S. m. (Jurisprudence) du latin delinquere : delictum, signifie en général une faute commise au préjudice de quelqu'un.

On comprend quelquefois sous ce terme de délits toutes sortes de crimes, soit graves ou légers, même le dommage que quelqu'un cause à autrui, soit volontairement ou par accident, et sans qu'il y ait eu dessein de nuire ; mais plus ordinairement on n'emploie ce terme de délit que pour exprimer les crimes légers ou le dommage causé par des animaux.

Les principes généraux en matière de délits sont que tous délits sont personnels, c'est-à-dire que chacun est tenu de subir la peine et la réparation dû. pour son délit, et que le délit de l'un ne nuit point aux autres. Cette dernière maxime reçoit néanmoins trois exceptions : la première est que le délit du défunt nuit à son héritier pour les amendes, la confiscation, et autres peines pécuniaires qui sont à prendre sur ses biens : la seconde exception est que les pères sont tenus civilement des délits commis par leurs enfants étant en bas âge et sous leur puissance ; les maîtres sont pareillement tenus des délits de leurs esclaves et domestiques, et du délit ou dommage causé par leurs animaux : la troisième exception est qu'il y a quelques exemples qu'en punissant le père pour certains crimes très-graves, on a étendu l'ignominie jusques sur les enfants, afin d'inspirer plus d'horreur de ces sortes de crimes.

Tous délits sont publics ou privés ; ils sont réputés de la dernière espèce, à moins que la loi ne déclare le contraire. Voyez ci-après DELIT PUBLIC et DELIT PRIVE.

Personne ne doit profiter de son délit, c'est-à-dire qu'il n'est pas permis de rendre par un délit sa condition meilleure.

La gravité du délit se considère eu égard à la qualité de celui qui le commet, à l'habitude où il peut être de le commettre, à la qualité de celui envers lequel il est commis, eu égard au lieu où les choses se sont passées, aux personnes qui étaient présentes, et autres circonstances qui peuvent mériter attention.

Les délits ne doivent point demeurer impunis ; ils est du devoir des juges d'informer des délits publics, dont la vengeance est réservée au ministère public. La peine doit être proportionnée au délit ; et les particuliers ne peuvent point poursuivre la peine d'un délit, mais seulement la réparation civîle et pécuniaire.

On dit communément qu'il n'y a point de compensation en matière de délits ; ce qui doit s'entendre quant à la peine afflictive qui est dû. pour la vindicte publique, mais non quant aux peines pécuniaires et aux dommages et intérêts qui en peuvent résulter. Il y a même certains délits privés qui peuvent se compenser ; par exemple, la négligence ou le dol commis réciproquement par des associés, liv. II. ff. de compens. et liv. XXXVI. ff. dolo malo. Il en est de même des injures et autres délits légers qui ne méritent point la peine afflictive, on les compense ordinairement en mettant les parties hors de cour.

Le délit n'est point excusé sous prétexte de colere ou de premier mouvement, ni sous prétexte d'exemple ou de coutume ; l'erreur même ne peut l'excuser que dans les cas où il n'y a point de délit sans dol.

Il y a certains délits dont l'action est annale, tels que les injures.

La peine des autres délits en général se prescrivait autrefois par dix ans suivant le droit du digeste ; mais par le droit du code, auquel notre usage est à ces égards conforme, il faut présentement vingt années.

La poursuite du délit est éteinte par la mort naturelle du coupable, quant à la peine, mais non quant aux réparations pécuniaires.

Il y a même certains délits graves que la mort n'éteint point, tels que le crime de lése-majesté divine et humaine, le duel, l'homicide de soi-même, la rébellion à justice à force armée. (A)

DELIT D'ANIMAUX, est de deux sortes ; savoir le dommage qu'ils peuvent causer à autrui en blessant quelqu'un, ce que les Romains appelaient pauperiem facère ; et le dommage qu'ils peuvent faire en paissant sur l'héritage d'autrui, soit dans des grains ou dans des bois en défense, ce que les Romains appelaient depastionem. Chez les Romains le maître du bétail qui avait commis le délit en était quitte en abandonnant la bête à celui qui avait souffert le dommage. Parmi nous le maître est obligé de réparer le dommage, lorsqu'il y a de sa part du dol ou de la négligence. Voyez au digeste, liv. IX. tit. j. et aux instit. tit. si quadrupes. (A)

DELIT CAPITAL ou CRIME CAPITAL, est celui qui mérite peine de mort : on dit plus ordinairement un crime capital. Voyez au mot CRIME. (A)

DELIT COMMIS ou COMMUN. La coutume d'Angoumais, ch. j. art. 23. dit que le clerc pour le délit commis sera renvoyé pardevant son ordinaire. Voyez la note de M. Angevin sur cet article, dans le coutumier général. (A)

DELIT COMMUN, ne signifie pas un délit qui se commet fréquemment, mais un délit ordinaire et non privilégié, c'est-à-dire qui n'est point d'une nature particulière, et dont la connaissance n'appartient point au juge par privilège, mais de droit commun.

Ce terme délit commun est opposé à délit privilégié, c'est-à-dire dont la connaissance appartient au juge par privilège.

Ces termes sont usités lorsqu'il s'agit de délits commis par des ecclésiastiques. On distingue le délit commun et le délit ou cas privilégié, pour régler la compétence du juge d'église et celle du juge séculier ; la connaissance du délit commun appartient au juge d'église, et celle du délit privilégié au juge royal.

Telles sont les notions vulgaires que l'on a de ces termes délit commun et délit privilégié ; mais pour bien entendre leur véritable signification et l'abus que l'on en a fait, il faut remonter jusqu'à l'origine de la distinction du délit commun et du cas privilégié.

On appelait délits communs, chez les Romains, tous ceux dont la punition appartenait aux juges ordinaires ; et délits propres à une certaine profession, ceux qui étaient commis contre les devoirs de cette profession.

Ainsi pour les gens de guerre on appelait délits communs ; ceux dont la vengeance était réglée par les lois communes à tous les autres hommes ; et délits propres ceux qui étaient contre les devoirs du service militaire, comme d'avoir quitté son poste.

On peut appliquer aux ecclésiastiques la même distinction, d'autant mieux que les lois romaines les appellent la milice sacrée.

Ce n'est pas ici le lieu de traiter de la juridiction ecclésiastique en général ; cependant pour l'éclaircissement de ces termes, délits communs et cas privilégiés, on ne peut s'empêcher de remonter jusqu'aux premiers siècles de l'Eglise, pour voir de quelles causes les juges d'église ont connu selon les différents temps.

Dans la primitive église où les ecclésiastiques n'avaient point de juridiction extérieure contentieuse, les prêtres et les diacres conciliaient charitablement les différends qui s'élevaient entre les fidèles, lesquels se faisaient un scrupule de recourir à des juges payens ; ce qui n'empêchait pas que les Chrétiens, et même les ecclésiastiques, ne fussent soumis à la justice séculière.

Constantin fut le premier qui fit un règlement entre les officiers ecclésiastiques et les séculiers ; il ordonna que les causes légères et celles qui concernaient la discipline ecclésiastique, se traiteraient dans les assemblées synodales ; qu'à l'égard des causes ecclésiastiques, l'évêque en serait juge entre ecclésiastiques ; qu'en fait de crimes les ecclésiastiques seraient jugés par les évêques, excepté pour les crimes graves dont la connaissance était réservée aux juges séculiers ; ce qui s'observait même pour les évêques accusés. On distinguait à leur égard, de même que pour les autres ecclésiastiques, le délit civil et commun, d'avec celui que l'on appelait ecclésiastique.

Cette distinction des délits communs d'avec les délits ecclésiastiques, fut observée dans le jugement d'Athanase évêque d'Alexandrie ; il était accusé par deux évêques ariens d'avoir conspiré contre l'empereur Constantin ; il était aussi accusé d'un homicide, et d'avoir voulu violer son hôtesse : l'empereur le renvoya pour ces crimes devant des juges séculiers qui l'interrogèrent. Mais lorsqu'il fut accusé d'avoir rompu des calices, d'avoir malversé dans la visite de ses églises, et d'avoir usé de violence envers les prêtres de son diocèse, il fut renvoyé au synode assemblé à Tyr.

Le même ordre fut observé sous les empereurs Constants et Constantius. En effet Etienne évêque d'Antioche, qui était arien, ayant fait un complot contre les ambassadeurs de Constants, ils demandèrent à l'empereur que le procès fût fait à cet évêque ; et celui-ci ayant demandé son renvoi au synode des évêques, on lui soutint qu'étant accusé de crimes capitaux, il devait être jugé en cour séculière ; ce qui fut ainsi ordonné.

Il est vrai que les mêmes empereurs accordèrent par faveur spéciale aux évêques, de ne pouvoir pour quelque crime que ce fût être jugés que par les évêques ; mais cela ne changea rien pour les autres ecclésiastiques ; et depuis, les empereurs Valents, Gratien et Valentinien, révoquèrent l'exception qui avait été faite pour les évêques, et ordonnèrent que pour crimes ecclésiastiques, tous clercs, soit évêques ou autres, seraient jugés dans le synode de leur diocèse ; mais que pour les crimes communs et civils, qui sont précisément ceux que l'on appelle aujourd'hui improprement cas privilégiés, ils seraient poursuivis devant les juges séculiers.

Les empereurs Honorius et Théodose rétablirent le privilège qui avait été accordé aux évêques, et l'étendirent même à tous ecclésiastiques en général pour quelque délit que ce fût.

Le tyran nommé Jean qui essaya d'usurper l'empire d'Occident, révoqua tous ces privilèges, et soumit les ecclésiastiques à la justice séculière, tant pour le civil que pour toutes sortes de crimes indistinctement.

Mais Théodose et Valentinien II. qui succédèrent à Honorius, rendirent aux ecclésiastiques le privilège de ne pouvoir être jugés qu'en la juridiction ecclésiastique, tant pour le civil que pour le criminel.

Tel fut l'état de la juridiction ecclésiastique pour les matières criminelles jusqu'au temps de Justinien, lequel par sa novelle 83 distingua expressément les délits civils des délits ecclésiastiques. Par les délits civils il entend les délits communs, c'est-à-dire ceux qui sont commis contre les lois civiles, et dont la punition est réservée aux lois civiles. C'est ce que le docte Cujas a remarque sur cette novelle, où il emploie comme synonymes ces deux mots civil et commun, et les oppose au délit ecclésiastique.

Justinien ordonna donc que si le crime était ecclésiastique, et sujet à quelqu'une des peines que l'Eglise peut infliger, la connaissance en appartiendrait à l'évêque seul ; que si au contraire le crime était civil et commun, le président si c'était en province, ou le préfet du prétoire si c'était dans la ville, en connaitraient, et que s'ils jugeaient l'accusé digne de punition, ils le livreraient aux ministres de la justice après qu'il aurait été dégradé de l'état de prêtrise par son évêque.

Peu de temps après, Justinien changea lui-même cet ordre par sa novelle 123, où il permit à celui qui accuserait un ecclésiastique de se pourvoir, pour quelque délit que ce fût, devant l'évêque : si le crime se trouvait ecclésiastique, l'évêque punissait le coupable selon les canons ; si au contraire l'accusé se trouvait convaincu d'un crime civil, l'évêque le dégradait, après quoi le juge laïc faisait le procès à l'accusé.

L'accusateur pouvait aussi se pourvoir devant le juge séculier ; auquel cas si le crime civil était prouvé, avant de juger le procès on le communiquait à l'évêque, et si celui-ci trouvait que le délit fût commun et civil, il dégradait l'accusé, qui était ensuite remis au juge séculier : mais si l'évêque ne trouvait pas le délit suffisamment prouvé, ou que la qualité du délit lui parut équivoque, il suspendait la dégradation, et les deux juges s'adressaient à l'empereur, qui en connaissance de cause ordonnait ce qu'il croyait convenable.

En France sous les deux premières races de nos rais, et même encore assez avant sous la troisième, les ecclésiastiques qui avaient beaucoup empiété sur la juridiction séculière, ne la reconnaissaient aucunement pour les matières criminelles, de telle nature que fût le délit ; c'est pourquoi Prétextat archevêque de Rouen étant accusé par Chilperic de crime de lése-majesté, le roi permit qu'il fût jugé par les évêques et prélats du royaume ; il leur observa néanmoins en même temps que les juges royaux auraient pu le condamner pour un tel crime.

Grégoire de Tours rapporte plusieurs exemples semblables, entr'autres que Salonius et Sagittarius accusés d'homicide, d'adultère, et autres crimes énormes, furent renvoyés au jugement des évêques.

On trouve aussi dans Monstrelet qu'en 1415, 1460, et (aux additions) en 1467, des clercs accusés de lése-majesté, sortiléges, homicides, étaient renvoyés au juge d'église, qui les condamnait à une prison perpétuelle, et à jeuner au pain et à l'eau.

Les capitulaires de Charlemagne, de Louis le Débonnaire, et autres princes leurs successeurs, contiennent plusieurs défenses de poursuivre les ecclésiastiques dans les tribunaux séculiers pour quelque crime que ce fût.

Philippe III. ordonna en 1274 qu'on aurait recours au droit écrit, pour savoir si un clerc accusé d'homicide serait poursuivi devant le juge ecclésiastique ou laïc.

De tous ces différents faits il résulte que l'on n'ignorait point dès-lors en France la distinction des délits civils et communs d'avec les délits ecclésiastiques, qui se trouve établie par les lois romaines, et notamment par les novelles de Justinien qui forment le dernier état du droit romain sur cette matière ; que si l'on renvoyait aux évêques la connaissance de tous les délits commis par les ecclésiastiques, c'était par déférence pour les évêques, et par respect pour les anciens decrets des conciles.

Mais bientôt après les gens d'église commencèrent à reconnaître l'autorité des juges séculiers pour les délits graves : on en trouve un exemple sous le règne de Charles V. Pierre d'Estaing évêque de Saint-Flour, et depuis archevêque de Bourges, et cardinal, ayant fait décider dans un synode qu'il convoqua à Bourges, que les clercs ne pouvaient être poursuivis en la justice séculière pour aucun crime, fut contraint de révoquer ce decret, et d'en donner sa déclaration par écrit en 1369, qui fut reçue par Jean duc de Berri, et ensuite acceptée par le roi.

Il parait donc par-là que les ecclésiastiques se reconnaissaient dès-lors sujets à la justice séculière quant aux crimes graves, qu'ils appelèrent improprement délits privilégiés ; comme si les juges séculiers n'en connaissaient que par privilège, quoique ce fût tout le contraire, les juges séculiers connaissant par droit commun de tous les délits, et les juges d'église seulement par privilège des délits ecclésiastiques.

L'exercice de la juridiction séculière sur les ecclésiastiques accusés de cas privilégiés, c'est-à-dire de crimes graves et dont la punition n'appartient qu'à la justice séculière, n'est même point un usage particulier à la France, mais un droit commun à toutes les nations chrétiennes.

En Espagne autrefois les ecclésiastiques ne pouvaient être poursuivis, pour quelque crime que ce fût, que devant le juge d'église ; mais l'impunité qui résultait de ce privilège fut cause que les rois d'Espagne le révoquèrent par rapport aux crimes atroces, tels que les assassinats, adultères, concubinages publics, et autres semblables, dont Philippe II. par un édit de 1597 donna pouvoir à ses juges d'informer contre toutes sortes de personnes sans exception.

La même chose est arrivée en Angleterre, où les ecclésiastiques accusés de crimes étaient aussi exempts de la justice séculière : ce privilège occasionnait un tel désordre, que sous le règne d'Henri II. il y eut plus de cent assassinats commis par des clercs ; ce qui engagea Henri II. à donner un édit portant que les clercs accusés de crimes ecclésiastiques répondraient devant les juges d'église, et devant les juges séculiers pour les crimes graves et qualifiés ; ce qui fut confirmé par Edouard II.

Damhoudere en sa pratique de Flandres, observe aussi que les ecclésiastiques y sont soumis à la justice séculière pour les crimes graves, tels que l'homicide, l'assassinat, port d'armes, et autres semblables.

Il est donc étrange que l'on traite de délits et cas privilégiés, des faits dont la connaissance appartient de droit commun au juge royal, et dont il est le juge naturel, et de traiter de délits communs ceux dont le juge d'église connait seulement par exception et par privilège.

Cependant l'usage a prévalu au contraire, même dans les tribunaux séculiers, pour l'application de ces termes délit commun et délit ou cas privilégié ; et si nous avons relevé cette erreur, c'est moins pour reclamer la véritable signification de ces termes, que pour soutenir les vrais principes par rapport à la juridiction que le Roi a de droit commun sur les ecclésiastiques, et non pas seulement par exception et par privilège.

Au reste, selon la façon commune de parler, on met dans la classe des délits privilégiés tous ceux qui se commettent contre le bien et le repos public, et que le Roi a intérêt de faire punir pour l'exemple et la sûreté de ses sujets, comme sont les crimes de lése-majesté divine et humaine, l'incendie, la fausse monnaie, l'homicide de guet-à-pens, le vol sur les grands-chemins, le vol nocturne, le port d'armes défendues, la force et la violence publique, la contravention aux défenses faites par un juge royal, et autres délits semblables.

Les délits communs sont tous ceux qui ne sont point privilégiés, tels que le simple larcin, l'homicide fait sans dessein prémédité, les injures faites à des particuliers, et autres semblables délits dont les juges d'église connaissent quand ils sont commis par des ecclésiastiques.

Il y a aussi des délits purement ecclésiastiques, c'est-à-dire qui sont des contraventions aux saints decrets et constitutions canoniques, tels que la simonie, le confidence, le sacrilège commis sans violence ; tels sont aussi les délits commis par des ecclésiastiques, tant en omettant à faire ce qui est de leur devoir ou en faisant ce qui leur est défendu, comme si un curé omettait malicieusement de dire la messe et faire le service divin les jours de fêtes et dimanches, s'il refusait d'administrer les sacrements à ses paraissiens, s'il célebrait les saints mystères d'une manière indécente, s'il exerçait quelqu'art ou métier indigne de son caractère. Quoique ces délits soient de la compétence du juge d'église, le juge royal en peut aussi connaître lorsqu'il y a scandale public, et que l'ordre public y est intéressé.

Un ecclésiastique peut donc pour un même fait être justiciable du juge d'église et du juge royal, lorsque le fait participe tout à la fois du délit commun et du délit privilégié.

Les juges des seigneurs ne peuvent connaître d'aucuns délits commis par les ecclésiastiques, mais seulement en informer, et ensuite renvoyer l'information au greffe royal.

Suivant l'ordonnance de Moulins, quand il y avait délit commun et privilégié, le juge royal devait d'abord faire le procès à l'ecclésiastique pour le cas privilégié, et ensuite le renvoyer au juge d'église pour le délit commun ; et en attendant le jugement de l'official, l'accusé devait tenir prison pour la peine du cas privilégié, dont le juge d'église était responsable supposé qu'il élargit le prisonnier.

Mais depuis, par l'édit de Melun, il a été ordonné que le procès pour le délit commun et le délit privilégié sera fait par le juge d'église et par le juge royal conjointement ; et en ce cas le juge royal doit se transporter au siège du juge d'église, ils y instruisent conjointement le procès, mais ils rendent chacun séparément leur sentence.

La forme de cette procédure a encore été réglée par deux déclarations des mois de Février 1682 et Juillet 1684, et par l'art. 38 de l'édit de 1695, qui ordonne l'exécution des précédentes ordonnances, notamment de l'édit de Melun et de la déclaration de 1684.

La déclaration du 4 Février 1711 ordonne que dans les procès qui seront faits conjointement par le juge d'église pour le délit commun, et par le juge royal pour le cas privilégié, le juge d'eglise aura la parole, prendra le serment des accusés et des témoins, et fera en présence du juge royal les interrogatoires, recolement et confrontations.

Quand l'ecclésiastique est jugé par le juge d'église seul, et condamné pour le délit commun ; il peut, quoiqu'il ait satisfait à la condamnation, être encore repris par le juge royal, et puni de nouveau par lui pour le cas privilégié.

Il en serait de même si l'ecclésiastique avait été absous par le juge d'église ; le juge royal pourrait néanmoins encore lui faire son procès.

Mais si l'ecclésiastique avait été renvoyé absous par le juge royal, ou qu'il eut obtenu grâce du Roi qui eut été entérinée, le juge d'église ne pourrait plus intenter procès à l'accusé pour le délit commun ; et s'il le faisait il y aurait abus.

Les peines que le juge d'église peut infliger pour le délit commun sont la suspension, l'interdit, l'excommunication, les jeunes, les prières, la privation pour un temps du rang dans l'église, de voix délibérative dans le chapitre, des distributions manuelles ou d'une partie des gros fruits, la privation des bénéfices, la prison pour un temps, et la prison perpétuelle. L'Eglise n'a point de punition qui puisse aller au-delà. Voyez JUGE D'EGLISE.

Voyez la loi xxiij. au code Théod. de episcop. et cleric. la novel. 123. de Justinien ; le tr. du délit commun et cas privilégié ; celui de l'abus par Fevret, livre VIII. ch. j. IIe IIIe et IVe Bouchel, biblioth. du droit franç. au mot CAS ; et la biblioth. canon. au mot CAS PRIVILEGIE. Leprêtre, cent. 20. Henrys, tome II. liv. I. quest. 16. (A).

DELIT ECCLESIASTIQUE, est celui qui est commis singulièrement contre les saints decrets et constitutions canoniques, comme la simonie, la confidence, l'hérésie. Voyez ce qui en est dit ci-devant au mot DELIT COMMUN. (A)

DELIT (flagrant) est le moment même où le coupable vient de commettre le crime ou le dommage dont on se plaint. On dit qu'il est pris en flagrant délit, lorsqu'il est saisi et arrêté, ou du moins surpris en commettant le fait dont il s'agit. Voyez l'art. IXe du tit. 10. de l'ordonnance criminelle (Julius Clarus, lib. V. sentent. quaest. VIIIe n. 5. (A)

DELIT GRAVE, est celui qui mérite une punition sévère : on dit en ce cas plutôt crime que délit. (A)

DELIT IMPARFAIT, est celui que l'on a eu dessein de commettre, ou même qui a été commencé, mais qui n'a pas été achevé. Pour savoir comment on punit ces sortes de délits, voyez ce qui en est dit au mot CRIME. (A)

DELIT LEGER, est celui qui ne mérite pas une punition bien rigoureuse : telles sont la plupart des injures, lorsqu'elles n'ont pas causé d'ailleurs un préjudice notable. (A)

DELIT MILITAIRE, est une faute commise contre la discipline militaire. Voyez le titre de re militari, au digeste xljx. tit. 16. et au code liv. XII. tit. 36. et le code militaire du baron de Sparre. (A)

DELIT MONACHAL, ce sont les fautes commises par un religieux contre sa règle. Voyez la nov. cxxxiij. ch. 5. et MOINES et RELIGIEUX. (A)

DELIT PERSONNEL, est celui que l'on prétend avoir été commis par celui auquel on en demande raison, à la différence de certains délits dont un tiers peut être tenu, comme le père est tenu civilement du délit de son fils, etc. (A)

DELIT PRIVE est opposé à délit public ; c'est celui dont la réparation n'intéresse point le public, mais seulement le plaignant, comme des injures ou une rixe. (A)

DELIT PRIVILEGIE, ou CAS PRIVILEGIE, est opposé à délit commun. Voyez ci-dev. DELIT COMMUN. (A)

DELIT, (quasi) est le dommage que l'on fait à quelqu'un sans qu'il y ait eu dessein de nuire, comme quand il tombe par accident quelque chose d'un tait ou d'une fenêtre, qui blesse les passants ou qui gâte leurs habits.

Ces sortes de quasi-délits engendrent une obligation de la part de celui qui a causé le dommage, en vertu de laquelle il est tenu de le réparer. Voyez aux institutes le titre de obligationibus quae ex quasi-delicto nascuntur.

Les lois romaines mettent aussi au nombre des quasi-délits, l'action d'un juge qui litem suam fecit ; et la conduite d'un maître de navire ou d'une hôtellerie, chez lequel il s'est commis quelque dol ou larcin : elles le rendent responsable de ces événements, parce que quoiqu'il n'ait pas eu dessein de nuire, il y a toujours de sa faute de n'avoir pas pris les précautions convenables pour prévenir le délit, et cette négligence est ce que l'on appelle quasi-délit. (A)

DELIT, ou simplement LIT, s. m. (Coupe des pierres) est une division naturelle qui se trouve dans les pierres par couches, comme aux feuilles d'un livre. Poser en lit, c'est donner à une pierre une situation différente de l'horizontale dans les pieds droits, et de lit en joint dans les voutes.

Il y a des pierres si compactes qu'elles n'ont ni lit ni délit ; tels sont la plupart des marbres que l'on peut poser comme on veut, observant cependant de mettre quelque chose entre les joints d'assise, comme une lame de plomb, pour conserver les arêtes, et empêcher qu'il ne s'y fasse des balèvres. (D)

DELIT, (Bois de) Comm. c'est ainsi qu'on appelle ceux qui dans les forêts ont été ou coupés, ou maltraités clandestinement et contre les ordonnances.