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Catégorie : Histoire naturelle
S. m. anacardium, (Histoire naturelle) c'est un fruit, ou plutôt un noyau aplati, de la forme du cœur d'un petit oiseau, noirâtre, brillant, long d'environ un pouce, se terminant par une pointe mousse, attaché à un pédicule ridé qui occupe toute la base. Il renferme sous une double enveloppe fort dure et qui est une espèce d'écorce, un noyau blanchâtre, d'un goût doux comme l'amande ou la châtaigne. Entre la duplicature de cette enveloppe est un suc mielleux, acre et brulant, placé dans les petits creux d'une certaine substance fongueuse ou diploé. Les anciens Grecs ne le connaissaient pas.

Il faut prendre l'anacarde récent, noir, pesant, contenant un noyau blanc et beaucoup de liqueur fluide. Le R. P. George Camelli, de la Compagnie de Jesus, dans l'index des plantes de l'île de Luzone que Jean Ray a fait imprimer, distingue trois espèces d'anacarde : la première est la plus petite, appelée ligas ; la seconde ou moyenne, est l'anacarde des boutiques ; et la troisième se nomme cajou, ou acajou.

Le ligas est un arbre sauvage de médiocre grandeur, qui vient sur les montagnes, et dont les jeunes pousses répandent, quand on les casse, une liqueur laiteuse, qui en tombant sur les mains ou sur le visage, excite d'abord la demangeaison, et peu-à-peu l'enflure. Sa feuille est longue d'un empan et davantage ; elle est d'un verd foncé et rude, et a peu de suc ; sa fleur est petite, blanche, découpée en forme d'étoile, et disposée en grappe à l'extrémité des tiges. Son fruit est de la grosseur de celui de l'érable, et d'un rouge safran ; il a le goût acerbe comme la pomme sauvage ; à son sommet est attaché un noyau noir, luisant, et plus long que les fruits ; son amande mâchée picote et resserre un peu le gosier.

L'anacarde moyen est un grand arbre, beau et droit, haut de soixante et dix pieds, épais de seize ou environ, qui aime le bord des fleuves, et qui jette au loin et en tout sens plusieurs branches de couleur cendrée : son bois est blanchâtre, et couvert d'une écorce cendrée ; sa racine fibreuse, rougeâtre, garnie d'une écorce rousse, sans odeur, mucilagineuse, et d'une saveur un peu salée ; sa feuille grande, quelquefois de trois coudées, longue, ovalaire, attachée aux rameaux par de petites queues, disposée à son extrémité en forme de rose, épaisse, nombreuse, rude, lisse, luisante, verte en-dessus, un peu cendrée en-dessous, insipide, et sans odeur : sa fleur petite, ramassée en grappe, blanchâtre, de bonne odeur, taillée en étoile, et portée sur de longs pédicules violets qui sortent du tronc. Elle est composée d'un calice verd, pointu, découpé en cinq quartiers, et de cinq pétales jaunes, ovales, pointus, et blanchâtres par leur bord. Entre ces pétales sont placées autant d'étamines blanchâtres, garnies de sommets partagés en deux, et au milieu un petit style blanchâtre. Quand la fleur est passée, il lui succede un fruit allongé, plus petit qu'un œuf de poule, sans noyau, bon à manger, rougeâtre d'abord, ensuite de couleur de pourpre foncé en-dehors, jaunâtre d'abord en-dedans, et bien-tôt après d'un bleu rougeâtre, d'une saveur acerbe, portant à son sommet un noyau en cœur, verd dans le commencement, rougeâtre par la suite, enfin noirâtre. Cet arbre se trouve aux Indes orientales, au Malabar, et dans les îles Philippines.

Les Indiens en font cuire les tendres sommets pour les manger : les noyaux ou amandes sont bonnes aussi ; elles ont le goût des pistaches et des châtaignes ; on en ôte l'écorce en les mettant sous la cendre chaude.

Le même Camelli dit que la vertu caustique et dangereuse qu'on attribue au noyau, n'est que dans le suc mielleux qui remplit les petits creux de l'écorce. On frotte de ce suc les condylomes, et autres excraissances charnues, les écrouelles, les verrues, et les dartres vives qu'on veut déraciner. Ce suc mielleux est utîle pour mondifier les ulcères des bestiaux ; il consume les dents cariées : on l'emploie avec la chaux vive pour marquer les étoffes de soie : on fait de l'encre avec les fruits verts pilés, et mêlés avec de la lessive et du vinaigre.

L'acajou est un fruit, ou plutôt un noyau qui a la figure d'un rein, la grosseur d'une châtaigne, l'écorce grise, brune, épaisse d'une ligne, composée comme de deux membranes, et d'une certaine substance qui est entre les deux, fongueuse, et comme un diploé, contenant dans ses cellules un suc mielleux, roussâtre, acre, et si mordicant, qu'en en frottant légèrement la peau, on y excite la sensation du feu.

Si quelqu'un mord imprudemment cette écorce, il souffrira une ardeur vive et brulante à la langue et aux lèvres. L'amande qui est dessous a aussi la figure d'un rein ; sa substance est blanche ; elle a la consistance et le goût de l'amande douce ; elle est revêtue d'une petite peau jaune qu'il en faut enlever.

L'arbre qui porte ce fruit se trouve aux îles de l'Amérique, au Brésil et aux Indes ; il s'élève plus ou moins haut, selon la différence du climat et du terroir. Au Brésil il égale la hauteur des hêtres ; au Malabar et aux iles, il est médiocre : le P. Plumier en donne la description suivante.

L'acajou est de la hauteur de notre pommier, fort branchu, fort touffu, et couvert d'une écorce ridée et cendrée : sa feuille est arrondie, longue d'environ cinq pouces, large de trois, attachée à une queue courte, lisse, ferme comme du parchemin, d'un verd gai en-dessus et en-dessous, avec une côte et des nervures parallèles ; au sommet des rameaux naissent plusieurs pédicules chargés de petites fleurs rangées en parasol, le calice découpé en cinq quartiers droits, pointus, et en forme de lance ; la fleur est en entonnoir, composée de cinq pétales longs, pointus, rougeâtres, verdâtres, rabattus en-dehors, et plus longs que le calice : les étamines sont au nombre de dix, déliées, de la longueur des pétales, et garnies de petits sommets ; elles entourent le pistil dont l'embryon est arrondi ; le style est grêle, recourbé, de la longueur des pétales, et le stigmate qui le termine est pointu ; le fruit est charnu et en forme de poire, plus gros qu'un œuf d'oie, ou du moins de cette grosseur, couvert d'une écorce mince, lisse, luisante, tantôt pourpre, tantôt jaune, tantôt coloré de l'un et de l'autre ; sa substance intérieure est blanche, succulente, douce, mais un peu acerbe. Ce fruit tient à un pédicule long d'un peu plus d'un pouce, et porte à son sommet un noyau : c'est ce noyau par lequel nous avons commencé la description, et qu'on appelle ici noix d'acajou.

Le bois d'acajou coupé, et même sans l'être, répand beaucoup de gomme roussâtre, transparente, et solide ; cette gomme imbibée d'eau se fond comme la gomme arabique, et tient lieu de la meilleure glu. On exprime du fruit un suc, qui fermenté devient vineux et enivre : il excite les urines ; on en retire un esprit ardent fort vif. Plus il est vieux, plus il enivre ; on en fait du vinaigre ; les Indiens préfèrent l'amande au fruit. Le suc mielleux teint le linge de couleur de fer ; l'huîle peint le linge en noir ; le suc est bon pour le feu volage, les dartres, la gale, les vers, etc. Il enlève les taches de rousseur, mais il n'en faut pas user dans le temps des règles ; alors il excite des érésipeles. Les habitants du Bresil comptaient jadis leur âge avec ces noix ; ils en serraient une tous les ans.