(Histoire des Pierres précieuses, Lithologie) vase précieux fait, à ce qu'on dit, d'une seule émeraude. On a béni et sanctifié ce vase sous le nom ridicule de saint-Graal. Les chanoines de l'église cathédrale de Genèseen sont les dépositaires. Durant le séjour que Louis XII. fit à Genèse l'an 1502, les chanoines le lui firent voir.

Ce vase s'est toujours conservé dans le trésor de la métropole. Il est taillé en forme de plat d'un exagone régulier. Il a sept pouces de chaque côté, quatorze pouces de diamètre, trois pouces et demi de creux, trois lignes d'épaisseur. On voit au-dessous du vase deux anses taillées dans la même pierre, et qui ont chacune trois pouces et demi de long, cinq lignes de diamètre. Le vase pese un marc et demi ou douze onces.

La couleur de cette pierre est, au jour, d'un verd qui surpasse celui des autres émeraudes. A la lumière des flambeaux, elle est transparente, nette et brillante ; on voit sur une de ses anses une entaille faite par un lapidaire, en présence de l'empereur Charles V. qui fut convaincu par cette épreuve, que c'était une vraie émeraude ; mais il est fort permis d'en douter.

Ce vase fut trouvé, disent les Génois, à la prise de Césarée. Les alliés partagèrent le butin ; les Vénitiens s'emparèrent de l'argent ; les Génois se contentèrent de cette pierre. On lit dans un manuscrit de la métropole, que c'est le plat dans lequel Jesus-Christ mangea l'agneau pascal à la dernière cêne qu'il fit avec ses apôtres. La tradition de la république veut que ce soit le plat où fut présentée la tête de S. Jean-Baptiste.

Ces traditions ne demandent pas une réfutation sérieuse ; mais cette émeraude, si elle était vraie, serait une pièce singulière. On ne la montre, pour le persuader au public, qu'avec de grandes formalités. Un prêtre en surplis et avec l'étole prend le vase, ayant passé au cou un cordon dont chaque bout est noué à chacune des anses. On ne la montre encore qu'aux personnes de distinction, et par un décret du sénat.

M. le chevalier de Cresnay, lieutenant général des armées navales, qui conduisit à Genèse par ordre du roi, madame infante, duchesse de Parme, sur la fin de l'année 1753, demanda à voir ce vase, et le vit avec tous les officiers de son escadre. M. de la Condamine l'a examiné de son côté, et en a parlé dans un mémoire qu'il a lu à l'académie des Sciences. (D.J.)