de barr ou de cour, dants la coutume de Bretagne signifie la révendication qu'un juge fait d'une cause ou procès. Voyez les articles 10 et 32.

RETRAIT de bienséance ou de convenance est le droit qu'un de plusieurs co-propriétaires qui possédaient un héritage par indivis, a de retirer la portion qui est vendue par son co-détenteur.

Ce retrait n'a lieu que dans un petit nombre de coutumes qui l'admettent expressément, telles que celle d'Acqs, tit. 10, art. 17 et 18, Lille, art. 19 ; et la Marche, art. 271 : c'est une imitation du droit usité en Allemagne, appelé jus congrui, suivant lequel il est permis de retirer l'héritage contigu au sien, lorsqu'il est vendu. Voyez Matth. de Afflictis decis. neapolit. 338 et 339, Mynsing. cent. 3 observ. 5.

RETRAIT DE BOURGEOISIE ou à titre de bourgeoisie, est le droit accordé aux bourgeois de certains lieux de se faire subroger en l'achat qu'un autre qu'un bourgeois du lieu a fait d'un fond situé sous la bourgeoisie. Ce retrait a lieu en Artais et dans les coutumes de Berg, Bruge, Bourbourg. Voyez Maillard sur Artais, tit. 3, n. 53.

RETRAIT en censive est la même chose que retrait censuel. Voyez ci-après RETRAIT CENSUEL.

RETRAIT de co-héritier ou de compersonnier est le droit qu'un des co-héritiers a de demander que l'acquisition de quelque chose concernant la succession non encore partagée, faite par un des co-héritiers, soit mise en la masse de la succession, à la charge que l'acquéreur touchera comptant ou prélevera ce qu'il a déboursé à l'occasion de cet achat. Ce retrait a lieu en Artais. Voyez Maillard sur le titre 3 de cette coutume, n. 41.

Il a pareillement lieu en Bretagne. Voyez Sauvageau sur Dufail, liv. III. ch. clix.

Le retrait de co-héritier, est aussi la faculté qu'a un héritier de se faire subroger au lieu et place d'un étranger qui a acquis la part d'un co-héritier du retrayant.

RETRAIT de communion ou à titre de communion de fraresche ou frareuseté, est la faculté que ceux qui possèdent quelque chose en commun, ont de se faire subroger en la portion de cette chose commune vendue par un de leurs consorts. Ce retrait a lieu en Artais et dans plusieurs autres coutumes. Voyez Acqs, Berg, Bourbourg, Bruges.

RETRAIT par consolidation, est le droit accordé à un co-partageant de se faire subroger en l'achat fait par un non co-partageant de la portion de l'immeuble partagé, laquelle est échue au vendeur. Coutume de la ville de Lille, art. 79. Ce retrait a aussi lieu en Artais. Voyez Maillard sur le titre 3 de cette coutume, n. 51.

RETRAIT de convenance ou à droit de bienséance, ces termes sont synonymes. Voyez ci-devant RETRAIT de bienséance.

RETRAIT CONVENTIONNEL, est la même chose que la faculté de rachat ou réméré, qui a été stipulée par le contrat en faveur du vendeur, pour pouvoir rentrer dans le bien par lui vendu dans le temps et aux conditions portées par le contrat. Voyez RACHAT et REMERE.

RETRAIT COUTUMIER, dans la coutume de Lodunais, est le retrait lignager.

RETRAIT COUTUMIER ou LOCAL, est aussi une espèce de retrait de bourgeoisie qui était usité en Alsace. Voyez ci-devant RETRAIT DE BOURGEOISIE, et ci-après RETRAIT LOCAL.

RETRAIT DEBITAL ou DE DEBITEUR, on appelle ainsi en Flandres la faculté que le débiteur a de se libérer, en remboursant au cessionnaire le véritable prix de la cession, suivant les lois per diversas et ab Anastasio. Voyez Maillard sur Artais, tit. 3, n. 45 et suiv. et les instit. au droit belgique de Ghewiet, p. 419.

RETRAIT DUCAL est la faculté que l'édit du mois de Mai 1711, portant règlement pour les duchés-pairies, donne à l'ainé des mâles descendants en ligne directe de celui en faveur duquel l'érection des duchés-pairies aura été faite, ou à son défaut ou refus, à celui qui le suivra immédiatement, et ensuite à tout autre mâle de degré en degré, de retirer les duchés-pairies des filles qui se trouveront en être propriétaires, en leur en remboursant le prix dans six mois, sur le pied du denier 25 du revenu actuel, et sans qu'ils puissent être reçus en ladite dignité ; qu'après en avoir fait le payement réel et effectif, et en avoir rapporté la quittance. Voyez l'article 7 dudit édit, et les mots DUCHE et PAIR.

RETRAIT ECCLESIASTIQUE, on appelle quelquefois ainsi le rachat que les ecclésiastiques font de leurs biens aliénés, en vertu des édits et déclarations qui leur donnent cette faculté. La dernière déclaration qui leur a permis d'user de cette faculté, est celle du mois de Juillet 1702. Voyez les mots EGLISE, RACHAT, et le dictionn. des arrêts de M. Brillon aux mots ALIENATION, GARANTIE et RETRAIT.

RETRAIT D'ECLECHE ou d'éclipsement, est la même chose que le retrait à titre de consolidation. Voyez ci-devant RETRAIT PAR CONSOLIDATION.

RETRAIT EMPHYTEOTIQUE se prend quelquefois pour le retrait conventionnel ou faculté de réméré, qui s'exerce en matière d'emphytéose ; quelquefois il se prend pour le retrait censuel en général, surtout dans les pays de droit écrit, où l'on confond volontiers le bail à cens avec l'emphytéose. Voyez RETRAIT CENSUEL, EMPHYTEOSE, REMERE.

RETRAIT FEODAL, est le droit que la coutume donne au seigneur de retirer et retenir par puissance de fief, le fief mouvant de lui, lorsqu'il a été vendu par son vassal, en remboursant à l'acquéreur le prix de son acquisition, et les loyaux couts.

On l'appelle aussi retenue féodale dans quelques-uns des pays de droit écrit ; il est compris sous le terme de prélation.

Ce droit a été introduit lorsque les fiefs commencèrent à devenir héréditaires, et qu'il fut permis au vassal d'en disposer par aliénation sans le consentement du seigneur, et sans peine de commise. Il en est parlé dans les assises de Jérusalem, qui sont les lois que les François donnèrent au peuple de Syrie et de Jérusalem l'an 1099 ; ainsi cet usage était déjà plus ancien en France, il en est fait mention dans la charte de Thibaut, comte de Champagne, de l'an 1198, et dans les établissements de S. Louis en 1270, et autres lois postérieures.

Il a lieu dans tout le royaume, tant en pays de droit écrit, que dans les pays coutumiers ; la coutume de la Salle, bailliage et châtellenie de Lille en Flandres, est la seule qui la rejette.

L'objet du retrait féodal est de donner au seigneur la faculté de réunir le fief errant au fief dominant, de profiter du bon marché de la vente, et empêcher que le fief ne soit vendu à vil prix en fraude du seigneur, enfin que le seigneur ne soit point exposé à voir malgré lui un vassal qui ne lui serait pas agréable.

Le seigneur peut céder à un autre son droit de retrait féodal.

Ce droit n'a lieu qu'en cas de vente ou autre contrat équipollent à vente ; tels que le bail à rente rachetable, la dation en payement, l'adjudication par decret.

Il n'a point lieu dans les mutations par échange ou par succession, soit directe ou collatérale, par donation ou legs.

Le seigneur ne peut pas non plus user de retrait en cas de partage ou licitation, pourvu que celui qui demeure propriétaire du tout ou de partie de l'héritage fût l'un des copropriétaires à titre commun ; mais il en serait autrement s'il n'était devenu copropriétaire que par un titre singulier.

Au reste, le retrait lignager est préféré au féodal, et le conventionnel est préféré à tous deux.

Le seigneur a quarante jours, à compter de l'exhibition du contrat, pour opter s'il exercera le retrait, ou s'il recevra les droits dû. pour la vente. Quand une fois il a fait son option, il ne peut plus varier.

Tout ce qui est tenu en fief est sujet au retrait féodal en cas de vente.

S'il y a plusieurs héritages relevants de différents seigneurs, chaque seigneur peut retirer ce qui est dans sa mouvance, et n'est pas obligé de retirer le surplus.

Si ce sont plusieurs fiefs, le seigneur en peut retirer un, et laisser l'autre ; mais il ne peut pas retirer seulement une partie d'un fief.

Si la mouvance est vendue, elle peut être retirée.

Le seigneur suserain peut aussi retirer les arriere-fiefs pendant la saisie qu'il a faite du fief de son vassal, pourvu que ce soit faute de foi et hommage, parce que cette saisie emporte perte de fruits.

Le retrait féodal ne peut être exercé que par le propriétaire du fief dominant, ainsi les apanagistes peuvent user de ce droit ; mais les usufruitiers ne peuvent retirer, si ce n'est au nom du propriétaire : et à l'égard des engagistes, ils n'ont ce droit que quand il leur a été cédé nommément par le contrat d'engagement.

Lorsqu'il y a plusieurs propriétaires du fief dominant, chacun peut retirer sa part, ou recevoir les droits ; mais il dépend de l'acquéreur d'obliger celui qui retire de garder le tout.

Le mari peut retirer le fief mouvant de sa femme, et même sans son consentement ; la femme peut aussi retirer malgre son mari, en se faisant autoriser par justice.

Les gens d'église et de main morte peuvent retirer les fiefs mouvants d'eux, à la charge d'en vider leurs mains dans l'an et jour, ou de payer au roi le droit d'amortissement, et au seigneur le droit d'indemnité.

Le tuteur peut retirer pour son mineur, et s'il ne le fait pas dans le temps prescrit, le mineur n'y est plus recevable.

Le fermier du fief dominant peut aussi user du retrait féodal, si ce droit est compris nommément dans son bail.

Le temps pour exercer le retrait féodal est différent, suivant les coutumes ; celle de Paris et beaucoup d'autres ne donnent que quarante jours, à compter du jour de l'exhibition du contrat, d'autres donnent trois mois, d'autres un an et jour.

S'il y a fraude dans le contrat, le délai ne court que du jour qu'elle est découverte.

Le seigneur peut exercer le retrait sans attendre l'exhibition du contrat, ni les quarante jours.

Quand le contrat ne lui est pas notifié, il peut intenter le retrait féodal pendant trente ans.

Il n'est plus recevable à l'exercer, soit lorsqu'il a reçu les droits, ou qu'il en a composé ou donné terme pour les payer, ou lorsqu'il a reçu le vassal en foi, ou baillé souffrance volontaire.

Il en est de même lorsque le vassal a été reçu en foi par main souveraine, et qu'il a consigné les droits.

Le seigneur n'est pas exclus du retrait lorsque son receveur, ou fermier, ou usufruitier ont reçu les droits, il doit seulement les rendre à l'acquéreur.

Si c'est son fondé de procuration spéciale qui a reçu les droits, il ne peut plus retirer. Il en serait autrement si c'était seulement un fondé de procuration générale, qui eut fait quelques démarches contraires au retrait.

Le tuteur qui a reçu les droits en la dite qualité, ne peut plus user du retrait pour son mineur.

La femme ne peut pas non plus retirer quand son mari a reçu les droits.

Le fait d'un des co-seigneurs ne peut pas empêcher les autres de retirer pour leur part.

L'assignation au retrait peut-être donnée après les quarante jours, pourvu que le seigneur ait fait dans les 40 jours sa déclaration qu'il entend user du retrait.

Les formalités de ce retrait étant différentes, suivant les coutumes, il faut suivre celle du lieu où est situé le fief que l'on veut retirer.

La demande en retrait doit être formée au bailliage on sénéchaussée royale du domicîle du défendeur.

Il faut faire offrir réellement par un huissier ou sergent le prix du contrat, et une somme pour les loyaux couts, sauf à parfaire. Ces offres doivent être faites à la personne ou domicîle de l'acquéreur ; si elles ne sont pas acceptées, il faut les réaliser à l'audience.

Le retrait étant adjugé, il faut payer ; ou si l'acquéreur refuse de recevoir, consigner.

Le retrait féodal est cessible.

En concurrence de deux retraits, l'un lignager et l'autre féodal, le lignager est préféré.

Le fief retiré féodalement n'est pas réuni de plein droit au fief dominant, à-moins que le seigneur ne le déclare expressément.

Sur le retrait féodal, voyez les dispositions des coutumes au titre des Fiefs, Salvaing, la Rocheflavin, Bouchel, Dunot, Louet et Brodeau, et ce dernier sur la coutume de Paris. (A)

RETRAIT FEUDAL, voyez ci-dev. RETRAIT FEODAL.

RETRAIT de fraresche, ou de frareuseté est la même chose que retrait de communion, voyez ci-devant RETRAIT DE COMMUNION.

RETRAIT LEGAL ou coutumier, est celui qui est fondé sur la loi ou la coutume, à la différence de celui qui dérive de la convention. Voyez ci-devant RETRAIT COUTUMIER.

RETRAIT LIGNAGER, est un droit accordé aux parents de ceux qui ont vendu quelque héritage propre, de le retirer sur l'acquéreur, en lui remboursant le prix et les loyaux couts.

On l'appelle en Bretagne presme ou prémesse, et dans le pays de droit écrit droit de prélation.

Les auteurs sont partagés sur son origine ; les uns, amateurs de la plus haute antiquité, la font remonter jusqu'à la loi de Moïse, suivant laquelle il y avait deux sortes de retrait, dont l'objet était de conserver les biens dans la famille.

L'un était le droit général que chacun avait au bout de cinquante ans de rentrer dans les biens de sa famille qui avaient été aliénés, c'est ce qu'on appelle le jubilé des Juifs.

L'autre espèce de retrait était celui par lequel le parent le plus proche était préféré à l'acquéreur qui était parent plus éloigné, ou étranger à la famille. Avant de vendre sa terre à un étranger, il fallait l'offrir à un parent. Le vendeur lui-même pouvait la retirer en rendant le prix.

D'autres craient trouver la source du retrait lignager dans les lois des Locriens et des Lacédémoniens, lesquelles notaient d'une infamie perpétuelle celui qui souffrait que les héritages de ses ancêtres fussent vendus et passassent en une main étrangère, et ne les retirait point.

Quelques-uns prétendent que notre retrait lignager est imité des mœurs des Lombards.

D'autres encore prétendent qu'il dérive du droit de prélation des Romains, appelé dans les constitutions grecques jus .

Suivant ce droit qui était fort ancien, il était permis aux parents, et même aux co-propriétaires, de retirer les héritages qui étaient vendus à des étrangers, soit en offrant et payant le prix au vendeur, et en le rendant à l'acheteur dans l'an et jour.

Ce droit fut abrogé en 395 par les empereurs Gratien, Valentinien, Théodose et Arcade.

Il fut pourtant rétabli, du moins en partie par les empereurs Léon et Ansthémius ; en effet, il est parlé du droit de prélation dans une de leurs constitutions insérée au code qui défend aux habitants du principal village de chaque canton, de transférer leurs héritages à des étrangers ; mais cette constitution est particulière pour ceux qui étaient habitants du même lieu, appelés convicani.

Mais le droit qui s'observait anciennement par rapport au retrait lignager, fut rétabli dans son entier par des novelles des empereurs romains Michel et Nicéphore, surnommé Lecapene, et par le droit des basiliques. Ces lois portent qu'avant de vendre un immeuble, on devait en avertir les parents dans l'ordre auquel ils auraient succédé, ensuite ceux avec lesquels l'héritage était commun, quoique du reste il fussent étrangers au vendeur ; enfin, les voisins dont l'héritage tenait de quelque côté à celui que l'on voulait vendre, afin que dans l'espace de trente jours ils pussent retenir l'héritage en donnant au vendeur le même prix que l'acheteur lui en offrait.

L'empereur Frédéric établit la même chose en occident l'an 1153.

Ce droit fut aussi adopté dans la loi des Saxons.

Ainsi l'on peut dire que c'est une loi du droit des gens commune à presque tous les peuples, et qu'elle a pour objet la conservation des héritages dans les familles, et l'affection que l'on a ordinairement pour les biens patrimoniaux.

Pithou, sur l'article 144. de la coutume de Troie., tient que le retrait lignager usité en France, était une ancienne coutume des Gaulois, qui s'y est toujours conservée.

Cependant il n'est point fait mention du retrait lignager dans les anciennes lois des Francs, telles que la loi salique et la loi ripuaire ; il n'en est pas non plus parlé dans les capitulaires de Charlemagne, de Louis le Débonnaire, et de Charles le Chauve, ni dans les anciennes formules, soit de Marculphe ou autres, ni dans les assises de Jérusalem, lois faites par les François en 1099, ni dans les plus anciennes coutumes de France, telles que la loi de Vervin ou de la Bassée, faite sous Henri I. les anciennes coutumes de Lorris en 1170, les lois données en 1212 par Simon, comte de Montfort, aux peuples d'Alby, Beziers, Carcassonne et autres, ni dans la charte appelée la paix de la Fere, faite par Enguerand de Coucy.

Balde prétend néanmoins que le retrait lignager fut introduit en France du temps de Charlemagne ; il se fonde sur ce que la loi des Saxons ordonnait qu'avant de vendre à un étranger son patrimoine ou propre héritage échu par succession, on l'offrit à son proche parent ; mais ce droit se rapporte au droit de prélation qui avait lieu chez les Romains, plutôt qu'au retrait lignager, tel que nous le pratiquons en pays coutumier.

Le retrait lignager tire plutôt son origine de ce qu'anciennement en France il était défendu de vendre à d'autres qu'à ses proches parents son aleu, ou bien patrimonial, il n'était permis de disposer librement que de ses acquêts ; pour disposer de son aleu, il fallait le consentement de ses héritiers présomptifs.

Cette prohibition de disposer autrement de son aleu avait lieu dès le commencement de la monarchie, ainsi qu'il parait par la loi salique ; et c'est delà probablement que s'est formé peu à-peu le retrait lignager.

On en trouve des vestiges dès le XIe siècle, dumoins dans quelques provinces de France dès le commencement du Xe siècle. C'est ainsi que Guichard de Beaujeu, qui possédait héréditairement le quart des dixmes du territoire de l'église de Mâcon, les donnant à cette église, ordonna qu'aucun de ses parents ne put l'inquiéter sur cette dixme, parce qu'avant de la donner, il avait invité et fait inviter par ses amis son frère Ponce, qui jouissait d'une autre quart, d'acheter le sien, ce qu'il n'avait pas voulu faire. Ces sommations, ou invitations d'acquérir, ces défenses aux parents d'inquiéter le nouveau possesseur, les confirmations que l'on faisait quelquefois faire par les parents, annoncent bien que le retrait lignager avait déjà lieu du-moins dans ce pays. On y trouve encore un exemple de pareilles défenses en 1116.

De tout cela l'on peut conclure que le retrait lignager, tel que nous le pratiquons, a été introduit non par aucune ordonnance de nos rais, mais par les mœurs et usages de quelques provinces, et qu'il a été ensuite adopté par les coutumes à mesure qu'elles ont été rédigées par écrit, ce qui commença à se faire dans le XIe siècle.

Les établissements de S. Louis, rédigés en 1270, font mention du retrait lignager ; et depuis ce temps il est devenu un droit commun et presque général pour tous les pays coutumiers.

Henri III. ordonna en 1581, que le retrait lignager aurait lieu dans tout le royaume, mais cette ordonnance ne fut vérifiée qu'au parlement de Paris, et elle n'a été reçue pour les provinces de droit écrit de son ressort, que dans le Mâconnais et dans l'Auvergne.

Le retrait lignager n'a pas lieu dans le Lyonnais, ni dans le Forez, ni dans le parlement de Toulouse, si ce n'est dans le Quercy et le Rouergue ; dans le parlement de Dauphiné, il n'a lieu que dans les bailliages de Romants et de Briançon ; dans les parlements de Bordeaux et de Dijon, il n'a lieu que dans les pays de coutume seulement ; il a aussi lieu dans le comté de Bourgogne, excepté dans la ville de Besançon et dans son ancien territoire.

Pour ce qui est du pays coutumier, le retrait a lieu dans toutes les coutumes ; mais il s'y pratique fort diversement.

Pour exercer le retrait lignager dans les coutumes qu'on appelle du côté et ligne, comme Paris et autres qui forment le plus grand nombre, il faut être parent du vendeur du côté et ligne d'où l'héritage lui était échu.

Il faut même dans quelques-unes, qu'on appelle souchères, être descendu de celui qui a mis l'héritage dans la famille.

Mais dans quelques autres coutumes qu'on appelle de simple côté, au défaut de parents de la ligne, on admet au retrait les autres parents du vendeur.

Le retrait lignager peut être exercé par les enfants même du vendeur, quoiqu'il soit encore vivant. Et la qualité d'héritier n'empêche pas non plus l'exercice du retrait, parce que c'est un droit que l'héritier tire de la loi, et non de sa qualité d'héritier.

Le retrait lignager n'a pas lieu quand l'acquéreur est lui-même lignager, ou qu'il a des enfants qui sont en ligne ; mais si dans la suite il mettait l'héritage hors la ligne, il y aurait lieu au retrait, et en ce cas, le premier vendeur peut venir lui-même au retrait.

Celui qui a vendu son propre peut lui-même le retirer, comme tuteur de son fils ; et l'on peut intenter le retrait au nom d'un enfant quoiqu'il ne fût ni Ve ni connu au temps de la vente.

Le mari peut exercer le retrait du côté de sa femme sans être fondé de sa procuration.

En concurrence de plusieurs retrayans, la coutume de Paris et plusieurs autres préférent le plus diligent ; d'autres préfèrent le plus prochain.

Si deux lignagers ont formé la demande en même temps, ou bien dans les coutumes qui admettent le plus prochain, si deux retrayans sont en égal degré, en ce cas ils viennent au retrait par concurrence et par moitié ; mais si l'un des deux manque à remplir quelque formalité qui le fasse déchoir du retrait, si l'autre veut suivre le sien, il est obligé de retirer le tout.

Le retrait n'a lieu que pour la propriété des héritages, maisons, rentes foncières et autres droits réels ; il n'a pas lieu en cas de vente de l'usufruit de ces mêmes biens, ni pour les offices et les rentes constituées, ni pour les meubles tels qu'ils soient.

Les mutations qui donnent ouverture au retrait lignager sont la vente à prix d'argent, ou autre contrat équipollent à vente, le bail à rente rachetable, le bail à longues années. La plupart des coutumes admettent aussi le retrait en cas d'échange, quand il y a soute qui excède la moitié de la valeur de l'héritage.

Suivant le droit commun, les propres sont seuls sujets au retrait, excepté en Normandie et dans quelques autres coutumes qui étendent le retrait aux acquêts.

L'héritage donné en contre-échange d'un propre, tient lieu de propre, et est sujet à retrait.

La plupart des coutumes admettent le retrait en cas de vente par decret ou licitation : mais il n'a pas lieu quand la vente est faite par une transaction, et qu'elle en est une des conditions.

La vente faite sur l'héritier bénéficiaire, ou sur un curateur aux biens vacans, est sujette au retrait ; il en est autrement de celle qui est faite sur un curateur aux biens vacans, parce qu'en ce cas il n'y a plus de propre.

Lorsque l'héritage vendu est partie propre et partie acquêt, il est au choix de l'acquéreur de laisser le tout au retrayant, ou seulement la portion qui est propre ; il en est de même lorsqu'on a vendu par le même contrat plusieurs héritages, les uns propres, les autres acquêts, et qu'il n'y a qu'un seul prix.

Le retrait lignager n'est point cessible, et si le retrayant qui est préféré, prêtait son nom à un tiers, les autres lignagers qui auraient intenté leur action dans l'an et jour, pourraient revenir au retrait dans l'an et jour depuis que la collusion aurait été découverte.

Le retrait lignager est préféré au féodal, tellement que le lignager peut retirer sur le seigneur auquel l'héritage aurait été transmis à titre de retrait féodal.

Mais le retrait conventionnel ou réméré est préféré au retrait lignager, aussi-bien qu'au retrait féodal.

L'héritage retiré par un lignager est tellement affecté à la famille, que si ce retrayant meurt, laissant un héritier des propres de cette ligne, et un héritier des acquêts, l'héritage retiré appartient à l'héritier des propres, en rendant néanmoins dans l'an du décès de l'héritier des acquêts le prix de l'héritage.

Les formalités du retrait étant différentes presque dans chaque coutume, on doit suivre celles de la coutume dans laquelle les héritages sujets à retrait sont situés, et non pas celles du lieu où la demande se poursuit.

Pour en donner une idée, on se contentera de rappeler ici brievement celles que présentent la coutume de Paris.

Suivant cette coutume, l'action en retrait doit être intentée, et le terme de l'assignation doit échoir dans l'an et jour que le contrat de vente a été ensaisiné, à l'égard des rotures ; et pour les héritages tenus en fiefs, du jour de la reception en foi : si c'est un franc-aleu, ou un héritage acquis par le seigneur dans sa propre mouvance ou censive, le temps du retrait ne court que du jour que l'acquisition a été publiée en jugement au plus prochain siege royal.

L'an du retrait court contre toutes sortes de personnes, mineurs, absens et autres, sans espérance de restitution.

L'assignation doit contenir offre de bourse, deniers, loyaux-couts et à parfaire ; il faut que l'huissier ou sergent ait une bourse à la main ; mais il n'est pas nécessaire que le prix y soit en entier, il suffit qu'il y ait quelque pièce d'argent.

Ces offres doivent être réitérées à toutes les journées de la cause, c'est-à-dire dans toutes les procédures faites ou réputées faites en jugement ; savoir, en cause principale jusqu'à la contestation en cause inclusivement, et en cause d'appel jusqu'à la conclusion aussi inclusivement.

Si la cause est portée à l'audience, ne fût-ce que par défaut, l'avocat doit avoir en main une bourse avec de l'argent, en réitérer les offres dans les mêmes termes.

Quand l'acquéreur tend le giron, c'est-à-dire reçoit les offres, ou que le retrait est adjugé, le retrayant doit payer à l'acquéreur, ou à son refus, consigner dans les 24 heures, après que l'acquéreur aura mis son contrat au greffe, partie présente, ou duement appelée, et qu'il aura affirmé le prix s'il en est requis par l'acquéreur.

Pour que la consignation soit valable, il faut qu'elle soit précédée d'offres réelles, et qu'elle contienne tous les prix en bonnes espèces ayant cours. Il faut aussi appeler l'acquéreur pour être présent, si bon lui semble, à la consignation, et que tout soit fait dans les 24 heures.

Toutes ces formalités sont tellement de rigueur, que celui qui manque à la moindre chose est déchu du retrait : qui cadit à syllabâ, cadit à toto ; ce qui a fait croire à quelques auteurs que le retrait lignager était odieux, comme gênant la liberté du commerce ; mais s'il était odieux, ces coutumes ne l'auraient pas admis ; elles ont seulement voulu empêcher les parents d'en abuser pour vexer l'acquéreur.

Le remboursement des loyaux-couts doit se faire après qu'ils sont liquidés : ils consistent dans les frais du contrat, les droits seigneuriaux, les labours et semences, les réparations nécessaires.

Le retrayant doit rembourser les droits seigneuriaux en entier, quoique le seigneur ait fait remise d'une partie à l'acquéreur.

Un acquéreur qui est exempt de droit seigneuriaux dans la mouvance du roi, ne laisse pas de les répéter du retrayant, comme s'il les avait payés, à-moins que l'acquéreur et le retrayant ne fussent tous deux privilégiés.

Sur le retrait lignager, voyez les dispositions des coutumes au tit. du Retrait, et les commentateurs, Tiraqueau, Louet, Coquille, Dunod, et ci-devant le mot PROPRE. (A)

RETRAIT LOCAL ou COUTUMIER : on appelait ainsi en Alsace le droit que les bourgeois prétendaient avoir de se faire subroger en l'achat des effets mobiliers qui étaient vendus dans leur ville, mais ce prétendu droit y a été proscrit par divers arrêts. Voyez Maillard sur Artais, tit. III. n °. 56. et ci-devant RETRAIT DE BOURGEOISIE.

RETRAIT DE MI-DENIER est une espèce particulière de retrait lignager, établi par la coutume de Paris et par la plupart des autres coutumes. Quand les conjoints durant leur mariage acquièrent leur héritage propre d'un vendeur, dont l'un d'eux est parent de la ligne, il n'y a pas lieu au retrait tant que le mariage subsiste ; mais après sa dissolution, la moitié de cet héritage est sujet à retrait au profit du conjoint lignager, ou de ses héritiers à l'encontre de l'autre, ou de ses héritiers qui ne le sont pas.

On appelle ce retrait de mi-denier, parce qu'on n'y rembourse que la moitié du prix principal et des loyaux couts.

Ce retrait n'a lieu qu'en cas d'acquisition faite à prix d'argent ou à rente rachetable, et non en cas que les conjoints aient eu le propre par retrait ; car en ce cas l'héritage est fait propre pour le tout au seul conjoint lignager, qui est seulement tenu de rembourser le prix, suivant l'article 139.

Un des héritiers du conjoint lignager ne voulant pas user de ce retrait, l'autre peut l'exercer pour le tout.

L'an et jour pour l'exercer ne court que du jour de l'ensaisissement ou inféodation ; les formalités sont les mêmes que pour le retrait ordinaire.

Il n'a point lieu quand les deux conjoints sont lignagers, ou que le conjoint non-lignager a des enfants en ligne.

Ce retrait n'est ouvert qu'au décès de l'un des conjoints.

Quand le conjoint lignager ou ses héritiers négligent d'exercer le retrait, en ce cas les autres lignagers non-copartageants sont admis au retrait de la moitié du propre, pourvu qu'ils intentent leur action dans l'an du décès du conjoint lignager. Voyez les articles 155, 156 et 157, de la coutume de Paris, et ce que les commentateurs ont dit sur ces articles. (A)

RETRAIT PARTIAIRE, usité en Flandres, a lieu quand un de plusieurs copropriétaires vend à un étranger sa part de l'effet commun, un autre copropriétaire peut retirer la portion vendue pour la réunir à son tout. Voyez RETRAIT de communion, de consolidation, d'écleche ou éclipsement, de fraresche ou frareuseté.

RETRAIT DE PREFERENCE, est la faculté qu'une personne appelée au retrait a de se faire subroger au lieu et place de quelqu'un qui a déjà usé du retrait sur la chose vendue, comme quand le retrait lignager est préféré au féodal, ou celui-ci au lignager, selon l'usage des différents pays. Voyez Maillard sur Artais, tit. III. n °. 43.

RETRAIT DE PREMESSE, est le nom que l'on donne au retrait lignager dans les coutumes où c'est le plus prochain lignager qui est préféré, car premesse signifie plus prochain. Voyez PREMESSE.

RETRAIT PUBLIC ou pour l'utilité publique, est la faculté que le roi, l'église ou les villes ont de se faire subroger dans l'achat même d'acquérir la propriété d'un héritage limitrophe, ou qui se trouve nécessaire pour les fortifications d'une ville, la construction ou l'agrandissement d'une église, la décoration d'une place, d'une ville, d'une maison royale ou d'un collège. Voyez la coutume de Bordeaux, article 10.

RETRAIT par puissance de fief, dans les coutumes d'Anjou et Maine, c'est le retrait féodal.

RETRAIT DE RECONSOLIDATION, voyez ci-devant RETRAIT PAR CONSOLIDATION.

RETRAIT DE RECOUSSE ou à titre de recousse, est la faculté accordée au saisi de rembourser dans un certain temps celui qui a acheté les meubles du saisi vendus en justice ; ce retrait a lieu en quelques endroits de la province d'Artais. Voyez Monstreuil 1507, style du bailliage, article 51. Verdun titre XIV. article 5.

RETRAIT SEIGNEURIAL ou féodal, voyez ci-devant RETRAIT FEODAL.

RETRAIT DE SOCIETE ET DE CONVENANCE, dans la coutume de Hainault, chap. xcv. art. 25. est le droit qu'un de plusieurs associés ou propriétaires a de retirer la portion que son copropriétaire ou coassocié, a vendue.

RETRAIT VOLONTAIRE, c'est lorsque l'acquéreur tend le giron au retrayant qui n'a commencé son action qu'après l'année de la saisine, et par conséquent hors le temps accordé par la coutume, pour-lors le retrait est volontaire, c'est-à-dire que l'acquéreur s'y est soumis sans y être obligé, et c'est une véritable vente déguisée sous le nom de retrait, laquelle ne résoud pas les hypothèques des créanciers de l'acheteur, et est sujette aux droits seigneuriaux. Voyez Maillard sur Artais, article 123. n °. 35 (A)

RETRAIT, terme de Blason, qui se dit de bandes, des paux et des fasces, dont l'un des coins ne touche pas les bords de l'écu.

Desrollans de Rhellanete en Provence, d'azur à trois pals retraits en chef d'or, au cor de chasse lié de même en pointe.

RETRAITS, blés, (Agriculture) on appelle blés retraits, des blés qui étant bien conditionnés au sortir de la fleur, mûrissent sans se remplir de farine. Les grains sont alors menus, ou, pour revêtir le langage des fermiers, sont retraits. Comme ces sortes de blés germent très-bien, ils servent à ensemencer les terres, ils font de belle farine et de bon pain, mais ils ne rendent presque que du son, de sorte que deux sacs de blés retraits ne fournissent pas plus de pain qu'un sac de bon blé.

Ce défaut, selon M. Duhamel, peut être produit par différentes causes ; par exemple, 1°. quand le blé est versé, comme la nourriture ne peut être portée à l'épi par le tuyau qui est rompu ou simplement ployé, le grain qui ne reçoit plus de subsistance mûrit sans se remplir de farine, et il reste vide. 2° Quand les blés ont pris leur accroissement par l'humidité, et qu'il survient de grandes chaleurs qui dessechent la paille et le grain, le blé mûrit sans se remplir de farine. Il n'est pas possible de prévenir les effets des orages, ceux de la gelée, ni de détourner les causes qui empêchent que le blé ne soit fécondé. Il n'est pas non plus possible d'affoiblir l'action du soleil qui précipite la maturité du grain ; mais, suivant les principes de M. Tull, on peut, par sa nouvelle culture, prévenir en partie les autres causes qui rendent les blés retraits. (D.J.)