fraxinus, s. m. (Histoire naturelle, Botanique) genre de plantes à fleurs sans pétales, dont les étamines ont ordinairement deux sommets, du milieu desquelles il sort souvent un pistil qui devient dans la suite un fruit en forme de langue : ce fruit est plat, membraneux, et renferme une semence qui est à-peu-près de la même figure. Il y a des espèces de frênes, dont les fleurs ont des pétales ; mais comme elles sont stériles, on ne les a pas distinguées de celles qui n'ont point de pétales. Tournefort, inst. rei herb. Voyez PLANTE. (L)

FRENE, fraxinus, (Histoire naturelle, Botanique) autre genre de plante à fleur en rose, composée de quatre ou cinq pétales très-étroits, très-allongés, disposés en rond, et soutenus par le calice. Toutes les plantes de ce genre ne portent pas des embryons : mais lorsqu'il s'y en trouve, ils sortent des calices, et deviennent dans la suite des fruits qui ressemblent presque en tout à ceux du frêne appelé ornus. Nova plant. american. gen. par M. Micheli. (I)

FRENE, grand arbre qui croit naturellement dans les forêts des climats tempérés ; il fait une très-belle tige, qui s'élève à une grande hauteur, qui est presque toujours très-droite, et qui grossit avec beaucoup de proportion et d'uniformité. On voit ordinairement le tronc du frêne s'élever sans aucunes branches à plus de hauteur que les autres arbres. Sa tête est petite, peu garnie de rameaux, qui ne s'étendent que lorsque l'arbre a passé la force de son accroissement. Son écorce, d'une couleur de cendre verdâtre, est longtemps très-unie ; et ce n'est que dans un âge fort avancé qu'il s'y fait des gersures. Ses feuilles sont au nombre de quatre ou cinq paires, quelquefois six, et même jusqu'à huit sur une même côte, qui est terminée par une seule feuille : elles sont lisses, légèrement dentelées, d'un verd très-brun, et elles font peu d'ombre. Cet arbre donne au mois de Mai des bouquets de fleurs, qui sont bruns, petits, courts, ramassés : ce sont des étamines, qui n'ont qu'une apparence de mousse. Les graines qu'il produit en grappe sont environnées d'une membrane fort mince, longue d'un pouce et demi, mais fort étroite : on compare la forme de ce fruit à celle d'une langue d'oiseau ; il n'est mûr que sur la fin du mois d'Octobre, qu'il commence à tomber ; mais il en reste sur quelques arbres jusqu'après l'hiver.

On met cet arbre au nombre de ceux qui tiennent le premier rang parmi les arbres des forêts, dont il égale les plus considérables par son volume : mais relativement à l'utilité, il ne peut entrer en comparaison avec le chêne, le châtaigner, et l'orme, qui l'emportent à cet égard. Il est vrai que l'accroissement du frêne est plus prompt que celui de ces arbres, mais il est plus lent à grossir ; et il lui faut pour cela un sol bien favorable ; ce qui ne se rencontre que rarement.

Le terrain qui convient le mieux à cet arbre, est une terre légère et limoneuse, mêlée de sable, et traversée par des eaux courantes. Il peut croitre dans la plupart des situations, depuis le fond des vallées jusqu'au sommet des montagnes, pourvu qu'il y ait de l'humidité et de l'écoulement ; il se plait surtout dans les gorges sombres des collines exposées au nord : on le voit pourtant réussir quelquefois dans la glaise, dans la marne, si le sol a de la pente ; et dans les terres caillouteuses et graveleuses, même dans les joints des rochers, si dans tous ces cas il y a de l'humidité. Cet arbre se contente de peu de profondeur, parce que ses racines cherchent à s'étendre à fleur-de-terre ; mais il craint les terres fortes et la glaise dure et seche : il se refuse absolument aux terrains secs, legers, sablonneux, superficiels, et trop pauvres, surtout dans les coteaux exposés au midi. J'en ai Ve planter une grande quantité de tout âge dans ces différents sols, sans qu'aucun y ait réussi.

Il n'est pas aisé de multiplier cet arbre pour de grandes plantations, quoiqu'il y ait deux moyens d'y parvenir ; l'un en semant ses graines, qui ne lèvent que la seconde année ; l'autre, en se servant de jeunes plants que l'on peut trouver dans les forêts. Dans ces deux cas, la propagation en grand n'est nullement facile, parce qu'il faut employer la transplantation ; expédient très-couteux et peu sur pour peupler de grands cantons. La nécessité de transplanter, même les plants que l'on aura fait venir de semence dans les pepinières, vient de ce qu'il est très-rare que l'on puisse semer les graines sur la place que l'on destine à mettre en bois, par la raison que les terrains qui conviennent au frêne sont ordinairement pierreux, aquatiques, inégaux, et presque toujours impraticables aux instruments de la culture.

Pour faire venir le frêne de semence, il faut en cueillir la graine lorsqu'elle commence à tomber, sur la fin d'Octobre, ou dans le mois suivant : on peut même en trouver encore pendant tout l'hiver sur quelques arbres qui conservent leurs graines jusqu'aux premières chaleurs du printemps. Si on les seme de très-bonne heure en automne, il en pourra lever quelque peu dès le printemps suivant ; mais il ne faut s'attendre à les voir lever complete ment, qu'au printemps de l'autre année. Si l'on voulait s'épargner d'occuper inutilement son terrain pendant cette première année, on trouvera l'équivalent, en conservant dans des manequins les graines mêlées de terre, ou de sable pour le mieux, pendant un an dans un lieu frais, abrité et point trop renfermé : cette précaution disposera les graines à germer, comme si elles avaient été mises en pleine terre ; et en les semant un an après au printemps, elles leveront au bout d'un mois ou six semaines : il faut pour cela une terre meuble, préparée comme celle d'un potager, et arrangée en planches. On peut se contenter de semer la graine sur la surface de la terre, et y passer le rateau ; mais le mieux sera de les mettre dans des rayons d'un pouce ou un pouce et demi de profondeur, pour faciliter la sarclure, qui leur sera très-nécessaire la première année, durant laquelle les semis ne s'éleveront guère qu'à 5 ou 6 pouces.

Les jeunes plants âgés de deux ans seront propres à être transplantés, soit en pepinière, soit dans les places que l'on se proposera de mettre en bois de cette nature ; c'est même à cet âge qu'ils conviennent le mieux pour cet objet. Il faudra peu de travail pour les planter ; et ils réussiront sans aucun soin, si le terrain leur est favorable : au lieu que s'ils étaient plus âgés, et par conséquent plus grands et plus enracinés, il faudrait plus de travail ; et leur reprise ne serait pas si assurée. Si au contraire le terrain leur était peu convenable, ils ne s'y soutiendront qu'à l'aide d'une culture fort assidue, trop dispendieuse, et dont le succès sera encore très-incertain. Sait que les plants que l'on mettra en pepinière proviennent d'un semis de deux ans, ou qu'ils aient été tirés des bois, ils profiteront également, et ils s'éleveront en quatre ans à huit ou dix pieds ; ils seront alors en état d'être transplantés à leur destination, qui est ordinairement d'en border les ruisseaux, d'en garnir les haies, et d'en faire des lisières autour des héritages, dans les terrains aquatiques, ou même dans les terrains qui ont seulement de la fraicheur : cet arbre s'y soutiendra, si on le tond tous les trois ou quatre ans, comme cela se pratique pour la nourriture du bétail. Encore une observation qui est importante sur la transplantation de cet arbre, c'est de ne point étêter : il se redresse rarement, lorsqu'on retranche la maîtresse tige ; et il perce difficilement de nouveaux rejetons quand on a supprimé les boutons de la cime. Il faut seulement se contenter d'ôter les branches latérales.

Le frêne est surtout estimé par rapport à son bois, qui sert à beaucoup d'usages : quoique blanc, il est assez dur, fort uni, et très-liant, tant qu'il conserve un peu de seve : aussi est-il employé par préférence pour les pièces de charronage qui doivent avoir du ressort et de la courbure ; les Tourneurs et les Armuriers en font également usage. Mais une autre grande partie de service que l'on en tire, c'est qu'il est excellent à faire des cercles pour les cuves, les tonneaux, et autres vaisseaux de cette espèce. Le bois des frênes venus dans des terrains de montagnes, ou qui ont été habituellement tondus, sont sujets à être chargés de gros nœuds ou protubérances, qui en dérangeant l'ordre des fibres, occasionnent une plus grande dureté, et une diversité de couleur dans les veines du bois ; ce qui fait que ces sortes d'arbres sont recherchés par les ébénistes. Mais quoiqu'il se trouve des frênes d'assez gros volume pour servir à la charpente, on l'applique rarement à cet usage, parce que ce bois est sujet à être picqué des vers, quand il a perdu toute sa seve. Le bois du frêne a plus de résistance et plie plus aisément que celui de l'orme : on y distingue le cœur et l'aubier, comme dans le chêne ; et lorsqu'il est verd, il brule mieux qu'aucun autre bois nouvellement coupé.

Quand cet arbre est dans sa force, on peut l'élaguer ou l'étêter, sans que cela lui fasse grand tort, à-moins qu'il ne soit trop gros : par ce moyen, on en tirera tous les trois ou quatre ans des perches, des échalas, du cerceau, ou tout au moins du fagotage. Le dégouttement du frêne endommage tous les végétaux qui en sont atteints ; c'est ce qui a fait dire que son ombre était dangereuse : il n'en est pas de même à son égard ; il ne craint d'être surmonté par aucune autre espèce d'arbre ; leur égoût ne lui fait aucun préjudice. Aussi le frêne réussit-il à l'ombre et dans les lieux serrés, où on peut s'en servir pour remplacer les autres arbres qui refusent d'y venir. Son feuillage est excellent pour la nourriture des bœufs, des chèvres, des bêtes à laine : tous ces animaux en sont très-friands pendant l'hiver. Il faut pour cela couper les rameaux de cet arbre, à la fin du mois d'Aout ou au commencement de Septembre, et les laisser sécher à l'ombre. On pourrait employer le frêne, à plusieurs égards, pour l'ornement des jardins ; il fait ordinairement une belle tige et une tête régulière : son feuillage leger, qui est d'un verd brun et luisant, contrasterait agréablement avec la verdure des autres arbres ; mais il est sujet à un si grand inconvénient, qu'on est obligé de l'écarter de tous les lieux d'agrément : les mouches cantharides qui s'engendrent particulièrement sur cet arbre, le dépouillent presque tous les ans de sa verdure dans la plus belle saison, et causent une puanteur insupportable.

On prétend que les feuilles, le bois, et suc du frêne ont quantité de propriétés pour la Médecine. Voyez le P. Schot, jésuite, qui les a rapportées fort en détail dans son livre intitulé, joco-seria naturae et artis.

Voici les espèces de frêne les plus connues jusqu'à-présent.

Le frêne de la grande espèce. C'est celle qui croit communément en France, et à laquelle on peut le mieux appliquer ce qui vient d'être dit en général.

Le frêne de la grande espèce, à feuilles panachées de jaune. C'est une variété qui n'a de mérite que pour les curieux en ce genre : il est vrai qu'elle est d'une belle apparence. On peut la multiplier par la greffe sur l'espèce commune.

Le frêne à feuilles rondes. Cette espèce croit en Italie, mais elle est encore très-peu connue en France. On croit que c'est sur cet arbre que l'on recueille la manne qui nous vient de Calabre.

Le frêne nain, ou le frêne de Montpellier. Les feuilles de cet arbre sont plus courtes et plus étroites que dans toutes les autres espèces de frêne : il se garnit de beaucoup de rameaux, et prend très-peu de hauteur.

Le frêne à fleurs. Cet arbre est originaire d'Italie ; il croit plus lentement que notre frêne commun, et s'élève beaucoup moins ; sa feuille est aussi plus petite à tous égards, son bois plus menu, et l'arbre se garnit d'un plus grand nombre de rameaux. Il donne au mois de Mai des grappes de fleurs aussi grosses que les bouquets du lilas, et qui, quoique d'un blanc un peu jaunâtre, sont d'une assez belle apparence ; elles rendent même une odeur qui de-loin n'est point desagréable : ses graines, qui sont plus larges que celles de l'espèce commune, lèvent dès la première année, quand on a eu soin de les semer de bonne heure en automne. Cet arbre est de tous les différents frênes celui que l'on doit le plus employer dans les jardins d'agrément, tant par rapport à ses fleurs, que parce qu'on peut lui former une jolie tête, et qu'il s'accommode de tous les terrains ; et il a de plus l'avantage de n'être pas sujet à être endommagé par les mouches cantharides, à-moins qu'il ne se trouve mêlé avec d'autres espèces de frêne.

Le frêne à feuilles de noyer. Cet arbre a le bois plus gros et les feuilles plus grandes que toutes les autres espèces de son genre ; elles sont d'un verd assez tendre ; elles ont au premier aspect quelque ressemblance avec celles du noyer ; mais elles ont une odeur forte et desagréable, quand on les presse entre les doigts.

Le frêne de la Nouvelle-Angleterre. C'est un joli arbre, qui ne s'élève guère qu'à vingt-cinq pieds : son écorce, quand il est dans sa force, est remplie de gersures d'une couleur jaunâtre, qui la font ressembler à celle de l'orme. Sa feuille n'est composée que de trois ou quatre paires de petites feuilles qui sont plus éloignées entr'elles, et qui sont terminées par une pointe plus allongée que dans les autres espèces de frêne. Cet arbre et le précédent veulent absolument un terrain bas et humide ; ils ne font aucun progrès dans les lieux secs et élevés, quoiqu'il y ait de la profondeur et un bon sol. Il y a plusieurs plants de cet arbre dans la pepinière de la province de Bourgogne, établie à Montbard, qui n'ont point encore produit de graine, quoiqu'ils soient âgés de quinze ans, et qu'ils aient environ vingt pieds de hauteur.

Le frêne blanc d'Amérique. C'est une nouvelle espèce, qui est venue de graines envoyées d'Angleterre, et qui provenaient d'Amérique. La couleur de son écorce est d'un gris cendré ; et sa feuille a beaucoup de ressemblance avec celle du précédent, si ce n'est qu'elle est blanche et lanugineuse en-dessous, et qu'elle est unie sur ces bords sans aucune dentelure ; caractère particulier, qui distingue essentiellement cet arbre de toutes les autres espèces de frênes que l'on vient de rapporter ici.

Toutes ces différentes sortes de frênes sont si robustes, qu'ils ne sont jamais endommagés par le froid des plus grands hivers de ce climat : comme la plupart ne produisent point encore de graine en France, on ne peut guère les multiplier que par la greffe, qui réussit très-bien sur le frêne commun. (c)

FRENE, (Pharmac. Met. medic.) son écorce, ses feuilles, et ses graines contiennent un sel alumineux, tartareux, de saveur austère, acre et amère : le sel qu'on tire de son écorce est un alkali fixe, actif et corrosif. Le sel tartareux, acre et amer que les graines contiennent, est plus huileux et plus actif que celui de son écorce. M. Tournefort trouve que le sel essentiel du frêne est presque semblable à l'oxisal diaphorétique d'Ange-Sala, uni avec beaucoup de terre et de soufre. La décoction ou l'infusion de son écorce, noircit la solution du vitriol, de même que la noix de galle.

On ordonne rarement ou jamais les feuilles de frêne : l'écorce de cet arbre a les propriétés de la noix de galle ; elle est atténuante, sudorifique, et dessicative ; le sel tiré des cendres de cette écorce excite puissamment les urines ; mais c'est une propriété qui lui est commune avec les autres sels alkalis.

La graine de frêne est appelée dans les boutiques ornithoglossum, ou lingua avis, parce qu'elle a en quelque manière la figure d'une langue d'oiseau : c'est une graine extrêmement acre ; elle donne dans la distillation une huîle empyreumatique, que l'on rectifie autant qu'il est possible, pour lui ôter son odeur de feu. Le petit peuple d'Angleterre confit cette graine, ou plutôt le fruit du frêne avant sa maturité, dans de la saumure de sel et de vinaigre, et il en use dans les sausses. Cette graine entre dans la mauvaise composition galénique nommée électuaire diasatyrion de Nicolas Myrepse. (D.J.)