S. m. (Histoire naturelle, Botanique) palma (Planche XXVIII. fig. 3.) genre de plante. Il y a de grandes différences entre les diverses espèces de palmiers, soit pour les fleurs soit pour les fruits ; les unes ont les fleurs monopétales, dans d'autres elles sont polypétales, et parmi celles-ci les unes sont stériles, et les autres fertiles : il se trouve quelquefois dans la même gaine des fleurs fertiles et des fleurs stériles, mais séparées les unes des autres : il y a aussi des fleurs stériles et des fleurs fertiles qui ont séparément chacune une gaine : enfin on voit des espèces dont les fleurs sont tout à fait stériles ; les embryons sont nuds et séparés des fleurs sur la même plante. Les fruits n'ont pas moins de variétés, car dans quelques espèces le fruit est mou, charnu, et renferme un noyau très-dur ; dans d'autres espèces, les fruits sont secs, durs ou en forme de coques osseuses, revêtues d'une écorce molle ou fibreuse ; ces coques renferment une amande solide ou une amande creuse, qui est remplie d'une liqueur aqueuse.

Le palmier est un genre de plante qui a un tronc droit dépourvu de branches, et dont la racine ne pousse point de rejetons, il est garni au sommet de côtes disposées en rond qui portent de petites feuilles ; ces côtes se dessechent ou tombent par vétusté. Au milieu de ce qui en reste, il en renait de nouvelles, entre lesquelles s'élèvent des gaines qui s'ouvrent de bas en-haut, et qui contiennent des fleurs et des embryons disposés en forme de grappe.

Le palmier diffère par ce dernier caractère de certaines espèces de fougère en arbre qui ont comme le palmier le tronc simple, qui ne poussent ni branches ni rejetons, et dont le sommet est garni de côtes qui tombent par vétusté, et qui se renouvellent toujours entre celles qui sont restées. Il y a des espèces de bananier ou musa, qui ressemblent aussi au palmier, car elles ont le tronc simple et garni au sommet de feuilles disposées en rond, et elles portent des gaines qui renferment des fleurs et des embryons disposés en grappes ; mais le palmier diffère de ces espèces en ce qu'elles se multiplient toutes par des rejetons qui viennent de la racine. Plumier, nova plant. amer. gen. Voyez PLANTE.

Les principales espèces de palmiers sont 1° le palmier dattier ; c'est le palmier par excellence, dont on trouvera par conséquent la description détaillée, qui peut suffire pour les autres espèces de palmiers, et abréger cet article. Voyez donc PALMIER DATTIER.

2°. Le palmier nain épineux, palma minor, C. B. P.

3°. Le latanier, nommé par Ray, palma brasiliensis prunifera, folio plicatili, seu flabelliformi, caulice squammato. Voyez LATANIER.

4°. Le chou palmiste, en anglais, the cabbage-tree ; en botanique, palma altissima, non spinosa, fructu pruniformi, minore, racemoso sparso, Sloane, Cat. Jamaïc.

5°. Le palmier oléagineux, palma foliorum pediculis spinosis fructu pruniformi, lacteo, oleoso, Sloane, Cat. Jamaïc. 175. en anglais, the oily palm-tree.

6°. Le grand palmier tout épineux, palma tota spinosa, major, fructu pruniformi, Sloane, Cat. Jamaïc. en anglais, the great maccaw-tree.

7°. Le palmier nain sans épines, à feuilles en éventail et à racines multipliantes, palma humilis, radice repentissimâ, soboliferâ, folio flabelliformi, pedunculo vix spinoso, Boerh. Ind. alt.

8°. Le palmier sang-dragon, palma prunifera, foliis yuccae, è quâ sanguis-draconis, Com. Hort. Amstael. en anglais, the dragon-tree. On le décrira au mot SANG-DRAGON.

9°. Le palmier du Japon, épineux, à feuilles de polypodes, palma japonica, spinosis pediculis, polypodii folio ; Parad. Batav. Boerh. Ind. alt. 270. C'est le palmier dont la fécule desséchée se nomme sagou. Voyez SAGOU.

10°. Le cocotier, palma indica coccigera angulosa, C. B. P. 108. Voyez COCOTIER.

11°. Le palmier vinifère de Thevet, palma vinifera Theveti, J. B. et C. B. P.

12°. Le palmiste franc, ou le palmier royal de Rochefort, palma nobilis, seu regalis, jamaïcensis et barbadensis, Sloane, Cat. Jamaïc. Il y a quantité de palmiers de cette espèce.

13°. Le palmier de Malabar, qui ne porte qu'une fois du fruit, et qui est ombragé de feuilles en éventail, pliantes et très-larges, palma montana, Malabarica, semel tantùm frugifera, folio plicatili, flabelliformi, maximo, Hort. Malab.

Toutes les espèces de palmiers peuvent être élevées de graines qu'on semera dans des pots remplis de terre légère : on plongera ces mêmes pots dans un lit de tan ; et quand les jeunes plantes auront poussé, on les transplantera dans d'autres pots, qu'on tiendra dans une serre chaude jusqu'à ce que les plantes aient acquis quelque force. Il est vrai que ces arbres viennent très-lentement dans nos climats, mais ils ne viennent guère plus vite dans leur pays natal.

Le palmier nain épineux croit rarement dans sa patrie au-dessus de quatre ou cinq pieds, mais il étend ses racines fort loin, et les multiplie si facilement, qu'un grand pays qui n'est pas cultivé en est couvert au bout de vingt ans. Ses feuilles servent à faire des balais de jonc. Cet arbre n'est pas rare en Espagne et en Portugal.

Le chou palmiste croit au contraire à une hauteur prodigieuse, et pousse quantité de feuilles qui s'entrelacent les unes dans les autres. On met ses jeunes tiges en saumure, et on les envoye en Angleterre sous le nom de chou-palmiste.

Le palmier oléagineux abonde sur la côte de Guinée, et dans les îles du Cap-verd, où il s'élève jusqu'à la hauteur d'un mât de vaisseau. Cet arbre a merveilleusement réussi à la Jamaïque et aux Barbades. Les negres tirent de son tronc une liqueur enivrante, une espèce d'huîle ou de beurre de la pulpe du fruit, et emploient l'écorce du tronc à en faire des nattes pour se coucher dessus.

Le grand palmier épineux pullule dans les îles Caraïbes. Les negres font de son bois leurs javelines et leurs flèches ; ils tirent aussi de son fruit une liqueur qu'ils aiment passionnément.

Le vrai palmier sang-dragon, ainsi nommé, parce qu'on en tire par incision le suc résineux de ce nom, n'est connu qu'à Madere et dans les îles Canaries. Il est vrai que dans nos climats on peut l'élever de graine, mais il ne parvient pas à une grande hauteur, et ne donne point de résine.

Le palmier vinifère de Thevet est célèbre par sa verdure perpétuelle, et est cher aux Ethiopiens qui percent son tronc à deux pieds de terre, et en tirent une liqueur qui a le goût du vin d'Anjou.

Le palmier royal contient dans la partie supérieure de son tronc une substance médullaire, blanche, tendre, savoureuse, et qui fait un des mets délicats des habitants des îles sous-le-vent.

Le palmier de Malabar a de très-grandes feuilles visqueuses, molles, propres à être pliées comme un éventail, et resserrées dans un très-petit espace.

Tous les palmiers qu'on peut élever dans nos climats méritent de se trouver dans les jardins de plantes exotiques, à cause de leur structure singulière et de la beauté de leurs feuilles.

Rien n'est plus commun dans les recueils de voyageurs anglais, français, hollandais, que d'y trouver des descriptions de palmiers d'Asie, d'Afrique et d'Amérique ; mais elles sont ou peu fidèles, ou merveilleuses. (D.J.)

PALMIER-DATTIER, (Botanique) arbre célèbre par bien des endroits, et peut-être celui dont les auteurs sacrés et profanes ont le plus parlé. Les Poètes l'ont consacré aux héros et à la victoire. Il sert d'un des plus heureux symboles pour le blason, pour les emblèmes, pour les médailles, et pour les devises. Il est regardé comme le type de l'amour conjugal, de la santé, de la fécondité, et de la conservation des empires. On connait une médaille d'Adrien, sur le revers de laquelle, Sabine debout, tient une palme de la main droite, et de l'autre une corne d'abondance, accompagnée de deux petits enfants, l'un mâle et l'autre femelle, avec cette inscription, hilaritas populi romani, " le bonheur du peuple romain ". Personne n'ignore que marie Stuart, cette princesse malheureuse, qui ne fut jamais plus digne de grâce qu'au moment qu'elle reçut l'arrêt de sa mort, avait pris pour devise dans sa prison une palme courbée sous le faix, et se relevant, avec ces mots : ponderibus virtus innata resistit, " la vertu sous le poids, ne peut être accablée ".

Si l'on osait ici mêler quelque chose de plus sérieux à ces idées poétiques, il semble qu'on pourrait dire que le palmier a reçu un nouveau lustre pour nous, depuis qu'il a fourni des vêtements, de la nourriture, et des remèdes à tant de chrétiens et de solitaires, qui ont si longtemps habité les déserts de l'Egypte où il croit en abondance.

Enfin quand l'on examine le palmier en naturaliste, l'on s'aperçoit qu'il mérite à tous égards l'attention du physicien. Son tronc sans écorce, garanti par des queues de branches feuillées, placées symétriquement ; ce même tronc dans sa vieillesse, portant au sommet des boutons pleins d'une substance médullaire qui, étant enlevée, fait périr l'arbre ; ses grappes branchues sortant des aisselles feuillées, et ayant chacune leur enveloppe ; ses côtes, ses épines, ses fleurs servant à féconder le palmier femelle ; l'ordre de leur production, le fruit qui en vient, ses degrés d'accroissement et de maturité ; tout cela, dis-je, est extrêmement digne de notre curiosité. Mais plus ce qui regarde le palmier-dattier est intéressant, et plus on est avide de le connaître avec exactitude, et de démêler le vrai du faux dans les relations qu'on en a faites. Kaempfer est presque le seul qui ait décrit cette plante avec intelligence, avec fidélité, et en homme du métier ; c'est aussi dans ses mémoires que j'en puiserai la description.

Cet arbre est nommé par les Botanistes, palma ; par excellence, palma major, palma dactilifera ; en anglais, the greater palm ou date-tree ; en allemand, dattel-baum. Il pousse une racine simple, épaisse, ligneuse, et quelquefois deux, selon que le terrain le permet. Elle est environnée vers son collet de menues branches, dont les unes sont tortueuses, simples, nues le plus souvent, et se répandant au loin sur la surface de la terre ; les autres sont garnies de fibres très-courtes, le bois est fibré, ferme et pliant, de couleur rousse foncée, d'une saveur acerbe.

Le tronc de cet arbre est droit, simple, sans branches, cylindrique, un peu moins épais vers le sommet, de grosseur et de longueur différentes selon son âge, desorte cependant que le plus haut surpasse à-peine huit brasses. Il n'a point d'écorce, mais il est garanti, lorsqu'il est jeune, par des queues de branches feuillées, qui restent après qu'on les a coupées, et que l'on appelle chicots. Ils sont placés symétriquement, au nombre de six, autour du tronc. Lorsque la vieillesse, ou l'injure du temps, les fait tomber, la superficie du tronc est nue, rude au toucher, de couleur fauve, et encore marquée des impressions de l'origine des branches feuillées, de la même manière que la tige du choux pommé, lorsque ses feuilles sont tombées.

La substance intérieure depuis le sommet jusqu'à la racine, est composée de fibres longitudinales, épaisses, ligneuses, fermes, et cependant si peu unies ensemble par le moyen d'une matière fongueuse, qu'on peut les séparer avec les doigts. C'est pourquoi le tronc de cet arbre est difficîle à couper, par le défaut de solidité. Les troncs d'un an n'ont point de moèlle, mais seulement une espèce de nerf ligneux qui se trouve au milieu.

Dans les jeunes troncs, toute la partie intérieure est molle, bonne à manger ; dans ceux qui sont plus avancés, il n'y a que le sommet ; et dans les vieux troncs, il n'y a que les boutons du sommet où se trouve cette moèlle, dont la substance est blanche, tendre, charnue, cassante, douçâtre et savoureuse. Dioscoride l'appelle , terme qui signifie moèlle : Théophraste et Galien la nomment , c'est-à-dire, cerveau. Lorsqu'on coupe cette moèlle, l'arbre meurt, car elle est le germe des nouvelles productions, et le principe des branches qui doivent naître.

Le palmier-dattier est terminé par une seule tête, quoique Théophraste assure, H. Pl. l. II. c. VIIIe que dans l'Egypte il y en a quelquefois plusieurs ; mais c'est seulement lorsqu' autour de cette tête, il croit un ou deux rejetons, qui grossissent et se fortifient par la négligence du propriétaire.

La tête, selon les différents états de l'arbre, est composée au-moins de quarante branches feuillées, qui font un bel effet, et qui sont placées circulairement ; car au sommet du tronc, il se trouve un grand bourgeon conique, de deux coudées de longueur, grêle, terminé en pointe, et composé de branches feuillées prêtes à se développer ; celles de l'intérieur, et qui ne sont pas encore totalement épanouies, l'entourent immédiatement.

Des aisselles des branches feuillées, sortent des grappes branchues, qui ont chacune leur spathe ou enveloppe, et qui portent des fleurs dans le palmier mâle, et des fruits dans le palmier femelle ; la branche feuillée est longue d'environ trois brasses, composée de feuilles semblables à celles du roseau, disposées sur une côte de chaque côté dans toute la longueur.

Cette côte est aplatie vers son origine, et diminue insensiblement jusqu'à son extrémité ; elle est verte, lisse, luisante et jaunâtre à sa base ; elle est de même substance que le tronc, mais moins compacte, entremêlée de fibres plus blanches et plus déliées.

On peut considérer dans la côte trois parties ; l'une en est la base, l'autre qui est nue, et la dernière qui est chargée de feuilles. La base est la partie inférieure de la côte ; elle est attachée et posée sur le tronc en manière d'écaille, de figure à-peu-près triangulaire, concave intérieurement, mince sur les bords, terminée par un grand nombre de fibres, entrelacées en manière de tissu, qui sert à réunir les deux bases des côtes intermédiaires du rang supérieur.

La partie nue, qui s'étend depuis la base jusqu'aux premières feuilles, est cette portion qui reste après la première coupe, et qui dans la seconde est retranchée par ceux qui cultivent les palmiers avec soin, de peur qu'elle ne retienne l'eau de la pluie. Pline appelle cette partie du nom de pollex, qui signifie chicot.

La dernière partie de la côte est bordée d'épines des deux côtés, et chargée de feuilles dans toute sa longueur.

Les épines sont les jeunes feuilles qui sortent de chaque côté de la côte : les premières sont courtes et plus écartées ; les autres sont plus longues et plus près les unes des autres, jusqu'à-ce qu'ayant acquis la longueur d'une coudée, elles prennent peu-à-peu la forme de feuilles. Ces épines sont de la figure d'un cône irrégulier et anguleux, épaisses, dures, en quelque façon ligneuses ; leur superficie est luisante, et d'un verd tirant sur le jaune pâle, creusée en gouttière à la face supérieure ; leur pointe est arrondie et de couleur brune ; enfin elles s'étendent, et se changent peu-à-peu en feuilles.

Ces feuilles durent toujours ; elles sont ailées, de la figure de celle du roseau, en très-grand nombre, courtes d'abord, ensuite longues d'un empan, et bien-tôt après beaucoup davantage, placées jusqu'à l'extrémité de la côte, qui est terminée par une pointe. Elles sont soutenues sur des espèces de queues ligneuses, épaisses, de la longueur d'environ un pouce, de figure irrégulière et presque carrée, fortement attachées à la côte, dont on ne peut les arracher qu'avec violence.

Ces feuilles sont situées obliquement sur une même ligne, et alternativement ; elles sont longues d'environ une coudée, larges de deux pouces, de la figure de celles du roseau, fort pointues, pliées en-dessus par le milieu dans toute leur longueur, et d'un verd-pâle des deux côtés. De plus, elles sont dures, tendues, roides, ayant de grosses nervures dans toute leur longueur.

L'enveloppe faite en forme de réseau, est rude, grossière, composée de fils inégaux, épais, anguleux, un peu aplatis, roides. Dans les jeunes palmiers, et surtout autour des branches feuillées du sommet, cette enveloppe est épaisse, d'un jaune-foncé et large d'un empan : dans les vieux palmiers, et surtout autour des vieilles branches feuillées, elle est d'un roux-noirâtre.

Le palmier qui vient de lui-même des racines d'un autre, comme dans son sein maternel, commence à donner des fruits quatre ans après qu'on l'a transplanté lorsque le terroir est fertîle ; et six ou sept ans après, s'il se trouve dans un lieu stérîle : mais celui qui vient d'un noyau, est bien plus longtemps à donner du fruit. Le palmier ne porte son fruit qu'au haut de son tronc, et aux aisselles des branches feuillées, qui sont garnies de grandes grappes en forme de balais, lesquelles étant encore jeunes, sont renfermées chacune dans une gaine presque coriace.

Les Romains donnaient le nom de spadix à ces grappes, et celui de spathae à leurs enveloppes : mots qu'ils ont empruntés de la langue grecque. On ne saurait distinguer par l'extérieur les grappes du palmier femelle, lorsqu'elles sont encore cachées dans leurs gaines.

Les palmiers-dattiers, soit mâle, soit femelle, gardent l'ordre suivant dans la production de leurs différentes fleurs. Au commencement du mois de Février, et peut-être plutôt, ces arbres font éclore leurs boutons dans les aisselles des branches feuillées. Les spathes croissent peu-à-peu, et grossissent tellement, par la quantité de fleurs qu'elles portent, que le mois suivant elles s'entr'ouvrent dans leur longueur, et laissent sortir un corps solide, semblable à une truffe. Ce corps solide, étant dégagé de son enveloppe, prend la figure d'une grappe composée d'un grand nombre de pédicules, qui soutiennent de petites fleurs dans le palmier mâle, et des espèces de petites prunes dans le palmier femelle.

Les fleurs servent à féconder le palmier femelle, dont les fruits mûrissent lentement, et seulement dans l'espace de cinq mois. Les spathes durent peu de temps, se fanent, se sechent, et doivent être retranchées par ceux qui cultivent soigneusement ces arbres.

La spathe a la figure d'une masse ligneuse, sa surface externe est couverte d'un duvet mollet, épais, très-court, de couleur rousse-foncée ; sa surface intérieure est blanche, lisse, humide, et en quelque façon muqueuse ; sa substance est semblable à celle d'une écorce sillonnée, fibreuse. Elle est pliante, lorsqu'elle est seche, et semblable à du cuir.

Le tuyau qui recouvre la queue de la grappe, est aplati, recourbé, de la figure d'un fourreau de cimeterre, long d'une coudée, gros d'un pouce, large de trois. Le ventre a une coudée de longueur, une palme de largeur, et trois pouces d'épaisseur, lorsqu'il est prêt à s'ouvrir.

La grappe mâle est parsemée de petites fleurs en grand nombre. Elle porte deux cent pédicules, dont les plus courts soutiennent quarante petites fleurs, les moyens soixante, les plus longs quatre-vingt. Ces petites fleurs moins grandes que celles du muguet, sont à trois pétales, d'une couleur blanchâtre, tirant sur le jaune-pâle, et d'une odeur desagréable ; les pétales de ces petites fleurs, sont droits, charnus, fermes ; les étamines sont velues, roides, très-courtes, blanchâtres, terminées par des petits sommets, remplis de poussière très-fine.

Sur la fin du mois de Février, et au commencement du mois de Mars, les spathes se rompent, les grappes femelles paraissent ; et peu de jours après, ayant quitté leurs enveloppes, elles sont nues, portant les embryons des fruits, enveloppés de deux petits calices, dont l'un est extérieur et plus court, et l'autre qui est intérieur, enveloppe immédiatement le fruit presque tout entier.

Ces embryons sont en très-grand nombre sur une grappe ; ils ressemblent aux grains de poivre pour la grosseur et la rondeur ; leur superficie est luisante et blanche, leur goût est acerbe. Dans le mois de Mai, ces fruits acquièrent la grosseur de nos cerises, et ils sont d'une couleur herbacée. Au commencement de Juin, ils ressemblent à des olives pour la figure et la grosseur ; leurs osselets se durcissent, leur chair perd de son humidité, et devient plus solide. Ils mûrissent dans le mois d'Aout ; ils ne s'amollissent pas dans toute leur substance, mais ils acquièrent d'abord une tache molle comme celle d'une pomme qui se pourrit ; cette tache s'étend peu-à-peu, et toute sa substance qui était verte, se change en une pulpe fort douce et d'un goût vineux dans la maturité. On nomme ces fruits dattes. Voyez DATTES.

Le noyau est solide comme de la corne, dur et ferme ; sa superficie est de la couleur des pepins de raisins, et d'un gris plus ou moins délayé ; sa substance interne est panachée à-peu-près comme la noix muscade, de figure longue, et quelquefois en toupie recourbée, convexe d'un côté, et partagée de l'autre dans sa longueur par un sillon. La moèlle qui est dans ce noyau, n'est pas telle que Ray l'a cru, ni telle qu'il s'est persuadé qu'on pouvait la retirer, lorsqu'on l'a amollie dans la terre.

Le palmier-dattier se plait dans les pays brulans, et aime une terre sablonneuse, légère et nitreuse. Il s'élève du noyau, ou des racines d'un autre palmier. Lorsqu'on seme des noyaux, il en vient des palmiers mâles et femelles : mais lorsqu'on plante des racines, les palmiers qui naissent suivent le sexe de leurs meres-racines.

On plante dans la terre au printemps, ou dans toute autre saison, les jeunes pousses de deux ou de trois ans, et on les arrose pendant l'été : on extirpe celles qui pullulent autour du tronc du palmier : on a grand soin d'en ôter les teignes, les fourmis et les sauterelles, insectes fort nuisibles à ces arbres.

Lorsqu'ils sont en état de porter des fleurs, ceux qui les cultivent, doivent travailler à les rendre féconds, et en retirer beaucoup de fruit. C'est pourquoi, sur la fin de Février, ils cueillent au sommet de l'arbre les spathes mâles remplies de leurs fleurs, propres à féconder les grappes femelles. Ils ouvrent ces spathes mâles dans leur longueur, ils en ôtent les grappes, dont les fleurs ne sont pas encore épanouies ; ils partagent ces grappes en de petites baguettes fourchues, et ils les placent sur les grappes femelles.

Les uns emploient ces baguettes encore vertes, et les mettent aussi-tôt sur les grappes femelles qui commencent à paraitre : d'autres sechent auparavant ces baguettes, et les gardent jusqu'au mois de Mars, temps auquel les matrices sont toutes ouvertes, et deviennent fécondes par une seule et même opération. Ils placent transversalement ces baguettes fourchues au milieu de la grappe femelle, ou bien ils les attachent de façon que les vents ne puissent pas les emporter, mais de sorte qu'elles y restent quelque temps, jusqu'à ce que les jeunes embryons aient acquis de la vigueur, étant couverts de la poussière séminale des petites fleurs, dont sont chargées les baguettes fourchues. Les habitants des déserts réitèrent quelquefois cette opération, mais les Perses et les Arabes se contentent d'en faire une seule avec soin.

Les grappes femelles deviennent encore fécondes sans le secours de l'homme, par le moyen de l'air qui transporte la poussière féconde du palmier mâle sur le palmier femelle : ainsi, quoique les personnes qui cultivent les palmiers, distribuent ces baguettes sur tous les palmiers femelles, ceux qui sont autour des palmiers mâles, reçoivent encore, sans le secours de l'art, la poussière des fleurs.

Les paysans qui habitent les lieux abondants en palmiers, emploient leur tronc, à la place de pieux et de poutres, pour soutenir leurs toits, et servir de charpente à leurs chaumières ; ils ferment tout le reste grossièrement avec des branches feuillées de palmier, sans clous, sans règle, sans art, et sans industrie. Le palmier leur fournit encore quelques meubles nécessaires ; ils font des fagots avec des branches feuillées, des balais avec les grappes, des vases, et des plats avec les spathes ou enveloppes, auxquelles ils donnent la figure qu'ils veulent ; ils font des chaussures et des cordes très-fortes pour leur marine avec les hampes des grappes. Ils se nourrissent de la moèlle du sommet, et tirent grand parti des dattes.

Le palmier-dattier vient de lui-même en plusieurs pays ; il est cultivé dans l'Afrique, où il produit beaucoup d'excellents fruits, aussi-bien que dans la Syrie et la Perse. On le cultive en Grèce, en Italie, et dans les provinces méridionales de la France ; mais il y produit rarement des fruits, et ceux qu'il y produit ne mûrissent jamais. Cela ne viendrait-il point de ce qu'il n'y a pas de palmier mâle !

Du-moins Pline, Théophraste, ont dit autrefois, ensuite Prosper Alpin, et Kaempfer, qui par eux-mêmes ont pu faire ces observations, ont confirmé que si un palmier femelle n'a point de mâle dans son voisinage, il ne porte point de fruits, ou que s'il en porte, ils ne viennent jamais à maturité ; ils sont âpres, de mauvais gout, sans noyau, et par conséquent sans germe : aussi, pour faire mûrir ces fruits, et pour les féconder, on a soin ou de planter un palmier mâle dans le voisinage, ou de couper des branches du palmier mâle chargées de sommets épanouis, et de les attacher au-dessous du palmier femelle ; pour lors il produit de bons fruits, féconds, et en abondance.

Ce fait avait déjà été dit à M. Tournefort, en 1697, par Adgi Mustapha, homme d'esprit et curieux. Mais ce ne sont pas les seuls palmiers, sur lesquels cette observation se vérifie. La chose est encore très-sensible sur la plupart des plantes qui portent les fleurs et les fruits sur différents pieds, ou sur différents endroits du même pied, pourvu que l'on ait un très-grand soin de couper les étamines, avant qu'elles aient commencé à se développer ; ou pourvu que l'on tienne les plantes femelles dans des endroits où la poussière des étamines ne puisse avoir aucun accès.

Je sai qu'on peut objecter ce que dit M. de Tournefort dans la préface de ses institutions botaniques, qu'il a Ve un pied femelle de houblon produire des graines dans le jardin du roi, où il n'y avait point de pied mâle, ni même dans le voisinage, en sorte que les poussières ne pouvaient être apportées par le vent, que des îles qui sont vers Charenton, où se trouvaient les pieds à fleurs les plus proches. Je ne contesterai point l'éloignement, mais je répondrai que quel que soit cet éloignement, il ne nuit en rien, pourvu que le vent puisse apporter les poussières ; or cela n'est pas impossible. Nous en avons un bel exemple allégué par Jovianus Pontanus, précepteur d'Alphonse, roi de Naples : il raconte que l'on vit de son temps deux palmiers, l'un mâle cultivé à Brindes, et l'autre femelle élevé dans les bois d'Otrante ; que ce dernier fut plusieurs années sans porter du fruit, jusqu'à ce qu'enfin s'étant élevé au-dessus des autres arbres de la forêt, il put apercevoir, dit le poète, le palmier mâle de Brindes, quoiqu'il en fût éloigné de plus de quinze lieues, car alors il commença à porter des fruits en abondance, et de fort bons ; si donc il ne commença qu'alors à porter des fruits, c'est vraisemblablement parce qu'il commença seulement pour-lors à recevoir sur ses branches, et sur les embryons de ses fruits, la poussière des étamines, que le vent enlevait de dessus le palmier mâle. Voilà la seule explication tolérable d'un phénomène qui a bien embarrassé les anciens. Ils ne comprenaient point comment le palmier femelle pouvait être fécondé par le palmier mâle : ils en attribuaient la cause à la sympathie de ces arbres, sans expliquer comment cette sympathie produisait des fruits. La Fontaine eut dit aux anciens :

Les mystères de leur amour

Sont des objets d'expérience,

Ce n'est pas l'ouvrage d'un jour

Que d'épuiser cette science. (D.J.)