S. f. (Numismatique) numisma dans Horace ; pièce de métal frappée ou marquée, soit qu'elle ait été monnaie ou non.

Le goût pour les médailles antiques prit faveur en Europe à la renaissance des beaux-arts. Pétrarque, qui a tant contribué à retirer les Lettres de la barbarie où elles étaient plongées, rechercha les médailles avec un grand empressement ; et s'en étant procuré quelques-unes, il crut les devoir offrir à l'empereur Charles IV. comme un présent digne d'un grand prince.

Dans le siècle suivant, Alphonse roi de Naples et d'Aragon, plus célèbre encore par son amour pour les Lettres que par ses victoires, fit une suite de médailles assez considérable pour ce temps-là. A l'exemple de ce monarque, Antoine, cardinal de Saint Marc, eut la curiosité de former à Rome un cabinet de médailles impériales.

Cosme de Médicis commençait dans le même temps à Florence cet immense recueil de manuscrits, de statues, de bas-reliefs, de marbres, de pierres gravées et de médailles antiques, qui fut ensuite continué avec la même ardeur par Pierre de Médicis son fils, et par Laurent son petit-fils. Les encouragements et les secours que les Savants reçurent de la maison de Médicis, contribuèrent infiniment aux progrès rapides que les Lettres firent en Italie. Depuis la fin du XVe siècle, le goût de l'antique et l'étude des médailles s'y sont perpétués, et les cabinets s'y sont multipliés et perfectionnés.

L'Allemagne connut les médailles dans le XVIe siècle ; Maximilien I. en rassembla beaucoup, et inspira par son exemple aux Allemands l'amour pour ces précieux restes d'antiquité. Nous trouvons les essais de leur goût pour ces monuments, dans le livre de Jean Xuttichius sur la vie des empereurs et des Césars, enrichie de leurs portraits tirés des médailles antiques. Ce livre fut publié en 1525, réimprimé en 1534, et augmenté trois ans après de 42 médailles consulaires gravées en bois.

Budé fut le premier en France qui né pour l'étude de l'antiquité, fit une petite collection de médailles d'or et d'argent, avant même que d'écrire sur les monnaies des anciens. Il fut imité par Jean Grollier, Guillaume du Choul et quelqu'autres. Les progrès que cette science a fait ensuite dans ce royaume, sont trop connus pour qu'il soit nécessaire de nous y arrêter.

Le goût des médailles prit la plus grande faveur dans les Pays-Bas, lorsque Goltzius vint à s'y réfugier ; et ce goût passa bientôt la mer, pour jeter dans la grande-Bretagne des racines aussi vives que profondes.

A l'égard de l'Espagne, Antonio Augustini, mort archevêque de Tarragone en 1586, est le premier et parait être presque le seul qui se soit appliqué à connaître et à rassembler des médailles. Ce savant homme, l'un des plus célèbres antiquaires de son temps, essaya de répandre parmi ses compatriotes la passion qu'il avait pour les monuments antiques ; mais ses tentatives furent infructueuses, personne ne marcha sur ses traces.

Il n'en a pas été de même dans les autres pays que j'ai nommés. Dès l'an 1555 on avait Ve paraitre en Italie le discours d'Enée Vico, pour introduire les amateurs dans l'intime connaissance des médailles. L'auteur y traita de la plupart des choses qu'on peut y observer en général, des métaux sur lesquels on les a frappées, des têtes des princes qu'elles représentent ; des types gravés sur les revers, des légendes ou inscriptions qui se lisent sur les deux côtés de la médaille ; des médaillons et des contorniates ; des médailles fausses ou falsifiées ; enfin, des faits historiques dont on peut ou établir la vérité, ou fixer la date par le moyen des médailles ; de la forme des édifices publics qu'on y remarque ; des noms des personnages qu'on lit sur ces monuments, et des différentes magistratures dont il y est fait mention.

En 1576 Goltzius publia dans les Pays-Bas ses médailles des villes de Sicîle et de la grande Grèce ; l'année suivante Ursini mit au jour les monuments numismatiques des familles romaines jusqu'au règne d'Auguste ; entreprise continuée dans le même siècle par Adolphe Occo, jusqu'à la chute de l'empire.

A la foule de beaux ouvrages qui parurent dans le siècle suivant sur les médailles en général, les Antiquaires y joignirent les explications de toutes celles de leurs propres cabinets et des cabinets étrangers : alors on fut en état, par la comparaison de tant de monuments, soit entr'eux, soit en les confrontant avec les auteurs grecs et latins, de former des systèmes étendus sur l'art numismatique.

Plusieurs savants n'oublièrent pas d'étaler, peut-être avec excès, les avantages que l'Histoire et la Géographie peuvent tirer des médailles et des inscriptions ; il est vrai cependant que ces monuments précieux réunis ensemble, forment presque une histoire suivie d'anciens peuples, de princes, et de grandes villes ; et leur autorité est d'autant plus respectable, qu'ils n'ont pu être altérés. Ce sont des témoins contemporains des choses qu'ils attestent, revêtus de l'autorité publique, qui semblent n'avoir survécu à une longue suite de siècles et aux diverses révolutions des états, que pour transmettre à la postérité des faits plus ou moins importants, dont elle ne pourrait d'ailleurs avoir aucune connaissance. On n'ignore pas que M. Spanheim a réduit à des points généraux l'objet des médailles en particulier, pour en justifier l'utilité ; et M. Vaillant, rempli des mêmes vues, a distribué par règnes toutes les médailles des villes grecques sous l'empire Romain.

D'autres auteurs se tournant d'un autre côté, ont envisagé les médailles comme monnaie, et en ont comparé le poids et la valeur avec celle des monnaies modernes ; l'examen de ce seul point a déjà produit plusieurs volumes.

Enfin les ouvrages numismatiques se sont tellement multipliés, qu'on avait besoin d'une notice des savants qui ont écrit sur cette matière ; c'est ce qu'a exécuté complete ment le P. Banduri, dans sa bibliotheca nummaria, imprimée à la tête de son grand ouvrage des médailles depuis Trajan Dece, jusqu'à Constantin Paléologue.

Mais ce siècle ayant trouvé quantité de nouvelles médailles, dont on a publié des catalogues exacts, c'est aujourd'hui qu'on est en état de rendre par ce moyen l'histoire des peuples plus détaillée et plus intéressante qu'on ne pouvait la donner dans le siècle précèdent.

Voilà comment la science des médailles s'étant insensiblement perfectionnée, est devenue, parmi les monuments antiques, celle qui se trouve la plus propre à illustrer ceux qui la cultivent. Il ne faut pas s'étonner du goût qu'on a pris pour elle : son étude brillante n'est point hérissée des épines qui rendent les autres sciences tristes et fâcheuses. Tout ce qui entre dans la composition d'une médaille contribue à rendre cette étude agréable : les figures amusent les yeux ; les légendes, les inscriptions, les symboles toujours variés, reveillent l'esprit et quelquefois l'étonnent. On y peut faire tous les jours d'heureuses découvertes : son étendue n'a point de bornes ; les objets de toutes les sciences et de tous les arts sont de son ressort, surtout l'Histoire, la Mythologie, la Chronologie, et l'ancienne Géographie.

Je voudrais bien traiter un peu profondément cette belle science dans tous les articles qui la concernent, entr'autres dans son article générique, et c'est à quoi du-moins je donnerai mes soins ; mais pour éviter que ma faible vue ne m'égare dans cette entreprise, j'emprunterai mes lumières des instructions du P. Jobert, des excellentes notes dont M. le baron de la Bastie les a enrichies ; des mémoires de l'académie des Inscriptions, et de tous les autres livres propres à me guider. Je tâcherai de mettre de la netteté dans les subdivisions nécessaires, et de remplir avec exactitude les articles particuliers. Le lecteur en les rassemblant y pourra trouver les secours suffisans pour acquérir les éléments de la science numismatique, et peut-être pour l'engager à en faire une étude plus profonde. L'on s'était proposé de faciliter cette étude par les Planches ; mais des hommes habiles nous ont représenté que les seules médailles très-rares allaient à plusieurs milliers.

Division générale des médailles. Toutes les médailles se partagent en deux classes générales, en antiques et en modernes ; car c'est de cette première notion que dépend l'estime et le prix des médailles.

Les antiques sont toutes celles qui ont été frappées jusque vers le milieu du IIIe ou jusqu'au ix. siècle de Jesus-Christ ; je suis obligé de m'exprimer ainsi, à cause du différent goût des curieux, dont les uns font finir les médailles antiques avec le haut empire, dès le temps de Galien, et même quelquefois avant Galien ; les autres seulement au temps de Constantin ; d'autres les portent jusqu'à Auguste, dit Augustule ; d'autres même ne les terminent qu'avec Charlemagne, selon les idées différentes qu'ils se forment, et qui sont purement arbitraires.

Les modernes sont toutes celles qui ont été faites depuis 300 ans : nous en ferons un article à part.

On distingue dans les antiques les grecques et les romaines : les grecques sont les premières et les plus anciennes, puisqu'avant la fondation de Rome les rois et les villes grecques frappaient de très-belles monnaies de tous les trois métaux, et avec tant d'art, que dans l'état le plus florissant de la république et de l'empire, l'on a eu bien de la peine à les égaler. On en peut juger par les médaillons grecs qui nous restent, car il y en a de frappés pour les rois et d'autres pour les villes de la Grèce. Il faut avouer que dans ce qui concerne les figures, les médailles grecques, généralement parlant, ont un dessein, une attitude, une force et une délicatesse à exprimer jusqu'aux muscles et aux veines, qui, soutenues par un très-grand relief, leur donnent une juste préférence en beauté sur les romaines.

Ces dernières sont consulaires ou impériales. On appelle médailles consulaires celles qui ont été frappées pendant que la république romaine était gouvernée par les consuls ; on nomme médailles impériales celles qui ont été faites sous les empereurs.

Parmi les impériales on distingue le haut et le bas empire ; et quoiqu'à l'égard de ce qu'on appelle moderne les médailles des empereurs jusqu'aux Paléologues passent pour antiques, encore qu'elles descendent jusqu'au XV. siècle, les curieux en gravure n'estiment que celles du haut empire, qui commence à Jules-César ou à Auguste, et finit, selon eux, au temps des trente tyrants. Ainsi les médailles du haut empire s'étend environ depuis l'an 700 de Rome, 54 ans avant Jesus-Christ, jusqu'à l'an 1010 de Rome ou environ, et de Jesus-Christ environ 260.

Le bas empire comprend près de douze cent ans, si l'on veut aller jusqu'à la ruine de l'empire de Constantinople, qui arriva l'an 1453, que les Turcs s'en rendirent les maîtres ; de sorte qu'on ne reconnut plus que l'empire d'Occident dans tout le monde chrétien. Ainsi l'on peut y trouver deux différents âges ; le premier depuis l'empire d'Aurelien ou de Claude le Gothique, jusqu'à Héraclius, qui est d'environ 350 ans ; le deuxième depuis Héraclius jusqu'aux Paléologues, qui est de plus de 800 ans.

Des différents métaux qui composent les médailles. Le prix des médailles ne doit pas être considéré précisément par la matière, c'est un des premiers principes de la science des médailles : souvent une même médaille frappée sur l'or sera commune, qui sera très-rare en bronze ; et d'autres fort estimées en or, le seront très-peu en argent et en bronze. Par exemple, un Othon latin de grand bronze, n'aurait pas de prix : on ne connait que des médailles d'Othon en moyen bronze, frappées dans l'Orient, à Antioche et en Egypte, elles sont même très-précieuses ; mais un Othon d'or ne vaut que quelques pistoles au-dessus de son poids, qui est environ de deux gros ; et le même Othon d'argent ne vaut qu'un écu au-delà de ce qu'il pese, excepté qu'il n'eut quelque revers extraordinaire qui en augmentât le prix. Si même l'on pouvait recouvrer quelques-unes des monnaies de cuir qui étaient en usage à Rome avant le règne de Numa, et que l'histoire nomme asses scortei, on n'épargnerait rien pour les mettre à la tête d'un cabinet.

Il est utîle de connaître les métaux antiques, afin de n'y être pas trompé, et de savoir ce qui forme les différentes suites où les métaux ne doivent jamais être mêlés, si ce n'est lorsque pour rendre la suite d'argent plus ample et plus complete , on y place certaines têtes d'or qui ne se trouvent plus en argent ; car cela s'appelle enrichir une suite. Ajoutons cependant que dans la suite des rois et des villes, il est assez d'usage de mêler ensemble les trois métaux, et même les différentes grandeurs : c'est aussi ce qui se pratique ordinairement dans la suite des médailles consulaires ; mais cela vient de ce qu'il y a des têtes de rois et des familles romaines qui ne se trouvent que dans l'un des trois métaux et sur ces pièces de différent volume, outre l'extrême difficulté qu'il y aurait de rassembler un assez grand nombre de ces têtes de même métal et de même volume, pour en composer une suite.

On voit déjà par ce détail que la matière des médailles antiques se réduit à trois principaux métaux, l'or, l'argent et le cuivre, qu'on nomme bronze par honneur. Les médailles d'or, à ne parler que des seules impériales, peuvent être d'environ trois mille : les médailles d'argent vont bien à six mille ; mais les médailles de bronze, en y comprenant les trois différentes grandeurs, pourraient aller à plus de trente mille, puisque le petit bronze seul s'étend peut-être jusqu'à vingt mille. Le célèbre Morel, que la mort surprit lorsqu'il travaillait à exécuter le grand et utîle dessein de graver toutes les médailles connues, se proposait d'en représenter vingt-cinq mille, quoiqu'il terminât la suite des impériales à l'empereur Héraclius. Si donc au nombre des médailles impériales en or, en argent, et dans les trois grandeurs de bronze, on y ajoutait les médaillons en tous métaux, les quinaires, les potins, les plombs antiques, les consulaires, les médailles des rois et des villes grecques, il est vraisemblable que le nombre des médailles antiques connues passerait cinquante mille.

On ne peut guère réfléchir sur la découverte de tant de médailles, sans venir à se persuader qu'elles étaient originairement des monnaies répandues dans le commerce, c'est-à-dire des espèces courantes ou dans tout l'empire, ou du-moins dans les pays où elles ont été battues.

1°. L'usage des métaux monnoyés a de tous temps été dans l'Empire, comme il est encore aujourd'hui parmi nous : cet usage est absolument nécessaire dans le commerce, depuis qu'on ne trafique plus par le seul échange des marchandises ; il faut donc croire qu'il n'a point été interrompu dans le siècle de Constantin, non plus que dans les précédents. On ne peut douter que durant tant de siècles on n'ait frappé une bien plus grande quantité de pièces de monnaies que de jetons, qui n'avaient aucun cours dans le commerce. Par quel miracle serait-il arrivé que ces jetons seuls se fussent conservés, qu'on en trouvât une infinité par-tout, et qu'au contraire il ne nous fût resté aucune monnaie ? Quand on me dit qu'il nous est resté beaucoup moins de médaillons que de médailles, je répons aussi-tôt que les médaillons n'étaient d'aucun usage dans le commerce, et qu'il s'en frappait beaucoup moins que de monnaies ; mais quand on me demande pourquoi on trouve une infinité de médailles, et qu'il ne nous reste plus aucune monnaie antique, je serais forcé, si je convenais du fait, d'avouer que c'est un prodige.

2°. Il est constant que la plupart des médailles, soit d'argent, soit de bronze, que nous avons du temps de la république (car pour parler médaille, tout le monde sait qu'on donne le nom de bronze au cuivre), il est constant, dis-je, que c'étaient les monnaies courantes. La plupart en portent la marque indubitable, qui est la valeur de chacune ; sur celles d'argent le Xa. le Q. II-S, sont voir qu'elles valaient tant d'as ; et sur celles de bronze, le nombre de 0. 00. 000. 0000. dit qu'elles valaient une once, deux onces, trois onces, quatre onces, etc. Pourquoi donc du temps des empereurs n'aurait-on pas continué la même chose, quoique ces marques ne s'y trouvent pas ? c'est que l'usage commun faisait assez savoir, comme à-présent, la valeur de chaque pièce.

Ainsi nous ne nous étendrons point à répéter les preuves que Patin a données après Savot et les autres antiquaires, que toutes les médailles que nous avons sont les vraies monnaies dont on se servait dans ces temps-là : il suffit de rappeler ceux qui seraient d'un sentiment contraire à ce miracle, qui sera toujours inconcevable, puisqu'il n'y aurait que les médailles qui auraient eu le bonheur de se conserver jusqu'à nos temps, pendant que toutes les monnaies absolument se seraient perdues, sans que dans ces trésors qu'on tire encore tous les jours des entrailles de la terre, on en put rencontrer une seule.

3°. Quand les médailles déclarent elles-mêmes qu'elles sont des monnaies, il me semble qu'on doit les en croire sur leur propre témoignage. Or nous avons dans le siècle de Constantin plusieurs médailles qui portent pour légende, Sacra Moneta Augg. et Caes. NN. Pourquoi ne vouloir pas lire dans les lettres initiales de l'exergue, ce qui se lit dans la légende tout au long, en expliquant S. M. par Sacra Moneta, plutôt que par Societas Mercatorum ?

Nous avons aussi des médailles qui portent Moneta Urbis. Cela veut dire des jetons ? Ce qui s'appelle monnaie du prince ou monnaie de la ville, n'est point sans doute un présent fait par des marchands gaulois. Nous avons enfin Moneta Augusti, et Moneta Augg. Dans Hadrien, dans Antonin, dans Septime Sevère et sous presque tous ses successeurs ; dans Trajan Dèce, Trébonien, Galle, Volusien, Valérien, Galien, Salonien, Posthume, Tétricus, Claude le gothique, Tacite, Florien, Carus, Carin, Numérien, etc. nous avons Moneta Augusti sur les médailles de quelques princesses, comme de Julia Pia, etc. Sous d'autres empereurs où on ne trouve pas Moneta, on trouve Aequittas Aug. avec le même type d'une femme assise ou debout qui tient une balance.

Cependant je ne voudrais pas décider que toutes les médailles absolument sans exception, fussent originairement des monnaies ; je crois cela presque toujours vrai, mais il peut se faire qu'en certaines occasions on ait frappé des médailles au poids et au titre de la monnaie courante, sans avoir dessein de les faire passer dans le commerce, et uniquement dans la vue de conserver la mémoire de quelque événement remarquable, ou par d'autres raisons particulières ; mais s'il se trouve de ces médailles, elles sont en si petit nombre, que l'opinion d'Erizzo et du P. Hardouin n'en est pas moins insoutenable.

Des différentes grandeurs qui forment les suites en bronze. La grandeur de toutes les médailles antiques n'est ordinairement que depuis trois pouces de diamètre jusqu'à un quart de pouce, soit en or, soit en argent, soit en cuivre, qui sont les principaux métaux sur lesquels travaillaient les monétaires.

On appelle médaillons les médailles qui sont d'une grandeur extraordinaire. Voyez MEDAILLON.

Il y a une si grande quantité de médailles de bronze, qu'on les sépare en trois grandeurs, qui forment ces trois différentes suites dont les cabinets sont remplis, le grand bronze, le moyen bronze et le petit bronze : on juge du rang de chacun par son volume, qui comprend en même temps l'épaisseur et l'étendue de la médaille, la grosseur et le relief de la tête ; de sorte que telle médaille qui aura l'épaisseur du grand bronze, pour n'avoir que la tête du moyen, ne sera que de la seconde grandeur. Telle autre qui n'aura presque point d'épaisseur, pour avoir la tête assez grosse, sera rangée parmi celles de la première grandeur. L'inclination du curieux y fait beaucoup ; car ceux qui préfèrent le grand bronze y font entrer beaucoup de médailles qui dans le vrai ne sont que de moyen bronze, y placent des médailles qui devraient être mises dans le grand, particulièrement pour avoir des têtes rares, qu'on a peine à trouver dans toute sorte de grandeur. Ainsi l'Othon de moyen bronze, l'Antonia, le Drusus, le Germanicus, se mettent dans le grand bronze ; et d'autres têtes du petit bronze se placent dans le moyen, sans que personne se soit opiniâtré à faire un procès sur cela aux curieux, pour les contraindre à déranger leurs cabinets.

Chacune de ces grandeurs a son mérite : la première, qui fait le grand bronze, excelle par la délicatesse et la force du relief, et par les monuments historiques dont les revers sont chargés, et qui y paraissent dans toute leur beauté : la seconde, qui est le moyen bronze, se fait considérer par la multitude et par la rareté des revers, surtout à cause d'une infinité de villes grecques et latines, qu'on ne trouve presque point en grand bronze : la troisième, qui fait le petit bronze, est estimable par la nécessité dont elle est dans le bas empire, où le grand et le moyen bronze abandonnent les curieux, et où l'un et l'autre, quand ils se rencontrent, passent pour médaillon.

Il faut savoir, pour ne pas se donner une peine inutile, que la suite complete du grand bronze ne s'étend point au-delà des Posthumes, parce qu'il est infiniment rare de trouver dans le bas empire des médailles de ce volume : celles qui se rencontrent depuis Anastase n'ont communément ni l'épaisseur, ni le relief, ni la grosseur de tête suffisante ; cependant sans passer les Posthumes, on peut, comme nous l'avons dit, pousser la suite au-delà de trois mille.

La suite de moyen bronze est la plus facîle à former et la plus complete , parce que non-seulement elle Ve jusqu'aux Posthumes, mais jusqu'à la décadence de l'Empire romain en Occident et même en Orient jusqu'aux Paléologues. A la vérité, depuis Héraclius, il est difficîle de les trouver toutes : on est forcé d'interrompre la suite ; mais cela peut venir du peu de soin qu'on a eu de les conserver, à cause qu'elles sont si grossières et si informes, qu'il semble que la gravure ne fait plus alors que gratter misérablement le métal ; et rien ne prouve mieux la désolation de l'Empire que la perte universelle de tous les beaux-arts, qui parait si sensiblement dans celui de la Gravure.

La suite de petit bronze est assez aisée à former dans le bas empire, puisqu'on a de ces sortes de médailles depuis les Posthumes jusqu'à Théodose ; mais depuis Jules jusqu'aux Posthumes, il est très-difficîle de la remplir ; et depuis Théodose jusqu'aux Paléologues, avec qui l'empire des Grecs a fini, il est absolument impossible d'y parvenir sans le secours de l'or et de l'argent, et même de quelques moyens bronzes : car ce n'est que de cette manière que M. Ducange, un des savants hommes du dernier siècle dans l'Histoire, nous a donné cette suite dans son livre des familles, qu'on nomme byzantines, parce qu'elles ne sont venues à l'empire qu'après la fondation de Constantinople, dite auparavant Byzance, dont Constantin fit une nouvelle Rome. Aussi a-t-elle fait gloire d'oublier son ancien nom pour prendre celui de son restaurateur.

Il ne faut donc point espérer d'avoir aucune suite complete de chaque métal en particulier, ni de chaque grandeur différente, mais on ne doit pas pour cela les gâter par le mélange des différents métaux ; cependant on permet, pour la satisfaction de ceux qui veulent avoir une suite des plus complete s, de mêler le petit bronze avec le moyen, afin de se voir sans interruption notable, conduits depuis la république romaine, qui perdit sa liberté sous Jules-César, jusqu'aux derniers empereurs grecs, qui furent détrônés par les Turcs l'an 1453. Ainsi la suite des médailles nous trace pour ainsi dire l'histoire de plus de quinze siècles.

Des suites de médailles par les têtes et par les revers. On peut encore composer des suites fort curieuses par les têtes des médailles, en rangeant par ordre les médailles des rais, des villes, des familles romaines, des empereurs et des déités : ce sont autant de classes sous lesquelles on distribue toutes les différentes suites de médailles, comme nous l'expliquerons fort au long au mot SUITE, Art numismatique.

Quant aux revers qui rendent les médailles plus ou moins curieuses, nous en détaillerons le mérite au mot REVERS ; mais dès qu'on est parvenu à former les suites de médailles d'un cabinet, il s'agit de connaître l'état de chaque médaille, parce que c'est delà que dépend particulièrement leur prix et leur beauté.

De l'état et de la beauté des médailles. Les antiques médailles ne sont les plus belles et les plus précieuses que lorsqu'elles sont parfaitement conservées ; je veux dire lorsque le tour de la médaille et le grenetis en sont entiers, que les figures imprimées sur les deux côtés en sont connaissables, et que la légende en est lisible.

Il est vrai que cette parfaite conservation est quelquefois un juste sujet d'avoir la médaille pour suspecte, et que c'est par-là que le Padouan et le Parmésan ont perdu leur crédit. Cependant ce n'est point une preuve infaillible qu'elle soit moderne, puisque nous en avons quantité d'indubitables, de tous métaux, et de toutes grandeurs, que l'on appelle fleur de coin, parce qu'elles sont aussi belles, aussi nettes, et aussi entières que si elles ne faisaient que de sortir de la main de l'ouvrier.

Le prix de la médaille antique augmente encore par une autre beauté que donne la seule nature, et que l'art jusqu'à présent n'a pu contrefaire, c'est le vernis que certaine terre fait prendre aux médailles de bronze, et qui couvre les unes d'un bleu turquin, presque aussi foncé que celui de la turquaise ; les autres d'un certain vermillon encore inimitable ; d'autres d'un certain brun éclatant et poli, plus beau sans comparaison que celui de nos figures bronzées, et dont l'oeil ne trompe jamais, ceux même qui ne sont que médiocres connaisseurs, parce que son éclat passe de beaucoup le brillant que peut donner au métal le sel armoniac mêlé avec le vinaigre. Le vernis ordinaire est d'un vert très-fin, qui sans effacer aucun des traits les plus délicats de la gravure, s'y attache plus proprement que le plus bel émail ne fait aux métaux où on l'applique. Le bronze seul en est susceptible ; car pour l'argent, la rouille verte qui s'y attache ne sert qu'à le gâter, et il faut l'ôter soigneusement avec le vinaigre ou le jus de citron, lorsqu'on veut que la médaille soit estimée.

Quand donc vous trouverez une médaille fruste ordinaire, c'est-à-dire à laquelle il manque quelques-unes des choses nécessaires, soit que le métal soit écorné ou rogné, le grenetis effleuré, les figures biffées, la légende effacée, la tête méconnaissable ; ne lui donnez point de place dans votre cabinet : mais plaignant le sort malheureux des grandeurs humaines, laissez aller ces princes qui ont autrefois fait trembler la terre, mollir sur l'enclume de l'orfévre, ou sous le marteau du chaudronnier.

Si néanmoins c'étaient de certaines médailles si rares, qu'elles pussent passer pour uniques, ou que l'un des deux côtés fût encore entier, ou que la légende fût singulière ou lisible, elles mériteraient fort d'être gardées, et ne laisseraient pas d'avoir leur prix.

En effet, on voit peu de cabinets où il n'y en ait quelqu'une de mal conservée, et l'on est trop heureux quand on peut avoir, même avec imperfection, certaines têtes rares, pourvu qu'elles soient tant sait-peu connaissables ; il ne faut pas surtout se rebuter pour une légende effacée, quand le type est bien conservé ; puisqu'il y a des savants qui les déchiffrent à merveille, témoins M. Vaillant et M. Morel, qui par un peu d'application, rappelaient les mots les plus invisibles, et ressuscitaient les caractères les plus amortis.

Il est bon de savoir que les bords des médailles, éclatées par la force du coin, ne passent pas pour un défaut qui diminue le prix de la médaille, quand les figures n'en sont point endommagées ; au contraire, c'est un signe que la médaille n'est point moulée ; ce signe néanmoins ne laisse pas d'être équivoque, à l'égard de ceux qui auraient battu sur l'antique, car cela ne prouverait pas que la tête ou le revers ne fût d'un coin moderne, et peut-être tous les deux.

Prenez garde aussi à ne pas rebuter les médailles d'argent dont les bords sont dentelés, et qu'on nomme numismata serrata, parce que c'est encore une preuve de la bonté et de l'antiquité de la médaille.

Mais il se trouve certains défauts qui nuisent à la beauté des médailles, et qu'on ne peut attribuer qu'à la négligence des monnoyeurs ; par exemple, lorsque le coin ayant coulé forme deux têtes pour une, deux grenetis ou deux légendes ; lorsque les lettres de la légende sont ou confondues ou supprimées, ou déplacées, comme on en voit communément sur les médailles de Claude-le-Gothique, et des trente tyrants, ce sont des monstres dont il ne faut point faire des miracles ; car quoique cela n'empêche pas que la médaille ne soit antique, cependant le prix au-lieu d'en augmenter en diminue notablement. Quant à certaines médailles qui ont une tête d'empereur avec quelques revers bizarres, ou avec des revers qui appartiennent à un autre empereur que celui dont elles portent la tête, il n'en faut faire aucune estime, puisque ce n'est qu'un effet de l'ignorance ou de la précipitation du faux monnoyeur.

Enfin il arrive quelquefois que ce monnoyeur oublie de mettre les deux carrés, et laisse ainsi la médaille sans revers : on nomme incuses ces sortes de médailles. Voyez MEDAILLE INCUSE.

C'est ici le lieu de parler des contre-marques, que les jeunes curieux pourraient prendre pour des disgraces arrivées aux médailles, dont elles entament le champ, quelquefois du côté de la tête, d'autres fois du côté du revers, particulièrement dans le grand et moyen bronze, assez semblables à ces marques qui se voient sur nos sous, que le peuple nomme tappés ; à cause que l'impression du coup qu'ils ont reçu, quand on leur a fait cette marque, y est demeurée : cependant ce sont des beautés pour les savants, qui recherchent les médailles où sont des contre-marques.

On en trouve sur les médailles des rois et des villes grecques, sur celles des colonies, et sur les impériales. Il y a quelquefois plus d'une contre-marque sur la même médaille, mais les Antiquaires n'en ont jamais Ve au-delà de trois. Rien n'est moins informe que ces contre-marques ; même sur les médailles latines : le plus souvent ce sont des lettres liées ensemble, qui expriment simplement le nom de l'empereur ; quelquefois ce sont les lettres S. C. Senatus-Consulto, sur les médailles frappées dans les monnaies de Rome, D. D. Decreto Decurionum ; sur les médailles des colonies, comme sur une de Sagonte, et sur une autre de Nismes, ou enfin N. C. A. P. R. que Golthius expliquait avec Angeloni, Vicus et Manuce, par Nobis Concessum A Populo Romano, formule qu'on peut peut-être mieux interpreter par Nummus Cusus, Auctoritate Populi Romani ; d'autres fois ces contre-marques sont des types, tantôt accompagnés de lettres, comme sur une médailles de Jules-César, frappée à Bérite, où l'on voit au contre-marque une corne d'abondance au milieu de deux C ; et tantôt sans lettres, comme une petite roue, qui porte sur les têtes d'Auguste et d'Agrippa, dans une médaille de la colonie de Nismes ; et une tête de taureau gravée sur le cou de Domitien, dans une médaille de ce prince. Le malheur est que d'un côté les Antiquaires ne conviennent pas de la signification de plusieurs contremarques, et que de l'autre ils savent encore moins les raisons qui les ont fait naître, comme nous le dirons au mot MEDAILLES CONTRE-MARQUEES.

Quant au relief des médailles, voyez RELIEF ; il suffit d'observer ici que c'est une beauté, mais qui n'est pas une marque indubitable de l'antique.

Des fourberies en médailles. Non-seulement il est facîle d'attraper les nouveaux curieux, par de fausses médailles, auxquelles on donne du relief, mais il est encore aisé de les surprendre à plusieurs autres égards, principalement lorsqu'ils sont dans la première ardeur de leur passion pour les médailles, et qu'ils se trouvent assez opulents pour ne pas appréhender la dépense. On les voit tous les jours se livrer à la mauvaise foi et à l'avarice des trafiquans, qu'on nomme par mépris brocanteurs, faute d'en soupçonner les artifices. Ils sont trompés d'autant plus aisément, que les meilleurs connaisseurs se trouvent partagés sur de certaines médailles, que les uns croient antiques et les autres modernes ; les uns moulées, les autres frappées, à peu-près comme il arrive par rapport aux tableaux, où les yeux les plus savants ne laissent pas de prendre quelquefois un original pour une copie, et une copie pour l'original. Le danger est encore devenu plus grand pour les amateurs des médailles, depuis que parmi les Médaillistes il s'est trouvé un Padouan et un Parmésan en Italie, qui ont su imiter parfaitement l'antique.

Pour dévoiler tout ce mystère, il faut commencer par indiquer les manières différentes de falsifier les médailles, et le moyen de reconnaître la falsification, afin que le mal ne demeure pas sans remède.

La première et la plus grossière, est de fabriquer des médailles qui jamais n'ont existé, comme celle de Priam, d'Enée, de Cicéron, de Virgile, et semblables personnages illustres, pour qui le Parmésan, et quelques autres ouvriers modernes, ont fait des coins tout exprès, afin de surprendre les curieux, animés du désir d'avoir des médailles singulières.

C'est avec la même mauvaise foi, et par le même motif d'intérêt, que l'on a fabriqué des revers extraordinaires, et capables de piquer la curiosité ; par exemple, un Jules-César, avec ces mots, Veni, vidi, vici ; un Auguste avec ces deux-ci, Festina lente ; car quoique ce bon mot soit effectivement d'Auguste, cependant on ne s'était pas avisé d'en conserver la mémoire sur le métal.

Il est aisé à ceux qui ne sont pas novices dans l'inspection des médailles, de reconnaître l'imposture : car toutes ces médailles sont moulées, ou frappées d'un coin et d'un métal qui parait d'abord ce qu'il est, c'est-à-dire moderne, et qui n'a ni la fierté ni la tendresse de l'antique.

Le seconde fourbe est de mouler les médailles antiques, de les jeter en sable, et puis de les réparer si adroitement, qu'elles paraissent frappées. On s'en aperçoit par les grains de sable, qui s'impriment toujours d'une certaine manière visible sur le champ de la médaille, ou par certaines petites enfonçures, ou par les bords qui ne sont pas assez polis ni arrondis, ni si licés que ceux des médailles frappées, ou par les caractères qui ne sont point francs, mais pochés et épatés : ou enfin par les traits qui ne sont ni si vifs ni si tranchans. On les reconnait aussi par le poids qui est toujours moindre ; car le métal fondu par le feu se raréfie, au-lieu que lorsqu'il est battu il se condense, et devient par conséquent plus pesant ; enfin quand la médaille est jetée en moule, il reste ordinairement la marque du jet, qui ne peut être bien effacée par la lime ; et les bords qui ont besoin d'être arrondis, laissent aussi voir les coups de lime, qui sont une marque essentielle de fausseté.

Comme les hommes de viennent de jour en jour plus raffinés, les uns à tromper, les autres à se défendre de la tromperie, on a trouvé le moyen d'empêcher que l'on n'aperçut, dans le champ de la médaille, les enfonçures que les grains de sable y laissent par leur inégalité qui est inévitable. On les couvre d'un certain vernis obscur qui remplit ces petits creux, et l'on pique les bords pour les rendre raboteux. Si l'on parvient, sans le secours du vernis, à polir le champ avec le burin, la fourberie n'en est que plus savante. Il faut donc, pour s'en défendre, piquer le vernis, s'il y en a, et on le trouvera beaucoup plus tendre que le vernis antique ; et s'il n'y en a point, il faut étudier avec attention la médaille, dont le champ paraitra infailliblement plus enfoncé ; enfin si on a le toucher un peu délicat, on trouvera le métal trop poli, au lieu que l'antique a quelque chose de plus fort et de plus rude. Ceux qui ne savent point cette finesse, et la différence du poids dont nous avons parlé, admirent que l'on connaisse quelquefois les médailles fausses seulement à les manier.

Il ne faut pas néanmoins rejeter certaines médailles, qui ayant été enchâssées dans de petites bordures ou de métal, ou de corne, ou de bois, ont les bords limés, parce qu'il a fallu les arrondir, car cela n'empêche pas qu'elles ne soient bonnes et antiques : c'est pour cela que les connaisseurs disent communément que quelquefois les bords justifient le champ de la médaille, et que quelquefois aussi le champ rend témoignage aux bords, qui par accident ont reçu quelque disgrace.

La troisième ruse, est de réparer finement les médailles antiques, en sorte que de frustes et d'effacées qu'elles étaient, elles paraissent nettes et lisibles. On connait des gens qui y réussissent parfaitement, et qui savent avec le burin enlever la rouille, rétablir les lettres, polir le champ, et ressusciter des figures qui ne paraissent presque plus.

Quand les figures sont en partie mangées, il y a une sorte de mastic que l'on applique sur le métal, et qu'on retaille fort proprement ensuite : le tout étant couvert de vernis, fait paraitre les figures entières et bien conservées. On découvre ce déguisement avec le burin dont on se sert pour égratigner quelque petit endroit de la médaille ; si l'on s'aperçoit qu'il morde plus aisément sur une partie que sur l'autre, c'est la preuve que le morceau est ajouté.

Cependant, quand l'oeil est accoutumé aux médailles, on trouve sur celles-ci de certains coups de burin trop enfoncés, des bords trop élevés, des traits raboteux et mal polis, par lesquels on devine qu'elles ont été retouchées : cela ne dégrade pas absolument une médaille antique, mais le prix en diminue du tout au tout.

Le quatrième artifice, c'est de frapper des coins exprès sur certaines médailles antiques les plus rares, que l'on restitue de nouveau, et que l'on fait passer pour véritables, avec d'autant plus d'apparence, qu'il est visible qu'elles ne sont ni moulées ni retouchées.

C'est en quoi le Padouan et le Parmésan ont si bien réussi, que leurs fausses médailles sont devenues une partie de la curiosité. Le Padouan a plus de force, le Parmésan plus de douceur : en général on ne peut pas approcher de plus près l'antique que ces deux ouvriers l'ont fait. Cependant leur manière finie et délicate ne vaut point cet air fier de l'antique, qui tient beaucoup plus du grand. On les reconnait encore par le trop de conservation, qui les rend suspects ; par l'oeil du métal, et principalement par le poids qui est moindre que celui du métal antique. Peut-être encore que si l'on examinait avec attention les coins du Padouan, on pourrait les distinguer infailliblement des coins antiques. On sait, par exemple, que sur le revers de Tibere gravé par le Padouan, ces mots placés dans l'exergue, Rom. ET Aug. sont ponctués de façon que le T se trouve entre deux points, Rome. T. Aug. aussi n'est-il pas possible de s'y méprendre, quand la médaille est bien conservée : l'embarras n'a lieu que lorsque la ponctuation ne se voit pas.

La cinquième fraude, est de battre sur l'antique même, c'est-à-dire de se servir de coins modernes pour reformer de vieilles médailles avec le marteau, afin de leur donner ensuite une nouvelle empreinte.

Quoique cette tromperie soit difficîle à découvrir, surtout par un curieux qui commence, parce qu'il n'a aucune des indications communes ; cependant s'il veut bien prendre garde au relief, il le trouvera pour l'ordinaire ou trop fort, ou trop faible, la coupure trop nette et trop neuve, et les bords trop peu conservés, à proportion du champ et des figures.

Le sixième stratagème consiste à effacer un revers commun pour y en mettre un plus rare, ce qui augmente considérablement le prix de la médaille. Par exemple, on met une Otacille au revers de Philippe ; un Tite au revers de Vespasien ; c'est ainsi que l'on a gâté un Helvius-Pertinax de grand bronze, en lui mettant au revers un Milon crotoniate chargé de son bœuf ; un Domitien, en y mettant une allocution de huit soldats ; et un médaillon de Dece, en lui gravant une inscription, Deciana Caesarum, Decennalia feliciter.

On fait plus ; car afin que rien ne paraisse réparé, on coupe deux médailles, et puis avec un certain mastic on colle à la tête de l'une le revers de l'autre, pour faire des médailles uniques et qui n'aient jamais été vues ; on a même l'adresse de réparer si bien les bords, que les plus fins y sont ordinairement trompés. Le P. Jobert dit avoir Ve un Domitien de grand bronze d'une conservation merveilleuse, dont on avait enlevé le revers pour insérer à la place le bel amphithéâtre qu'on avait aussi enlevé par dessous le grenetis à une médaille de Titus. Morel, dans son Specimen R. Nummar. tom.... p. 77. rapporte un exemple d'une falsification à-peu-près pareille.

On connait ces faux revers ou par la différence qui se trouve immanquablement dans les traits d'une tête antique, et d'un revers moderne quelque bien travaillé qu'il puisse être ; ou lorsque le revers est antique et simplement appliqué, on le découvre en sondant les bords de la médaille, qui ne sont jamais si parfaitement unis que l'on ne s'aperçoive de quelque chose, et que les deux marques ne découvrent la jointure ou la différence du métal. Tel était un Vérus, à qui l'on avait attaché une Lucille, pour en faire une médaille rare, sans avoir considéré que le Vérus était de cuivre rouge, et Lucille de cuivre jaune.

La septième imposture se fait dans les légendes, soit du côté de la tête, soit du côté du revers. Il est plus ordinaire de le tenter du côté de la tête par l'intérêt qu'on a de trouver des têtes rares, ce qui manque communément dans les suites. Or, cela s'exécute en substituant avec adresse un nom à l'autre, surtout quand il y a peu de lettres à changer ou à ajouter. C'est ainsi que, dans le cabinet du P. Jobert, il y avait une Lucille changée en Domitia de grand bronze, et un jeune Gordien d'Afrique, moyennant l'addition d'un peu de barbe, et le changement des lettres P. F. en A F R. C'est encore ainsi que dans le cabinet de M. l'abbé de Rothelin, il y avait une Coelonia d'or, qui n'était autre chose qu'une Agrippine, mère de Caligula.

La huitième finesse trompeuse est de contrefaire le vernis antique, ce qui sert à empêcher qu'on ne reconnaisse les médailles moulées, et à cacher les défauts des bords et des caractères, comme nous l'avons déjà dit. Il y en a même qui mettent les médailles en terre, afin de leur faire contracter, si ce n'est le vernis, du-moins une certaine rouille qui en impose aux connaisseurs moins habiles : d'autres emploient le sel armoniac mêlé avec le vinaigre ; d'autres le simple papier brulé, qui est la manière la plus facile.

On se défend aisément de cette tromperie, parce qu'on ne peut donner au vernis moderne ni la couleur, ni l'éclat, ni le poli du vernis antique qui dépend de la terre. D'ailleurs on n'a pas la patience de laisser une médaille en terre assez longtemps pour qu'elle puisse y prendre cette belle rouille qu'on estime plus que le plus riche métal. Il faudrait être assuré d'une longue vie, et pouvoir compter sur un prince aussi dupe que l'était le pape Paul III. pour tenter ce qui réussit à un fourbe italien. Il fit frapper sur le plomb un buste de S. Pierre, avec ces mots, Petrus Apostolus Jesu Christi : au revers deux clés en pal, Tibi dabo claves regni coelorum. Il enfouit cette pièce fort avant en terre, et l'y laissa quelques années : ensuite faisant creuser dans cet endroit comme par hazard, on y trouva cette médaille qu'il décrassa soigneusement, et qu'il montrait à tout le monde comme un monument de la piété des premiers chrétiens. Le bruit s'en répandit bientôt à Rome : le pape voulut avoir cette médaille, il la demanda au possesseur, et la lui paya mille écus. Enfin le vernis moderne est tendre, et se pique aisément, au lieu que l'antique est dur comme le métal même.

La neuvième supercherie a pour fondement un accident qui arrive quelquefois aux médailles qu'on frappe, ce qui a fait dire aux Antiquaires que toute médaille, dont les bords ont éclaté, est infailliblement frappée. Pour profiter de cette préoccupation, ceux qui font de fausses médailles, tâchent de les faire éclater lorsqu'ils les frappent effectivement, ou même de les fendre tout exprès quand elles sont assez bien moulées.

On n'en sera pas la dupe si l'on examine ces fentes avec un peu de soin ; car quand elles ne sont point assez profondes, ou que la coupure n'en est pas franche, ou qu'elles ne finissent pas par certains filaments presque imperceptibles ; c'est une preuve que cela n'est point arrivé par l'effort du coin, mais par artifice.

Enfin le moyen général de se précautionner contre toutes les fourberies des brocanteurs, c'est de s'appliquer à la connaissance de l'antique qui comprend le métal, la gravure des coins et le poinçonnement des caractères ; c'est ainsi qu'on acquiert ces yeux, que Cicéron appelle oculos eruditos. Mais exiger d'un homme de lettres qu'il s'attache à démêler la différence de l'antique et du moderne, qu'il descende jusqu'au détail de la gravure et de la fabrique des médailles, n'est-ce point le réduire à la condition d'un simple artiste ? n'est-ce point même lui imposer une obligation qu'il sera hors d'état de remplir, puisque le goût qu'il doit avoir pour la lecture, ne peut s'accorder avec la dissipation inséparable de la vie d'un homme qui s'occuperait à visiter les cabinets ?

Nous conviendrions de la force de cette objection, si la connaissance du matériel de la médaille demandait une occupation longue et sérieuse, ou, si l'on ne supposait pas un goût né pour les médailles, dans celui qui veut acquérir cette connaissance. En effet, sans ce gout, ce serait faire trop peu de cas de son temps que de le consacrer à de tels soins. Mais il s'agit ici d'un curieux, en qui l'amour des lettres augmente le penchant naturel qu'il se sent pour déchiffrer ces précieux restes de l'antiquité. Il s'agit d'un curieux qui se propose sans cesse d'étudier le sens, l'esprit des médailles, et pour y parvenir de consacrer ses veilles à la lecture des ouvrages, dans lesquels il peut puiser des lumières. Nous allons donc lui en indiquer les principaux.

Livres sur les médailles. Je suppose qu'il sait aussi-bien que moi qu'on ne fera jamais de progrès dans l'art numismatique sans la connaissance des langues savantes, de l'Histoire grecque et romaine, de la Géographie ancienne et moderne, de la Chronologie et de la Mythologie. Si cependant je parlais à un jeune homme qui n'eut pas étudié préalablement toutes ces sciences, je lui conseillerais de commencer à les apprendre par les tables chronologiques du P. Pétau, les parallèles géographiques du P. Briet, la mythologie de l'abbé Banier, ou autres semblables.

Le livre du P. Pétau est connu sous le titre de Dionysii Petavii rationarium temporum ; il y en a grand nombre d'éditions. Celui du P. Briet est intitulé : Philippi Brietii parallela geographiae veteris et novae. Mais attendu qu'il n'est pas complet, il est nécessaire d'y joindre la géographie ancienne de Cellarius, Christoph. Cellarii notitia orbis antiqui, ab ortu rerum publicarum ad Constantinorum tempora ; cum tabulis geographicis : on préférera l'édition de Leipsic 1733, in -4°. deux volumes, avec les observations de M. Schuwartz.

Comme l'Histoire doit être la principale étude d'un curieux en médailles, on conçoit bien que, pour les entendre, il doit lire Hérodote, Dion, Denis-d'Halicarnasse, Tite-Live, Tacite, César, Velleius Paterculus, etc. A mesure qu'il fera des progrès dans l'art numismatique, il faudra qu'il ait sous les yeux Suidas, Pausanias, Philostrate, et parmi les modernes Rhodiginus, Giraldus, Rosinus, et autres semblables, qui lui fourniront des lumières pour l'explication des types et des symboles.

A ces secours, il joindra le livre du P. Hardouin, intitulé : Nummi populorum et urbium illustrati ; ce livre où l'on trouve cent choses curieuses, quoique souvent conjecturales, a été réimprimé avec des changements et des augmentations dans le recueil des œuvres choisies du même auteur : Joan. Hardouin Opera selecta, Amstelod. 1709, in-fol. mais si notre curieux veut s'animer encore davantage dans la carrière qu'il a choisie, il faut qu'il lise le savant traité de M. Spanheim sur l'usage des médailles. Ce bel ouvrage, dont voici la bonne édition, est intitulé : Ezéchielelis Spanhemii, etc. dissertationes de praestantiâ et usu numismatum antiquorum, editio nova, tom. I. Lond. 1706, in-fol. volumen alterum, opus posthumum, ex autoris autographo editum, ac numismatum iconibus illustratum, ab Isaaco Verburgio, Amst. 1717, in fol. La première édition est de Rome 1664, in -4°. et la deuxième d'Amsterdam 1671, in -4°.

Il faut ensuite se procurer les ouvrages où les médailles antiques de toutes espèces sont gravées et expliquées. Voici quelques-uns des plus nécessaires.

On acquérera la connaissance des médailles grecques des villes, dans les livres de Goltzius sur la Sicîle et la Grèce ; en voici les titres : Huberti Goltzii Sicilia, et magna Graecia, sive historiae urbium et populorum Siciliae et magnae Graeciae, ex antiquis numismatibus restitutae liber primus, Brugis 1576, in folio. On doit préférer la seconde édition imprimée à Anvers 1618, par les soins de Jacques de Bie, avec les remarques du P. André Schot, jésuite. L'autre livre de Goltzius sur les médailles des villes grecques n'a paru que longtemps après sa mort, avec les commentaires de Louis Nugnez, savant Espagnol, Ludovici Nonnii Commentarius in Huberti Goltzii Graeciam, Insulas, et Asiam minorem, Ant. 1620, in fol.

Nous avons un excellent ouvrage de M. Vaillant sur les médailles des villes grecques qui ont été frappées avec des têtes d'empereurs. On y a joint une ample explication des époques, des jeux, des fêtes, des alliances, et de tout ce qui donne de la peine à ceux qui commencent à s'appliquer à cette étude, ce qui est d'un grand secours pour les médailles, dont les légendes ont quelque chose de fruste et de difficîle à déchiffrer. La première édition est à Paris en 1698. La seconde édition faite en Hollande avec plusieurs augmentations est connue sous ce titre : Numismata imperatorum, Augustarum, et Caesarum à populis Romanae ditionis graecè loquentibus, ex omni modulo percussa, etc. editio altera ab ipso autore recognita, septingentis nummis aucta, etc. Amst. 1700, in-folio.

Quoique ce recueil soit fort considérable, le nombre des médailles qui avaient échappé aux recherches de M. Vaillant, est presque aussi grand que celui des médailles décrites dans son ouvrage. On en trouvera 700 nouvelles dans les Numismata Musei Teupoli, etc. Venet. 1736, in -4°. deux volumes ; et plus de 300 dans le livre d'un jésuite allemand, intitulé : Erasmi Froelich soc. Jes. quatuor tentamina in re monetariâ vetère.... editio altera.... Vienn. 1737, in -4°. Il y en a de même plusieurs dans le Tesoro Britanico Nic. Haym. On pourrait joindre celles du cabinet du roi, et d'autres cabinets particuliers, qui fourniraient le moyen d'augmenter du double le recueil de M. Vaillant.

Nous sommes enrichis de quatre ouvrages sur les médailles des familles romaines. 1° De l'ouvrage de Fulvio Ursini, intitulé : Familiae romanae quae reperiuntur in antiquis numismatibus, ab urbe conditâ, ad tempora divi Augusti, Rom. 1577, in-fol. 2° Idem.... Carolus Patinus, etc. restituit, recognovit, auxit. Paris 1663, in-fol. 3° Nummi antiqui familiarum romanarum, perpetuis interpretationibus illustrati, per Joan. Vaillant, etc. Amstel. 1703, deux vol. in fol. 4° Thesaurus Morellianus, sive familiarum romanarum numismata omnia, juxta ordinem F. Ursini et Car. Patini disposita, à Cel. antiquario And. Morellio. Accedunt nummi miscellanei urbis Romae, Hispanici, et Goltziani. Nunc primum edidit, et commentariis perpetuo illustravit, Sigeb. Havercampus, Amstel. 1734, in fol. deux volumes.

Pour les impériales, il faut nécessairement avoir un Occo : son livre est intitulé : Imperatorum romanorum numismata, à Pompeio magno, ad Heraclium, ab Adolpho Occone olim congesta, studio Francisci Mediobardi, Mediol. 1683, in-folio. On en a fait une seconde édition à Milan en 1730, par les soins de M. Archelati, avec quelques additions et corrections, qui ne sont pas aussi considérables que le public avait lieu de l'espérer.

Mais à l'Occo et au Mezzabarba, on ne peut se dispenser d'ajouter, Numismata imperatorum, à Trajano Decio, ad Palaeologos Augustos, studio D. Anselmi Banduri, etc. Paris 1718, in-fol. deux volumes.

Quoique M. Patin, dans son grand ouvrage des impériales, n'ait fait graver que le moyen bronze, il y a cependant beaucoup à apprendre pour tous les métaux et pour toutes les grandeurs, à cause de la ressemblance des types : son livre est intitulé : Imperatorum romanorum numismata, à Julio Caesare ad Heraclium, per Car. Patinum, Argentinae 1671, in-fol. edit. prim. Amstel. 1697, in-fol. edit. sec.

Il convient d'avoir encore sur les médailles impériales les descriptions du cabinet du duc d'Arschot, que Gevarsius a fait imprimer avec des explications, et où l'on trouve presque toutes les médailles ordinaires : il est intitulé : Regum et imperatorum romanorum numismata aurea, argentea, aerea, à Romulo et C. Julio Caesare usque ad Justinanum, Antverp. 1654, in-fol. Si l'on veut y joindre Oiselius, ses explications sont encore meilleures : son livre porte pour titre : Jac. Oiselii Thesaurus selectorum numismatum antiquarum cum fig. Amstel. 1677, in -4°.

Il est vrai que les auteurs que nous venons de nommer, n'ont parlé proprement que des médailles de bronze, mais Hemelarius, chanoine d'Anvers, a fait un volume à part sur les médailles d'or : ce volume est intitulé : Imperatorum romanorum numismata aurea, à Julio Caesare ad Heraclium collecta, et explicata à Joan. Hamelario, Antverp. 1627, in -4°. cum fig. aeneis.

Patin a rassemblé dans son trésor un assez beau recueil de médailles d'argent, quelques médaillons, et quelques grands bronzes : mais on en trouvera un beaucoup plus grand nombre dans M. Vaillant, qui ne s'est pas contenté d'en donner simplement la description, comme il avait fait pour le bronze, il a encore ajouté à chacune une explication succincte.

Le même auteur, dans les deux volumes qu'il a publiés sur les médailles des colonies, n'a rien omis de ce qu'on pouvait exiger d'un habîle antiquaire ; il en a donné les types et les explications avec un succès admirable, et a fait graver les médailles avec un très-grand soin : cet ouvrage est intitulé : Numismata aerea, imperatorum in coloniis, Paris 1688, in-fol. deux volumes.

M. Ducange, dans les familles byzantines, a fait graver aussi fort exactement tout le bas-empire, et en a facilité l'explication par une savante dissertation qu'il a imprimée à la fin de son glossaire de la basse et moyenne latinité, t. III. Paris 1678, in-fol. Les familles byzantines portant pour titre : Historia Bysantina, duplici commentario ïllustrata, etc. auctore Car. du Fresne, D. Ducange, Paris 1680, in-folio. Les gravures de ce livre se retrouvent presque toutes dans celui du P. Banduri.

Il importe aussi de connaître quelles sont les médailles rares, afin de les savoir estimer ce qu'elles méritent. Elles ont été autrefois expliquées fort au long par Jean Tristan, sieur de Saint-Amand. Son livre est intitulé, Commentaires historiques ; contenant l'histoire des empereurs, impératrices, césars et tyrants de l'empire romain ; illustrés par les inscriptions et énigmes de 13 à 1400 médailles, tant grecques que latines, Paris 1644, 3 vol. in-fol. Si les commentaires de Tristan sont très-fautifs, il faut observer qu'il vivait dans un siècle où personne ne lui pouvait encore servir de guide. Mais en échange, M. Vaillant a excellé dans ses Explications des médailles rares en général, et dans l'exposition de la rareté de chacune en particulier. Tous les Antiquaires possèdent l'ouvrage dont nous parlons : Numismata imperatorum romanorum praestantiora, à Julio Caesare ad posthumum et tyrannos, per Joann. Foi-Vaillant, etc. tom. I. De romanis aereis senatus-consulto percussis, etc. cui accessit series numismatum maximi moduli nondum observata. tom. II. De aureis et argenteis, etc. Paris, 1692, in 4°. Il faut aussi avoir la première édition de cet ouvrage, Paris, 1682 ; parce qu'on y a marqué le cabinet où se trouvait chacune des médailles qui y sont décrites : et de-plus, les posthumes d'or et d'argent ont été omises dans la seconde édition.

M. Baudelot, dans son livre de l'Utilité des voyages, s'est aussi donné la peine d'y marquer les médailles rares, par rapport à la tête. Enfin, on en trouve un grand nombre qui sont expliquées dans le Recueil de l'acad. des belles lettres.

En indiquant ces livres profonds sur la science des médailles, j'allais presqu'oublier d'en nommer quelques-uns, qui sont propres à y introduire un nouveau curieux, et à lui en donner une connaissance générale. Il peut donc commencer sa carrière par le Discours d'Enée Vico sur les médailles, imprimé à Rome en 1555 ; ou plutôt par les Dialogues d'Antonius Augustinus, qui sont comme autant de leçons capables de l'éclairer.

Le livre de l'archevêque de Tarragone est intitulé : Dialogos dè medallas, inscriciones, y otras antiquidades en Tarragona, por Felipe Mey, 1587. C'est un petit in 4°. de 470 pages, avec 26 Planches de médailles, dont les deux premières sont ordinairement placées à la tête du premier dialogue, et les 24 autres avant le dialogue suivant. Cette édition, d'ailleurs très-bien imprimée, est devenue très-rare, et on l'a vue vendre jusqu'à trente pistoles. L'ouvrage d'Antoine Augustin a été traduit deux fois en italien. La première de ces traductions, imprimée à Venise, in -4°. est assez conforme à l'édition espagnole. La seconde dont l'auteur s'appelait Ottaviano Sada, est de Rome, 1592, in-fol. Le traducteur y a joint quelques observations, et une dissertation de Loelio Paschalini sur les médailles de Constantin, qu'il a insérée dans le premier dialogue. Les médailles y sont placées dans le corps de l'ouvrage, aux endroits où il en fait mention ; on y a même ajouté celles qui y sont expliquées, et qu'on n'avait pas fait graver dans l'édition espagnole. Mais il aurait été à souhaiter que les desseins eussent été plus exacts et les gravures plus belles. Enfin, le P. André Schot traduisit ces dialogues en latin, et les fit imprimer à Anvers en 1617, in-fol. avec fig.

Le même curieux trouvera dans le Trésor de Goltzius, l'intelligence des abréviations les plus ordinaires, sans quoi l'on ne peut rien connaître aux légendes ; il y verra les noms et les prénoms des empereurs, des charges et des magistratures, qui ne se trouvent qu'en abrégé sur les médailles. S'il veut un plus grand répertoire, Ursatus le lui fournira. Le livre de ce dernier auteur est intitulé, Sertorii Ursati de Notis Romanorum Commentarius, Patavii, 1672, in-fol.

Mais la Science des médailles, du P. Louis Jobert jésuite, me parait être, en petit, le meilleur livre qu'on ait jusqu'à présent, pour rendre l'étude de ces monuments antiques plus facile, plus utile, et plus agréable. La dernière édition est à Paris 1739, 2 vol. in -12. avec fig.

Quant à ceux qui désireront de connaître ou de se procurer tous les auteurs qui ont écrit sur l'art numismatique, je ne puis rien faire de mieux, que de les renvoyer à la Bibliotheca nummaria, du P. Banduri, imprimée à Hambourg en 1719, in -4°. avec les Notes de Fabricius ; car depuis ce temps-là, à peine a-t-il paru dix livres un peu considérables sur les médailles.

Observations générales sur les médailles, et sur leur étude. La publication de tant d'ouvrages sur l'art numismatique, et la description d'une infinité de cabinets, ont fait dans cette science, ce que fait l'expérience dans les arts. Les arts ne se sont perfectionnés que par les diverses observations de ceux qui ont su profiter de ce que l'usage leur avait appris ; mais dans la science des médailles on a voulu trop tôt établir des principes indubitables, que les moins habiles ont détruits en un moment, par la seule vue de quelques médailles que le hasard leur a fait tomber entre les mains.

Ainsi la croyance du siècle passé, que l'on n'avait aucun véritable Othon de bronze, est aujourd'hui entièrement effacée par la quantité des Othons de ce métal qui se trouvent dans les cabinets, et dont on n'oserait disputer l'antiquité, d'autant plus qu'ils nous sont venus de l'Orient.

Ainsi, pour réfuter celui qui a dit, qu'on ne donnait la couronne de laurier qu'aux Augustes, et jamais aux Césars ; il n'y a qu'à voir le médaillon de Maxime . IO. OH MAIMOC KAICAP, où il a la couronne de laurier, avec la qualité de César, sans parler du bas empire où Crispus César est couronné de laurier.

On a encore avancé deux maximes comme constantes, au sujet des fleuves qu'on voit très-souvent sur les revers des médailles. La première, que les fleuves étant ordinairement représentés par des figures couchées à terre ; on ne mettait debout que ceux qui portaient leurs eaux dans celui qui était couché. La seconde, que si l'on trouvait un fleuve représenté sans barbe, il fallait conclure que ce n'était qu'une petite rivière qui n'était point navigable. Cependant voici trois médailles qui prouvent la fausseté de ces principes. 1°. Une médaille de Gordien III ; elle porte au revers le Méandre et le Marsyas, tous deux couchés par-terre, quoique le Marsyas se jette dans le Méandre. 2°. Une médaille de Philippe, où ces deux mêmes fleuves sont sans barbe, quoique le Méandre soit assurément très-navigable, au rapport de Strabon. 3°. Une médaille d'Antonin Pie, , où l'on voit le Billœus et le Sardo, tous deux de-bout : et l'on sait que le second se décharge dans le premier.

Cependant, quoiqu'il y ait peu de maximes qui ne souffrent des exceptions, il serait dangereux de n'en vouloir jamais admettre aucune. Observons seulement, qu'elles soient toujours fondées en nécessité ou en raison, et qu'elles fassent plier la règle à leur objet, sans la détruire sur les autres points, où elle peut avoir son application.

C'est, par exemple, une maxime généralement adoptée par les antiquaires, que ce que nous appelons médailles, les romaines surtout, étaient originairement la monnaie courante ; et ils en donnent une bonne preuve. On trouve tous les jours, disent-ils, une prodigieuse quantité de ces médailles cachées dans la terre, comme autant de trésors particuliers qu'on voulait mettre à couvert de l'incursion et de l'avidité des Barbares. Et loin que ces petits trésors forment jamais des suites de médailles plus ou moins complete s, ou qu'ils soient tous composés de différents revers, ils ne consistent communément que dans un petit nombre d'empereurs qui ont régné ensemble, ou qui se sont immédiatement succédés ; et le même revers s'y trouve quelquefois par milliers ; ce qui seul porte avec soi un caractère si marqué de monnaie courante, qu'il est comme impossible de se refuser à l'évidence d'un pareil témoignage.

On ne laisse pas d'en excepter les médaillons, du-moins ceux qui par leur relief, leur étendue, et leurs poids, auraient été fort à charge dans le commerce ; ceux surtout, qui, composés de plusieurs cercles de différentes espèces de cuivre, semblent nous dire encore qu'ils ont uniquement été faits pour le plaisir et l'ostentation, et nullement pour l'usage et la commodité.

Peut-être en viendra-t-on aussi à faire une classe séparée en plusieurs autres sortes de médailles qui, quoiqu'au même titre, et uniformes entr'elles par le poids et le volume, offrent des objets tout à fait étrangers, pour ne pas dire contraires à l'idée d'une monnaie courante. Telles sont entr'autres, ces médailles qui paraissent n'avoir été imaginées que pour honorer après leur mort, des princes et des princesses, dont le portrait n'avait jamais été gravé, de leur vivant, des gendres, des sœurs, des nièces d'empereurs, des enfants décédés au berceau ou dans la plus tendre jeunesse. Telles encore celles, où après une assez longue succession d'empereurs, on a renouvellé l'image et le souvenir de quelques illustres romains des premiers temps de la république.

Non toutefois que ces mêmes médailles n'aient pu être reçues et même recherchées dans le commerce, parce qu'elles étaient de la même forme et de la même valeur intrinseque ; parce que travaillées avec autant et plus de soin, on y trouvait aussi des choses plus singulières et plus intéressantes. Enfin, parce que frappées sans doute en moindre quantité qu'on ne frappait des revers de la monnaie ordinaire, elles étaient dans le même temps, à-proportion aussi rares qu'elles le sont aujourd'hui.

Une autre maxime en fait de médailles, c'est lorsqu'au revers d'un empereur romain, on trouve le nom d'une ville, d'un peuple, d'un pays ; ce pays, ce peuple, cette ville doivent avoir été de la domination romaine ; ou, s'ils ne lui ont pas été immédiatement soumis, ils reconnaissaient du-moins son autorité par quelque hommage, par quelque tribut, ou autre condition équivalente stipulée dans des traités. Il en faut cependant excepter ces médailles, où l'on voit d'un côté, la tête d'un empereur, et de l'autre, celle d'un prince voisin allié de l'empire, qui s'honorait bien du titre d'ami du peuple et des empereurs romains, , mais dont l'alliance utîle était quelquefois achetée par de gros subsides, que la vanité romaine qualifiait de gratifications.

A combien plus forte raison, n'en devrait-on pas excepter encore les médailles, où l'on verrait d'un côté, la tête d'un empereur romain, et de l'autre, le nom et les symboles d'une ville, qui, loin d'avoir été jamais sous sa domination, se trouverait appartenir depuis longtemps à un autre prince puissant, lequel n'avait rien à démêler avec l'empire ; rien à espérer de son alliance, rien à craindre de ses entreprises ? Sans cela, quelle absurde conséquence ne tirerait-on pas un jour de la médaille du czar Pierre I. frappée en 1718, avec le nom de la ville de Paris à l'exergue, Lutetiae-Parisiorum ? et vingt autres semblables ; si ceux qui joindront la connaissance de l'histoire à celle des médailles, n'étaient pas à-portée d'expliquer ces énigmes d'or et d'argent, comme le poète Prudence les appelait déjà de son temps.

On ne tarirait point sur les abus qui se sont glissés dans l'étude des médailles, et qui ont pour auteurs, je ne dis pas des hommes sans lettres, mais des écrivains d'une érudition reconnue. C'est sur la parole de ces écrivains célèbres qu'on cite chaque jour des médailles, qui n'ont peut-être jamais existé ; c'est leur témoignage qui empêche de rejeter des médailles d'une autre espèce, qui malgré leur antiquité, ne peuvent faire foi dans l'histoire ; c'est sur leur autorité que sont fondées ces interprétations chimériques qui dégraderaient les monuments les plus respectables, en les rendant le jouet de l'imagination de chaque particulier. Enfin, c'est principalement à ces auteurs qu'il faut imputer plusieurs fautes, où tombent tous les jours des amateurs des médailles, surtout ceux qui les recueillent uniquement, ou par le goût naturel qu'ils ont de ramasser, ou par le désir de s'acquérir une sorte de nom dans les lettres.

Il en est des médailles comme d'une infinité d'autres choses, qui font partie de ce qu'on appelle curiosités ; la vanité de posséder une pièce rare et unique, fait souvent mettre en usage toutes sortes de ruses et d'artifices pour en imposer. De-là sont venus ces catalogues informes, où des médailles qui n'ont d'autre qualité que d'avoir été frappées par des faussaires et par des ignorants, sont décrites avec de pompeux éloges. De-là ces interprétations arbitraires qui vont quelquefois jusqu'à renverser les points d'histoire les plus constants. De-là cette confusion et ce mélange dans les cabinets, et dans les livres, des médailles fausses avec les vraies, ou des modernes avec les antiques. De-là enfin, mille inconvénients que l'on découvre à chaque instant dans l'étude et dans la recherche des médailles ; car cette vanité s'étant une fois emparée de l'esprit, on ne s'en est point tenu au vrai, on a couru après le merveilleux. Chacun a voulu que sa collection fût plus singulière que celle d'un autre, ou du-moins qu'elle passât pour telle. Pour y parvenir, on a tout fait valoir, on a tout loué, on a tout admiré.

Il est donc essentiel à un amateur de ces monuments antiques, d'être en état de juger par lui-même du mérite de chaque pièce, et de ne point se laisser séduire aux pompeuses descriptions qu'il entendra faire, soit au nouvel acquéreur d'une médaille, soit à celui qui cherche à en vendre. Souvent, après avoir examiné ce qu'on lui vantait avec tant d'emphase, il trouvera que c'est un coin moderne ; que la médaille est fausse ou réparée. Mais supposons-la antique et légitime, elle sera peut-être inutîle pour l'histoire ; il cessera pour lors d'admirer cette médaille ; et ayant cessé de l'admirer, il cessera bientôt de rechercher ce qu'il ne désirait ardemment, que faute de le bien connaître. C'est encore un nouvel avantage pour le grand nombre des gens de lettres, à qui la nature a donné de la facilité pour les sciences, plus que la fortune ne leur a procuré de secours pour les acquérir.

Les vains curieux qui ne joignent au goût qu'ils ont pour les médailles, ni une certaine connaissance de l'histoire, ni la lecture des ouvrages de l'antiquité, n'estiment communément les médailles, qu'à proportion de leur rareté ; et cette rareté dépend souvent ou du caprice, ou de la mauvaise foi de ceux qui ont fait imprimer des catalogues de médailles, quelquefois de la beauté seule et de la conservation de la médaille, et presque toujours du hazard qui a permis qu'on ait découvert un trésor antique plutôt ou plus tard.

Au contraire, celui qui n'envisage les médailles qu'en homme de lettres, c'est-à-dire, qui n'en mesure le prix que sur l'utilité, ne préfère en médailles, que celles qui servent à découvrir quelque fait nouveau, ou à éclaircir quelque point obscur de l'histoire. Une médaille qui porte une date intéressante, ou qui fixe une époque de quelque conséquence, est plus précieuse pour lui que les Cornelia supera, les Tranquillines, et les Pescennius.

Ce n'est pas que nous voulions condamner les gens qui n'épargnent rien pour recueillir toutes les têtes des personnages illustres de l'antiquité ; nous avouons que les médailles ne seraient pas dépouillées de tout prix, quand même elles ne serviraient qu'à nous conserver les portraits des grands hommes ; mais ce n'est point là ce qui doit les faire principalement rechercher par un homme de lettres. Si une médaille de Pescennius ne porte aucune date particulière ; si elle n'apprend aucun fait d'histoire, et qu'elle ne nous présente qu'un portrait, il est indifférent à celui qui veut devenir savant, que cette pièce rare soit entre ses mains, ou entre celles d'un autre. Tout le monde convient de l'existence de Pescennius. Le curieux qui possède la médaille, n'en est pas plus assuré qu'un autre. L'homme de lettres voudrait fixer précisément le temps où ce prince a vécu ; il voudrait apprendre quelque circonstance particulière de sa vie : si la médaille ne peut l'instruire de ce qu'il cherche, il est presque inutîle qu'il l'ait vue.

Voilà la vraie manière dont on doit envisager les médailles, sans les estimer ni chacune en particulier ni toutes en général, au-delà de l'utilité dont elles sont réellement. Gardons-nous surtout, d'imaginer que leur étude puisse se séparer de celle des inscriptions, et de la lecture des auteurs anciens. Elles éclaircissent des passages ; elles suppléent des dates ou des noms, et redressent même quelquefois des erreurs ; mais, pour un service qu'elles rendent à l'histoire, elles en reçoivent mille des historiens, et tous d'une si grande conséquence, qu'avec les livres sans médailles, on peut savoir beaucoup et savoir bien ; et qu'avec les médailles sans les livres, on saura peu et l'on saura mal. C'est par cette remarque qui n'est point d'un amateur enthousiaste, que je termine ce détail. Il ne me reste plus qu'à y joindre une courte explication de quelques mots fréquents dans la langue numismatique.

Termes d'usage dans l'art numismatique. Ame de la médaille. Les Antiquaires regardent la légende comme l'âme de la médaille, et les figures comme le corps ; tout-de-même que dans l'emblème où la devise tient lieu d'ame ; sans quoi l'on n'aurait aucune connaissance de ce que les figures qui en font le corps, nous doivent apprendre. Par exemple, nous voyons, dans une médaille d'Auguste, deux mains jointes qui serrent un caducée entre deux cornes d'Amalthée, voilà le corps ; le mot pax qui y est gravé, marque la paix que ce prince avait rendue à l'état, en se réconciliant avec Marc Antoine, réconciliation qui ramena la félicité et l'abondance, voilà l'âme.

Buste. Il désigne, en matière de médailles, comme dans les autres arts, un portrait à-demi-corps, qui ne présente que la tête, le col, les épaules, une partie de la poitrine, et quelquefois les deux bras. Les bustes qu'on voit sur les médailles, se trouvent accompagnés de symboles qui leur sont particuliers, surtout quand les deux bras paraissent, comme il est ordinaire dans les médaillons et dans les petites médailles du bas empire. Ces symboles sont le sceptre, la férule, l'acacia. Dans d'autres bustes qui vont jusqu'à-mi-corps, on y voit le casque, le bouclier, et un cheval qu'on tient par la bride, pour marquer les victoires remportées ou dans les combats de la guerre, ou dans les jeux.

Champ. C'est le fond de la pièce qui est vide, et sur lequel il n'y a rien de gravé. On est parvenu à trouver l'explication de certaines lettres initiales qui se trouvent dans le champ des médailles du bas empire. En voici des exemples :

Coin. On sait que c'est la même chose que la matrice ou le carré d'une médaille. Chaque médaille n'a point eu un coin différent de toutes les autres qui lui sont semblables. M. Baudelot a combattu savamment l'opinion contraire, dans son livre de l'utilité des voyages.

Corps. On regarde toutes les figures comme le corps de la médaille.

Exergue. C'est un mot, une date, des lettres, des chiffres marqués dans les médailles au-dessous des têtes qui y sont représentées, soit sur le revers, ce qui est le plus ordinaire, soit sur la tête. Les lettres ou les chiffres des exergues de médailles signifient ordinairement, ou le nom de la ville dans laquelle elles avaient été frappées, ou le temps, ou la valeur de la pièce de monnaie : et les lettres initiales ne marquent que cela.

Inscription. On appelle proprement inscription, les paroles qui tiennent lieu de revers, et qui chargent le champ de la médaille au lieu de figures.

Légende. Elle consiste dans les lettres qui sont autour de la médaille, et qui servent à expliquer les figures gravées dans le champ.

Module. Grandeur déterminée des médailles, d'après laquelle on compose les différentes suites.

Monogramme. Lettres, caractères ou chiffres, composés de lettres entrelacées. Ils dénotent quelquefois le prix de la monnaie, d'autrefois une époque, quelquefois le nom de la ville, du prince, de la déité représentée sur la médaille.

Nimbe. Cercle rayonnant qu'on remarque sur certaines médailles, surtout sur celles du bas empire.

Ordre. C'est ainsi qu'on appelle une classe générale sous laquelle on distribue les suites : on forme ordinairement cinq ordres de médailles, l'un desquels contient la suite des rais, un second la suite des villes, un troisième la suite des consulaires, un quatrième la suite des impériales ; et sous un cinquième on range toutes les divinités, les héros, les hommes célèbres de l'antiquité. L'ordre dans les suites du moderne est absolument arbitraire.

Panthées. Ce sont des têtes ornées de symboles de plusieurs divinités.

Parazonium. Sorte de poignard, de courte épée, de bâton, de sceptre tantôt attaché à la ceinture, tantôt appuyé par un bout sur le genou, et tantôt placé d'une autre manière.

Quinaire. C'est une médaille du plus petit volume en tout métal.

Relief. Saillie des figures et des types empreints sur la tête ou sur le revers d'une médaille.

Revers. Côté de la médaille opposé à la tête.

Suite. C'est l'arrangement qu'on donne aux médailles dans un cabinet, soit d'après leur différente grandeur, soit d'après les têtes et les revers.

Symbole ou type. Terme générique qui désigne l'empreinte de tout ce qui est marqué dans le champ des médailles.

Tête. Côté de la médaille opposé aux revers. Chez les Romains, Jules-César est le premier dont on ait osé mettre la tête sur la monnaie, de son vivant.

Volume. On entend par ce mot l'épaisseur, l'étendue, le relief d'une médaille, et la grosseur de la tête.

Le lecteur trouvera les articles de médailles qui suivent, rangés avec quelque ordre

Toute médaille est antique ou moderne ; nous commencerons par ces deux mots.

Ensuite nous viendrons aux métaux, parce qu'il y a des médailles d'or, d'argent, de billon, de bronze, de cuivre, d'étain, de fer, de plomb, de potin.

Une médaille peut être contrefaite, dentelée, éclatée, fausse, fourrée, frappée sur l'antique, non frappée, fruste, inanimée, incertaine, incuse, martelée, moulée, réparée, saucée, sans tête.

Parmi les médailles, il y en a de contorniates, de contre-marquées, de rares, de restituées, d'uniques et de votives.

Il y a encore des médailles sur les allocutions, et d'autres qu'on nomme de consécration ; nous en ferons aussi les articles.

Les médailles de colonies, les consulaires, les grecques, les impériales, les romaines, méritent surtout notre curiosité.

Cependant nous n'oublierons pas de parler des médailles arabes, égyptiennes, espagnoles, étrusques, gothiques, hébraïques, phéniciennes et samaritaines.

Enfin, les médailles d'Athènes, de Crotone, de Lacédémone et d'Olba, intéressent trop les curieux pour les passer sous silence.

Nous terminerons ce sujet par dire un mot des époques marquées sur les médailles.

Il est inutîle d'avertir que les autres articles de l'art numismatique sont traités sous leurs lettres. (D.J.)

MEDAILLE ANTIQUE. (Numismatique) J'ai déjà dit que ce sont toutes celles qui ont été frappées jusques vers le milieu du troisième ou du neuvième siècle de Jesus-Christ.

Depuis les progrès de la renaissance des Lettres, on a rassemblé les médailles antiques ; on les a gravées, déchiffrées et distribuées par suites ; on en a fait une science à part très-étendue. Il ne s'agit peut-être plus aujourd'hui que d'éclairer le zèle de ceux qui l'étudient avec passion, et leur prouver qu'ils ne doivent pas donner une confiance aveugle à toutes les médailles qui sont antiques, de bon aloi, et frappées dans les monnaies publiques. Justifions ici cette vérité par les judicieuses observations de M. l'abbé Geinoz, rapportées dans l'histoire de l'acad. des Inscriptions, tom. XII.

Il n'y a, dit-il, que trop de médailles antiques singulières, et qui renferment des contradictions palpables avec la tradition historique la plus constante, et même avec les autres médailles.

La cause de ces singularités vient sans doute d'une confusion de coins, semblable à celle qu'on a remarquée sur les médailles fourrées. Il est arrivé plus d'une fois aux Monétaires même, surtout lorsqu'il y avait plus d'un prince pour lequel on travaillait dans le même hôtel des monnaies : il leur est, dis-je, arrivé plus d'une fois de joindre ensemble deux coins, qui n'étaient pas faits pour la même pièce de métal. Il n'était pas difficîle que deux ouvriers travaillant l'un près de l'autre, celui qui voulait appliquer un revers à la tête de Vespasien ; prit par mégarde le coin dont son voisin devait se servir, pour en frapper un à celle de Titus : il n'était pas même impossible qu'un ancien coin oublié dans la salle, fût employé par inadvertance à former le revers de quelque médaille nouvelle par un ouvrier peu attentif. Cette confusion n'a rien qui répugne, et elle a été avouée par le Père Pagi dont la bonne critique est assez connue, et par M. Liebe, un des célèbres antiquaires de ces derniers temps. Les exemples en sont rares à la vérité, et les médailles qui nous les fournissent, sont ordinairement uniques : on Ve cependant en rapporter quelques-unes pour preuve de ce qu'on vient d'avancer.

Sur deux médailles d'argent d'Antonin Pie, on trouve au revers Augusta, avec des types qui montrent évidemment qu'on a joint à la tête de cet empereur des revers qui avaient été destinés aux médailles de Faustine sa femme. Deux autres médailles d'argent de Julia Domna ont à leurs revers, l'une Liberal. Augg. et l'autre Virtus Aug. Cos.... On voit bien que ces légendes ne peuvent convenir à cette princesse : aussi les a-t-on prises pour des médailles de Sevère, où on les trouvera facilement. Une autre médaille d'argent d'Herennia Etruscilla, a pour revers un type connu parmi ceux de Trajan Dece, avec la légende Pannoniae. Au revers d'une médaille de Faustine la jeune en grand bronze, on lit Primi Decennales Cos. III. S. C. Quelqu'un prétendrait-il qu'on faisait des vœux décennaux pour les femmes des empereurs ? non, car le silence de l'histoire et de tous les autres monuments nous prouve le contraire ; mais si on consulte les médailles de M. Aurele, on verra que ce revers a été frappé avec un coin destiné à cet empereur. Une autre médaille en grand bronze de Didius Julianus, a sur le revers Juno Regina, légende qui ne lui peut appartenir, mais qu'on a empruntée d'un coin de Manlia Scantilla.

M. Liebe a fait graver dans son trésor de Saxe-Gotha une médaille d'argent d'Hadrien, où on lit d'un côté Hadrianus Augustus, et de l'autre S. P. Q. R. M. O. PRINC. Qui est-ce qui ne voit pas que le coin d'un des revers de Trajan a été employé par mégarde avec un coin d'Hadrien ? le même antiquaire rapporte ensuite une médaille d'Antonin Pie, dans laquelle sa 15e. puissance tribunitienne se trouve également marquée autour de la tête et au revers. La cause de cette singularité est que le monétaire s'est servi de deux coins qui étaient bien de la même année, mais qui n'avaient pas été faits pour être unis ensemble.

Tous ces exemples paraissent prouver sans contestation, du-moins aux yeux des critiques impartiaux, que les Monétaires même ont fait des méprises ; et si le père Chamillard eut connu les médailles qu'on vient de citer, il n'aurait point cherché des moyens plausibles de les concilier avec l'histoire, ou d'accorder ensemble les légendes des têtes et celles des revers. Tandis que le père Hardouin rejette avec hauteur l'idée de ces méprises de Monétaires, il nous en fournit lui même plusieurs traits dans son histoire auguste. On y voit une médaille de grand bronze, qui joint le sixième consulat de Vespasien avec le second de Titus ; quelques-unes de Domitien avec la tête de Vespasien au revers ; une de Trajan avec son cinquième consulat, et au revers les têtes d'Hadrien et de Plotine, avec la légende Hadrianus Aug. Les critiques sages aimeront toujours mieux adopter dans ces médailles des erreurs de Monétaires, erreurs qui n'ont rien que de naturel et d'ordinaire, que d'en faire la base de quelque système entièrement opposé à l'histoire de toute l'antiquité.

Ne reconnaissons donc point pour des pièces authentiques ces médailles singulières, qui ne peuvent s'accorder ni avec les autres médailles reçues, ni avec l'histoire ; et examinons si ce qui cause notre embarras, lorsque nous cherchons à en déméler le sens, ne vient pas de quelque méprise du monétaire. Nous pourrons facilement nous en apercevoir, en vérifiant si ces revers ne se trouvent pas joints sur d'autres médailles à des têtes auxquelles ils conviennent mieux ; quand cela se rencontrera, nous avouerons que des coins mélés ou confondus sont la source de nos doutes, et nous verrons la difficulté disparaitre.

Au reste, on voudrait envain nous persuader qu'il règne quelquefois sur les médailles antiques des traits d'ironie et de plaisanterie, semblables à ceux qu'on voit assez souvent dans nos médailles modernes. On cite pour le prouver la médaille de Galien que le roi possede, Gallienae Augustae Pax Ubique : médaille frappée dans le temps que par la lâcheté et l'indolence de cet empereur l'Empire était déchiré par les trente tyrants. Ce qu'il y a de sur, c'est que tout ce que M. Baudelot nous a ingénieusement expliqué des médailles qui se frappaient pour les plaisirs des saturnales, ne sert de rien pour appuyer ce sentiment. Il n'est pas mieux établi par une seule médaille équivoque. Je conviens que la difficulté d'accommoder le nom d'une princesse à la tête d'un empereur est d'abord embarrassante ; mais on peut la résoudre par l'inadvertance ou la précipitation du monétaire, et confirmer cette solution par les preuves que nous venons d'en donner tout-à-l'heure. Enfin, on adoptera bien moins un fait unique, que le désir qui nous anime de prêter aux anciens le caractère d'esprit de notre siècle. (D.J.)

MEDAILLE MODERNE. (Numismatique) On appelle médailles modernes celles qui ont été frappées depuis environ trois siècles. En effet, il faut observer qu'on ne met point au rang des médailles modernes celles qu'on a fabriquées pendant la vie de Charlemagne, &, après lui, pendant cinq cent ans ; parce qu'elles sont si grossières, que les antiquaires regardent cet espace de temps comme un vilain entre-deux de l'antique et du moderne. Mais quand les beaux Arts vinrent à renaître, ils se prêtèrent une main secourable pour procurer des médailles qui ne fussent plus frappées au coin de la barbarie. Voilà nos médailles modernes.

Leur curiosité, comme celle de la belle Peinture, eut sa première aurore au commencement du quinzième siècle, après avoir été ensevelie l'espace de mille ans avec les tristes restes de la majesté romaine. Ce fut d'abord par les soins d'un Pisano, d'un Bolduci, et de quelques autres artistes, qu'on vit reparaitre de nouvelles médailles avec du dessein et du relief. Le Pisano fit en plomb, en 1448, la médaille d'Alphonse, roi d'Aragon ; &, dix ans auparavant, il avait donné celle de Jean Paléologue, dernier empereur de Constantinople. Ensuite, on se mit à frapper des médailles en or ; telle est celle du concîle de Florence, et d'un consistoire public de Paul II. qui sont les premières ébauches des medailles modernes, perfectionnées dans le siècle suivant, et ensuite recherchées pour la gravure, par quelques curieux.

Il est vrai que la plupart de ces nouvelles médailles ont été faites avec grand soin, que les époques s'y trouvent toujours marquées, que les types en sont choisis et l'explication facile, pour peu qu'on ait connaissance de l'histoire. On y voit des combats sur terre et sur mer, des sieges, des entrées, des sacres de rais, des pompes funèbres ; les alliances, les mariages, les familles ; en un mot, les événements les plus importants qui concernent la religion et la politique : cependant tout cela réuni ne nous touche point comme une seule médaille de Brutus, de Lacédémone, ou d'Athènes.

Je ne puis même deviner les raisons qui ont engagé le père Jobert à décider que sur les médailles antiques on trouve, plus que sur les modernes, le faux mérite honoré. Il semble, au contraire, que cet inconvénient, qui est inévitable dans toute société humaine, est beaucoup plus à craindre dans les médailles modernes, qu'il ne l'était dans les monnaies antiques ; car parmi nous les princes sont maîtres absolus de la fabrication de leurs monnaies, tandis qu'à Rome le sceau de l'autorité du sénat, quelque corrompu qu'on le suppose, y intervenait encore.

D'un autre côté, les monnaies antiques ne se frappaient que pour le prince ; et l'histoire nous a éclairé sur ses vertus ou sur ses vices. Mais aujourd'hui il n'est point de particulier qui ne puisse faire frapper des médailles en son honneur : combien de gens sans mérite, que la vanité a déjà porté à essayer de se procurer une espèce d'immortalité, en se faisant représenter sur des médailles !

Je ne détournerai néanmoins personne de donner dans la curiosité du moderne. On peut rassembler, si l'on veut, ces sortes de médailles, et former même des suites de papes, d'empereurs, de rais, de villes et de particuliers, avec le secours des monnaies et des jetons. La suite complete des papes peut se faire depuis Martin V. jusqu'à présent : mais la suite des empereurs d'Occident depuis Charlemagne ne pourrait s'exécuter qu'en y joignant les monnaies. Si l'on me dit qu'Octavius Strada a conduit cet ouvrage depuis Jules-César jusqu'à l'empereur Matthias, je réponds que c'est avec des médailles presque toutes fausses, inventées pour remplir les vides, ou copiées sur celles que Maximilien II. fit battre pour relever la grandeur de la maison d'Autriche.

Quant à la suite des rois de France, il faut se contenter des monnaies pour les deux premières races : car il n'y a aucune médaille avec l'effigie du prince avant Charles VII. Toutes celles qu'on a frappées dans la France métallique jusqu'à Charlemagne, sont imaginaires ; et la plupart des postérieures, sont de l'invention de Jacques de Bie, et de Duval son associé. Il est vrai qu'il y a dans le cabinet de Louis XV. une suite de tous ses prédécesseurs jusqu'à Louis XIV. gravée très-proprement en relief sur de petites agates ; mais on sait que c'est une suite de la même grandeur, d'une même main, et d'un ouvrage exquis, qu'on fit à plaisir sous le règne de Louis XIII.

Les médailles d'Espagne, de Portugal, et des couronnes du Nord, ne sont que du dernier siècle. En Italie, les plus anciennes, j'entends celles de Sicile, de Milan, de Florence, ne forment aucune suite, et ne se trouvent que moulées. Telles sont les médailles de René et d'Alphonse, rois de Sicile, de François de Sforce, duc de Milan, et du grand Côme de Médicis.

En un mot, la Hollande seule, par la quantité de médailles qu'elle a fait frapper, forme une histoire intéressante. Elle commence par la fameuse médaille de 1566, sur laquelle les confédérés des Pays-Bas qui secouèrent la tyrannie du roi d'Espagne, firent graver une besace, à cause du sobriquet de gueux qu'on leur donna par mépris, et qu'ils affectèrent de conserver.

Il ne faut donc pas s'étonner qu'il y ait peu de livres qui traitent des médailles modernes. Je ne connais que ceux du père du Moulinet et de Bonanni pour les papes ; de Luckius, de Trypotius, de la France métallique dont j'ai parlé ; de l'abbé Bizot et de Van-Loon pour la Hollande. Voici les titres de ces sept ouvrages.

1°. Claudii du Moulinet historia summorum pontificum à Martino V. ad Innocentium XI. per eorum numismata ; id est, ab anno 1417 ad an. 1678. Paris. 1679, fol.

2°. Numismata pontificum romanorum à tempore Martini V. ad ann. 1699, illustrata à Philippo Bonanni S. J. Romae, 1699, 2 vol. fol.

3° Sylloge numismatum elegantiorum, quae diversi imp. reges, principes, respublicae, diversas ob causas, ab anno 1500 ad annum usque 1600 cudi fecerunt, etc. operâ Joh. Jac. Luckii argentoratensis. Argentinae, 1620, fol.

4°. Symbola divina et humana pontificum, imperatorum, regum. Accessit brevis isagoge Jac. Trypotii ex musaeo Octav. de Strada. Sculptor Egidius Sadeler ; Pragae, 1601, fol.

5°. La France métallique, contenant les actions célèbres, tant publiques que privées, des rois et reines, marquées en leurs médailles d'or, d'argent et de bronze, par Jacques de Bie ; Paris, 1636, in-fol.

6°. Histoire métallique de Hollande, par M. l'abbé Bizot ; Paris, 1687, fol.

7°. Mais l'ouvrage de Van-Loon est bien autrement complet : il est intitulé histoire métallique des dix-sept provinces des Pays-Bas, depuis l'abdication de Charles V. jusqu'à la paix de Bade conclue en 1716, traduite du hollandais de M. Girard Van-Loon ; à la Haie, 1732, 1737, 5 vol. in-fol.

Pour ce qui concerne l'histoire de Louis le Grand et des événements de son règne par les médailles, de l'Imprimerie royale, 1702 et 1723, in-fol. tout le monde sait ce qu'il en faut penser. (D.J.)

MEDAILLE D'OR, (Numismatique) Dans le grand nombre des médailles d'or grecques et romaines, il y en a qui sont, soit or fin, toujours plus pur et d'un plus bel oeil que le nôtre ; soit or mêlé plus pâle, d'un aloi plus bas, et ayant environ sur quatre parts un cinquième d'alliage ; soit enfin or notablement alteré, tel que nous le voyons dans certaines gothiques. Il faut observer, que quoique Sévère Alexandre, eut donné la permission de se servir d'alliage dans les monnaies, cela n'a point empêché que les médailles de ce prince et de ceux qui lui ont succedé, même dans le bas empire, ne soient ordinairement d'un or aussi pur et aussi fin que du temps d'Auguste, le titre ne se trouvant proprement altéré que dans les gothiques.

L'or des anciennes médailles grecques est extrêmement pur ; l'on en peut juger par celle de Philippe de Macédoine et d'Alexandre le grand, qui vont à vingt-trois karats et seize grains, à ce que dit M. Patin, l'un des fameux antiquaires du dernier siècle. On lui est redevable d'avoir tâché d'inspirer aux curieux l'amour des médailles, et de leur en avoir facilité la connaissance.

L'or des médailles impériales est aussi très-fin, et de même aloi que celui des Grecs ; c'est-à-dire au plus haut titre qu'il puisse aller, en demeurant maniable : car les affineurs le préfèrent encore aujourd'hui à celui des sequins et des ducats ; et du temps de Bodin, les orfévres de Paris ayant fondu un Vespasien d'or, ils n'y trouvèrent qu'un 788e d'empirance qui est l'alliage.

Il faut se souvenir que les Romains ne commencèrent à se servir de monnaies d'or que l'an 547. de Rome, afin que l'on ne soit pas trompé à celles qui se trouveront avant ce temps-là. Par exemple, si l'on nous présentait quelqu'un des rois de Rome, ou des premiers consuls frappés sur l'or, il n'en faut pas davantage pour conclure que c'est une fausse médaille : j'entends qu'elle n'est point frappée du temps de ces rois ou de ces consuls ; car les descendants de ces familles, plusieurs siècles après, ont fait frapper quelquefois les têtes de leurs ancêtres : témoin celles de Quirinus, de Numa, d'Ancus Martius, de Junius-Brutus ; et ces sortes de médailles ne laissent pas d'être antiques par rapport à nous, quoiqu'elles ne soient pas du temps de ceux qu'elles représentent. (D.J.)

MEDAILLE D'ARGENT, (Numismatique) l'usage des médailles d'argent commença chez les Romains l'an 485. de Rome. L'on en trouve en beaucoup plus grand nombre que d'or, mais l'argent n'en est pas si fin que le titre des médailles d'or ; car les curieux ont remarqué par les fontes, que les Romains ont toujours battu les médailles d'or sur le fin, au lieu qu'ils ont frappé celles d'argent à un titre d'un sixième plus bas que nos monnaies de France. On ne laisse pas d'appeler argent fin, l'argent des médailles qui se trouvent jusqu'à Septime Sévère, en comparaison de celles qui se trouvent jusqu'à Constantin, dont l'argent est bas et fort allié. On le nomme communément potin. Voyez MEDAILLE DE POTIN.

Savot remarque, qu'Alexandre Sévère, fit battre de la monnaie d'argent, où il n'y avait qu'un tiers de fin, quoique le poids fût toujours le même. On l'appela néanmoins restitutor monetae, ce qui fait voir combien de son temps la monnaie avait été altérée.

Didius Julianus est le premier qui ait corrompu le titre des médailles d'argent ; il le fit, à ce qu'on prétend, pour remplir plus aisément ses coffres qu'il avait épuisés par ses largesses, en achetant l'empire des soldats prétoriens, qui venaient de massacrer Pertinax. Depuis Didius Julianus, le titre alla toujours en baissant, et certainement les médailles de ce prince ont moins d'alliage que celles de Septime Sévère : et celles de ce dernier sont encore moins mauvaises, que celles de Sévère Alexandre. Sous Gordien, c'est encore pis, et peut-être c'est par cette raison, que l'on trouve sous cet empereur, les médailles d'un module plus grand et plus épais ; car quoique ce module soit connu dès le temps de Septime Sévère, de sa femme Julia Pia, et de son fils Caracalla ; il est cependant vrai, qu'il y a peu de ce grand module sous ces princes ; comme il y a fort peu de petit module sous Gordien.

Galien alla encore en baissant le titre, et je crois qu'il n'est pas douteux que sa monnaie d'argent, quoiqu'elle eut au-moins quatre cinquiemes d'alliage, ne fût la seule monnaie d'argent, connue pour lors dans l'Empire. Je n'ignore pas cependant, que quelques curieux prétendent avoir des médailles d'argent pur de ces temps-là, et même de Probus, de Carus, etc. mais ces médailles qu'ils vantent tant sont toutes fausses, et cela parait assez prouvé par les médailles fourrées, que nous trouvons sous Galien, et même sous Posthume. Comment aurait-on risqué sa vie pour fourrer des médailles d'argent pur ? Un antiquaire qui est mort a longtemps vanté une magnia urbica d'argent pur de son cabinet : cette médaille a été vue et examinée après sa mort ; il est évident qu'elle est moulée.

Depuis Claude le Gothique, jusqu'à Dioclétien, qui rétablit la monnaie, il n'y a plus d'argent du-tout dans les médailles ; ou s'il s'en trouve quelques-unes, elles sont si rares que l'exception confirme la règle. On a frappé pour lors sur le cuivre seul, mais après l'avoir couvert d'une feuille d'étain. C'est ce qui donne cet oeil blanc aux médailles que nous appelons saucées, telles que plusieurs Claudes, les Auréliens, et la suite jusqu'à Numérien inclusivement. On trouve même encore de ces médailles saucées sous Dioclétien, Maximien, Constance Clorre, et Galéro Maximien ; quoique l'usage de frapper sur l'argent pur fût déjà rétabli.

Je ne sai si quelque cabinet peut fournir des Licinius, des Maxences, et des Maximins de cette espèce ; on y trouverait plutôt de vrai billon. En tout cas, il semble qu'il ne soit plus question de médailles saucées sous Constantin. Au reste, si les auteurs qui nous ont donné des collections de médailles eussent fait cette attention, ils auraient évité de grossir leurs livres d'un long catalogue de médailles d'argent, entre Posthume et Dioclétien, puisque toutes celles de ce temps-là ne sont véritablement que de petit bronze couvert d'une feuille d'étain, et que par conséquent, il était inutîle de répéter des médailles absolument les mêmes, dans deux différentes classes.

Il n'est pas aisé de deviner, pourquoi l'on cessa tout-à-coup de frapper des médailles d'argent, tandis qu'on continuait d'en frapper en or ; car il est à remarquer que dans le temps du plus grand affoiblissement, et même de l'anéantissement presque entier des espèces d'argent ; celles d'or ont toujours été battues sur la fin. Cela proviendrait-il de ce que la recette d'une grande partie des revenus de l'Empire, s'est toujours faite en or ? La plupart des termes employés pour exprimer les tributs et les autres impositions, étaient des épithetes d'aurum, comme aurum vicesimarium, aurum coronarium, aurum lustrale, etc. L'empereur était intéressé à ne pas permettre qu'on altérât le titre de ce métal, afin que ses finances ne souffrissent pas de cette altération. Au contraire, le trésor impérial faisant ses payements en argent ou en cuivre ; plus le titre de l'un et le poids de l'autre de ces métaux étaient affoiblis, plus le fisc y trouvait son compte, parce que cet affoiblissement des espèces n'en faisait pas changer la valeur dans le commerce ; et qu'avec une plus petite quantité d'or, on pouvait avoir du cuivre en masse pour en faire de la monnaie, à laquelle l'on donnait la valeur des pièces d'argent, en y ajoutant une feuille d'étain affiné.

Cet expédient à la fin ruineux pour l'état, a pu être un effet de la nécessité où se sont trouvés les empereurs, de recourir aux moyens les plus odieux, pour payer leurs troupes, pendant le désordre où l'empire se vit plongé depuis Galien jusqu'à Dioclétien et Maximien ; car durant tout cet intervalle de temps, l'empire fut toujours attaqué au-dehors par les nations Barbares qui l'environnaient, et déchiré au-dedans par les tyrants, qui s'élevèrent ou ensemble, ou successivement dans ses différentes provinces. (D.J.)

MEDAILLE DE BILLON, (Numismatique). On nomme ainsi toute médaille d'or ou d'argent, mêlée de beaucoup d'alliage, car le billon en matière de monnaie, signifie toutes sortes de matière d'or ou d'argent alliée, c'est-à-dire mêlée au-dessous d'un certain degré, et principalement de celui qui est fixé pour la fabrication des monnaies.

Depuis le règne de Galien et de ses successeurs, on ne trouve presque que des médailles de pur billon, dont les unes sont battues sur le seul cuivre, et couvertes d'une feuille d'étain ; on les nomme médailles saucées : les autres n'ont qu'une feuille d'argent battue fort adroitement sur le cuivre ; on les appelle médailles fourrées. Voyez MEDAILLE FOURREE. (D.J.)

MEDAILLE DE BRONZE, (Numismatique) c'est par le mot de bronze qu'on a cru devoir annoblir le nom de cuivre, en termes de médaillistes. Le bronze est comme on sait un mélange de cuivre rouge et de cuivre jaune, dont les antiquaires ont formé trois espèces différentes de médailles, qu'ils appellent le grand, le moyen et le petit bronze, selon la grandeur, l'épaisseur et l'étendue de la médaille ; la grosseur et le relief de la tête. (D.J.)

MEDAILLE DE CUIVRE, (Numismatique) Quoique tout le cuivre dans la distinction des suites dont les cabinets sont composés, ait l'honneur de porter le nom de bronze, on ne laisse pas néanmoins de le distinguer par les métaux. Quand on en veut parler exactement, comme M. Savot a fait dans son Disc. des Méd. II. part. chap. XVIIe

On voit plusieurs médailles de cuivre rouge dès le temps d'Auguste, particulièrement parmi ce qu'on appelle moyen bronze.

On en voit aussi de cuivre jaune dès le même temps parmi le grand bronze, comme parmi le moyen.

Il s'en trouve de vrai bronze dont l'oeil est imcomparablement plus beau ; mais on n'en connait point de cuivre de Corinthe. Il est très-vraisemblable que ce cuivre ne fut jamais introduit dans les monnaies, parce que c'eut été y mettre une grande confusion ; puisqu'alors il aurait dû y avoir une différence de valeur dans des pièces de même grandeur et de même poids, ce qui aurait exposé le public à toutes sortes de fraudes et de tromperies.

Cependant il y a des médailles de deux cuivres qui ne sont point alliés, mais dont seulement l'un enchâsse l'autre, et qui sont frappées d'un même coin ; tels sont quelques médaillons antiques de Commode, d'Adrien, etc. et certains autres, qui sans cela ne seraient que de grand et de moyen bronze. L'on peut y remarquer, que les caractères de la légende mordent quelquefois sur les deux métaux ; d'autres fois ils ne sont que sur l'intérieur, auquel le premier cercle de métal ne sert que d'encastillement. (D.J.)

MEDAILLE D'ETAIN, (Numismatique) c'étaient vraisemblablement des médailles de plomb noir et de plomb blanc ; mais il ne nous en est point parvenu.

Cependant les anciens ont employé quelquefois l'étain à faire de la monnaie. Jules Pollux nous apprend que Denys le Tyran força les Syracusains à battre de la monnaie d'étain au lieu d'argent, et qu'il fixa la valeur de ces sortes de pièces à quatre drachmes.

Une loi du digeste (c'est la loi 9, ad leg. Cornel. de Fals.) défend d'acheter et de vendre des pièces de monnaies d'étain ; d'où il est évident que les anciens avaient frappé des médailles en ce métal ; mais Savot, discours sur les médailles, part. II. c. IIe et IIIe croit qu'on n'a jamais pu se servir pour cela de véritable étain, qui était un composé d'argent et de plomb fondus ensemble, ni même de l'etain faux composé d'un tiers de cuivre blanc, et de deux tiers de plomb blanc, parce que l'un et l'autre était trop aigre et trop cassant.

On n'a donc pu frapper des médailles que sur deux autres espèces d'étain faux, dont l'un se faisait avec du plomb noir et du plomb blanc mêlés ensemble en égale quantité, et l'autre avec deux tiers de plomb noir, et un tiers de plomb blanc. (D.J.)

MEDAILLE DE FER, (Numismatique) nous ne connaissons point de vraies médailles de fer : il est vrai que César dit que certains peuples de la grande-Bretagne se servaient de monnaies de fer. Il est encore vrai que la même chose est arrivée dans quelques villes de la Grèce. Enfin, Savot rapporte qu'il s'est trouvé des monnaies romaines que l'aimant attirait ; mais ce n'était que des médailles fourrées, telles qu'il nous en reste encore plusieurs et du temps de la république, et du temps des empereurs.

MEDAILLE DE PLOMB, (Numismatique) en latin nummus plumbeus. Personne ne doute aujourd'hui, qu'il ne nous reste des médailles antiques de plomb. Plaute parle des monnaies de plomb en plus d'un endroit, ei ne nummum crederem, dit un de ses acteurs, cui si capitis res sint, nummum nunquam credam plumbeum : et dans une autre de ses pièces, Tace, sis faber qui cudere solet plumbeos nummos.

A la vérité, Casaubon a prétendu que Plaute donnait le nom de nummi plumbei à ces petites pièces de bronze, que les Grecs appelaient , et ; et ce savant homme donne la même explication aux passages de Martial, où il est parlé de médailles de plomb, savoir, épigramm. lib. I. épigr. 79. et lib. X. épigr. 4. Mais l'illustre commentateur de Théophraste, d'Athénée, de Strabon, et de Polybe, aurait bien changé d'avis, s'il eut Ve les médailles de ce métal de plomb, qui se sont conservées en grand nombre, jusqu'à des suites de trois à quatre cent dans les cabinets des curieux de Rome.

M. le baron de la Bastie en a Ve deux incontestablement antiques, dans le cabinet de M. l'abbé de Rothelin. La première dont le revers est entièrement fruste, est un Marc-Aurele. La seconde qui est bien conservée, représente d'un côté la tête de Lucius Verus couronnée de laurier : Imp. Caes. L. Verus Aug. Au revers une femme debout vétue de la stole, offre à manger dans une patère qu'elle tient de la main droite, à un serpent qui s'élève d'un petit autel, autour duquel il est entortillé. On lit pour légende Saluti Augustor. Tr. P. Cos. 11.

Patin déclare dans son Histoire des médailles, p. 50, en avoir Ve un grand nombre de grecques, et il en cite deux latines de son cabinet. Il est donc certain que les anciens Grecs et Romains se sont servis de monnaies de plomb, quoiqu'il paraisse par les passages de Plaute, cités ci-dessus, que les pièces de ce métal étaient de la plus petite valeur.

Mais il faut prendre garde de n'être pas trompé en achetant des médailles de plomb modernes, pour des médailles antiques de ce métal. Les modernes ne sont de nulle valeur, et les antiques sont très-curieuses ; le plomb en est plus blanc que le nôtre, et plus dur. (D.J.)

MEDAILLE DE POTIN, (Numismatique) on nomme ainsi des médailles d'argent bas et allié.

Ce sont des médailles d'un métal factice composé de cuivre jaune, et d'un mélange de plomb, d'étain, et de calamite avec un peu d'argent.

Savot dans son discours sur les médailles, définit le potin une espèce de cuivre jaune qui ne se peut dorer à cause du plomb qui y entre. On lui donne, ajoute-t-il, le nom de potin, à cause qu'on fait ordinairement les pots de cuivre de cette matière.

Mais il entrait encore dans la composition du potin, dont on se servait pour frapper des médailles, environ un cinquième d'argent, comme on l'a reconnu en en faisant fondre quelques-unes.

On commence à trouver des médailles de potin dès le temps d'Auguste et de Tibere. M. le baron de la Bastie a Ve une médaille grecque de Tibere au revers d'Auguste en potin, dans le cabinet de M. l'abbé de Rothelin, qui avait fait une suite presque complete en ce métal, chose singulière, et qui peut passer pour unique en son genre. (D.J.)

MEDAILLE CONTREFAITE, (Numismatique) les médailles contrefaites, sont toutes les médailles fausses et imitées.

Nous avons indiqué au mot médaille, les diverses fourberies qu'on met en usage dans leurs contrefaçons, et les moyens de les découvrir. Nous ajouterons seulement ici quelques observations.

Comme les Emiliens de G B, sont fort estimés, et coutent 40 ou 50 francs, les faussaires ont trouvé le moyen d'en faire avec les médailles de Philippe Père, dont le visage a assez de ressemblance avec celui d'Emilien.

On a trouvé semblablement le secret de donner quelques médailles de Gordien troisième, aux Gordiens d'Afrique, soit en réformant la légende de la tête, et en mettant A F R au lieu de Pius F. soit en marquant un peu de barbe au menton ; de sorte que quelques-uns ont pris de-là sujet de soutenir que c'était un troisième africain, fils ou neveu des deux autres. Il sera aisé de se désabuser, en se souvenant que tous les revers où il y a Aug. ne conviennent point aux deux africains, qui marquent ordinairement deux G. G. sur leurs médailles. Ce n'est pas qu'il ne s'en rencontre quelquefois avec Aug. par un seul G, comme providentia Aug. virtus Aug. mais alors le mot A F R. qui se trouve du côté de la tête, empêche qu'on ne puisse y être abusé.

Il ne faut pas se laisser tromper par certains Nérons de moyen bronze, déguisés quelquefois en Othons ; il ne faut pas non plus s'arrêter à la perruque qui parait si nettement sur l'argent et sur l'or, et condamner sur les médailles où l'on ne la remarque pas ; car quoiqu'elle ne se trouve pas sur les médailles battues hors d'Italie, elles n'en sont pas moins véritables ; et quoique le Padouan ait pris soin de la marquer fort proprement sur le grand bronze, ses médailles n'en sont pas moins fausses.

Enfin, il ne faut pas établir pour règle sans exception qu'on contrefasse uniquement les médailles rares et de grand prix, comme celles dont le même Padouan a pris la peine de faire les carrés : en effet, il y a des médailles très-communes qui ne laissent pas d'être contrefaites. (D.J.)

MEDAILLE DENTELEE, (Numismatique) en latin numisma serrata.

On appelle médailles dentelées ou crenelées, les médailles d'argent dont les bords ont une dentelure. Cette dentelure est une preuve de la bonté et de l'antiquité de la médaille : elles sont communes parmi les médailles consulaires jusqu'au temps d'Auguste, depuis lequel il n'y en a peut-être aucune.

Il s'en trouve de bronze des rois de Syrie ; mais il semble que ces dernières n'aient été dentelées que pour l'ornement et non pour la nécessité ; au lieu que dans les médailles d'argent, la fourberie des faux monnoyeurs a obligé de prendre cette précaution dès le temps que la république frappa des monnaies d'argent. En effet, les faux monnoyeurs s'étudiaient à contrefaire les coins des monétaires ; et ayant imaginé de ne prendre qu'une feuille d'or ou d'argent pour couvrir le cuivre de leurs médailles ; ils la frappaient avec beaucoup d'adresse.

Pour remedier à cette friponnerie, et pour distinguer la fausse monnaie de la bonne, on inventa l'art de créneler, de denteler les médailles, et on décria tous les coins dont on trouvait des espèces fourrées. (D.J.)

MEDAILLE ECLATEE ou FENDUE, (Numismatique) on nomme ainsi les médailles dont les bords sont éclatés ou fendus par la force du coin.

Il est bon de savoir que les bords des médailles éclatées par la cause dont nous venons de parler, ne sont pas un défaut qui diminue le prix de la médaille, quand les figures n'en sont point endommagées ; au contraire c'est un des bons signes que la médaille n'est point moulée. Ce signe ne laisse pas néanmoins d'être équivoque à l'égard des fourbes qui auraient battu sur l'antique ; car cela ne prouverait pas que la tête ou le revers ne fût d'un coin moderne, et peut-être tous les deux. (D.J.)

MEDAILLE FAUSSE, (Numismatique) toute médaille faite à plaisir, et qui n'a jamais existé chez les anciens. On nomme aussi médailles fausses, les médailles antiques, moulées, réparées, vernissées, restituées, avec des coins modernes, réformées avec le marteau ; celles dont les revers ont été contrefaits, insérés, appliqués ; celles dont la tête, les légendes ont été altérées ; enfin, celles qu'on a fait éclater ou fendre exprès en les frappant. (D.J.)

MEDAILLE FOURREE, (Numismatique) médaille de bas aloi avec un faux revers.

Les antiquaires nomment spécialement médailles fourrées, celles de l'antiquité qui sont couvertes d'une petite feuille d'argent sur le cuivre ou sur le fer, battues ensemble avec tant d'adresse, qu'on ne les reconnait qu'à la coupure. Ce sont de fausses monnaies antiques, qui malgré leur antiquité reconnue, ne méritent aucune foi dans l'histoire.

Rien de plus commun que ces sortes de pièces, pour qui s'est familiarisé avec l'antique, et rien de plus rare qu'un antiquaire, qui sachant résister à la vanité de posséder une médaille unique, ne fasse de celles-ci que le cas dont elles sont dignes.

On n'aura pas de peine à croire que l'objet de l'attention des gouvernements se soit porté en tout temps, et en tout pays, sur les faux monnoyeurs. De-là ce qu'on appelle fausse-monnaie, a été un ouvrage de ténèbres. Ceux que l'avidité du gain a entrainé dans un métier si dangereux, ont ordinairement exercé leur art dans des lieux obscurs et retirés ; et c'étaient plutôt des gens sans connaissance et sans éducation, qui exposaient ainsi leur vie pour un vil intérêt, que des hommes instruits et capables de travailler avec exactitude. Aussi voyons-nous peu de ces médailles fourrées, sur lesquelles on ne remarque des erreurs grossières, soit dans les dates, lorsque le même consulat, la même puissance tribunitienne, sont répétées sur les deux faces de la médaille, ou qu'on y trouve une différence réelle, et quelquefois de plusieurs années, soit dans les faits, lorsqu'ils ne conviennent qu'à un prince qui régnait devant, ou après celui, dont la tête est représentée de l'autre côté de la médaille.

Ces fautes doivent être imputées aux fabricateurs de ces fausses monnaies. L'inquiétude inséparable de toute action qui met la vie dans un risque perpétuel, ne s'accorde guère avec l'attention nécessaire pour la correction d'un ouvrage. Ils frappaient donc leurs fausses médailles suivant que le hasard arrangeait les différents coins, que ce même hasard avait fait tomber entre leurs mains ; ils joignaient à la tête d'un empereur le premier revers qu'ils rencontraient, et ne craignaient point que ce bizarre mélange put empêcher le cours de leurs espèces, parce qu'ils jugeaient des autres par eux-mêmes, et que leur ignorance ne leur permettait pas de s'apercevoir de leurs propres bétises.

M. Geinoz en a observé quantité sur des médailles fourrées du seul cabinet de M. l'abbé Rothelin. Il a Ve avec étonnement dans Trajan, son sixième consulat marqué au revers d'une médaille d'argent, qui du côté de la tête, ne porte que le cinquième. Dans Hadrien fortunae raeduci, où le mot reduci est écrit avec un ae. Dans M. Aurele, la vingt-quatrième puissance tribunitienne d'un côté, pendant que l'autre n'exprime que la dix-huitième. Ici des consulats et des puissances tribunitiennes au revers d'une impératrice, là des types et des légendes qui ne conviennent qu'à des princesses, au revers de la tête d'un empereur. Dans Gordien, un de ces revers que fit frapper Philippe pour les jeux séculiers qui se célebraient sous son règne ; quelquefois une tête impériale avec le revers d'une médaille consulaire. Enfin, des exemples sans nombre de tout ce que peuvent produire en ce genre la négligence, la précipitation, l'ignorance, ou le manque de coins nécessaires, pour frapper toutes les médailles qu'ils voulaient imiter.

Il faut en conclure, que d'ajouter foi à ces sortes de médailles, et vouloir en tirer avantage pour faire naître des problèmes dans l'histoire, c'est tromper le public par de frivoles et fausses discussions. Si ceux qui jusqu'à-présent nous ont donné des catalogues de médailles, n'ont point eu soin de distinguer ces fausses monnaies d'avec les vraies, c'est un reproche bien fondé que nous sommes en droit de leur faire. Mêler les médailles fourrées avec les médailles légitimes, c'est mêler de faux titres avec ceux qui sont vrais ; c'est confondre la Fable avec l'Histoire.

Mais, dira-t-on, pourquoi les médailles fourrées sont-elles presque toujours rares, et même assez souvent uniques ? C'est d'abord parce que les fausses monnaies n'ont jamais été aussi abondantes que les vraies. C'est encore, parce que celles-là ont été plus aisément détruites par la rouille et les autres accidents, qui font plus d'impression sur le fer et sur le cuivre, que sur l'or et sur l'argent. C'est enfin, parce qu'il est assez rare, que la même faute soit souvent répétée par des ouvriers qui n'ont d'autres conducteurs que le hasard.

On a peine à comprendre aujourd'hui que les fausses pièces pussent avoir cours autrefois, et qu'on ne s'aperçut pas d'abord de leur fausseté, par la contrariété qui se trouvait entre la tête et le revers ; mais on ne saurait faire là-dessus la moindre comparaison entre les pièces de monnaies de notre siècle, et celles qui avaient cours chez les anciens. Nos monnaies conservent le même revers pendant longtemps, et il n'y a par exemple, à tous nos louis, et à tous nos écus, qu'un seul et même revers ; en sorte que si l'on en présentait quelques-uns qui portassent d'un côté la tête de Louis XV. et de l'autre des revers employés sur les monnaies de Louis XIV. ils seraient aisément reconnus pour faux, et ne passeraient pas dans le commerce. Il n'en était pas de même chez les Romains ; chaque année, chaque mois, et presque chaque jour, on frappait une prodigieuse quantité de revers differents pour la même tête. Comment distinguer du premier coup d'oeil, dans cette variété presqu'infinie de revers, si celui qu'on voyait sur la pièce de monnaie qu'on représentait, répondait à la tête qui était de l'autre côté ? Chaque particulier était-il en état de faire cette distinction ? Tout le monde savait-il lire, pour pouvoir juger si la légende de la tête convenait avec celle du revers ? Il n'y avait donc à proprement parler, que le côté de la tête qui fut le caractère de la monnaie courante ; et il suffisait que cette tête fût celle de quelque empereur, de quelque princesse, de quelque César, etc. pour qu'elle fût reçue dans le commerce ; car pour lors, ce n'était pas l'usage qu'à tous les avénements des empereurs au trone, en commençant de battre monnaie à leur coin, on décriât les pièces qui étaient marquées au coin de leur prédécesseurs.

C'est à la faveur de cet usage, par lequel toute pièce de monnaie qui portait l'image d'un empereur, soit pendant sa vie, soit après sa mort, avait un libre cours dans l'empire, que les faux monnoyeurs apportèrent moins de soin à copier exactement les monnaies qu'ils voulaient contrefaire. Cependant il n'y a pas d'apparence que leur fraude ait été longtemps cachée. Dès qu'on reconnaissait les pièces fausses, sans doute on se hâtait de les décrier, de les refondre, et d'en briser les moules et les coins : de-là vient que plusieurs médailles fourrées sont uniques en leur espèce, et la plupart très-rares. Mais en attendant que la fraude fût découverte, les faussaires avaient le temps de travailler, de faire circuler leur fausse monnaie dans le public, et de se dédommager de leurs frais, peut-être même de gagner considérablement.

Après tout, quelles que soient les causes des fautes qu'on trouve sur les médailles fourrées, il suffit pour les décréditer, de prouver qu'elles en sont remplies, et qu'elles ne peuvent servir de preuve à aucun fait historique. Or c'est ce dont tous les antiquaires conviennent. Voyez le mémoire de M. le baron de la Bastie, inséré dans le recueil de l'acad. des Inscriptions, tome XII.

Il ne faut pas cependant imaginer que les médailles qui ont été frappées par ordre du prince, et sous les yeux du magistrat, soient toujours exemptes de fautes. Il s'en trouve dont la légende n'est pas exacte ; tantôt quelques lettres y sont omises ; tantôt il y en a de superflues ; on en voit où les lettres sont transposées, et d'autres où le monétaire à la place des lettres véritables, en a substitué qui ne signifient rien, ou dont le sens ne s'accorde nullement avec le type. Sur quelques-unes, la tête du même prince est gravée en relief des deux côtés, souvent avec des inscriptions qui portent des dates différentes. Sur quelqu'autres qu'on nomme incuses, la même tête est d'un côté en relief, et de l'autre en creux. Quelquefois le revers d'un empereur est joint à la tête d'une impératrice ; ou bien le revers gravé pour une impératrice, est uni à la tête d'un empereur. Enfin, il est certaines médailles qui ont été frappées plus d'une fais, et celles-là nous représentent souvent l'assemblage monstrueux de mots composés de deux légendes différentes. Voyez MEDAILLE ANTIQUE. (D.J.)

MEDAILLE FRAPPEE SUR L'ANTIQUE (Numismatique) les médailles ainsi nommées sont celles que l'on a reformées par fourberie avec le marteau, et auxquelles on a ensuite donné une nouvelle empreinte. Voyez sur cette ruse le mot MEDAILLE.

MEDAILLE NON FRAPPEE, (Numismatique) on nomme ainsi des pièces de métal d'un certain poids, qui servaient à faire des échanges contre des marchandises ou des denrées, avant qu'on eut trouvé l'art d'y imprimer des figures ou des caractères par le moyen des coins et du marteau. On peut lire au sujet de ces sortes de médailles, une savante dissertation de Sperlingius, intitulée, Sperlingii (Othonis) dissertatio de nummis non cusis, tàm veterum quàm recentiorum. Amst. 1700, in -4.

MEDAILLE FRUSTE, (Numismatique) les antiquaires appellent médailles frustes, toutes celles qui sont défectueuses dans la forme, et qui pechent, soit en ce que le métal est rogné, le grenetis effleuré, la légende effacée, les figures biffées, la tête méconnaissable, etc. Il faut qu'une telle médaille soit fort rare, pour que les curieux l'estiment précieuse malgré ses défauts.

MEDAILLE INANIMEE, (Numismatique) les antiquaires appellent médailles inanimées, celles qui n'ont point de légendes, parce que la légende est l'âme de la médaille. Voyez LEGENDE, (Numismatique)

MEDAILLE INCERTAINE, ou INCONNUE, (Numismatique) les antiquaires nomment ainsi les médailles dont on ne peut déterminer ni le temps, ni l'occasion pour laquelle on les a fait frapper. M. le baron de la Bastie en cite pour exemple dans cette classe, une d'argent qui était dans le cabinet de M. l'abbé de Rothelin. Cette médaille offre d'un côté une tête couronnée de laurier, avec une barbe fort épaisse. La légende est Hercules adsertor : au revers est une femme debout, tenant un rameau de la main droite, et une corne d'abondance de la gauche. On lit autour, florente fortunâ. (D.J.)

MEDAILLE INCUSE, (Numismatique) les médailles qui ne sont marquées que d'un côté, s'appellent médailles incuses.

Ce défaut est fort commun dans les monnaies modernes, depuis Othon jusqu'à Henri l'Oiseleur. Dans les antiques consulaires, il se trouve aussi des médailles incuses, et quelques-unes dans les impériales de bronze et d'argent.

La conformation de ces médailles pourrait surprendre un nouveau curieux, parce qu'au lieu de revers, elles n'ont que l'impression de la tête en creux, comme si on eut voulu en faire un moule ; mais il est certain que cette défectuosité vient de l'oubli, ou de la précipitation du monnoyeur, qui avant que de retirer une médaille qu'il venait de frapper, remettait une nouvelle pièce de métal, laquelle trouvant d'une part le carré, et de l'autre la médaille précèdente, recevait l'impression de la même tête, d'un côté en relief, et de l'autre en creux ; mais toujours plus imparfaitement d'un côté que de l'autre, l'effort de la médaille étant beaucoup plus faible que celui du carré.

MEDAILLE MARTELEE, (Numismatique) on appelle une médaille martelée, celle dont on a fait une médaille rare d'une médaille commune, en se servant du martelage. On prend une médaille antique, mais fort commune, on en lime entièrement le revers qui est commun, et on y frappe à la place un nouveau revers qui est rare, avec un coin tout neuf, qu'on rend exprès dans le goût antique le plus qu'il est possible. On prend garde dans cette opération frauduleuse, d'altérer la tête qui doit être conservée dans sa pureté. Comme c'est à coups de marteau qu'on empreint ce nouveau revers, on a donné à ces sortes de médailles le nom de martelées. Les habiles antiquaires reconnaissent la supercherie, en comparant la tête avec le revers, dont ils aperçoivent bientôt la différente fabrique. (D.J.)

MEDAILLE MOULEE, (Numismatique) on appelle médailles moulées, des médailles antiques jetées en sable dans des moules, et ensuite réparées.

On a découvert à Lyon au commencement de ce siècle, des moules de médailles antiques, dont la fabrique n'est pas indigne de notre curiosité.

La matière de ces moules est une argîle blanchâtre, cuite ; leur forme est plate, terminée par une circonférence ronde, d'un pouce de diamètre ; leur épaisseur est de deux lignes par les bords, et est diminuée dans cet espace, de l'un ou des deux côtés du moule, qui a été cavé par l'enfoncement de la pièce de monnaie, dont le type y est resté imprimé. Je dis de l'un ou des deux côtés du moule, parce que la plupart ont d'un côté l'impression d'une tête, et de l'autre celle d'un revers, et que quelques-uns ne sont imprimés que d'un côté seulement.

Chacun de ces moules a un endroit de son bord ouvert par une entaille, qui aboutit au vide formé par le corps de la pièce imprimée ; et comme la forme plate et l'égalité de la circonférence de tous ces moules les rendent propres à être joints ensemble par arrangement relatif des types, à ceux des revers dont ils ont conservé l'impression, et dans une disposition où toutes ces entailles se rencontrent, on s'aperçoit d'abord que le sillon continué par la jonction de ces crénelures, servait de jeu au grouppe formé de l'assemblage de ces moules, par la fusion de la matière destinée aux monnaies.

Ce grouppe qui pouvait être plus ou moins long, selon le nombre des moules à double type dont on le composait, se terminait à chaque extrémité par un moule imprimé d'un côté seulement. Il est facîle de juger par le reste de terre étrangère, comme attachée au bord de quelques-uns de ces moules, que la terre leur servait de lut pour les tenir unis, et pour fermer toutes les ouvertures par lesquelles le métal aurait pu s'échapper ; ce lut était aisé à séparer de ces moules sans les endommager, lorsqu'après la fusion, la matière était refroidie.

L'impression des types des têtes de Septime Sévère, de Julia Pia et d'Antonin leur fils, surnommé Caracalla, qui s'est conservée sur ces moules, rend certaine l'époque du temps de leur fabrique ; c'est celui de l'empire de ces princes, dont les monnaies devaient être abondantes à Lyon, puisque le premier y avait séjourné assez de temps après la victoire qu'il y remporta sur Albin, et que cette ville était le lieu de la naissance du second.

Un lingot de billon, dont la rouille verdâtre marquait la quantité de cuivre dominante sur la portion de l'argent qui y entrait, trouvée en même temps et au même lieu que ces moules dont nous parlons, ne laisse aucun lieu de douter qu'ils n'aient servi à jeter en sable des monnaies d'argent, plutôt que des monnaies d'or.

Il parait par cette description, et par l'usage que les anciens faisaient de ces moules, que leur manière de jeter en fonte était assez semblable à la nôtre, et que ce qu'ils avaient de particulier était la qualité du sable dont ils se servaient, qui était si bon et si bien préparé, qu'après 1400 ans, leurs moules sont encore en état de recevoir plusieurs fusions.

La bonté des moules, et le grand nombre qu'on en avait déjà trouvé du temps de Savot dans la même ville de Lyon, l'ont persuadé que les Romains moulaient toutes leurs monnaies. Fréher adopta l'idée de Savot, et leur suffrage entraina tous les antiquaires ; mais on est aujourd'hui bien revenu de cette erreur, et les savants sont convaincus que tous ces moules n'avaient été employés que par les faux monnoyeurs, du genre de ceux qui joignent à la contrefaçon par le jet en sable, la corruption du titre, en augmentant considérablement l'alliage du cuivre avec l'argent.

De-là vient cette différence notable du titre qu'on observe assez souvent dans beaucoup de pièces d'argent du même revers et de même époque sous un même empereur. Cette manière de falsifier la monnaie, avait prévalu sur la fourrure, dès le temps de Pline, qui en fait la remarque.

La décadence de la Gravure, qui sous Septime Sévère était déjà considérable, et l'altération qu'il avait introduite dans le titre des monnaies, favorisèrent encore davantage les billonneurs et les faussaires, en rendant leur tromperie plus aisée. La quantité de ces moules qu'on a découverts à Lyon en différents temps, fait assez juger qu'il devait y avoir une multitude étonnante de ces faussaires. Le nombre devint depuis si prodigieux, dans les villes mêmes où il y avait des préfectures des monnaies, et parmi les officiers et les ouvriers qui y étaient employés, qu'il fut capable de former à Rome, sous l'empereur Aurélien, une petite armée, qui, dans la crainte des châtiments dont on les menaçait, se révolta contre lui, et lui tua dans un choc sept mille hommes de troupes réglées. Bel exemple de la force et de l'étendue de la séduction du gain illicite ! Voilà l'extrait d'un mémoire qu'on trouvera sur ce sujet dans le tom. III. de l'acad. des Inscript. (D.J.)

MEDAILLE REPAREE, (Numismatique) les antiquaires nomment médailles réparées, les médailles antiques qui étaient frustes, endommagées, et qu'on a rendu par artifice entières, nettes et lisibles. Nous avons parlé de cette ruse au mot MEDAILLE.

MEDAILLE SAUCEE, (Numismatique) c'est-à-dire, médaille battue sur le seul cuivre, et ensuite couverte d'une feuille d'étain.

Depuis Claude le Gothique, jusqu'à Dioclétien, il n'y a plus d'argent du-tout dans les médailles, ou s'il s'en trouve dans quelques-unes, elles sont si rares, que l'exception confirme la règle. On a frappé pour lors sur le cuivre seul, mais après l'avoir couvert d'une feuille d'étain ; c'est ce qui donne cet oeil blanc aux médailles que nous appelons saucées. Tels sont plusieurs Claudes, les Auréliens, et la suite jusqu'à Numérien inclusivement. On trouve même encore de ces médailles saucées sous Dioclétien, Maximien, quoique l'usage de frapper sur l'argent pur fût déjà rétabli. Je ne sai si quelque cabinet peut fournir des Licinius, des Maxences et des Maximes de cette espèce ; on y trouverait plutôt de vrai billon. En tout cas, il semble qu'il ne soit plus question de médailles saucées sous Constantin. Au reste, si les auteurs qui nous ont donné des collections de médailles eussent fait cette attention, ils auraient évité de grossir leurs livres d'un long catalogue de médailles d'argent, entre Posthume et Dioclétien, puisque toutes celles de ce temps-là ne sont véritablement que de petit bronze couvert d'une feuille d'étain, et que par conséquent il était inutîle de répéter des médailles absolument les mêmes dans deux différentes classes.

MEDAILLE SANS TETE, (Numismatique) nom des médailles qui se trouvent avec les seules légendes, et sans tête. Telle est celle qui porte une victoire posée sur un globe, avec la légende, salus generis humani : au revers S. P. Q. R. dans une couronne de chêne. Les uns la donnent à Auguste, les autres aux conjurés qui assassinèrent Jules-César ; en un mot, on en abandonne l'énigme aux conjectures des savants.

Ces sortes de médailles qui n'ont point de tête, se placent ordinairement à la suite des consulaires, dans la classe qu'on appelle nummi incerti. MM. Vaillant, Patin et Morel, en ont ramassé chacun un assez grand nombre ; mais il y en a beaucoup qui leur ont échappé. Les uns veulent que ces médailles aient été frappées après la mort de Caligula, d'autres après celle de Néron ; car le sénat, dit-on, crut alors qu'il allait recouvrer sa liberté et son autorité, et il fit frapper ces monnaies pour rentrer en jouissance de ses anciens droits. Aussi, ajoute-t-on, ces médailles ont-elles pour la plupart sur un des côtés, ou S. P. Q. R. dans une couronne, ou P. R. signa, ou d'autres symboles, qui paraissent appartenir plutôt à la république, qu'à quelqu'un des empereurs. Mais il y eut trop peu de temps entre la mort de Caligula et l'élection de Claude, et entre la mort de Néron et l'arrivée de Galba à Rome, pour que dans des intervalles si courts, le sénat eut pu faire frapper tant de médailles différentes.

On a peine à se persuader aujourd'hui, que sous les empereurs, on ait fait frapper à Rome ou en Italie des monnaies qui ne portaient ni leur nom, ni leur image, parce qu'on se représente l'empire des Césars, comme une monarchie parfaitement semblable à celles qui sont actuellement établies en Europe. C'est une erreur, dit M. le baron de la Bastie, qu'il serait aisé de réfuter ; et ceux qui voudront s'en désabuser, n'ont qu'à lire le livre du célèbre Gravina, de imperio romano, qu'on a joint aux dernières éditions de l'ouvrage de ce savant homme, sur les sources du Droit civil. (D.J.)

MEDAILLE CONTORNIATE, (Numismatique) on appelle contorniate en italien medaglini, contornati, des médailles de bronze avec une certaine enfonçure tout-autour, qui laisse un rond des deux côtés, et avec des figures qui n'ont presque point de relief, en comparaison des vrais médaillons. Voyez CONTORNIATES.

J'ajoute ici qu'on ignore en quel temps l'on a commencé d'en frapper, quoique M. Mahudel ait soutenu avec assez de probabilité, que ce fut vers le milieu du IIIe siècle de J. C. que l'usage en a continué jusque vers la fin du iv. siècle, et que c'est à Rome, et non pas dans la Grèce, qu'il faut chercher l'origine de ces sortes de pièces.

Un savant, qui ne s'est point fait connaître, a prétendu dernièrement (en 1636) que les médailles contorniates étaient une invention des personnes employées aux jeux publics, sur la scène, ou dans le cirque. Il croit que ces acteurs, après avoir marqué sur un des côtés de la médaille leur nom, celui de leurs chevaux, et leurs victoires, avaient mieux aimé faire mettre sur l'autre côté le nom et la tête de quelque personnage illustre des siècles précédents, que de le laisser sans types, quoique cela soit arrivé quelquefois.

Cette opinion n'a rien de contraire à celle de M. Mahudel ; mais il faut avouer que l'anonyme se trompe, s'il ne croit pas qu'il y ait d'autres contorniates, que celles sur lesquelles on trouve le nom des athletes, cochers et comédiens, celui des chevaux qui avaient remporté le prix dans les courses du cirque, enfin les victoires des différents acteurs employés aux jeux publics. Nous connaissons plusieurs de ces médailles, où au revers d'Alexandre, de Néron, de Trajan, etc. on ne rencontre rien de semblable ; et M. Havercamp en a fait graver quelques-unes dans sa dissertation d'une médaille contorniate d'Alexandre le grand, et sur les contorniates en général ; mais ce savant homme, qui convient en plus d'un endroit de son ouvrage, que ces médailles ont toutes été fabriquées depuis le temps de Constantin jusqu'à Valentinien III, et qu'elles ont été faites à l'occasion des jeux publics, ne laisse pas de prodiguer l'érudition pour en expliquer les revers, de la même façon que si c'étaient des pièces frappées du temps même des princes dont elles portent l'image.

La médaille qui a donné lieu à sa dissertation, et qu'il lui plait de rapporter à Alexandre le grand, représente, à ce qu'il prétend, d'un côté l'orient et l'occident, sous la figure de deux têtes qui ouvrent la bouche d'une manière hideuse, et au revers, les quatre grands empires par quatre sphinx. Comment M. Havercamp ne s'est-il pas aperçu que ce qu'il prend pour deux têtes accollées, ne sont que deux masques fort ressemblans à quelques-uns de ceux qui sont représentés dans les ouvrages de Bergerus et de Ficoroni sur les masques des anciens ? Il est aisé de distinguer un masque d'une tête, puisque les têtes ne sont jamais représentées sans cou, et que les masques n'en ont jamais. Ainsi, cette médaille ne peut avoir rapport qu'aux jeux scéniques. Toutes ces remarques sont de M. le baron de la Bastie. (D.J.)

MEDAILLE CONTREMARQUEE, (Numismatique) les Antiquaires appellent ainsi certaines médailles grecques ou latines, sur lesquelles se trouvent empreintes par autorité publique différentes figures, types ou symboles, comme dans les médailles grecques, ou bien, comme dans les médailles latines, tantôt de simples lettres, tantôt des abréviations de mots frappés sur les mêmes médailles après qu'elles ont eu cours dans le commerce. On recherche toujours avec avidité les raisons politiques qui donnèrent lieu à ces médailles contremarquées, et c'est sur quoi nous n'avons encore que des conjectures, mais voici les faits dont on convient.

1°. Le mécanisme de l'art de contremarquer les médailles, à en juger par l'évacuation du métal plus ou moins apparente à l'endroit qui répond directement à la contremarque sur le côté opposé, ne demandait qu'un grand coup de marteau sur le nouveau poinçon que le monnoyeur posait sur la pièce ; et comme il était essentiel que par cette opération les lettres de la légende et les figures du champ de la médaille opposé à la contremarque, ne fussent ni aplaties, ni effacées, on conçoit qu'il fallait qu'on plaçât la pièce sur un billot d'un bois qui cédât à la violence du coup ; c'est par ce défaut de résistance du bois qui servait de point d'appui, que le métal prêtant sous le marteau, formait une espèce de bosse.

2°. L'art et l'usage de contremarquer les monnaies ont pris leur origine dans la Grèce. Le nombre de médailles des villes grecques que l'on trouve en argent et en bronze avec des contremarques, ne permet pas d'en douter ; il y en a cependant moins sur les médailles des rois grecs que sur celles des villes de la grande Grèce, de l'Asie mineure, et des îles de l'Archipel ; mais de toutes les villes de ces différentes parties de la Grèce, il n'y en a point qui ait plus usé de contremarques que la ville d'Antioche de Syrie.

3°. Les Romains du temps de la république ne se sont point servi de contremarques sur leurs monnaies, ni sur celles de bronze qui ont d'abord eu cours à Rome, ni sur celles d'argent ; l'usage n'en a commencé chez eux et sur celles de bronze seulement que sous Auguste, et il parait finir à Trajan. On ne trouve point de contremarques sur les médailles de Vitellius et de Narva ; on ne commence à en revoir que sous Justin, Justinien, et quelques-uns de leurs successeurs ; encore sont-ce des contremarques d'une espèce différente, et il y en a des deux côtés de la médaille.

4°. La coutume des Grecs et celle des Romains en fait de contremarques ont été différentes. Les premiers n'ont employé sur les monnaies de leurs rois et de leurs villes tant qu'elles se sont gouvernées par leurs propres lais, et depuis même qu'elles ont été soumises aux empereurs, que des têtes ou des bustes de leurs dieux, des figures équestres de leurs princes et de leurs héros, ou des figures de plantes, de fruits, et d'animaux qui naissaient dans leur pays, ou de vases et d'instruments qui étaient en usage ; les derniers au contraire sur leurs monnaies et sur celles de quelques unes de leurs colonies latines, comme de Nimes, des Empouries et d'autres, ne se sont servi pour contremarques que de monogrammes formés de caractères romains, ou de mots latins abrégés qui composent de courtes inscriptions, en sorte qu'on peut dire qu'on ne voit ordinairement en contremarques sur les médailles romaines impériales aucune figure, ni sur les grecques impériales aucune inscription grecque. Ajoutez que les contremarques des médailles de villes grecques sont faites avec beaucoup d'art et de soin, au lieu que les contremarques des médailles romaines sont renfermées dans des carrés très-grossiers.

5°. Les contremarques des médailles grecques sont mises sur toutes les espèces courantes à la différence des contremarques des médailles romaines, qui n'ont été placées que sur le bronze. Cependant comme il y avait très-peu de villes grecques où l'on frappât de la monnaie d'or, on n'a point encore Ve de leurs médailles en or qui fussent contremarquées.

6°. On n'a pas appliqué une seule contremarque sur les médailles latines, mais souvent deux et quelquefois trois ; on les y a placées avec si peu de ménagement pour les têtes et pour les revers, que de cela seul naissait une difformité si choquante, qu'elle a peut-être suffi pour engager les successeurs de Trajan à proscrire cet usage qui ne reprit faveur que sous quelques empereurs du bas empire, qui avaient totalement perdu le goût des arts.

7°. Le nombre des médailles de bronze contremarquées est fort rare en comparaison de celles du même empereur, du même type et du même coin, qui ne l'ont jamais été. Il y a telle médaille qui se trouve chargée de deux ou trois contremarques différentes, et la même contremarque se trouve aussi employée sur des médailles d'empereurs, et de types tout différents.

8°. Enfin les contremarques que l'on trouve sur les médailles grecques et sur celles de bronze de l'empire romain portent avec elles un caractère d'authenticité, qui ne permet pas de penser qu'elles aient été l'ouvrage du caprice des Monétaires. Tout y annonce l'autorité du ministère public, soit de la part des empereurs, soit de la part du sénat conjointement avec le peuple ; soit du consentement du peuple représenté par les princip aux magistrats dans les villes grecques, par les tribuns à Rome et par les décurions dans les colonies.

Les faits qu'on vient de rapporter sont reconnus de tous les savants, mais il leur est très-difficîle de découvrir les motifs qui ont engagé les Romains à contremarquer ainsi quelques-unes de leurs pièces de monnaie. L'opinion la plus généralement adoptée par les Antiquaires, est que les contremarques ont été introduites pour produire, dans des occasions passageres, une augmentation de valeur de monnaie dans le commerce, sans en augmenter la matière. Mais pourquoi ne voyons-nous point de contremarques sur les médailles consulaires ? Pourquoi sous les empereurs romains trouve-t-on si peu de médailles contremarquées en comparaison de celles qui ne le sont pas, quoique du même prince, du même type et du même coin ? Pourquoi les seules médailles de bronze ont-elles été sujettes à la contremarque, puisque celle sur l'or et sur l'argent auraient donné tout d'un coup un profit cent fois plus considérable que sur le bronze ? Enfin, pourquoi n'a-t-on pas mis des contremarques indifféremment sur toutes les monnaies du même temps ? Je conviens que les contremarques de médailles des villes grecques ayant été faites avec soin et appliquées indifféremment sur toutes les espèces courantes, peuvent avoir servi à indiquer une augmentation de valeur dans le commerce ; mais il n'en est pas de même des contremarques des médailles romaines qui n'ont été placées que sur le bronze, et qu'il aurait été facîle de contrefaire, si la chose en eut valu la peine. Toutes ces raisons ont fait conjecturer à M. de Boze que les pièces contremarquées ne servaient que comme de mereaux, qu'on distribuait aux ouvriers employés à des travaux publics, civils ou militaires. Ce système à la vérité est très-ingénieux, mais je doute qu'il puisse seul résoudre toutes les difficultés. Concluons qu'il faut mettre les médailles contremarquées au nombre des énigmes numismatiques qui ne sont pas encore devinées. (D.J.)

MEDAILLE RARE, (Numismatique) toute médaille qui ne se trouve que dans quelques cabinets de curieux, a le nom de médaille rare. On a indiqué au mot médaille les ouvrages qui les font connaître. Je me borne donc à quelques remarques.

Certaines médailles sont rares dans un pays, et sont communes dans l'autre. Tels sont les posthumes dont la France est pleine, et dont on trouve fort peu en Italie : tels les Aelius de grand bronze, qui passent pour rares en Italie, et dont nous avons quantité en France. Ces connaissances sont nécessaires pour faire des échanges.

Ce n'est ni le métal, ni le volume qui rend les medailles précieuses, mais la rareté ou de la tête, ou du revers, ou de la légende. Telle médaille en or est commune, qui sera très-rare en bronze. Telle sera très-rare en argent, qui sera commune en bronze et en or. Tel revers sera commun, dont la tête sera unique. Telle tête sera commune, dont le revers étant très-rare, rendra la médaille d'un fort grand prix. Il serait inutîle d'en mettre ici des exemples. M. Vaillant, dans son dernier ouvrage, en a fait un détail si exact, qu'il n'a rien laissé à désirer pour l'instruction parfaite des curieux.

Il y a des médailles qui ne sont rares que dans certaines suites, et qui sont fort communes dans les autres. Quelques-unes sont rares dans toutes les suites, et jamais dans les autres. Par exemple, on n'a point d'Antonia pour la suite du grand bronze ; il faut nécessairement se servir de celle du moyen bronze. Au contraire, on n'a point d'Agrippine, femme de Germanicus, en moyen bronze, mais seulement en grand. L'Othon est rare dans toutes les suites de bronze ; il est commun dans celle d'argent. L'Auguste est commun dans toutes les suites : l'on n'a point pour la suite d'or ni Pauline, ni Tranquilline, ni Mariana, ni Corn. Supera. On les trouve en bronze et en argent. Les colonies sont communes dans le moyen bronze, elles sont rares dans le grand ; tout cela s'apprend encore chez M. Vaillant, qui s'est donné la peine de marquer le degré de rareté sur chaque médaille en particulier.

Il en est des médailles comme des tableaux, des diamants et de semblables curiosités ; quand elles passent un certain prix, elles n'en ont plus que celui que leur donnent l'envie et les facultés des acquéreurs. Ainsi quand une médaille passe dix ou douze pistoles, elle vaut tout ce qu'on veut. Ainsi la seule curiosité du rare fait monter les Othons de grand bronze à un prix considérable ; et l'on croit que ceux de moyen bronze ne sont point trop chers, quand ils ne coutent que trente ou quarante pistoles. On met presque le même prix aux Gordiens d'Afrique grecs, quoique de fabrique égyptienne, parce qu'on en a de ceux-là en moyen bronze. Les médailles uniques n'ont point de prix limité. Voyez MEDAILLE UNIQUE.

Quand il y a plusieurs têtes sur le même côté de la médaille, elle en devient plus rare et plus curieuse, soit que les têtes soient affrontées, c'est-à-dire qu'elles se regardent comme celles de M. Aurele et de Vérus, de Macrin et de Diaduménien, et autres semblables ; soient qu'elles soient accolées comme Néron et Agrippine, Marc-Antoine et Cléopâtre, etc. La médaille devient encore plus précieuse quand on y voit trois têtes, au lieu de deux, comme celles de Valerien avec ses deux fils, Galien et Valerien le jeune ; celle d'Otacille avec son mari et son fils, etc.

Pour le prix des médailles, il n'est pas aisé de rien décider, puisqu'à proprement parler, il ne dépend que de la disposition du vendeur et de l'acquéreur : car cette curiosité est toute noble, et c'est la passion des honnêtes gens ; un acheteur passionné ne considère pas le prix excessif d'une médaille qu'il trouvera rare, belle, bien conservée, et nécessaire pour une de ses suites : cela dépend aussi de l'honnêteté du vendeur, qui quelquefois préfère à son intérêt la satisfaction d'obliger un galant homme, ravi de l'accommoder d'une médaille qu'il désire. (D.J.)

MEDAILLE RESTITUEE, (Numismatique) on appelle proprement médailles restituées ou de restitution, les médailles soit consulaires, soit impériales, sur lesquelles outre le type et la légende qu'elles ont eu dans la première fabrication, on voit de plus le nom de l'empereur qui les a fait frapper une seconde fais, suivi du mot RESTITUIT entier, ou abrégé, REST.

Telle est la médaille de moyen bronze, où autour de la tête d'Auguste rayonnant on lit : Divus Augustus Pater ; au revers est un globe avec un gouvernail, et pour légende Imp. T. Vesp. Aug. REST. Telle est encore cette médaille d'argent de la famille Rubria, qui représente d'un côté la tête de la concorde voilée, avec le mot abrégé Dos. c'est-à-dire Dossennus ; au revers un quadrige, sur lequel est une victoire qui tient une couronne au-dessous, L. Rurri, et autour, Imp. Caes. Trajan. Aug. Germ. Dac. P. P. REST.

Il y a d'autres médailles à qui on donne improprement le nom de restituées, qui semble en être le caractère distinctif. Telles les médailles frappées sous Galien, pour renouveller la mémoire de la consécration de plusieurs de ses prédécesseurs. Voyez MEDAILLES DE CONSECRATION.

Mais on ne peut en aucun sens donner le nom de médailles restituées à celles qu'Auguste, Tibere, Caligula, Claude et Néron ont fait frapper avec les noms et la tête de Jules César, d'Auguste, de Livie, d'Agrippa, d'Agrippine, de Drusus, de Germanicus, parce que ce ne sont pas d'anciens types qu'on ait employé de nouveau, mais des espèces absolument nouvelles, tant pour le type que pour le coin.

Ce n'est que sous Titus qu'on commence à voir des médailles restituées, et nous en connaissons de frappées pour Auguste, Livie, Agrippa, Drusus, Tibere, Drusus fils de Tibere, pour Germanicus, Agrippine mère de Caligula, pour Claude, pour Galba et pour Othon. A l'exemple de Titus, Domitien restitua des médailles d'Auguste, d'Agrippa, de Drusus, de Tibere, de Drusus fils de Tibere, et de Claude. Nous ne connaissons jusqu'à présent que des médailles d'Auguste restituées par Nerva : Trajan en a restitué de presque tous ses prédécesseurs : on connait celles de Jules César, d'Auguste, de Tibere, de Claude, de Vespasien, de Titus et de Nerva.

Il avait outre cela restitué un très-grand nombre de médailles des familles romaines ; on a celles des familles Aemilia, Coecilia, Carisia, Cassia, Claudia, Cornelia, Cornuficia, Didia, Horatia, Julia, Junia, Lucretia, Mamilia, Maria, Martia, Memmia, Minucia, Norbana, Numonia, Rubria, Sulpitia, Titia, Tullia, Valeria, Vipsania. On trouve enfin une médaille restituée par Marc-Aurele et Lucius Verus ; on y voit d'un côté la tête de Marc-Antoine, et pour légende Ant. Aug. III. Vic. R. P. C. au revers l'aigle légionnaire au milieu de deux autres enseignes militaires avec ces mots : Leg. VI. Antoninus et Verus Aug. REST. Voilà toutes les restitutions proprement dites, connues jusqu'à-présent ; mais les savants ont été partagés sur l'idée qu'on devait attacher au mot Rest, c'est-à-dire Restituit, qui se lit sur toutes ces médailles en abrégé ou entier.

La plupart des Antiquaires craient d'après Vaillant, que ce mot signifie seulement que Titus, Domitien, Nerva et Trajan ont fait refaire des coins de la monnaie de leurs prédécesseurs ; qu'ils ont fait frapper des médailles avec ces mêmes coins, et qu'ils ont permis qu'elles eussent cours dans le commerce, ainsi que leurs propres monnaies. A leur avis, Trajan ne s'est pas contenté de faire frapper des médailles au coin des princes ses prédécesseurs ; il a de plus fait rétablir tous les coins dont on s'était servi pour les médailles consulaires, lorsqu'elles étaient la monnaie courante.

Le P. Hardouin, aussi distingué par la singularité de ses sentiments que par l'étendue de son érudition, s'étant fait un jeu de s'essayer contre les opinions les mieux fondées, n'avait garde d'épargner celle-ci ; mais celle qu'il a substituée est encore plus dénuée de vraisemblable. Il a prétendu contre l'usage de la langue latine que le mot restituere, signifie ici imiter, représenter les vertus : ainsi, par exemple, la médaille dont la légende porte du côté de la tête, Ti-Caesar. Divi. Augusti. F. Augustus, et au revers, Imp. T. Caes. Divi. Vesp. F. Aug. P. M. TR. P. P. P. Cos VIII. RESTITUIT, doit s'expliquer en ce sens : Tite, etc. fait revivre en sa personne les vertus de Tibere. Une pareille déclaration de la part de Tite avait de quoi faire trembler le sénat et le peuple romain. Ce sentiment ne parait pas avoir fait fortune, et le simple énoncé suffit pour le faire mettre au rang des paradoxes littéraires de ce savant homme.

Il y a certainement beaucoup plus de probabilité dans le sentiment de M. Vaillant ; Trajan, afin de se concilier les esprits du sénat et du peuple, voulut donner des marques de sa vénération pour la mémoire de ses prédécesseurs, et des témoignages de sa bienveillance envers les premières maisons de la république. Dans ce dessein, il fit restituer les monnaies des empereurs qui avaient regné avant lui, et celles sur lesquelles étaient gravés les noms des familles romaines. Nous ne connaissons à la vérité qu'environ trente de ces dernières médailles, mais on en découvre tous les jours de nouvelles ; Ursin n'en avait d'abord fait graver qu'un très-petit nombre ; Patin, Vaillant et Morel y en ont ajouté plusieurs.

On a trouvé depuis trente ans en Allemagne une médaille de la famille Didia, restituée par Trajan ; il y en avait une de la famille Carisia, restituée de même dans le cabinet de feu M. le Bret ; et quoique, selon les apparences, elle fût moulée, comme elle avait certainement été moulée sur l'antique, l'original existe, ou a existé dans quelqu'autre cabinet. Une preuve que Trajan avait restitué toutes les médailles consulaires, c'est que dans le petit nombre qui nous en reste aujourd'hui, on en connait plusieurs de la même famille avec des types différents, et quelquefois d'une famille peu célèbre, comme est entr'autres la famille Rubria, dont on a trois différentes médailles restituées par Trajan. Le sens qu'on donne suivant cette opinion à la légende Imp. Caes. Trajan Aug. Ger. Dac. PP. REST. est parfaitement conforme aux règles de la grammaire et au génie de la langue latine.

Quand l'inscription se gravait sur le monument même qu'on faisait rétablir, souvent on omettait le nom du monument restitué, parce qu'il n'était pas possible de se méprendre sur le cas régi par le verbe restituit, et que tout le monde le suppléait aisément. Ainsi lorsqu'on voyait sur le chemin de Nimes une colonne milliaire avec cette inscription : Ti. Caesar. Divi. F. Aug. Pont. Max. Tr. Pot. XXXII. Refecit. et RESTITUIT V. on comprenait fort bien que cette colonne qui servait à marquer le cinquième mille de Nimes, avait été rétablie par les ordres de Trajan auprès de Mérida en Espagne ; elle est rapportée par Gruter, à qui je renvoie pour une infinité d'exemples de cette façon de parler elliptique.

Dans l'ancienne inscription du pont Fabricius à Rome on lisait : L. Fabricius C. F. Cur. Viarum. Faciundum Curavit ; et cela suffisait pour faire entendre que Fabricius avait fait construire ce pont, parce que c'était sur le pont même que l'inscription était gravée. Rien de si commun que de trouver sur les cippes, soit votifs, soit sépulchraux, Posuit, Fecit, Faciundum Curavit, sans que ces verbes soient suivis d'aucun régime, parce que les cippes mêmes sont censés en tenir lieu.

Par la même raison, quand on trouve sur les médailles, Imp. Titus, Imp. Domitianus, Imp. Trajanus RESTITUIT, si c'est, comme on le croit, du rétablissement de la médaille même dont on a voulu faire mention ; il n'a pas été nécessaire d'ajouter hunc nummum, car on tient dans sa main et on a sous les yeux la chose même qui a été rétablie. Mais il n'en serait pas de même si on avait voulu marquer que ces empereurs faisaient en quelque sorte revivre leurs prédécesseurs et les grands hommes, dont les noms étaient gravés sur ces pièces de monnaie ; car souvent il n'y a rien dans le type qui ait rapport aux vertus ou aux actions par lesquelles on suppose que les empereurs les représentaient. En un mot, le paradoxe du P. Hardouin est insoutenable.

A la vérité l'opinion de M. Vaillant, adoptée par le général des Antiquaires, n'est pas heureuse à tous égards, car elle n'est point appuyée du témoignage des anciens auteurs. Ils ne nous disent nulle part qu'un empereur se soit avisé de rétablir les monnaies de ses prédécesseurs. De plus, on n'allegue aucun motif vraisemblable qui ait pu engager Tite, Domitien, Nerva et Trajan à faire battre monnaie au coin des empereurs qui les avaient précédés.

Ces raisons ont paru si fortes à M. le Beau, qu'elles l'ont engagé à bâtir un nouveau système sur l'origine des médailles de restitution. Il pense que le mot restituit signifie que l'empereur qui est annoncé comme restituteur a rétabli en tout ou en partie quelque monument de l'autre empereur, ou du magistrat nommé sur la même médaille ; de sorte que ce monument est tantôt représenté dans le type, et tantôt simplement indiqué. On désirerait 1°. que cette hypothèse qui plait par sa simplicité, fût appuyée du témoignage des historiens pour la confirmer. 2°. Une partie des médailles restituées ne présente souvent sur le revers ni monument, ni figure, sur quoi puisse tomber le terme restituit ; or s'il se rapportait à quelqu'ouvrage rétabli, cet ouvrage serait sans doute représenté sur la médaille. 3°. Parmi les types des médailles restituées, il y en a qui ne désignent assurément aucun monument, comme, par exemple, deux mains jointes ensemble, l'aigle des consécrations, des chars attelés par des éléphans, etc. Je ne décide point si M. le Beau peut résoudre ces trois difficultés sans réplique ; mais je puis assurer qu'il nous a donné six mémoires très-intéressants sur toutes les médailles restituées ; et j'invite fort un curieux à les lire dans le Recueil de l'Académie des Belles-Lettres, tom. XXI. XXII. et XXIV. in-4°. (D.J.)

MEDAILLE UNIQUE, (Numismatique) on appelle médailles uniques, celles que les antiquaires n'ont jamais vues dans les cabinets, même dans ceux des princes et des curieux du premier ordre ; quoique peut-être elles soient dans des cabinets sans nom, où le hasard les a placées. Ainsi l'Othon de véritable grand bronze, que M. Vaillant a Ve en Italie, est une médaille unique. Le médaillon grec d'argent de Pescennius, que le même M. Vaillant découvrit en Angleterre, entre les mains de M. Falchner, et qui est aujourd'hui au cabinet du roi, est unique. L'Annia Faustina d'argent que M. l'abbé de Rothelin a possedé est encore unique jusqu'à-présent. Tel est encore l'Hérode Antipas, sur laquelle M. Rigord qui le possédait, a fait une savante dissertation. Mais l'Agrippa-César, troisième fils de M. Agrippa et de Julie, adopté par Auguste avec Tibere, qu'on a donné pour unique, ne l'est pas aujourd'hui.

Quoiqu'on trouve de temps en temps des médailles inconnues auparavant, et qui d'abord passent pour uniques ; néanmoins les médailles dont le type est extraordinaire, et dont les antiquaires n'ont jamais fait mention, doivent à parler régulièrement, être regardées comme douteuses et suspectes, parce qu'il n'est pas à présumer qu'elles se soient dérobées si longtemps à la connaissance des antiquaires, et de tant de personnes intéressées à publier ces nouvelles découvertes. Ainsi la prudence veut qu'on en examine soigneusement et avec des yeux éclairés, le métal et la fabrique, afin d'éviter le piege que les brocanteurs savent tendre avec adresse aux nouveaux curieux.

Les médailles qui n'ont jamais été vues des savants dans un métal ou dans une certaine grandeur, offrent donc de fortes présomptions contre leur antiquité. Par exemple, les Gordiens d'Afrique, les Pescennius ou le Maximus d'or, sont assurément très-suspectes. Une Plotine, une Marciana, une Matidia, une Didia Clara de moyen bronze, le seraient de même, parce qu'on n'en connait point jusqu'à ce jour de ce module ; mais il ne faut pas conclure absolument que les médailles qui ne sont point encore connues dans un métal ou dans une certaine grandeur, n'ont jamais été frappées sur ce métal ou dans cette grandeur, autrement il faudrait rejeter l'Annia Faustina en argent, dont l'antiquité est néanmoins incontestable, parce qu'elle n'était pas connue du temps de M. Vaillant. Or ce qui est arrivé à l'égard de l'Annia Faustina en argent, peut arriver pour les Gordiens d'Afrique, les Pescennius et les Maximus en or, parce que la terre qu'on viendra à fouiller heureusement, peut nous procurer aujourd'hui de nouvelles médailles, qu'elle ne nous a pas encore données ; et que rien ne nous assure que ces princes dont nous venons de parler, sont les seuls exceptés de la loi générale, qui nous fait voir des médailles d'or de tous ceux dont nous en avons d'argent. Il suffit donc d'être attentifs, jusqu'au scrupule, dans l'examen de toutes les médailles qui paraissent pour la première fais. (D.J.)

MEDAILLE VOTIVE, (Numismatique) les antiquaires français ont appelé médailles votives, d'après M. Ducange, toutes les médailles où les vœux publics qui se faisaient pour la santé des empereurs de cinq en cinq ans, de dix en dix ans, et quelquefois de vingt en vingt ans, sont marqués soit en légendes, soit en inscriptions. Ces médailles portent le mot de Vota quinquennalia, decennalia, vicennalia.

Sur la médaille de Marc-Aurele le jeune, dont le revers représente les vœux qu'on fit au temps de son mariage, on lit en légende Vota publica. Sur une médaille d'Antonin, vota suscepta decennalia, et sur une seconde du même prince, qui fut frappée dix ans après, Vota decennalium. Dans le bas empire on rencontre perpétuellement ces sortes de vœux que l'on portait toujours même plus avant que le terme, ce qu'on exprimait par ces mots multis. Par exemple, Votis Xe Multis xx, ou par celui de sic, comme sic Xe sic xx. Mais entre les médailles votives du bas empire, il n'y en a guère de plus curieuses que celles de Dioclétien et de Maximien son collègue, qui ont pour légende Primis Xe Multis xx. Quelques-unes de ces médailles ont pour type Jupiter debout. Il y en a où l'on voit une victoire assise, tenant de la main gauche un bouclier appuyé sur son genou, et de la main droite écrivant dans le bouclier votis Xe ou votis xx. D'autres encore représentent deux victoires qui soutiennent un bouclier où l'on lit votis x sel. Ces médailles sont d'autant plus remarquables que les vœux sont en légende et non en inscription, et qu'ils sont répétés sur celles où on les lit derechef dans le bouclier.

Les médailles votives avec l'inscription au revers votis, Ve Xe xx. dans une couronne, sont beaucoup plus fréquentes dans le bas que dans le haut empire. On sait qu'on rencontre cette inscription sur les médailles de Maximien, de Balbin, de Puppien, de Crébonien Galle, d'Oemilien, de Valerien et de Galien.

M. Ducange a savamment éclairci tout ce qui regarde les médailles votives. Il nous apprend que depuis qu'Auguste feignant de vouloir quitter les rênes de l'empire, eut accordé par deux fois aux prières du sénat, qu'il continuerait de gouverner dix ans, on commença à faire à chaque decennale des prières publiques, des sacrifices et des jeux pour la conservation des empereurs : que dans le bas empire, on en fit de cinq en cinq ans ; et que c'est par cette raison que depuis Dioclétien, l'on voit sur les médailles, Votis, Ve XVe etc. Il observe enfin que la coutume de ces vœux dura jusqu'à Théodose, après lequel temps on ne trouve plus cette sorte d'époque.

Mais outre Ducange, le lecteur apprendra bien des choses sur cette matière, dans l'Auctuarium chronologicum de votis decennalibus imperatorum et Caesarum, du cardinal Noris, mis au jour à Padoue en 1676, à la suite des dissertations du même auteur, sur deux médailles de Dioclétien et de Lucinius. On peut aussi consulter la dissertation latine consularibus caesareis, du P. Pagi, imprimée à Lyon en 1682 in -4°. (D.J.)

MEDAILLES SUR LES ALLOCUTIONS, (Numismatique) on nomme médailles sur les allocutions certaines médailles de plusieurs empereurs romains, sur lesquelles ils sont représentés haranguant des troupes ; et la légende de ces sortes de médailles c'est adlocutio, d'où vient que quelques-uns de nos curieux appellent cette espèce de médaille, une allocution.

La première qu'on connaisse est celle de Caligula. Ce prince y est représenté debout en habit long, sur une tribune d'où il harangue quatre soldats qui ont leur casque en tête et leur bouclier en main, comme tout prêts à partir pour une expédition. A l'exergue on lit, Adloc. coh. c'est-à-dire, adlocutio cohortium.

Il y a une allocution semblable de Néron, ensuite de Galba et de Nerva, de Trajan, de Marc-Aurele, de Lucius Verus, de Commode, de Septime-Sevère, de Caracalla, de Geta, de Macrin, de Sevère Alexandre, de Gordien Pie, des deux Philippes père et fils, de Valérien, de Galien, de Tacite, de Numérien et de Carin joints ensemble, enfin de Maxence. On connait une douzaine d'allocutions d'Hadrien, trois de Posthume, et quelques médaillons de Probus dans le même genre. Voyez l'hist. de l'acad. des Inscrip. tom. I. (D.J.)

MEDAILLE CISTOPHORE, (Numismatique) médaille qu'on frappait par autorité publique au sujet des orgies, ou fêtes de Bacchus. Comme dans ces fêtes on nommait cistophores les corbeilles mystérieuses, et les cassettes portées par de jeunes filles, on appelle médailles cistophores celles où l'on voit la corbeille empreinte avec les serpens autour, ou qui en sortent. Les antiquaires craient aussi découvrir sur quelques-unes de ces médailles, la plante nommée férule, qu'on portait dans la solennité des orgies, pour marquer qu'Osiris qu'on regardait comme l'inventeur de la médecine, avait composé des remèdes salutaires de cette plante. Voyez l'antiquité expliquée du P. Monfaucon, et le traité des cistophores du P. Panel. (D.J.)

MEDAILLES DE CONSECRATION, (Numismatique) médailles frappées en l'honneur des empereurs après leur mort, lorsqu'on les plaçait au rang des dieux. On sait les cérémonies qu'on pratiquait à leur apothéose, par la description qu'Hérodien nous a laissée de celle de Sévère. Il nous apprend entr'autres particularités que dès que le feu était au bucher, on en faisait partir du haut un aigle qui s'envolant dans les airs, représentait l'âme de l'empereur enlevée au ciel. Nous avons plusieurs médailles qui représentent des monuments de la consécration d'Auguste, rétablis par quatre empereurs, Tite, Domitien, Nerva et Trajan.

Galien fit frapper de ces sortes de médailles, pour renouveller la mémoire de la consécration de la plupart de ceux de ses prédécesseurs qu'on avait mis au rang des dieux après leur mort. Ces médailles ont toutes la même légende au revers, consecratio ; et ces revers n'ont que deux types différents, un autel sur lequel il y a du feu, et un aigle avec les ailes déployées. Les empereurs dont Galien a restitué la consécration, sont Auguste, Vespasien, Titus, Nerva, Trajan, Hadrien, Antonin Pie, Marc-Aurele, Commode, Sévère et Sévère Alexandre.

Il n'y a que deux médailles pour chacun d'eux, excepté pour Marc-Aurele, dont on en connait trois ; mais toute la différence qui s'y trouve, c'est que dans les deux premières on lit du côté de la tête, Divo Marco, et sur la troisième, Divo Marco Antonino. Il ne s'est pas encore trouvé de médailles frappées sous Galien, avec les consécrations, de Claude, de Lucius Verus, de Pertinax, de Pescennius, de Caracalla, de Gordien, ni des princesses qui avaient été mises au rang des déesses. Ainsi on ne connait jusqu'à présent que 23 médailles différentes des consécrations restituées par Galien. Le P. Banduri n'en a même rapporté que huit, et il ne connaissait pas celles de Vespasien, d'Hadrien et de Commode. (D.J.)

MEDAILLES DE COLONIES, (Numismatique) ces sortes de médailles exigent des observations générales.

1°. On sait que les Romains envoyaient de temps en temps des familles entières de citoyens dans le pays qu'ils avaient nouvellement conquis ; et pour en constater l'époque, on frappait des médailles avec certaines marques distinctives, qui faisaient connaître le sujet pour lequel elles avaient été frappées. Par exemple, un bœuf sur le revers, ou deux bœufs avec un homme qui conduit une charrue, désignent l'établissement d'une colonie.

2°. Les médailles de colonies sont rares en comparaison des médailles ordinaires ; quoique les unes soient plus rares que les autres, tant parmi les grecques que parmi les latines. Leur beauté dépend ou du type, quand il est historique ou extraordinaire, ou du pays, quand ce sont certaines villes peu connues ; d'où l'on apprend quelque trait de l'ancienne géographie : enfin quand les charges et les dignités de ceux qui les ont fait battre sont singulières.

3°. La médaille passe pour commune quand il n'y a qu'un bœuf sur le revers, ou deux bœufs avec le prêtre qui conduit la charrue, ou les seules enseignes militaires ; cependant nous apprenons de-là quels ont été les premiers habitants de la colonie. En effet, quand les enseignes représentées sur les médailles de colonies, portent le nom de quelque légion, on est en droit d'assurer que ces colonies ont été formées par les soldats de ces légions ; mais quand on ne lit sur ces enseignes le nom d'aucune légion, soit qu'elles accompagnent une charrue, soit qu'elles ne l'accompagnent pas, ce serait sans fondement qu'on en conclurait que la colonie désignée n'a pas été formée de simples citoyens ; si pareillement la médaille n'a pour type qu'une charrue sans enseignes militaires, on aurait tort de nier pour cela, qu'elle fût composée de soldats.

4°. Les colonies portent ordinairement sur les médailles le nom de celui qui les a fondées, et de celui qui les a ou fortifiées ou rétablies. Toutes celles qui s'appellent Juliae, ont été fondées par Jules-César. Colonia julia Beritus. Celles qui se nomment Augustae, ont été fondées par Auguste. Municipium Augustae Bilbilis. Quand elles prennent les deux noms ensemble, c'est que Jules les a fondées, ou qu'Auguste les a renforcées ou réparées par de nouvelles recrues : Colonia Julia Augusta Dertota. Quand le nom d'Augusta est devant celui de Julia, c'est signe que la colonie, étant en mauvais état, Auguste l'a réparée. Cela ne doit néanmoins s'entendre que quand les deux noms se suivent immédiatement ; car s'il se trouve quelque mot entre-deux, ce n'est plus la même chose. Voilà une des finesses de l'art que nous apprenons de M. Vaillant, dans son exposition de la médaille colonia Julia, Concordia, Augusta, Apamaea.

5°. Quoiqu'il y ait eu des colonies en Italie, pas une n'a jamais mis la tête du prince sur ses médailles. C'était un honneur réservé aux villes qui avaient droit de battre monnaie, et que les empereurs n'ont jamais voulu accorder à aucune ville d'Italie. Ce droit de battre monnaie, s'accordait par une permission ou du sénat seul, ou du sénat et du peuple tout seuls, ou de l'empereur. Quand il était obtenu de l'empereur, on mettait sur la monnaie, permissu Caesaris. Quand on tenait ce droit du sénat, on gravait sur les médailles, mêmes sur les grecques, S. C. senatus consulto, ou S. R. senatus romanus, en sousentendant concessit, permisit.

6°. Depuis Caligula, on ne trouve plus aucune médaille frappée dans les colonies d'Espagne, quoique nous en ayons quantité sous Auguste et sous Tibere. Suetone rapporte que Caligula leur en ôta le privilège, en punition de ce qu'elles en avaient battu en l'honneur d'Agrippa son ayeul, dont il trouvait mauvais qu'on se souvint qu'il était petit-fils, imaginant que ce titre ne tournait point à sa gloire.

7°. Depuis Galien, on ne trouve presque plus de médailles d'empereurs frappées dans les colonies ; soit que ce droit leur ait été ôté par les successeurs de Galien, soit que dans le boulversement de l'empire, les colonies ne sachant presque plus à quels maîtres elles appartenaient, se mirent peu en peine de rendre cet hommage à des princes qui ne pouvaient les protéger. Toujours est-il sur que depuis Aurélien, on ne voit plus aucune médaille de colonie.

M. Vaillant a fait graver toutes les médailles des colonies, les a décrites et expliquées avec sa sagacité ordinaire, dans un ouvrage qui compose 2 vol. in-fol. Nous indiquerons la manière de former de cet ordre de médailles, une suite agréable et facîle ; ce sera au mot SUITE. (D.J.)

MEDAILLES CONSULAIRES, (Numismatique) le nom de consulaires donné aux médailles romaines, frappées dans les temps que Rome était gouvernée par des consuls, ne signifie pas qu'elles se frappaient par leur ordre, avec leurs noms et des symboles propres à marquer ce qu'ils avaient fait pour l'avantage ou la gloire de la république.

2°. Il ne faut pas croire que tous les faits historiques que l'on trouve marqués sur les monnaies que nous appelons médailles consulaires, l'aient été dans le temps même de ces événements ; et la plus grande preuve qu'il soit possible d'en donner, c'est que la plupart de ces événements sont du premier, du second, du troisième et du quatrième siècle de Rome, et que ce n'est que sur la fin du cinquième qu'on a commencé à y frapper de la monnaie d'argent.

3°. Il n'est pas moins certain que pendant plus d'un siècle encore, les questeurs, les édiles et les triumvirs monétaires, qui eurent successivement l'intendance des monnaies, jus cudendae monetae, dans la crainte de donner le moindre sujet de jalousie à des concitoyens qui n'en étaient que trop susceptibles, affectèrent de ne mettre sur ces monnaies que la double tête de Janus, avec une proue de vaisseau, un bige ou un quadrige au revers, ou bien la tête de Rome casquée, avec des pareilles biges ou quadriges au revers, et plus souvent encore des figures de Castor et Pollux. Ce ne fut que vers le temps de Marius, de Sylla, de Jules-César, et surtout du triumvirat, que les monétaires romains, prenant un peu plus l'essor, commencèrent à rappeler sur les monnaies les actions mémorables de leurs ancêtres, qui pouvaient donner un nouveau lustre à leur famille, victoires, conquêtes, triomphes, sacerdoces, jeux publics, consulats, dictatures, etc. Aussi ces sortes de médailles sont d'un goût de gravure si semblable, que cette uniformité seule suffirait pour nous apprendre qu'elles sont presque toutes du même siècle, quand nous n'en aurions pas la preuve d'ailleurs.

4°. Il suit de ces observations, que les chars gravés aux revers de la plupart des médailles consulaires, avec un attelage de deux, trois ou quatre chevaux, ne sont pas toujours autant de symboles des victoires remportées, et des triomphes obtenus par les consuls romains, dont ces médailles portent le nom ; ils désignent pour l'ordinaire les courses dans les jeux que ces magistrats avaient donnés au peuple pendant leur édilité.

5°. Golztius a fait un recueil de médailles consulaires par ordre chronologique, tandis qu'Ursinus les a disposées par ordre des familles romaines ; mais M. Vaillant a beaucoup amplifié le recueil de ce dernier antiquaire, comme nous l'avons remarqué ailleurs, en indiquant leurs ouvrages. (D.J.)

MEDAILLES GREQUES ; (Numismatique) Il est certain que les Grecs commencèrent de frapper des médailles, ou de battre monnaie, longtemps avant la fondation de Rome ; mais il ne nous reste aucune de ces précieuses monnaies grecques de ce temps-là.

C'est à Phédon qu'on doit l'invention des poids, des mesures, et des monnaies frappées dans la Grèce. Les marbres d'Arondel fixent l'époque de ce prince à l'an 142, avant la fondation de Rome. C'est à Phédon que Beger rapporte une médaille d'argent qu'il a fait graver dans son Trésor de Brandebourg, tom. I. pag. 279. On y voit d'un côté un vase à deux anses, au-dessus duquel est une grappe de raisin ; on lit dans le champ à droite 1, et à gauche 0. Le revers réprésente un bouclier béotien. Cette médaille est très-précieuse, mais on doute fort qu'elle ait été frappée du vivant de Phédon ; car entr'autres raisons les caractères paraissent trop arrondis, et trop bien formés pour être un premier essai de l'art de battre monnaie.

On croit généralement qu'une des plus anciennes monnaies grecques qui nous reste, est une petite médaille d'or de Cyrène, publiée par le P. Hardouin, dans les Mém. de Trévoux, Aout 1727 : elle représente d'un côté un homme debout, la tête ceinte d'un diadème, et rayonnée, avec une corne de bélier au-dessus de l'oreille. Cet homme tient de la main droite une image de la victoire, et de la gauche une haste, ou un sceptre de la même longueur que la haste ; à ses pieds est un mouton : on lit dans le champ à gauche, AMNAKTO ; au revers est un char attelé de quatre chevaux de front, avec un homme qui le guide, au-dessus KPANAION. Cette médaille serait la plus ancienne qui nous reste, si elle avait été frappée pour Démonax le mantinéen, régent du royaume de Cyrène, pendant la minorité de Battus IV. car il vivait du temps de Cyrus, vers la fin du second siècle de Rome, comme on peut en juger par ce qu'Hérodote nous en a appris ; mais il y a toute apparence que le Démonax, dont on lit ici le nom, devait être un des magistrats de Cyrène, et non pas le tuteur de Battus IV. qui vivait plus de deux cent ans avant l'archontat d'Euclide. Le nom AMNAKTO qui s'y trouve écrit par un oméga, en est une preuve sans replique ; puisque personne n'ignore que les voyelles longues H et n'ont été reçues dans l'alphabet grec que sous l'archontat d'Euclide, la seconde année de la 94e olympiade.

La médaille d'Amyntas, roi de Macédoine, bisayeul d'Alexandre-le-Grand, pourrait donc encore passer pour la plus ancienne que l'on connaisse, s'il ne se trouvait pas dans le cabinet du Roi des monnaies d'or et d'argent de Cyrène, où l'on voit d'un côté des têtes qui paraissent naturelles, et de l'autre le sylphium, ou quelque autre type usité sur les monnaies des Cyrénéens, avec ces légendes APK, BA, ou BAT ; et K, KP ; légendes qui ne peuvent être expliquées que par , ou . Quand même ces médailles n'appartiendraient qu'à Battus IV. et à Arcésilaus IV. des deux derniers rois de Cyrène, de la famille des Battiades, elles seraient cependant du temps de Cyrus et de Cambyse, et par conséquent plus anciennes que celles d'Amyntas.

Quoi qu'il en sait, non-seulement les Grecs battirent monnaie avant la fondation de Rome, mais ils la portèrent rapidement à un degré de perfection supérieur à celui des temps les plus florissants de la république et de l'empire ; on peut en juger encore par les médailles de Gilon, d'Agathocles, de Philippe, d'Alexandre, de Lysimachus, de Cassandre, etc.

Nous sommes fort riches en médailles grecques ; car celles que nous avons des seuls rois de Syrie, d'Egypte, et de Macédoine, forment de belles et nombreuses suites. Le roi de France, en particulier, en a une collection des plus complete s et des mieux choisies, qui mériterait d'être publiée. En un mot, la quantité des médailles grecques est si considérable, qu'il faudrait la séparer des médailles latines, et donner à chacune leur propre suite, au-lieu de joindre aux latines les grecques du même volume. On imiterait en cela les bibliothécaires, qui séparent l'histoire grecque de l'histoire romaine. De plus, en leur donnant des tablettes séparées, on les démêlerait commodément sans avoir souvent inutilement un grand nombre de planches à tirer.

Au reste, il est vraisemblable que l'usage de frapper les médailles grecques avec la tête des empereurs, vint à cesser sous Dioclétien et Maximien.

Je n'ajoute qu'un mot sur les caractères grecs : ils sont composés de lettres qu'on appelle majuscules ; ils se sont conservés uniformes sur toutes les médailles, sans qu'il y paraisse presque aucune altération ni aucun changement dans la conformation des caractères, quoiqu'il y en ait eu dans l'usage et dans la prononciation. Il n'y a que la lettre , qui n'a pu se conserver que jusqu'à Domitien ; car depuis ce temps-là on la voit constamment changée en C ou en , soit au commencement, au milieu, ou à la fin des mots. L'on trouve aussi Z et marqué ; le par , et le par C ; l' par . On trouve pareillement un mélange de latin et de grec, non-seulement dans le bas empire, où la barbarie régnait, mais même dans les colonies du haut empire. S. R. F. lettres latines, se trouvent pour le C. P. . grec. M. de Spanheim en donne les exemples.

Il faut donc bien prendre garde à ne pas condamner aisément les médailles, à cause de quelques lettres mises les unes pour les autres ; car c'est être novice dans le métier, que de ne pas savoir que souvent on a mis E pour H, ; O pour ,HPO ; H en forme de pure aspiration, ; Z pour ,ZMYPNAIN et pour Z, EYC, ou même EYC pour ZEYC ; A pour à la fin des noms de peuple, , pour TN, et quelques autres semblables de dialecte dorique.

Le caractère grec s'est conservé dans sa beauté jusqu'à Galien, depuis lequel temps il parait moins rond et plus affamé, surtout dans les médailles frappées en Egypte, où le grec était moins cultivé.

MEDAILLES IMPERIALES, (Numismatique) Nous avons remarqué, au mot médaille, qu'on faisait deux classes des médailles impériales, que la première contenait le haut empire, et la seconde le bas empire. Le curieux ne recherche que les médailles du haut empire, parce qu'il n'estime que les beautés de la gravure antique ; mais l'homme studieux qui ne travaille qu'à s'instruire et à perfectionner ses connaissances, rassemble également les médailles de l'un et de l'autre empire.

Il est vrai que les médailles impériales, frappées après le règne de Caracalla, et après celui de Macrin son successeur, qui ne lui survécut que deux ans, sont très-inférieures à celles qui furent frappées sous les trente premiers empereurs. Après Gordien-Pie, elles dégénérèrent encore plus sensiblement, et sous Galien, qui regnait cinquante ans après Caracalla, elles n'étaient qu'une vilaine monnaie. Il n'y a plus ni goût ni dessein dans leur gravure, ni entente dans leur fabrication. Comme ces médailles présentaient une monnaie destinée à flatter le prince, sous le règne de qui on les frappait, et à servir dans le commerce, on peut bien croire que les Romains, aussi jaloux de leur mémoire qu'aucun autre peuple, employaient à les faire les ouvriers les plus habiles qu'ils pussent trouver ; il est donc raisonnable de juger par la beauté des médailles, de l'état où était la gravure sous chaque empereur.

Mais mettant à part la gravure des médailles impériales, on peut en former les suites de plusieurs manières différentes : nous en indiquerons quatre.

1°. On peut se contenter de faire entrer dans une suite, les médailles qu'on appelle communément du haut empire, c'est-à-dire depuis Jules-César jusqu'à Posthume, suivant le plan qu'à suivi M. Vaillant dans ses numismata praestantiora : 2°. on peut continuer cette suite jusqu'à Constantin : 3°. ceux qui voudront la pousser jusqu'à la chute de l'empire d'Occident, y feront entrer toutes les médailles jusqu'à Augustule : 4°. si on est bien-aise de ramasser des médailles de tous les empereurs sans exception, quoiqu'on ne puisse pas se flatter de jamais y réussir ; on peut se proposer pour but de la conduire jusqu'à Constantin Paléologue, sous lequel Constantinople fut prise par les Turcs.

Chacune de ces suites paraitra faite suivant un ordre systématique, et quoiqu'on mette ordinairement au rang des modernes, les monnaies des princes qui ont vécu après Charlemagne, et même celles de nos premiers rois ; on peut cependant regarder comme antiques celles des empereurs de Constantinople, qui ont regné depuis cette époque, parce qu'elles achevent de rendre complete une suite impériale, commencée par le véritable antique. D'ailleurs, comme ces princes ont regné dans un pays assez éloigné du nôtre, la distance de lieu fait à peu près le même effet que la distance de temps, et supplée en quelque façon ce qu'on a coutume d'exiger pour donner à quelques monuments le titre d'antique. (D.J.)

MEDAILLES ROMAINES, (Numismatique) On appelle médailles romaines, ou latines, les médailles frappées sous les rois de Rome, la république et les empereurs. On les divise en consulaires et en impériales ; et parmi ces dernières on distingue celles du haut et du bas empire.

Comme les médailles étaient une monnaie destinée autant à flatter le prince qu'à servir dans le commerce, on peut croire que les Romains employèrent à les faire leurs ouvriers les plus habiles ; ainsi par la beauté des médailles romaines, on peut juger de l'état où était la gravure sous chaque empereur. Celles qui furent frappées après le règne de Caracalla et de Macrin, sont très-inférieures à celles qui furent frappées sous les trente premiers empereurs. Elles dégénérèrent sensiblement sous Gordien Pie, et sous Galien elles n'avaient ni goût ni dessein dans la gravure. Depuis Constantin jusqu'à Théodose c'est bien pis, on ne trouve que de petites médailles sans relief et sans épaisseur ; enfin après la mort de Théodose ce n'est plus que de la vilaine monnaie, dont le tout est barbare, les caractères, la langue, le type, la légende ; de sorte qu'on ne se donne pas même la peine de les ramasser, et qu'elles sont devenues par-là presque aussi rares qu'elles sont laides.

Vers le temps de Dèce on commence déjà à apercevoir de l'altération dans le caractère, les N étant faites comme des M, ainsi qu'on peut le voir dans le revers Pannonia, et autres semblables. Ce qu'il y a de particulier, c'est que quelque temps après le caractère se rétablit, et demeura passable jusqu'à Justin. Alors il commença à s'altérer de nouveau, pour tomber enfin dans la dernière barbarie, trois siècles après le règne de Constantin.

Il faut cependant avertir ici un jeune curieux, de ne pas prendre pour des fautes d'orthographe, l'ancienne manière d'écrire que les médailles latines nous conservent, et de ne pas se scandaliser de voir V pour B. Danuvius ; O pour V, Volcanus, Divos ; EE pour un E long, FEELIX ; ni deux II, VIIRTVS ; S et M retranchés à la fin, ALBINV, CAPTV ; XS pour X, MAXSVMVS ; F pour PH, TRIVMFVS, et choses semblables, sur quoi on peut consulter les anciens Grammairiens. (D.J.)

MEDAILLES ARABES, (Numismatique) On appelle ainsi des médailles mahométanes modernes, dont on trouve une assez grande quantité, et dont on est peu curieux. En effet, la fabrique en est pitoyable ; très-peu de gens en connaissent la langue et le caractère ; enfin elles ne peuvent servir à quoi que ce soit dans les suites, parce qu'elles ne renferment que peu de têtes de princes mahométants ; cependant le cabinet du roi de France, est actuellement autant supérieur en médailles arabes, aux autres cabinets de l'Europe, qu'il l'était déjà en médailles modernes et antiques. M. Morel a fait graver la plus belle des médailles arabes, celle du grand Saladin, ou comme on l'écrit, Salahoddin. D'un côté on voit sa tête avec celle d'un jeune Almelek Ismahel, fils de Nurodin, qui est de la fin du XIIe siècle. La légende est en arabe, Joseph filius Job, comme s'appelait Saladin, et au revers, Rex imperator princeps fidelium. (D.J.)

MEDAILLES EGYPTIENNES, (Numismatique) les Antiquaires appellent ainsi les médailles frappées en Egypte, en l'honneur de leurs rais, ou des empereur romains. Ces médailles sont précieuses, parce qu'on a su en tirer un avantage considérable pour les lettres. Par exemple, M. Vaillant a donné l'histoire des rois d'Egypte, d'après leurs anciennes monnaies. D'autres savants ont fait usage des médailles impériales frappées en Egypte pour l'éclaircissement de l'histoire des empereurs. On n'a trouvé même jusqu'à-présent aucune médaille grecque de Dioclétien, excepté celles qui ont été frappées en Egypte ; quoiqu'on ignore l'année où les Egyptiens cessèrent d'en fabriquer en son honneur : peut-être fut-ce en l'an 296 de l'ère chrétienne, année où l'Egypte ayant été réunie au reste de l'empire, par la défaite du tyran Achillaeus, on commença à battre la monnaie avec des légendes latines, comme on faisait dans les autres provinces. (D.J.)

MEDAILLES ESPAGNOLES, (Numismatique) anciennes monnaies espagnoles qu'il ne faut pas confondre avec les puniques, quoique les unes et les autres aient été pour la plupart trouvées en Espagne.

Personne n'ignore que dans l'antiquité ce royaume a été habité par divers peuples. Outre les anciens habitants du pays, les Phéniciens attirés par le commerce, s'étaient établis en divers endroits sur les côtes et y avaient bâti des villes ; les Grecs même y avaient envoyé des colonies. Ces nations différentes avaient chacune leurs mœurs, leurs usages, leur langue et leurs monnaies particulières.

A la vérité nous n'avons point de médailles frappées par les grecs qui s'établirent en Espagne : peut-être même que leur petit nombre les empêcha d'en faire frapper dans une langue qui n'aurait pas été entendue de leurs voisins ; mais nous avons d'anciennes médailles espagnoles. Lastanosa a rendu service aux curieux, en en faisant graver environ deux cent qu'il avait ramassés dans son cabinet, la plupart en argent. Son livre, qui est devenu rare, est intitulé : Museo de las medallas desconoscidas, espagnolas impresso in Huesca, par Juan Nognez, anno 1645, in -4°. Il soutient dans cet ouvrage que les caractères de ces médailles sont espagnols et non pas puniques, et que c'est de ces pieces-là que Tite-Live parle, quand il met au nombre des dépouilles rapportées d'Espagne par les Romains, argentum signatum oscense.

Quoi qu'il en soit de cette dernière conjecture, la différence des médailles espagnoles et des médailles phéniciennes ou puniques, est évidente pour tous ceux qui se sont donné la peine de les comparer, ou qui ont des médailles puniques avec le livre de Lastanosa. Dans les espagnoles les types semblent ne les rapporter qu'à des peuples qui habitaient le milieu des terres : on y voit ordinairement un homme à cheval, quelquefois un cheval tout seul, et quelquefois un bœuf. Dans les puniques ou phéniciennes, on ne voit que des symboles qui conviennent à des villes maritimes, un navire, des poissons, &c.

La légende de ces dernières est en caractères arrondis, mais inégaux, et ces caractères sont tout à fait semblables à ceux qu'on voit sur les médailles de Tyr et de Sidon ; sur les médailles de Carthage, de Malthe, de Gorre ou Cossura, de quelques villes de Sicile, et enfin sur celle du roi Juba. Par toutes ces preuves on ne saurait raisonnablement douter que ce ne soient de véritables caractères phéniciens ou puniques.

Au contraire, sur les médailles où l'on voit un homme à cheval et les autres types dont nous avons parlé, la légende est en caractères plus carrés, plus égaux, et ces caractères sont très-ressemblans à ceux des médailles et des autres monuments étrusques.

Peut-être cette observation de M. le baron de la Bastie n'aura point échappé aux savants Italiens, qui travaillent avec ardeur à faire revivre l'ancienne langue des Etruriens, et à éclaircir tout ce qui regarde les antiquités de ces peuples.

Ces remarques, qui mériteraient d'être plus approfondies, suffisent néanmoins pour montrer que puisqu'on a trouvé en Espagne des médailles de deux espèces différentes, tant pour les types que pour les caractères, les unes étant assurément phéniciennes ou puniques, les autres doivent être les monnaies des anciens Espagnols ; d'où il suit que la langue dans laquelle sont conçues leurs légendes et les lettres qui servent à l'exprimer, sont l'ancienne langue et les anciens caractères des peuples qui habitaient l'Espagne.

On fera bien de lire à ce sujet la dissertation de M. Mahudel sur les monnaies antiques d'Espagne, imprimée à Paris en 1725, in-4°. et placée à la fin de l'histoire d'Espagne de Mariana, traduite en français par le P. Charenton. (D.J.)

MEDAILLES ETRUSQUES, (Art. numism.) On a commencé de nos jours à ramasser avec soin les médailles étrusques, qui paraissent avoir été trop négligées dans les siècles passés : c'est une nouvelle carrière qui s'ouvre à la curiosité et à l'érudition ; et quoique les recueils qu'on a fait de ces médailles ne soient pas encore bien considérables, et qu'il soit très-difficile, pour ne pas dire impossible, d'en former une suite, il sera cependant très-utîle d'empêcher à l'avenir qu'on ne dissipe tout ce qui pourra se découvrir en ce genre : peut-être même la sagacité des savants, aidée de toutes ces nouvelles découvertes, leur fera-t-elle retrouver l'ancienne langue étrusque, dont nous avons des fragments assez considérables dans quelques inscriptions. L'académie étrusque établie à Cortone, et composée de sujets distingués par leur érudition et par leur amour pour les Lettres, contribuera beaucoup à étendre nos connaissances, par le soin qu'elle prend d'éclaircir non-seulement tout ce qui regarde les antiquités des anciens Etrusques, mais encore l'origine de tous les anciens peuples d'Italie. On pourra vraisemblablement ranger dans la classe des médailles étrusques, celles qu'on croit avoir été frappées par les Samnites, les Ombres, les Messapiens, etc. On trouvera quelques planches des médailles étrusques dans l'Etruria regalis de Dempster, tome I. pag. 356 ; dans le museum etruscum de M. Gori, tome I. tab. 196. 197 ; dans les antiquités d'Ilorta de M. Fontanini, diss. d'ell'acad. etrusq. tome II. table 1. 2 ; et à la suite des dissertations de l'académie étrusque de Cortone, antiquit. Hort. liv. I. pag. 126-140. (D.J.)

MEDAILLES GOTHIQUES. (Art. numism.) On nomme ainsi des médailles de quelques rois goths qui ont passé jusqu'à nous, et qui sont communément en bronze ; mais on nomme spécialement médailles gothiques de certaines médailles frappées dans des siècles de barbarie, et dont les têtes ont à peine la forme humaine, sans porter aucune inscription, ou si elles en ont, c'est dans des caractères méconnus aux Antiquaires, aussi bien que ceux des médailles qu'on appelle puniques. (D.J.)

MEDAILLES HEBRAÏQUES, (Art numismatiq.) Divers savants ont cherché à expliquer les anciennes médailles hébraïques qui se sont conservées jusqu'à nos jours ; de ce nombre sont Villalpand ; Kircker, le P. Morin, Conringius, Vaserus, Bouteroue, Hottinger, Valton, et plus récemment le P. Hardouin et le P. Etienne Souciet. Ce dernier, dans une dissertation très-étendue et très-savante, soutient, 1°. que la langue et les caractères qu'on voit sur ces médailles sont l'ancienne langue et les anciens caractères des Hébreux, c'est-à-dire ceux dont ils usaient avant la captivité de Babylone ; 2°. que les caractères dont les Juifs se sont servis depuis leur retour de la captivité, sont les caractères assyriens qu'ils rapportèrent en revenant dans leur pays ; 3°. enfin, que ces médailles ont été frappées par les Juifs mêmes, et non par les Samaritains.

Le P. Hardouin, dans sa chronologie de l'ancien Testament et dans les notes de la seconde édition de Pline, a essayé de prouver que ces médailles, sans aucune exception, sont du temps de Simon, frère de Judas Macchabée, et de Jonathas, grand-prêtre des Juifs ; qu'elles ont été frappées dans la Samarie, dont quelques villes avaient été cédées aux Juifs par Démétrius, roi de Syrie ; que les caractères des légendes sont samaritains ou assyriens, c'est-à-dire que les légendes sont gravées dans les caractères des Cuthéens que Salmanasar envoya dans la Samarie après en avoir enlevé les dix tribus d'Israèl. On peut voir dans les ouvrages des deux savants jésuites, les raisons dont chacun d'eux se sert pour appuyer son sentiment. On trouvera dans les mêmes ouvrages un catalogue complet des médailles hébraïques connues jusqu'à présent, avec les descriptions des types qui y sont représentés. Voyez Morel, specimen R. nummar. tom. I. p. 230. et seq. (D.J.)

MEDAILLES PHENICIENNES ou PUNIQUES, (Numismatique) On nomme ainsi celles dont les légendes sont en caractères phéniciens ou puniques. Quoique la plupart de ces sortes de médailles aient été trouvées en Espagne, elles diffèrent des anciennes médailles espagnoles et par la nature des types, et par celle des caractères, comme nous l'avons observé plus au long au mot MEDAILLES ESPAGNOLES. (D.J.)

MEDAILLES SAMARITAINES, (Numismatique) On appelle ainsi les médailles qui sont empreintes sur un des côtés de caractères samaritains. On trouve même assez communément des médailles qui présentent de chaque côté des lettres samaritaines ; et selon les apparences, elles ont été frappées du temps de Simon Macchabée, en mémoire de la liberté que les Juifs recouvrèrent alors. Mais les médailles sur lesquelles est jointe une inscription grecque à une légende samaritaine, sont fort rares ; et peut-être celles d'Antigonus roi de Judée, sont les seules qui soient venues jusqu'à nous. Le célèbre Reland, qui avait tenté de les éclaircir, les regarde comme une énigme. Voyez la cinquième dissertation de nummis samaritanis. Voyez aussi l'histoire de l'acad. des Belles-Lettres, tome XXIV. (D.J.)

MEDAILLES LATINES, voyez MEDAILLES ROMAINES.

MEDAILLES D'ATHENES, (Art. numismatiq.) Nous avons un assez grand nombre de médailles d'Athènes, mais nous n'en voyons point de frappées au coin des empereurs de Rome ; et il faut croire ou que l'amour de la liberté a empêché les Athéniens de reconnaître l'autorité romaine dans leurs monnaies, ou que leur religion ne leur a pas permis d'y graver autre chose que les images de leurs divinités.

Le plus grand nombre des médailles d'Athènes qui sont au cabinet du Roi, consiste en médaillons d'argent presque uniformes, tous avec le buste de Minerve d'un côté, et au revers une couronne d'olivier, au milieu de laquelle est une chouette sur un vase renversé, et marqué d'une lettre grecque : différents noms de magistrats y sont joints à l'inscription ; et c'est, avec de petits symboles ajoutés dans le champ, tout ce qui distingue ces médaillons, dont on ne saurait d'ailleurs fixer précisément l'époque.

On sait quel a été le culte de Minerve dans Athènes, et ce que l'antiquité en a publié. Les muses grecques et latines ont célébré à l'envi les unes des autres la dévotion des Athéniens pour leur déesse ; mais rien n'en marque mieux l'étendue et la durée que leurs monnaies, sur lesquelles on voit toujours d'un côté la tête de Minerve, et de l'autre une chouette dans une couronne d'olivier, ses symboles ordinaires.

L'olivier lui appartenait à bon titre, surtout depuis sa victoire ; et hors Jupiter qui en a quelquefois été couronné aux jeux olympiques, aucune autre divinité n'a osé le disputer à Minerve. A l'égard de la chouette, on la lui avait donné comme un symbole de prudence, la pénétration de cet oiseau dans l'avenir ayant été établie par les anciens ; ce qui est encore certain, c'est que le nom de chouette avait été donné aux monnaies de l'Attique. L'esclave d'un riche lacédémonien disait plaisamment dans ce sens-là, qu'une multitude de chouettes nichaient sous le tait de son maître.

Une chose qui mérite encore quelqu'attention dans les médailles d'argent de la ville d'Athènes, ce sont les différents noms par lesquels on les distingue aussi les unes des autres. Il n'y a point à douter que ce ne soit autant de noms de magistrats athéniens ; mais la question est de savoir si ces magistrats sont archontes ordinaires d'Athènes, ou d'autres officiers préposés à la fabrication de ces monnaies. L'examen et la comparaison de leurs noms et surnoms, pourront servir à la décision d'une difficulté sur laquelle personne n'a encore osé prononcer.

Le culte de Minerve ne règne pas moins dans ce que nous avons de médailles de bronze d'Athènes, que dans celles d'argent ; hors une seule tête de Jupiter, on n'y voit par-tout que le buste de cette déesse toujours casquée, et quelquefois avec le casque et l'égide ; mais les revers sont plus variés que dans les médailles d'argent.

Enfin, dans presque toutes les médailles d'Athènes, soit d'argent, soit de bronze, il n'est question que de Minerve. Les Athéniens ne pouvaient pas faire trop d'honneur à la déesse de la sagesse, qu'ils croyaient présider à leurs conseils, veiller sur leurs magistrats, animer leurs guerriers, inspirer leurs poètes, former leurs orateurs, et soutenir leurs philosophes. Mais il serait à souhaiter que cette même déesse, les intérêts à part, eut un peu mieux instruit leurs monétaires. Les autres peuples du-moins nous ont appris par leurs monnaies quelque chose de leur gouvernement, de leurs privilèges, de leurs alliances, de leurs jeux, de leurs fêtes, des singularités de leurs pays, des temps où ces monnaies ont été fabriquées ; mais le peuple athénien n'a pas jugé à-propos de les imiter en cela, non-plus que dans l'usage de frapper des médailles en l'honneur des empereurs romains. Uniquement renfermé dans sa religion, il a négligé tout le reste dans ces sortes de monuments ; et l'on peut dire de ce qui nous est resté des médailles d'Athènes, comme des ruines de cette ville, autrefois si florissante et si belle, le théâtre de la sagesse humaine et de la valeur, et l'école publique des Sciences et des Arts,

Quid pandionae restat nisi nomen Athenae !

(D.J.)

MEDAILLES DE CROTONE, (Numismatique) Les Antiquaires ont rassemblé dans leurs cabinets plusieurs médailles curieuses de Crotone, aujourd'hui Cortona, ville du royaume de Naples dans la Calabre ultérieure. Denys d'Halicarnasse fixe la fondation de cette ville à la troisième année de la dix-septième olympiade, qui, selon lui, répond à la quatrième année du règne de Numa.

M. de Boze remarque, dans l'histoire de l'académie des Inscriptions,

1°. Qu'il n'a jamais Ve de médailles de Crotone qu'en argent, mais que Goltzius en rapporte une en or, à la différence de celles de Lacédémone, qui certainement sont toutes de bronze ; et à la différence de celles d'Athènes, dont on a presque un pareil nombre d'argent et de bronze, et point du tout en or.

2°. Qu'on ne trouve aucune médaille frappée par ceux de Crotone en l'honneur des empereurs romains, comme on n'en trouve point d'Athènes dans toute la suite des mêmes médailles impériales, au lieu qu'il y en a beaucoup de Lacédémone.

3°. Que, comme on reconnait par les médailles d'Athènes que le principal culte des Athéniens s'adressait à Jupiter et à Minerve ; et par celles de Lacédémone qu'Hercule et les Dioscures y étaient l'objet de la vénération publique, de même on voit par les médailles de Crotone qu'on y adorait particulièrement Junon, Apollon et Hercule.

Myscellus fonda Crotone après avoir consulté l'oracle d'Apollon ; et ce dieu voulut bien accorder au fondateur, ainsi qu'aux habitants, la santé et la force : c'est pour cela qu'il parait si souvent sur les médailles de cette ville.

Le culte des Crotoniates envers Junon Lacinia, est encore marqué parfaitement sur leurs médailles. La tête de cette déesse y est presque toujours gravée, on n'y en voit pas même d'autre. On y trouve aussi des trépiés et des branches de laurier, prix ordinaires des jeux de la Grèce, où les Crotoniates s'étaient signalés par un grand nombre de victoires : Hercule occupe enfin la plupart des revers.

A l'égard d'Hercule, dont il semble qu'il s'agisse ici plus que d'aucune autre divinité, on comprend aisément qu'il devait être dans une vénération infinie parmi des peuples si recommandables par la force naturelle. C'est Crotone qui a produit le célèbre Milon, Iscomachus, Tisicrate, Astyle, et tant d'autres illustres athlètes. Dans une même olympiade, dit Strabon, sept crotoniates furent couronnés aux jeux olympiques, et remportèrent tous les prix du stade. Ils passaient pour des Hercules dès le berceau, et ce fut bientôt un proverbe que le plus faible d'entr'eux était le plus fort des Grecs. (D.J.)

MEDAILLES DE LACEDEMONE, (Numismatique) On est très-curieux de connaître les médailles des Lacédémoniens, les plus libres de tous les Grecs, comme l'Antiquité les appele, et ceux du monde connu qui ont joui le plus longtemps de leurs lois et de leurs usages. Fidèles à la république romaine qui leur avait rendu leur gouvernement après la réduction de l'Achaïe, ils surent se conserver jusqu'au bout l'estime et l'amitié de leurs vainqueurs. Sparte éleva des temples en l'honneur de Jules - César et d'Auguste, dont elle avait reçu de nouveaux bienfaits, et ne crut point faire injure aux dieux de la Laconie en battant des monnaies au coin de plusieurs successeurs de ces princes. Le roi de France en possède qui sont frappées au nom et avec la tête d'Hadrien, d'Antonin le pieux, de Marc-Aurele et de Commode. M. Vaillant en a cité une de Néron ; et quoique cet empereur ait toujours refusé d'aller à Sparte à cause de la sévérité des lois de Lycurgue, dont il n'eut pas moins de peur, dit-on, que des furies d'Athènes, cela n'empêcha pas que les Lacédémoniens ne cherchassent les moyens de lui faire leur cour lorsqu'il vint se signaler dans les jeux de la Grèce. Les têtes de Castor et de Pollux, que M. Vaillant donne pour revers à la médaille de Néron qu'il avait vue, s'accordent parfaitement avec les autres médailles de Sparte, où il n'est question que de ces anciens rois de la Laconie, plus célèbres dans les fables que dans l'Histoire.

Dans la médaille d'Hadrien, ces illustres gémeaux sont représentés à cheval la lance baissée, comme on les voit communément dans les médailles consulaires, et tels qu'ils apparurent au dictateur Posthumius dans la bataille qu'il gagna contre les Latins. La seconde médaille est d'Antonin, et ce sont les bonnets des Dioscures qui en font les revers. L'antiquité les représentait avec des bonnets, parce que les Lacédémoniens allaient au combat la tête couverte de cette espèce de casque. A pileatis nona fratribus pila, dit Catulle, en parlant de Castor et de Pollux. La médaille de Marc-Aurele regarde encore les Dioscures ; ils y sont représentés debout sous la figure de deux jeunes hommes de même âge, de même taille, de même air, et d'une parfaite ressemblance. Une de leurs médailles représente Commode dans la fleur de sa jeunesse ; la massue qui est au revers entre deux bonnets étoilés, fait voir qu'Hercule était revéré dans la Laconie avec les Dioscures. Dans une autre médaille de Commode, Minerve ou Vénus y parait sur le revers armée de toutes pièces, et assez semblable au dieu Mars.

Après Commode on ne trouve plus rien de Lacédémone dans les médailles des empereurs de Rome : à peine l'histoire des siècles suivants parle-t-elle de cette ville, encore si florissante sous les Antonins. Hercule est la divinité dominante dans la plupart des médailles purement lacédémoniennes, c'est-à-dire dans celles où les Romains n'ont aucune part, soit qu'elles aient été frappées du temps de la république, ou depuis l'établissement de l'empire.

On vient de dire qu'Hercule partageait avec Castor et Pollux l'encens des Lacédémoniens, et c'était à bon titre qu'il entrait dans ce partage. Il avait rendu de grands services à la Laconie ; ses descendants y regnèrent successivement depuis leur retour dans le Péloponnèse, et les Lacédémoniens s'étaient fait une religion de n'obéir qu'à des rois de la postérité d'Hercule. Ainsi ce héros pouvait encore prétendre aux honneurs de leurs monnaies aussi-bien que les Dioscures. Il y a une médaille de Lacédémone qui représente ce dieu d'un côté avec la coiffure de peau de lion, et de l'autre, deux vases entourés de deux serpens ; ce qui se rapporte assez naturellement au premier de ses travaux, et à ces vases que l'antiquité lui avait particulièrement consacrés.

Goltzius rapporte deux médailles de deux anciens rois de Lacédémone, Agésilaus et Polydore ; mais les couronnes de laurier qu'il donne à ces rois ne leur conviennent point du tout, et le reste est encore plus suspect. Ainsi ne comptons que sur les médailles dont nous pouvons répondre : elles ne remontent pas jusqu'aux monnaies de fer, seules en usage à Lacédémone du temps de Lycurgue ; mais elles se ressentent encore de la défense expresse qu'il fit des monnaies d'or et d'argent, si constamment observée par les Lacédémoniens. En un mot, ces peuples ne nous ont laissé que des monnaies de cuivre, et tout y roule sur les divinités de la Laconie, comme les médailles d'Athènes sur les divinités de l'Attique. Il ne faut rien chercher de plus dans ce qui nous reste de ces deux républiques si fameuses ; qui ont disputé entr'elles l'empire de la Grèce jusqu'à ce qu'elles aient passé avec la Grèce entière sous le joug des Romains. (D.J.)

MEDAILLES D'OLBA, (Numismatique) les médailles d'Olba en Sicile, méritent un article à part. Les grands-prêtres de cette ville faisaient battre monnaie à leur coin, et exerçaient dans l'étendue de leurs états, les droits de la souveraineté. Ministres de la religion, ils portaient le sceptre d'une main, et de l'autre offraient des sacrifices à l'Etre-suprême. Princes et pontifes au milieu des provinces romaines, ils étaient libres, et vivaient suivant leurs propres lais.

Nous ne connaissons jusqu'à-présent que sept médailles frappées au coin de trois princes d'Olba nommés Polémon, Ajax et Teucer ; et ces sept médailles sont toutes rares.

La première de moyen bronze, est de la grandeur ordinaire ; mais par son relief et son épaisseur, elle peut passer pour un médaillon. C'est une médaille de Polémon, dont on eut donné le dessein dans les Pl. si la matière l'eut permis. On voit d'un côté la tête nue d'un jeune homme, tournée de droite à gauche : on lit autour M. ANTNIO ; et de l'autre côté KENNAT. , et dans une seconde ligne, KAI, c'est-à-dire, tête de M. Antoine Polémon, grand-prêtre de Kennati, d'Olba la sacrée, et de Palassis, année seconde, qui tombait en l'année 714 de Rome. Le type est une chaire à dos et sans bras, à moitié tournée de droite à gauche. On voit au côté droit un symbole singulier, une espèce de triquetre.

Une autre médaille du même prince Polémon représente d'un côté une tête d'homme et un caducée, avec cette légende, ; au revers un foudre : et on lit autour Et B. La même médaille se trouve dans le cabinet du comte de Pembrock, mais avec un revers différent.

Deux autres médailles d'Olba ont été frappées par l'ordre d'un prince appelé Ajax, qui vivait sous Auguste, et qui fut un des successeurs de Polémon. Une de ces médailles, qui est du cabinet du duc de Dévonshire, représente d'un côté la tête d'Auguste renfermée dans une couronne de laurier, avec la légende . Le revers représente deux foudres posés l'un sur l'autre : on lit dans le champ . L'autre médaille d'un prince de même nom était conservée à Venise dans le cabinet de M. Belloto. On voit d'un côté la tête du prince, avec ces mots ; de l'autre, la figure ou le symbole de la triquetre : on lit au-dessus .

On connait encore deux médailles d'un autre prince d'Olba, appelé Teucer. Sur l'une on voit la tête du jeune prince une, et devant elle un caducée, pour légende : au revers, le symbole comme ci-dessus, et l'inscription . ET. A. Sur l'autre médaille, la tête et la légende sont les mêmes, mais sans caducée. On voit au revers un foudre, et l'inscription. . ET B.

M. Masson, dans son édition des œuvres du rhéteur Aristide, n'a décrit que la troisième, la quatrième et la cinquième de ces médailles des princes d'Olba ; mais M. l'abbé Belley les a toutes décrites avec des observations très-curieuses, qu'il faut lire dans les Mém. de littérature, tome XXI. in -4°. (D.J.)

MEDAILLES, époques marquées sur les (Numismatique) Les époques marquées sur les médailles, sont les dates des années du règne des princes, ou de la durée des villes, soit depuis leur fondation, soit depuis quelques événements, d'où elles ont commencé de compter leurs années. Ces époques donnent un grand mérite aux médailles, à cause qu'elles règlent surement la chronologie ; ce qui sert beaucoup à éclaircir les faits historiques. C'est avec leur secours que M. Vaillant a si bien débrouillé toute l'histoire des rois de Syrie, où les noms semblables des princes font une grande confusion ; et c'est par-là que la cardinal Noris, auparavant célèbre antiquaire du grand-duc, a fait tant de découvertes utiles dans son livre de epochis Syro-Macedonum.

Il est vrai que sur ce point les Grecs ont été plus soigneux que les Romains, et les derniers siècles plus exacts que les premiers ; en effet, les médailles romaines ont rarement marqué d'autre époque, que celle du consulat de l'empereur, dont elles représentent la tête, et de la puissance de tribun : or ni l'une, ni l'autre n'est assurée, parce qu'elles ne suivent pas toujours l'année du règne de ce même prince, et que difficilement l'année de la puissance de tribun, répond à celle du consulat. La raison en est que la puissance de tribun se prenait régulièrement d'année en année ; au-lieu que l'empereur n'étant pas toujours consul, l'intervalle de l'un à l'autre consulat, qui souvent était de plusieurs années, gardait toujours l'éloge du dernier ; par exemple, Adrien est dit durant plusieurs années Cos. III. de sorte qu'on ne saurait par-là se faire aucun ordre assuré pour les différentes médailles qui ont été frappées depuis l'an de Rome 872, que ce prince entra dans son troisième consulat, jusqu'à sa mort, qui n'arriva que vingt ans après. Cependant comme les puissances tribunitiennes se renouvellaient toutes les années au même jour où elles avaient commencé, on sait à quelles années de la puissance tribunitienne doivent répondre les consulats de chaque empereur. C'est du moins un calcul qui est aisé à faire pour peu que l'on ait les premiers élements de la chronologie ; la fixation des dates des principaux faits historiques en dépend ; et c'est une des plus grandes utilités qu'on doive se proposer dans l'étude des médailles.

Les Grecs ont eu soin de marquer exactement les années du règne de chaque prince, et cela jusques dans le plus bas empire, où les revers ne sont presque chargés que de ces sortes d'époques, surtout après Justinien.

Je ne parle ici que des médailles impériales : car je sai qu'à l'exception de certaines villes, toutes les autres que Goltzius nous a données, n'ont point d'époques ; et que c'est ce qui embarrasse extrêmement la chronologie. Pour les rais, l'on y trouve plus souvent les époques de leur règne ; le P. Hardouin, dans son antirrhétique, a publié des médailles du roi Juba, dont l'une marque l'an 32, d'autres l'an 36, 40, 42 et 53.

Quelques colonies marquaient aussi leur époque, comme nous voyons dans les médailles de Viminacium, en Maesie, qui, sous Gordien qu'elle commença, marque an. j. IIe etc. sous Philippe, an. VIIe etc. sous Décius, an. XIe

Or, le commencement de ces époques doit se prendre tantôt du temps que la colonie a été envoyée : tantôt du règne du prince à qui elle était soumise alors : tantôt du règne de quelqu'autre prince qui leur avait fait quelque nouvelle grâce, d'où il est arrivé quelquefois que la même ville, telle par exemple qu'Antioche, s'est servie de différentes époques ; et c'est à quoi il faut faire une attention sérieuse, pour ne pas confondre des faits dont les médailles nous intéressent.

Les villes grecques soumises à l'empire étaient jalouses d'une époque particulière, c'était de l'honneur qu'elles avaient eu d'être néocores, c'est-à-dire, d'avoir eu des temples, où s'étaient faits les sacrifices solennels de toute une province pour les empereurs. Voyez NEOCORE.

Les Grecs marquaient encore une époque particulière sur leurs médailles, qui est celle du pontificat. Il y avait des villes grecques où les pontifes étaient perpétuels ; ils s'appelaient : dans les autres villes où le pontificat était annuel, ceux qui possédaient cette charge, n'étaient pas moins soigneux de le marquer, surtout lorsqu'ils étaient élus pour la seconde ou pour la troisième fais. Il faut observer en passant que ces lettres A P X ne signifient pas seulement pontife ; mais que le plus souvent elles signifient archonte ; c'était le titre des magistrats grecs qui gouvernaient les villes soumises aux lois d'Athènes. M. Vaillant en a fait une grande énumération.

Les époques qui forment les années du règne des empereurs se marquent presque toujours sur les revers, en une de ces deux manières : quelquefois en exprimant les mots entiers , etc. Plus souvent par les simples chiffres, et le mot abrégé E. ou ET. A. B. presque toujours par le lambda antique L, qui signifie, selon la tradition des antiquaires, , mot poétique et inusité dans le langage ordinaire, mais qui veut dire anno, et qui probablement était plus commun en Egypte que dans la Grèce, puisque c'est sur les médailles de ce pays qu'il se trouve toujours. Nous avons cependant un canope au revers d'Antonin . B. comme nous avons du même empereur un revers L. , et plusieurs autres, avec les simples chiffres L. Z. L. H. L. I . chargés de la figure de l'Equitté, de la tête de Sérapis, et d'un dauphin entortillé autour d'un trident.

Les époques des villes, sont communément exprimées par le simple chiffre sans E. ni L. et le nombre plus bas est ordinairement le premier posé. Dans les médailles d'Antioche . M. et non pas M. . Dans une de Pompéopolis, qui a d'un côté la tête d'Aratus, et de l'autre celle de Chrysipe,

. K. C. au-lieu de C. K.

. etc.

Dans le bas empire Grec, les époques sont marquées en latin, anno III. Voyez VII. etc. depuis Justin jusqu'à Théophile, et elles occupent le champ de la médaille sur deux lignes de haut em-bas. (D.J.)

MEDAILLE, ornements des (Numismatique) ce sont toutes les choses qui ornent les têtes, les bustes et les revers d'une médaille ; ainsi le diadême, la couronne, le voîle se nomment les ornements des têtes couvertes. Les divers types ou symboles qui sont empreints sur les revers des médailles, en sont tout autant d'ornements. Voyez -en la description au mot SYMBOLE. (D.J.)