S. m. citreum : (Histoire naturelle, Botanique) genre de plante à fleur en rose. Le pistil sort du calice, et devient dans la suite un fruit ordinairement oblong, qui a une chair ferme qui est divisée en plusieurs loges remplies de suc et de vésicules. Ces cellules renferment aussi des semences calleuses : ajoutez au caractère de ce genre, que les feuilles sont simples. Tournefort, inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)

CITRONNIER, (Jardinage) du latin citreum, citreum, malus medica. Plin. Virgil.

DEFINITION.

Illaesum retinet citrus aurea frondis honorem,

Malaque floriferis haèrent pendentia ramis,

Veris et autumni pulcherrima dona.

C'est en effet cet arbre admirable, toujours verd, que le printemps confondu pour ainsi dire avec l'automne, presente à nos yeux chargé de fleurs et de fruits, dont les uns tombent par la maturité, tandis que d'autres commencent à mûrir, et d'autres commencent seulement à paraitre. Rival de l'oranger, et méritant peut-être la préférence, il n'en diffère que par son fruit et par ses feuilles, qui sont larges et roides comme celles du laurier, mais sans talon.

Ipsa ingens arbos, faciemque simillima lauro :

Et si non alium latè jactaret odorem,

Laurus erat : folia haud ullis labentia ventis :

Flos apprimè tenax : animas, et olentia Medi

Ora fovent illo, et senibus medicantur anhelis.

Virg. II. Georg. Ve 131.

" L'arbre dont je parle, originaire de la Médie, s'élève fort haut, et ressemble au laurier. Si l'odeur qu'il répand n'était pas différente, on pourrait aisément le confondre avec le laurier. Ses feuilles résistent au souffle des aquilons, et sa fleur est fort adhérente aux branches où elle est attachée. Les Medes s'en servent pour mettre dans la bouche une odeur agréable, et pour fortifier les vieillards asthmatiques ".

Sa description. (Geoffroi, mat. med.) Il est médiocrement haut dans nos jardins. Sa racine est branchue, et s'étend en tous sens : elle est ligneuse, et couverte d'une écorce jaune en-dehors, blanche en-dedans. Son tronc n'est pas fort gros ; son bois est blanc et dur ; son écorce est d'un verd pâle. Ses branchue sont nombreuses, longues, grêles et fort pliantes ; les plus vieilles sont d'une couleur verte jaunâtre, et garnies de pointes blanchâtres : celles qui sont jeunes, sont d'un beau verd gai ; l'extrémité des branches et des feuilles est fort tendre, et d'un rouge brun.

Ses feuilles approchent de la grandeur de celles du noyer ; elles sont souvent mousses, quelquefois pointues, et presque trois fois plus longues que larges ; plus vertes en-dessus qu'en-dessous, légèrement dentelées en leur bord, garnies de veines qui viennent de la côte épaisse qui est dans le milieu, quelquefois ridées et comme bosselées ; elles sont en grand nombre, et durent pendant tout l'hiver, d'une bonne odeur, amères : elles paraissent percées de trous, ou plutôt parsemées de points transparents, quand on les regarde au soleil, de même que celles du millepertuis. La plupart des feuilles ont une épine contiguè à la partie supérieure, et voisine du bourgeon : la pointe de cette épine est rougeâtre, verte dans le reste, fort roide, et assez longue.

Ses fleurs sont en grand nombre au sommet des rameaux, où elles forment comme un bouquet ; elles sont en rose, composées le plus souvent de cinq pétales charnus, disposés en rond et réfléchis, parsemés de rouge en-dehors, blancs dans tout le reste ; soutenus par un petit calice verd, découpé en cinq quartiers, renfermant beaucoup de filets d'étamines blanchâtres, et surmontés d'un sommet jaune. Ces fleurs ont une odeur faible, et sont d'abord douçâtres, ensuite amères : les unes sont fertiles, ayant au milieu des étamines un pistil longuet, qui est l'embryon du fruit ; et les autres sont stériles, étant sans pistils : celles-ci tombent bientôt, et les autres subsistent.

Ses fruits sont souvent oblongs, quelquefois sphériques, d'autrefois pointus à leur sommet, quelquefois mousses ; leur superficie est ridée et parsemée de tubercules : souvent ils ont neuf pouces de longueur, et quelquefois davantage ; car ils varient en grandeur et en pesanteur. Quelques-uns pesent jusqu'à six liv.

Leur écorce extérieure est comme du cuir, mince, amère, échauffante, verte dans le commencement, de couleur d'or dans la maturité, d'une odeur pénétrante. Leur écorce intérieure ou la chair, est épaisse et comme cartilagineuse, ferme, blanche, douçâtre, un peu acide, et légèrement odorante, partagée intérieurement en plusieurs loges pleines d'un suc acide contenu dans des vésicules membraneuses.

Enfin chaque fruit contient beaucoup de graines. Quelques-uns en ont plus de cent cinquante, renfermées dans la moelle vésiculaire. Elles sont oblongues, d'un demi-pouce de longueur, ordinairement pointues des deux côtés, couvertes d'une peau un peu dure et membraneuse, amère, jaune en-dehors, cannelée, et renfermant une amande blanche, mêlée d'amertume et de douceur.

Son origine. Le citronnier, comme le prouvent ses noms latins, a été d'abord apporté de l'Assyrie et de la Médie en Grèce, de-là en Italie et dans les provinces méridionales de l'Europe. On le cultive en Sicile, en Portugal, en Espagne, en Piémont, en Provence, et même dans quelques jardins du nord, où il donne des fruits, mais bien inférieurs à ceux des climats chauds. On cultive encore cet arbre à la Chine, aux Indes orientales et occidentales, et en Amérique, au rapport du chevalier Hans-Sloane. Voyag. à la Jam. tom. II. pag. 176.

Ses espèces. Les Botanistes en distinguent une dixaine d'espèces principales, quoiqu'ils n'ignorent pas que les jardiniers de Genèse qui en est la grande pepinière pour l'Europe, sont si curieux d'étendre cette variété, qu'ils l'augmentent tous les jours.

L'espèce de citronnier la plus estimée est celle de Florence, dont chaque citron se vend à Florence même cinquante sous de notre monnaie : on en envoye en présent dans les différentes cours de l'Europe. Cette espèce particulière ne peut venir dans sa perfection que dans la plaine qui est entre Pise et Livourne ; et quoiqu'on ait transporté ces sortes de citronniers du lieu même en divers autres endroits choisis d'Italie, ils perdent toujours infiniment de cet aromate, de cette finesse de goût que leur donne le terroir de cette plaine.

Son usage chez les Romains. On ne mangeait point encore de citron du temps de Pline ; et Plutarque rapporte qu'il n'y avait pas longtemps qu'on en faisait usage en qualité d'aliment lorsqu'il vint au monde. Au rapport d'Athenée, on regardait alors les citrons comme une chose d'un très-grand prix ; on en enfermait avec des hardes pour les garantir des teignes, et leur donner en même temps une odeur agréable : c'est de-là sans-doute que vient le nom de vestis citrosa. On mangeait le citron du temps de Galien, et Apicius nous a conservé la manière dont on l'accommodait.

Comme le citronnier est ensuite par-tout devenu très-commun, on trouve dans les ouvrages des modernes un nombre immense d'observations sur les vertus de cet arbre et de son fruit, dont plusieurs parties sont d'usage en Médecine. Voyez CITRON. (Chimie).

Il y a des citrons qui sont en même temps oranges, c'est-à-dire que certain nombre de côtes ou plutôt de coins solides, continués jusqu'à l'axe du fruit, sont d'orange, et les autres de citron : ce nombre de côtes est non-seulement différent, mais quelquefois différemment mêlé en différents fruits. Est-ce un effet de l'art, ou sont-ce des espèces particulières ? (Histoire de l'acad. des Sc. 1711. et 1712.) Si c'est un effet de l'art, serait-ce par des poussières appliquées à des pistils étrangers que cette merveille arrive ? On pourrait le soupçonner sur des exemples approchants qui s'en trouvent chez quelques animaux, si l'analogie du règne animal au végétal était recevable en Physique. Ce serait bien-là une manière élégante d'avoir de nouvelles espèces de fruit ; mais il faut attendre les expériences avant que de prononcer.

Il est parlé dans les éphémerides d'Allemagne (Ephem. N. C. dec. 1. ann. 9. obs. 3. dec. 2. ann. 2. obs. 11.) de citrons monstrueux en forme de main ; et le P. Dentrecolles (Lett. édifiant. tome XX. page 301.) a envoyé de la Chine la figure d'un citron nommé main de Dieu par les Chinois, et dont ils font grand cas pour sa beauté et pour son odeur. Ce fruit est tel par sa forme, qu'on croit voir les doigts d'une main qui se ferme ; et sa rareté a engagé les ouvriers chinois à imiter ce fruit avec la moèlle du tong-stao, qu'ils tiennent en raison par divers fils de fer qui figurent les doigts. Le citron des curieux d'Allemagne venait-il des semences de celui de la Chine, ou sa forme venait-elle de causes particulières qui avaient changé son espèce ?

Voici une autre singularité, ou plutôt monstruosité bien plus étrange, dont parlent quelques auteurs. C'est d'un citron qui nait enfermé dans un autre, citrum in citro : mais d'abord il faudrait l'avoir Ve ; et peut-être quand on l'aurait vu, en abandonner l'explication : car il ne s'agit pas dans le fait d'un fruit double ou gemeau, et qui se forme accouplé, lorsque deux boutons naissent d'une même queue si près l'un de l'autre, que les chairs se confondent à cause de leur trop grande proximité. C'est ici, dit-on, un citron qui sort du centre de l'autre, ou plutôt c'est ici peut-être un fait mal Ve et mal rapporté. Ceux qui en donnent l'explication par l'abondance de la seve, n'expliquent point le phénomène, parce qu'on ne comprend pas que la force et la fécondité de la seve produisent de soi un citron contenu dans un autre, sans l'entremise de sa queue, de sa fleur, et de tous les organes dans lesquels la matière de la production ordinaire du fruit est préparée.

Du bois de citronnier des anciens. Il me reste à parler du bois de citronnier des anciens, qui était très-rare et très-estimé à Rome. Il fallait être extrêmement riche et magnifique pour en avoir seulement des lits, des portes, ou des tables ; c'est pourquoi Pline a écrit : on emploie rarement le bois de cet arbre pour les meubles, même des plus grands seigneurs. Cicéron en avait une table, qui avait couté deux mille écus. Asinius Pollio en avait acheté une trente mille livres, et il y en avait de plus de quarante mille écus ; ce qui faisait cette différence de prix, c'était ou la grandeur des tables, ou la beauté des ondes et des nœuds. Les plus estimées étaient d'un seul nœud de racine.

La promesse qu'Horace fait à Vénus de la part de Maximus, lib. IV. od. j.

Albanos prope te lacus

Ponet marmoream sub trabe citrea ;

" il vous dressera une statue de marbre dans un temple de bois de citronnier près du lac d'Albe " : cette promesse, dis-je, n'est pas peu considérable : car un temple boisé de citronnier devait être d'une prodigieuse dépense. Ce temple de Vénus n'aurait pourtant pas été le premier où l'on aurait employé de ce bois : on n'a qu'à lire pour s'en convaincre Théophraste, l. V. ch. Ve et Pline, l. XII. ch. XVIe

Nous voyons par ce détail que je dois au P. Sanadon, qu'il ne s'agit pas ici du bois de notre citronnier ; mais nous ignorons quel arbre était le citrea d'Horace, nous ne le connaissons plus.

Il est parlé dans l'Ecriture du bois almugim (III. liv. des Rais, ch. Xe Ve xj.), qui a aussi exercé tous les savants ; les uns prétendent que c'est le sabinier, d'autres l'acacia, et d'autres enfin entendent par almugim, des bois gras et gommeux : mais puisque c'était un bois rare que la flotte d'Hiram apporta d'Ophir, et qu'on n'avait jamais Ve jusqu'à ce jour-là, l'opinion la plus vraisemblable est que c'était du bois de thuya, comme l'a traduit la vulgate, c'est-à-dire du bois de cedre d'Afrique ; parce que suivant toute apparence, le pays d'Ophir était la côte de Sophala en Afrique. Ainsi peut-être que le bois almugim ou le cedre d'Afrique, pourrait bien être le bois de citre d'Horace, si rare, si recherché par sa bonne odeur, ses belles veines et sa durée.

Auteurs anciens. Les littérateurs peuvent consulter ici Dioscor. liv. I. c. cxxxj. Théophr. hist. plant. liv. IV. ch. IVe Athenée, liv. III. ch. VIIe VIIIe Pall. R. R. liv. IV. tit. Xe liv. VIII. tit. IIIe Plin. XII. IIIe XV. XIVe xxviij. XVI. xxvj. XVII. Xe XVIII. VIe Geop. liv. X. c. VIIe VIIIe IXe Macrob. II. saturn. XVe Paulus, lib. I. c. VIIIe l. VII. c. IIIe Ve Solin. c. xlvj. salmasii exercit. Plin. 666. Apicius, l. I. c. xxj.

Auteurs modernes. Et parmi les modernes, Commelinus, (Joh.) in Hesperidibus Belgicis. August. Vindel. 1676. fol. en hollandais.

Ferrarius, (Joh. Bapt.) Hesperides. Romae, 1646. fol. cum fig. belle impression, figures encore plus belles, ouvrage excellent, édition originale.

Geoffroi, Mat. méd. tom. VI. très-bon.

Grube, (Herman) analysis mali citrei. Hafniae, 1668. in -8°. Ham. 1674. in -4°. compilation des plus médiocres.

Jovianus, (Joh.) horti Hesperidum, lib. II. Basileae, 1538. in -8°.

Lanzonus, (Joseph.) citrologia Ferrariae, 1690. in -12. Ce petit traité se retrouve dans le recueil de ses ouvrages.

Nati, (Petri) observatio de malo limonia citratâ aurantiâ, vulgò la bisarria dicta. Florent. 1674. in -4°. figur.

Steerbeek, (Franc.) citri cultura. Antuerp. 1682. in -4°. en flamand, avec de belles figures.

Wolchammer, (Jos. Christop.) Hesperidum morib. lib. IV. Noriberg. 1713. in-fol. C'est ici la traduction latine de l'ouvrage de cet auteur, qui fut d'abord publié en allemand, et imprimé à Nuremb. en 1708. in-fol. bon.

On peut consulter Hoffman (Frider.) dans ses ouvrages sur l'utilité du citron en santé et en maladie.

Ferrari, entr'autres bonnes choses, a traité avec beaucoup d'érudition et de connaissances, de la culture du citronnier, qui intéresse la Botanique pratique. Cette culture demande à-peu-près les mêmes soins et la même méthode que celle de l'oranger, comme le remarque Miller. Voyez ORANGER.

Nebelius a donné l'anatomie du citron ; et Seba, le squelete de la feuille de l'arbre. Ther. t. I. pl. 4. D'un autre côté M. Geoffroi, maître dans son art, a enseigné le procédé de tirer le sel essentiel du citron, en faisant évaporer le suc jusqu'à consistance de sirop clair. Il a aussi trouvé une troisième manière de tirer l'huîle essentielle du citron, qu'il met au-dessus des deux méthodes dont nous avons parlé. Voyez les mém. de l'acad. des Scienc. ann. 1721. et 1738. Article de M(D.J.)

CITRON, s. m. (Chim. Diete. Mat. méd. Pharmac.) la pulpe ou la chair et le suc du citron, ses pepins et son écorce, fournissent différents remèdes à la Médecine.

Le suc de citron doit être rapporté à la classe des substances végétales, muqueuses, et au genre de ces substances qui contiennent un excès d'acide qui les rend peu propres à subir la fermentation vineuse lorsqu'on les y expose sans mélange, mais qui peuvent servir très-utilement à corriger des substances de la même classe, qui pechent au contraire relativement à l'aptitude à la fermentation vineuse par un défaut d'acide : le suc de citron est même un extrême dans cette espèce. Voyez MUQUEUX, VIN, MOTHECNIECNIE.

Le suc de citron est employé à titre d'acide et comme précipitant dans certaines teintures ; par exemple, dans celle qui est faite avec le safranum, dont la partie colorante est extraite par un alkali fixe. Le suc de citron sert encore dans le même art à aviver ou exalter certaines couleurs. Voyez TEINTURE.

Ce suc a des usages plus étendus à titre d'aliment et de médicament ; il fournit un assaisonnement salutaire et fort agréable, que les Allemands surtout emploient dans presque tous leurs mets, soit exprimé, soit plus ordinairement avec la pulpe qui le contient, et même avec l'écorce, et dont l'emploi est beaucoup plus rare dans notre cuisine.

C'est avec le suc de ce fruit étendu dans une suffisante quantité d'eau, et édulcoré avec le suc, qu'on prépare cette boisson si connue sous le nom de limonade, qui est sans contredit de toutes les boissons agréables celle qui peut être regardée comme le plus généralement salutaire. Voyez LIMONADE.

Le suc de citron est rafraichissant, diurétique, stomachique, antiputride, antiphlogistique, regardé comme très-propre à préserver des maladies contagieuses ; quoiqu'il faille avouer qu'à ce dernier titre il est moins recommandé que le citron entier, qui est censé opérer par son parfum. L'utilité médicinale la plus évidente du suc de citron consiste à prévenir les inconvénients de la chaleur extérieure dépendante des climats ou des saisons. Les habitants des pays très-chauds retirent de son usage des avantages constants, qui fournissent une observation non équivoque en faveur de cette propriété : celle de calmer efficacement les fièvres inflammatoires et putrides, n'est pas si constatée à beaucoup près. Voyez FIEVRE.

Le scorbut appelé scorbut de mer, est guéri très-promtement par l'usage des citrons : toutes les relations de voyages de long cours donnent pour un fait constant la guérison prompte et infaillible des matelots attaqués de cette maladie, même au dernier degré ; dès qu'ils peuvent toucher à un pays où ils trouvent abondamment des citrons, ou autres fruits acides de ce genre, comme oranges, etc. Mais jusqu'à quel point cet aliment médicamenteux opere-t-il dans cette guérison ? Ne pourrait-on pas l'attribuer à plus juste titre aux viandes fraiches, et à toutes les autres commodités que ces malades trouvent à terre, à l'air de terre, et ses exhalaisons même, selon la prétention de quelques observateurs ? Tout cela ne parait pas assez décidé. Voyez SCORBUT.

Les Apothicaires gardent ordinairement du suc de citron dans les provinces où ils ne peuvent pas avoir commodément des citrons dans tous les temps de l'année. Ce suc se conserve fort bien sous l'huile, étant tenu dans un lieu frais : il subit pourtant une légère fermentation qui le dépure et le rend très-clair, mais qui altère un peu son goût ; ce qui est évident par l'impossibilité de préparer avec ce suc ainsi dépuré, une limonade aussi agréable que celle qu'on prépare avec le suc de citron récemment exprimé.

C'est avec le suc de citron dépuré qu'on prépare le syrop appelé syrop de limon ; car on ne distingue pas le citron du limon dans les usages pharmaceutiques ; on se sert même plus ordinairement du premier, parce qu'il est plus commun.

Pour faire le syrop de limon, on prend une partie du suc de citron dépuré par le leger mouvement de fermentation dont nous venons de parler, et deux parties de beau sucre blanc qu'on fait fondre dans ce suc, à l'aide d'une chaleur légère, au bain-marie, par exemple, dans un vaisseau de fayance ou de porcelaine, N. B. 1°. qu'on peut employer un peu moins de sucre, parce que la consistance exactement syrupeuse n'est pas nécessaire pour la conservation des sucs acides des fruits, et que cette moindre dose fournit la commodité de faire fondre plus aisément le sucre sans le secours de la chaleur ; avantage qui n'est pas à négliger pour la perfection du syrop : 2°. qu'on gagnerait encore du côté de cette perfection, pour ne perdre que du côté de l'élégance de la préparation, si l'on employait du suc non dépuré et récemment exprimé, au lieu du suc dépuré qui ne peut être récent.

Les médecins allemands et les médecins anglais emploient assez communément l'acide du citron combiné avec différentes matières alkalines : les yeux d'écrevisses citrés, les alkalis fixes saoulés de suc de citron, sont des préparations de cette espèce. Mais nous ne connaissons par aucune observation suffisante les vertus particulières de ces sels neutres, qui ne sont d'aucun usage dans la médecine française : le premier parait fort analogue au sel de corail, quoiqu'il ne faille pas absolument confondre l'acide végétal fermenté avec l'acide végétal naturel ; et le second a précisément le degré d'analogie avec la terre foliée de tartre.

Le médecin, en prescrivant le suc ou le syrop de citron dans les mélanges, ne doit pas perdre de vue sa qualité acide, qui le rend propre à se combiner avec les matières alkalines, soit terreuses, soit salines, et à coaguler le lait et les émulsions ; il doit se souvenir encore que les chaux d'antimoine, l'antimoine diaphorétique lui-même, sont rendus émétiques par l'addition des acides végétaux.

Meuder recommande, dans son traité des teintures antimoniales, celle de ces teintures qu'il appelle vraies, qu'on peut tirer de ce demi-métal par le moyen des acides végétaux, et particulièrement celle qu'on prépare avec le suc de citron. Voyez ANTIMOINE.

L'écorce jaune de citron a un goût amer, vif et piquant, dépendant principalement de la grande quantité d'huîle essentielle qu'elle contient dans de petites vésicules très-sensibles, et en partie aussi d'une matière extractive soluble par l'eau. Cette écorce, soit fraiche, soit séchée ou confite, est cordiale, stomachique, antihystérique, carminative, vermifuge, etc. on en fait un syrop connu dans les boutiques sous le nom de syrupus flavedinum citrei. En voici la préparation.

Prenez des zestes de citron ou de limon, cinq onces ; de l'eau bouillante, une livre : faites macérer pendant douze heures au bain-marie dans un vaisseau fermé, et ajoutez à la colature le double de sucre fin, sur lequel on prendra environ une once pour en faire un eleosaccharum avec l'huîle essentielle de citron ; eleosaccharum qu'on fera fondre au bain-marie avec le reste du sucre, et votre syrop sera fait.

Ce syrop ne participe que bien faiblement de la vertu de l'écorce jaune de citron.

On tire l'huîle essentielle de citron par des procédés fort simples, et par-là même fort ingénieux. Voyez HUILE ESSENTIELLE.

L'huîle essentielle de citron possède éminemment les vertus que nous avons attribuées à son écorce. La plupart de ces propriétés sont communes à toutes les huiles essentielles ; mais celle-ci par la douceur et le gracieux de son parfum, fournit à la Pharmacie une matière très-propre à aromatiser certains médicaments. On l'emploie dans cette dernière vue sous la forme d'un eleosaccharum. Voyez ELEOSACCHARUM.

Boerhaave dit qu'on emploie avec beaucoup de succès l'huîle des écorces de citron dans les palpitations du cœur, qui dépendent d'une humeur aqueuse, froide, et d'un muqueux inactif, ab aquoso frigido, et inerti mucoso ; causes qui figurent on ne peut pas mieux, pour l'observer en passant, avec le visqueux, ou l'alkali spontané, l'acrimonie mécanique, etc. Le même auteur célèbre beaucoup aussi l'eau retirée par la cohobation des écorces de citron, contre les vents, les syncopes, les langueurs, et les mouvements irréguliers du cœur.

On tire aussi des zestes de citron, par le moyen de la distillation, une eau simple et une eau spiritueuse, comme sous le nom d'esprit de citron. Voyez EAU DISTILLEE ; voyez aussi ESPRIT.

Cette eau aromatique spiritueuse, si connue sous le nom d'eau sans pareille, n'est autre chose que de l'esprit-de-vin chargé d'une petite quantité d'huîle essentielle de citron, que l'on dissout goutte à goutte et en tâtonnant, jusqu'à ce qu'on ait atteint au degré de parfum le plus agréable.

L'autre partie de l'écorce de citron, qui est connue sous le nom d'écorce blanche, passe pour vermifuge et lithontriptique ; mais l'on peut douter de ces deux propriétés, surtout de la dernière.

Voici ce qu'on trouve sur les graines de citron, dans la matière médicinale de M. Geoffroi. " On croit que les graines de citron sont alexipharmaques : on les emploie dans quelques confections alexitaires : elles font mourir les vers de l'estomac et des intestins ; elles excitent les règles, dissipent les vents, atténuent et divisent les humeurs visqueuses. On en fait des émulsions vermifuges et cordiales, dans les maladies d'un mauvais caractère et pestilentielles ".

On fait entrer ordinairement le citron entier coupé par tranches dans les infusions purgatives, connues dans les boutiques sous le nom de tisanes royales. Voyez PURGATIF.

" On vante beaucoup, dit M. Geoffroi, les citrons dans la peste et les maladies contagieuses, pour détourner la contagion ; on porte continuellement dans ses mains un citron seul, ou percé de clous de girofle ; on le flaire et on le mord de temps en temps : mais il faut avouer, ajoute cet auteur, qu'on ne détourne pas tant la contagion par ce moyen, qu'on apaise les nausées et les envies de vomir qui viennent des mauvaises exhalaisons des malades, ou de l'imagination qui est blessée ; ce qui affoiblit l'estomac et corrompt la digestion ".

Les différentes confitures de citron, telles que les petits citrons entiers, les zestes et l'écorce entière, sont d'assez bons analeptiques, ou des aliments legers, stomachiques et cordiaux, que l'on peut donner avec succès aux convalescens et aux personnes qui ont l'estomac faible, languissant, et en même-temps peu sensible. Il faut observer pourtant que cette écorce de citron verte, très-épaisse, qu'on nous apporte toute confite de nos iles, doit être regardée non-seulement comme possédant à un degré très-inférieur les qualités que nous venons d'attribuer aux autres confitures de citron, qui sont plus aromatiques que celles-ci, mais même comme fort indigeste, au moins pour les estomacs faibles.

On trouve dans les boutiques des Apothicaires un électuaire solide, connu sous le nom d'électuaire ou de tablettes purgatives de citron. Voici comme elles sont décrites dans la pharmacopée de Paris.

Prenez écorce de citron confite, conserve de fleurs de violette, de buglose, de chaque demi-once ; de la poudre diatragaganthe froide nouvellement préparée, de la scammonée choisie, de chaque demi-once ; du turbith, cinq gros ; du gingembre, un demi-gros ; des feuilles de sené, six gros ; de la rhubarbe choisie, deux gros et demi ; des girofles, du santal citrin, de chaque un scrupule : faites du tout une poudre selon l'art ; après quoi vous ferez cuire dans de l'eau de roses dix onces de beau sucre en consistance requise pour former avec les conserves et la poudre, des tablettes que l'on conservera dans un lieu sec, parce qu'elles sont sujettes à attirer l'humidité de l'air, et semoisir.

Ces tablettes purgent assez bien à la dose d'une demi-once ; on peut même en donner six gros aux personnes robustes. Mais l'usage de ce purgatif a été abandonné, apparemment parce qu'il est fort dégoutant, comme toute préparation pharmaceutique qui contient beaucoup de poudre, et qu'on ne peut faire prendre que délayée dans de l'eau ; mais on devrait au moins le prescrire aux personnes à qui leur fortune ne permet pas d'être si difficiles ; car ce remède coute très-peu, il purge très-bien, et avec aussi peu de danger que les médecines magistrales un peu actives.

Le citron entier, son écorce jaune, son suc, sa pulpe, ses graines, son eau distillée, son esprit, etc. entrent dans un grand nombre de préparations pharmaceutiques officinales. (b)