il n'y eut retardement affecté de la part de l'adjudicataire, auquel cas on peut se pourvoir pour faire cesser les intérêts, et même condamner l'adjudicataire au délaissement, sauf à lui à se pourvoir pour la liquidation. Voyez le traité de la vente des immeubles par decret de M. de Héricourt, chap. XIIe n. 6. et les mots ADJUDICATION, CRIEES, DECRET, SAISIE REELLE.