S. f. (Jurisprudence) dans un sens étendu se prend pour toute sorte de crimes, autre que celui de lése-majesté, tels que l'incendie, le rapt, l'homicide, le vol, et autres délits par lesquels on attente à la personne d'autrui.

Mais dans le sens propre et le plus ordinaire, le terme de félonie est le crime que commet le vassal qui offense grievement son seigneur.

La distinction de ce crime d'avec les autres délits tire, comme on voit, son origine des lois des fiefs.

Le vassal se rend coupable de félonie lorsqu'il met la main sur son seigneur pour l'outrager, lorsqu'il le maltraite en effet lui, sa femme, ou ses enfants, soit de coups ou de paroles injurieuses ; lorsqu'il a déshonoré la femme ou la fille de son seigneur, ou qu'il a attenté à la vie de son seigneur, de sa femme, ou de ses enfants.

Boniface, tom. V. liv. III. tit. j. ch. xjx. rapporte un arrêt du parlement de Provence du mois de Décembre 1675, qui condamna un vassal à une amende honorable, et déclara ses biens confisqués, pour avoir dépouillé son seigneur dans le cercueil, et lu avoir dérobé ses habits.

Le roi Henri II. déclara, en 1556, coupables de félonie tous les vassaux des seigneurs qui lui devaient apporter la foi et hommage, et ne le faisaient pas, tels que les vassaux de la Franche-Comté, de Flandres, Artais, Hainaut, etc.

Le démenti donné au seigneur est aussi réputé félonie ; il y a deux exemples de confiscation du fief prononcée dans ce cas contre le vassal, par arrêts des 31 Décembre 1556 et Mai 1574, rapportés par Papon, liv. XIII. tit. j. n. 11. et par Bouchel, bibliot, verbo félonie.

Le désaveu est différent de la félonie, quoique la commise ait lieu en l'un et l'autre cas.

Le crime de félonie ne se peut commettre qu'envers le propriétaire du fief dominant, et non envers l'usufruitier, si ce n'est à l'égard d'un bénéficier, lequel tient lieu de propriétaire, auquel cas le fief servant n'est pas confisqué au profit du bénéficier, mais de son église.

La peine ordinaire de la félonie est la confiscation du fief au profit du seigneur dominant ; un des plus anciens et des plus mémorables exemples de cet usage, est la confiscation qui fut prononcée pour félonie commise par le seigneur de Craon contre le roi de Sicîle et de Jérusalem. Par arrêt du parlement de Paris, de l'an 1394, ses biens furent déclarés acquis et confisqués à la reine, avec tous les fiefs qu'il tenait de ladite dame, tant en son nom que de ses enfants ; et comme traitre à son seigneur et roi, il fut condamné en 100000 ducats et banni hors du royaume ; mais l'exécution de cet arrêt fut empêchée par le roi son oncle et par le duc d'Orléans. Papon, liv. XIII. tit j. n. 11.

Les bénéficiers coupables de félonie ne confisquent pas la propriété du fief dépendant de leur bénéfice, mais seulement leur droit d'usufruit. Forget, ch. xxiij.

La félonie et rebellion de l'évêque donnent ouverture au droit de regale, ainsi qu'il fut jugé par un arrêt du parlement de Paris, du mois d'Aout 1598. Filleau, part. IV. quest. 1.

Celui qui tient un héritage à cens, doit aussi être privé de ce fonds pour félonie. Lapeyrere, lett. f. n. 61. et 114.

Mais la confiscation pour félonie, soit contre le vassal ou contre le censitaire, n'a pas lieu de plein droit ; il faut qu'il soit intervenu un jugement qui l'ordonne sur les poursuites du seigneur dominant Voyez Andr. Gail. lib. II. observ. 51.

Outre la peine de la commise, le vassal peut être condamné à mort naturelle, ou aux galeres, au bannissement, en l'amende honorable, ou en une simple amende, selon l'atrocité du délit qui dépend des circonstances.

Si le seigneur dominant ne s'est pas plaint de son vivant de la félonie commise envers lui par son vassal, il est censé lui avoir remis l'offense, et ne peut pas intenter d'action contre ses héritiers, à moins qu'elle n'eut été commencée du vivant du seigneur dominant et du vassal qui a commis l'offense. Voyez Balde sur la loi dernière, cod. de revoc. Donat ; Mynsinger, cent. IIIe observ. 97. Wourmser, tit. IIe de feud. observ. 36. n. 2. et 3. Decianus, rep. 23. n. 15. vol. I. Wulteius, de feudis, c. XIe n. 13. Obrecht, de jure feudor. lib. IV. cap. VIIIe p. 57. Voyez aussi le manifeste fait en 1703, par le comte Paul Perroni pour le duc de Mantoue, cité au ban de l'Empire, qui forme un traité complet du droit féodal par rapport à la félonie. (A)

Félonie du seigneur envers son vassal, est lorsque le seigneur commet contre lui quelque forfait et déloyauté notable.

Cette espèce de félonie fait perdre au seigneur dominant l'hommage et la mouvance du fief servant, qui retourne au seigneur suzerain de celui qui a commis la félonie, et le vassal outragé par son seigneur est exempt, et ses successeurs, pour toujours de la juridiction du seigneur dominant, et de lui payer aucuns droits seigneuriaux, ce qui est fondé sur ce que les devoirs du seigneur et du vassal sont réciproques ; le vassal doit honneur et fidélité à son seigneur et celui-ci doit protection et amitié à son vassal.

Le plus ancien et le plus fameux exemple que l'on rapporte de la confiscation qui a lieu en ce cas contre le seigneur dominant, est celui de Clotaire I. lequel, au rapport de Guaguin, du Haillan, et quelques autres historiens, fut privé de la mouvance de la seigneurie d'Yvetot en Normandie, pour avoir tué dans l'église, le jour du vendredi saint, Gauthier seigneur de ce lieu, lequel ayant été exilé par ce prince, était revenu près de lui muni de lettres du pape Agapet. On prétend que Clotaire pour réparer son crime, érigea Yvetot en royaume ; mais cette histoire, dont on n'a parlé pour la première fois que 900 ans après la mort de ceux qui y avaient quelque part, est regardée comme fabuleuse par tous les bons historiens.

Chopin, sur la coutume d'Anjou, liv. II. part. III. tit. IVe ch. IIe n. 2. rapporte un arrêt du 13 Mars 1562, par lequel un seigneur fut privé de la foi, hommage, et service que son vassal lui devait pour lui avoir donné un soufflet dans une chambre du parlement de Paris.

Voyez les coutumes de Laon, articles 196. et 197. Chalons, art. 197. et 198. Rheims, art. 129. et 130. Ribemont, art. 31. Saint-Pol, art. 32. et Billecoq, tr. des fiefs, liv. XII. ch. IIe IVe et XIIIe (A)