(Médailles, Art numismatique) le dictionnaire de Trévoux dit contourniates, qui me parait moins bon. On appelle contorniates, des médailles de cuivre terminées dans leur circonférence par un cercle d'une ou de deux lignes de largeur, continu avec le métal, quoiqu'il semble en être détaché par une rainure assez profonde qui règne à l'extrémité du champ, de l'un et l'autre côté de la médaille. Cette sorte particulière de cercle fait aisément distinguer les médailles contorniates, de celles qui sont enchâssées dans les bordures du même ou d'un différent métal. Quoiqu'on put dire que le nom de contorniate vient du mot conturnus, contour, employé dans nos vieux titres, comme on voit dans le glossaire de M. Ducange ; cependant M. Mahudel prétend qu'il en faut chercher l'origine en Italie, où ces médailles sont appelées medaglioni contornati : mais tout cela revient au même.

Les antiquaires conviennent assez qu'elles n'ont jamais servi de monnaie. Le cercle qui les termine, plus parfait que celui des médailles qui servaient de monnaie ; l'éminence de ce cercle, qui rend ces médailles moins propres à être maniées ; la difficulté qu'il y a eu de former la vive-arrête qu'on voit des deux côtés de ce cercle, et qui demandait un temps trop considérable ; la damasquinure qu'on aperçoit sur plusieurs de ces médailles dans le champ du côté de la tête, et sur quelques-unes des figures du revers, ouvrage dont la longueur ne s'accorde pas avec la célérité et la multiplication nécessaire pour la monnaie courante ; le défaut de sous-division en moitiés et en quarts, nécessaires dans le commerce de la monnaie pour remplir toutes les valeurs, comme on en trouve dans les autres médailles d'or, d'argent, et de cuivre ; et celui du decret ou de l'autorité qui parait sur les médailles qui servaient de monnaie, tel qu'était la formule de senatus-consulto, ou le nom du magistrat qui les faisait frapper : tout cela prouve que les contorniates n'ont jamais servi de monnaie. Il est vrai que l'on voit sur plusieurs de ces médailles des lettres, comme P. E. mais ces lettres sont le monogramme ou la marque des ouvriers qui fabriquaient ces pièces, et qui voulaient par-là se faire connaître.

M. Spanheim et M. Ducange ont cru que ces médailles étaient du temps des premiers empereurs dont les têtes y sont gravées, mais qu'elles avaient été retouchées sous leurs successeurs ; et ils les appellent nummi restituti. Le P. Hardouin pense bien différemment ; car il prétend que ce n'est que dans le XIIIe siècle qu'elles ont été fabriquées. M. Mahudel fixe la première époque de leur fabrication à la fin du IIIe siècle, et leur durée jusqu'au milieu du jv.

Quoiqu'il en sait, premièrement pour ce qui regarde les contorniates qui représentent des têtes d'hommes illustres, il est évident qu'elles ne sont pas de leur temps, puisque l'orthographe de leurs noms y est mal observée. Dans celle sur laquelle est la tête d'Homère, son nom est écrit avec un au lieu d'un O ; et dans celle de Salluste, avec une seule L, Salustius, au lieu de Sallustius, comme on le trouve dans les inscriptions lapidaires de son temps. On y voit aussi le nom d'auteur écrit autor, au lieu d'auctor, comme Quintilien l'écrit en parlant de ce même Salluste ; outre qu'à parler exactement, l'emploi de ce terme est contre le bon usage, et que du temps de cet historien on aurait dit historiae scriptor, et non pas auctor. 2°. Dans les contorniates où il y a des têtes grecques, on trouve des légendes latines, comme dans celle qui représente Alexandre, dont la légende Alexander magnus : quelle apparence que les Grecs de ce temps-là aient employé une langue étrangère ? 3°. Une nouvelle preuve que les contorniates qui ont la tête des premiers empereurs ne sont pas de leur temps, c'est la parfaite ressemblance de ces médailles avec celles qui représentent les empereurs des temps postérieurs, soit dans le gout, soit dans la gravure plate et grossière, dans le volume, dans les marques des ouvriers, dans le style des légendes, et dans la formation des caractères ; uniformité qu'on ne croira pas s'être soutenue depuis Alexandre jusqu'à Honorius. 4°. Ajoutez à cela que l'on voit également sur les médailles qu'on pourrait soupçonner être du haut empire, et sur celles qui sont d'un temps moins éloigné, les mêmes figures de rameaux, de palmes, d'étoiles, etc. ce qui supposerait que les mêmes monétaires ont vécu plusieurs siècles. 5°. Enfin les mêmes types sont répétés dans des contorniates qui représentent des princes qui ont regné dans différents temps.

Mais quoique ces médailles soient postérieures aux hommes illustres qu'elles représentent, il n'en faut pas conclure qu'elles soient méprisables : car outre qu'elles peuvent par leurs légendes nous apprendre beaucoup de choses d'un siècle éloigné, elles sont intéressantes en ce qu'elles nous ont conservé l'histoire de la Gymnastique. Voyez la dissert. de M. Mahudel, dans les mém. de l'acad. royale des Inscript. tome III. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT.