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Catégorie parente: Histoire naturelle
Catégorie : Botanique
laurus, s. m. (Histoire naturelle, Botanique) genre de plante à fleur monopétale, faite en forme de bassin et découpée ; il sort du fond de la fleur un pistil qui devient dans la suite un fruit en forme d'œuf ou une baie ; il y a sous l'écorce de cette baie une coque qui renferme une semence presque de la même forme que la baie. Tournefort. Inst. rei herb. Voyez PLANTE.

Le laurier est un arbrisseau dont il y a différents genres qui se divisent en plusieurs espèces ou variétés. Par le mot laurier simplement, on entend ordinairement l'espèce de laurier qui a été connue dans la plus haute antiquité, et que l'on nomme laurier-franc, laurier commun ou laurier-jambon, et en Bourgogne laurier-sauce ; mais il y a encore plusieurs autres arbrisseaux, auxquels on donne aussi le nom de laurier, quoique d'un genre tout différent, et quoiqu'ils n'aient aucune analogie ni ressemblance avec le laurier-franc ; tels sont le laurier-royal, le laurier-cerise, le laurier-tin, le laurier-rose, le laurier-alexandrin ; tous ces arbrisseaux ont une qualité qui leur est commune : ils sont toujours verts ; mais il y a tant de différence dans leur culture, leur tempérament et leurs propriétés, dans la façon de les multiplier, de les cultiver et conduire, qu'il faut traiter de chacun séparément.

Le laurier-franc est connu de tout le monde. C'est un arbre toujours verd, de moyenne grandeur, qui se plait dans les pays chauds : on le trouve communément en Grèce et en Italie. Il ne s'élève dans nos provinces septentrionales qu'à environ vingt pieds ; mais plus ordinairement, on ne l'y voit que sous la forme d'un arbrisseau. Il prend une tige droite et sans nœuds, dont l'écorce est brune et unie ; ses feuilles sont entières, luisantes et fermes ; elles sont placées alternativement sur les branches et de la plus belle verdure. Ses fleurs d'un blanc jaunâtre, ont peu d'agrément ; elles paraissent au commencement de Mai, et elles durent près d'un mois. Les fruits qui leur succedent, sont de la grosseur d'une petite cerise ; ce sont des baies oblongues, vertes au commencement et noires en murissant ; elles sont odorantes, aromatiques, huileuses et amères au gout. Cet arbre vient dans tous les terrains ; mais il se plait surtout dans une terre fraiche, bien substantielle, et il aime l'ombre. On peut le multiplier de semences, de branches couchées et de boutures. Ce dernier moyen est aussi long qu'incertain ; on avance un peu plus en couchant les branches, mais elles ne produisent que des plans défectueux et languissants ; il vaut mieux semer, c'est la voie la plus courte, la plus sure et la plus satis faisante à tous égards. Il faut cueillir les baies du laurier au mois de Janvier, qui est le temps de leur maturité. On peut les semer tout de suite, ou les mettre dans du sable pour attendre le mois de Mars. On fera bien de les faire tremper dans l'eau pendant vingt-quatre heures avant de les semer. Dans ce dernier cas, elles leveront au bout de deux mois : les jeunes plants prendront cette première année trois ou quatre pouces de hauteur, et la plupart s'éleveront l'année suivante à environ un pied. Alors ils seront plus en état qu'à tout autre âge, d'être transplantés dans la place qu'on leur destine. Pendant les trois ou quatre premières années, l'hiver est un temps bien critique pour ces arbres ; il faudra avoir grand soin de les couvrir de paille dans cette saison, et surtout durant le hâle de Mars qui est le fléau des arbres toujours verts, lorsqu'ils sont jeunes ou nouvellement transplantés. Le laurier est peut-être de tous les arbres de cette qualité celui qui réussit le moins à la transplantation. Le mois d'Avril est le temps le plus convenable pour cette opération ; c'est-à-dire un peu avant qu'il ne commence à pousser. Si on voulait en faire des plantations un peu considérables, en avancer le progrès, s'assurer du succès et se procurer de beaux arbres ; il faudrait les semer sur la place et dans l'arrangement où ils devraient rester. Le plus grand agrément qu'on puisse tirer de cet arbre, c'est de le mettre en palissade pour garnir un mur. On fait quelqu'usage des baies du laurier ; elles servent aux teinturiers ; on en tire une huîle qui est de quelqu'utilité en Médecine ; mais les maréchaux l'appliquent dans bien des cas. Ses feuilles lorsqu'elles sont séches, entrent dans plusieurs ragouts de la vieille cuisine. Il y a plusieurs variétés de cet arbre. Le laurier à large feuilles, qui est le plus robuste de tous : le laurier à fleur double, dont la rareté fait le mérite : le laurier à feuilles ondées ; minutie dont on fait peu de cas : et le laurier à feuilles panachées de jaune, qui a plus d'agrément que les autres, mais aussi il est plus délicat ; il faut le traiter comme les arbrisseaux de l'orangerie. On peut le multiplier par la greffe comme les autres variétés.

Le laurier-cerise est un bel arbre de moyenne grandeur, qui est toujours verd : il nous est venu de la Natolie en Turquie, son pays naturel, il y a environ deux cent ans. On ne voit guère ce laurier sous la forme d'un arbre dans la partie septentrionale de ce royaume, parce qu'il n'est pas assez robuste pour y prendre tout son accroissement ; et comme on est réduit à le tenir en palissade à des expositions qui lui conviennent, on ne le connait que sous la forme d'un arbrisseau. Il pousse des tiges assez droites, grosses et fermes. Son écorce est brune et unie sur le vieux bois, mais elle est d'un verd jaunâtre sur les nouvelles branches. Ses feuilles sont grandes, oblongues, unies, douces et fermes au toucher, d'un verd tendre des plus brillans. Ses fleurs paraissent au commencement de Mai ; elles sont blanches, sans odeur, et disposées en longues grappes. Les fruits qui en viennent sont rouges, charnus, et ressemblent à une cerise ; ce qui a fait donner à l'arbre le nom de laurier-cerise : ils sont doux, assez agréables au goût ; on peut les manger sans inconvénient. Cet arbre s'accommode de tous les terrains, pourvu qu'il y ait de la profondeur, de la fraicheur et de l'ombre. Il se plait surtout parmi les autres arbres. Il croit très-promtement, il lui faut peu de culture, et il se multiplie aisément de semence, de branches couchées, de boutures, et par les rejetons qui croissent au pied des vieux arbres. On seme les noyaux du fruit en automne, les branches couchées se font au printemps ; et les boutures au mois de Juillet : par ce dernier moyen on peut avoir au bout de quatre ans des plants de 8 à 9 pieds de haut. Cet arbre réussira difficilement à la transplantation ; si les plants sont âgés de plus de deux ou trois ans. L'automne est le temps le plus propre à cette opération. Suivant les auteurs anglais qui ont écrit sur la culture des arbres, le laurier-cerise se greffe sur le cerisier, et il forme un bel arbre ; cependant par quantité d'épreuves que j'ai Ve faire à ce sujet, cette greffe ne réussit que pendant deux ou trois années, et souvent dès la seconde la greffe meurt avec le sujet. Ce laurier n'est pas assez robuste pour résister au froid dans des places isolées ; il serait souvent exposé dans ce cas à être mutilé par les gelées des hivers rigoureux, et même à être desséché jusqu'au pied. Il est vrai que ses racines donnent de nouveaux rejetons, mais cela ne dédommage pas suffisamment. Le meilleur parti qu'on en puisse tirer pour l'agrément, c'est de le placer dans des bosquets d'arbres toujours verts, où il se fera distinguer par la brillante verdure de son feuillage. On peut aussi en former de hautes palissades contre des murs à l'exposition du nord, il y sera moins sujet à être endommagé par la gelée que s'il était placé au midi. La feuille de ce laurier est de quelque usage à la cuisine pour donner au lait et à la crême un goût d'amandes amères. Mais la liqueur tirée de ces mêmes feuilles par la distillation, peut produire des effets très-pernicieux. On connait deux variétés et deux espèces différentes de cet arbre ; l'une des variétés a les feuilles panachées de jaune, et l'autre de blanc. Toutes les deux n'ont pas grande beauté. Les autres espèces de ce laurier sont le laurier-cerise de la Louisiane ou laurier-amande : cet arbre est encore si rare en France, qu'on ne peut entrer dans un détail circonstancié à son sujet. Il y a lieu de croire qu'il pourra venir en plein air dans ce climat, puisqu'il a déjà passé plusieurs hivers en pleine terre dans les jardins de M. le duc d'Ayen à Saint-Germain-en-laye. Sa feuille a beaucoup de ressemblance avec celle du laurier-franc, néanmoins elle a l'odeur et le goût de l'amande amère. Le seconde espèce est le laurier-cerise de Portugal, ou l'azarero des Portugais ; c'est l'un des plus jolis arbrisseaux toujours verts. Il s'élève bien moins que le laurier-cerise ordinaire ; sa feuille est aussi moins grande, mais elle est d'un verd encore plus brillant : la queue des feuilles et l'écorce des jeunes rejetons sont d'une couleur rougeâtre fort vive. L'arbrisseau se couvre au mois de Juin de grosses grappes de fleurs, dont la blancheur et la douce odeur frappent et saisissent de loin ; et en automne, les fruits ne font pas un moindre agrément lors de leur maturité. L'azarero est plus délicat que l'espèce commune ; il lui faut un bon terrain, qui ne soit ni trop sec, ni trop humide, et la meilleure exposition pour résister en pleine terre à nos hivers ordinaires. On peut le multiplier par les mêmes moyens, et aussi facilement que le laurier-cerise commun, sur lequel on peut aussi le greffer. Cet arbrisseau se garnit au pied de beaucoup de branches qui s'étendent et s'inclinent, en sorte qu'il faut le soigner pour lui faire prendre une tige et lui former une tête ; encore en viendra-t-on difficilement à bout, s'il a été élevé de boutures ou de branches couchées ; ce n'est qu'en le faisant venir de semence, qu'on peut l'avoir dans sa perfection. L'azarero est encore rare en France.

Le laurier-rose, arbrisseau toujours verd, d'un grand agrément, et qui est fort connu. Si on le laisse croitre sans le conduire, il pousse quantité de tiges de pied qui ne forment qu'un buisson. Il se garnit de beaucoup de feuilles longues, étroites et pointues, elles sont sans dentelures, fort unies en-dessus, mais relevées en-dessous d'une seule nervure ; elles conservent toujours la même verdure, qui est terne et foncée. L'arbrisseau donne aux mois de Juillet et d'Aout une grande quantité de fleurs rassemblées par bouquets à l'extrémité des branches, qui sont d'une belle apparence. Lorsqu'elles sont passées, il leur succede de longues siliques qui renferment des semences garnies d'aigrettes, mais ce n'est que dans les années chaudes et bien favorables que cet arbrisseau donne de la graine dans ce climat. Il faut soigner ce laurier dans sa jeunesse pour lui faire prendre une tige droite ; et il ne faut pas moins d'attention par la suite pour lui former une tête par rapport à l'irrégularité qu'il contracte naturellement. On connait à présent sept espèces différentes de cet arbrisseau ; comme elles ne sont pas également robustes, il sera plus convenable de les traiter séparément, et d'en faire deux classes. La première comprendra ceux qui exigent moins de précaution pour passer les hivers ; tels sont le laurier-rose ordinaire à fleurs rouges, celui à fleurs blanches, et celui dont les fleurs sont mêlées de rouge et de blanc ; il faut à ces arbrisseaux les mêmes ménagements que pour les grenadiers, c'est-à-dire, qu'il faut les serrer pendant l'hiver, et que la plus mauvaise place de l'orangerie leur suffit : il est vrai qu'on en a Ve dans le climat de Paris qui ont passé plusieurs hivers de suite en plein air ; mais les plants qu'on avait ainsi exposés en ont été quelquefois si endommagés et si fatigués, qu'ils perdaient beaucoup de leur agrément. L'usage est de les tenir ou dans des pots ou dans des caisses, et c'est le meilleur parti. Rien de plus aisé que de multiplier ce laurier, soit par les rejetons qu'il produit au pied, soit en semant ses graines, soit en couchant des jeunes branches, ou en greffant ses espèces les unes sur les autres. Tous ces moyens sont bons, si ce n'est que celui de semer sera le plus difficîle et le plus long. Le commencement d'Avril est le temps propre pour faire les branches couchées ; il sera presque égal de ne les faire qu'au mois de Juillet, elles feront des racines suffisantes pour être transplantées au printemps suivant. Il faut à ces arbrisseaux beaucoup d'eau pendant l'été, sans quoi ils feraient peu de progrès, et ne produiraient pas beaucoup de fleurs. Si l'on veut même en tirer tout le parti possible, c'est de les ôter des caisses, et de les mettre en pleine terre pendant toute la belle saison jusqu'au 20 d'Octobre qu'il faudra les remettre dans leur premier état ; on leur donne par ce moyen de la vigueur, de la durée, de la hauteur, et infiniment plus de beauté. Les lauriers-rose de la seconde classe sont infiniment plus délicats que ceux dont on vient de parler, il leur faut une serre chaude pour passer l'hiver et des soins tous différents : ceux-ci sont le laurier rose à fleurs rougeâtres, simples et odorantes, le même à fleurs doubles, celui à fleurs doubles, mêlées de rouge et de blanc, et un autre à grandes fleurs rouges. Ces arbrisseaux viennent de la Nouvelle Espagne, d'où ils ont passé aux colonies anglaises d'Amérique, et de-là en Europe. Les deux variétés à fleurs doubles sont de la plus grande beauté ; elles donnent pendant tout l'été de gros bouquets de fleurs très-doubles, dont la vive couleur, l'élégance et la bonne odeur rendent ces arbrisseaux très-précieux. Mais il faut des précautions pour les faire fleurir ; car si on les laisse en plein air pendant l'été, quoique dans la meilleure exposition, ils ne donneront point de fleurs ; il faut absolument les mettre sous des châssis, et les traiter durant cette saison comme les plantes les plus délicates des pays chauds. Ces arbrisseaux, dans les pays d'où on les a tirés, croissent naturellement sur les bords des rivières et le long des côtes maritimes ; on ne saurait donc trop recommander de les faire arroser souvent. Du reste on peut les multiplier comme les espèces qui sont plus robustes.

Le laurier-tin, arbrisseau toujours verd, l'un des plus jolis que l'on puisse employer pour l'agrément dans les jardins ; il prend de lui-même une tige droite, il se garnit de beaucoup de rameaux, la verdure de son feuillage ne change point ; et quoiqu'un peu brune, elle plait aux yeux par son brillant ; ses fleurs blanchâtres et sans odeur viennent en ombelles au bout des branches, elles sont d'un ordre assez commun, mais ce laurier en donne une grande quantité, elles sont de longue durée ; elles paraissent dès que la saison s'adoucit à la fin de l'hiver, et l'arbrisseau en produit encore quelques-unes pendant l'automne. Les fruits qui succedent sont de petites baies d'un noir bleuâtre et luisant, qui renferment chacune une semence presque ronde. Cet arbrisseau n'est nullement délicat sur la qualité du terrain ; et quoique dans les pays où il vient naturellement, comme en Espagne, en Portugal, en Italie et en France, aux environs de Narbonne, il croisse de lui-même dans des lieux escarpés, pierreux et incultes, cependant il se plaira encore mieux dans une terre franche et humide, à l'exposition du nord et à l'ombre des autres arbres ; qualité très-avantageuse dont on pourrait profiter pour former dans des endroits couverts et serrés, des haies, des séparations et des palissades qui s'éleveraient facilement à huit ou dix pieds, ou que l'on pourra retenir, si l'on veut, à hauteur d'appui. Il n'y a peut-être aucun arbrisseau que l'on puisse multiplier aussi aisément que celui-ci ; il vient de rejetons, de semence, de branches couchées, de boutures et par la greffe comme bien d'autres : mais on peut encore le multiplier par ses racines, et même en piquant dans la terre ses feuilles, qui font racine assez promptement ; la queue de la feuille fait de petites racines, il s'y forme ensuite un oeil qui donne bien-tôt une tige. Il ne faut presque aucune culture à ce laurier, et peu d'attention sur le temps propre à coucher ses branches, ou à en faire des boutures ; tous les temps conviennent pour cela, pourvu que la saison soit douce, et il arrive souvent que les branches qui touchent contre terre y font racine, sans qu'il soit besoin de les couvrir de terre. Si l'on voulait se procurer une grande quantité de ces arbrisseaux, il faudrait en semer des graines, quoique ce soit le parti le plus long et le plus incertain : le temps de les semer est en automne, aussi-tôt qu'elles sont en maturité. Cet arbrisseau est susceptible de toutes les formes qu'on veut lui faire prendre. Il faut le tailler au printemps, après que les fleurs sont passées ; si on le faisait plutôt, on supprimerait les fleurs de l'arrière saison. La serpette convient mieux pour cette opération que le ciseau qui dégrade les feuilles. Sa transplantation demande des précautions, il participe en cela du défaut qui est commun aux arbres toujours verts, qui reprennent difficilement. La meilleure saison de le transplanter est au commencement d'Avril, immédiatement avant qu'il pousse ; on ne peut être assuré de la reprise que quand on a enlevé ces arbrisseaux avec la motte de terre. On doit les arroser souvent, et les tenir couverts de paille jusqu'à ce qu'ils commencent à pousser. Ce laurier n'est pas aussi robuste qu'on pourrait le désirer ; il est quelquefois endommagé par les hivers rigoureux, mais il s'en relève aisément.

Les différentes espèces de ce laurier que l'on connait jusqu'à present, sont 1°. le laurier ordinaire. Sa fleur est blanche, et ses feuilles sont d'un verd luisant en-dessus, mais qui est terne en-dessous.

2°. Le laurier-tin ordinaire à feuilles panachées de blanc. C'est une belle variété qui est fort rare.

3°. Le laurier-tin ordinaire à feuilles d'un verd brun très-luisant. Ses fleurs sont plus grandes, et ont plus d'apparence que celles des autres espèces, mais il fleurit plus tard, et il est un peu moins robuste.

4°. Le laurier-tin à feuilles rudes et à fleurs purpurines. Il est plus branchu que les précédents, ses feuilles sont plus étroites et plus longues ; l'écorce des jeunes rejetons est rougeâtre.

5°. Le laurier-tin à petites feuilles. Cette espèce s'élève moins que les autres ; il se garnit de beaucoup plus de feuilles, et son fruit est bien plus âcre et plus brulant à la bouche que celui des espèces précédentes. Les deux dernières espèces sont plus robustes que les autres, fleurissent plutôt, et donnent une plus grande quantité de fleurs.

6°. Le laurier-tin à feuilles rudes panachées de jaune et à fleurs purpurines. Cette variété est de la plus grande beauté ; elle est encore très-rare.

On observe que les deux variétés panachées ne sont pas assez robustes pour passer les hivers en pleine terre, et qu'il faut les mettre dans l'orangerie.

Le laurier royal ou laurier des Indes, arbre toujours verd, dont le feuillage fait toute la beauté. Il est trop délicat pour passer les hivers en plein air dans ce climat : il faut le traiter comme les orangers. Il prend de lui-même une tige fort droite ; il se garnit de quantité de feuilles assez ressemblantes à celles du laurier-cerise, mais plus grandes et moins brillantes ; ses fleurs sont blanches, et viennent en gros bouquets ; elles n'ont point d'odeur, et il n'y a nul goût aromatique dans toutes les parties de cet arbre. On le cultive beaucoup dans le Portugal, où on l'emploie à faire des allées. Il vient aisément de graines qui ne mûrissent point dans ce climat, et qu'il faut tirer de Portugal : il demande pour la culture les même soins que l'oranger ; tout ce qu'il y a de particulier pour le laurier royal, c'est qu'il craint la sécheresse, et qu'il lui faut de fréquents arrosements. On peut aussi le multiplier de branches couchées, qu'il faudra marcotter, et qui n'auront de bonnes racines qu'au bout de deux ans.

Le laurier-alexandrin, c'est une sorte de plante vivace dont les tiges durent deux années, et qui se renouvelle tous les ans à-peu-près comme le framboisier. Ce laurier pousse de bonne heure au printemps de nouvelles tiges qui sortent des racines et qui s'élèvent à environ deux pieds ; chaque tige se divise en plusieurs branches, qui sont garnies de feuilles ressemblantes à celles du mirthe à large feuille. Dans la plupart des espèces de ce laurier, la graine sort du milieu de la feuille, et cette graine est une baie de la grosseur d'une petite cerise et d'un rouge assez vif : cette singularité jointe à ce que ce laurier conserve ses feuilles, ses fruits et ses tiges pendant l'hiver suivant, voilà ce qui en fait tout le mérite ; on peut le multiplier de graine, mais il sera plus court et plus aisé d'en tirer du plant en divisant ses racines au printemps avant qu'il commence à pousser. Cette plante se plait à l'ombre, et n'exige aucun soin particulier. C'est bien gratuitement qu'on lui a donné le nom de laurier ; elle n'a ni rapport ni ressemblance avec les arbres de ce nom, et elle ne mérite pas d'ailleurs de leur être associée : il y a plusieurs espèces de cette plante.

1°. La première se nomme fragon, houx, frelon, buis piquant, brusque, housson, houx-fragon, et petit houx en Bourgogne. Elle vient naturellement dans plusieurs provinces de ce royaume ; elle ne s'élève qu'à un pied environ, et elle est de quelqu'usage en Médecine.

2°. Le laurier-alexandrin à larges feuilles.

3°. Le laurier-alexandrin à feuilles étroites.

Dans ces trois espèces les fruits sortent du milieu des feuilles.

4°. Le laurier-alexandrin à feuilles étroites, qui porte son fruit à l'extrémité de ses branches. Cette espèce s'élève un peu plus que les autres ; aussi la nomme-t-on le grand laurier-alexandrin.

5°. Le laurier-alexandrin à larges feuilles, dont les fruits viennent aux aisselles des feuilles.

Quoique les quatre dernières espèces soient originaires de l'Egypte, elles résistent très-bien au froid de ce climat : il arrive quelquefois qu'une partie des branches sont flétries dans les hivers rigoureux, mais les racines n'en souffrent point.

6°. Le laurier-alexandrin à larges feuilles, dont le fruit vient sur le bord de la feuille. Cette espèce est originaire de Madere : elle n'est pas assez robuste pour passer en pleine terre ; il lui faut l'abri de l'orangerie pendant l'hiver. Elle s'élève à sept ou huit pieds. Article de M. DAUBENTON.

LAURIER-CERISE, lauro-cerasus, genre de plante à fleur en rose, composée de plusieurs pétales disposés en rond. Le calice a la forme d'un entonnoir ; il en sort un pistil qui devient dans la suite un fruit mou, assez semblable à une cerise. Il renferme une coque qui contient une semence arrondie. Ajoutez aux caractères de ce genre le port de la plante. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE.

LAURIER-FRANC, (Botanique) plante du genre du laurier. Voyez LAURIER.

LAURIER-ROSE, nerion, genre de plante à fleur monopétale découpée, et presqu'en forme d'entonnoir ; il sort du calice un pistil qui est attaché comme un clou à la partie postérieure de la fleur, et qui devient dans la suite un fruit presque cylindrique, composé de deux graines ou siliques remplies de semences à aigrettes. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE.

LAURIER-TIN, tinus, genre de plante à fleur monopétale rayonnée et découpée ; le milieu est percé par l'extrémité du calice, qui devient un fruit en forme d'olive avec un ombilic ; il renferme une semence qui a la figure d'une poire. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE.

LAURIER, (Chimie, Pharm. Mat. med. et Diete.) On se sert indifféremment des deux espèces, ou plutôt des deux variétés de laurier, connues dans les boutiques sous le nom de laurier-franc et de laurier-royal.

Le laurier était d'un grand usage dans la pratique des anciens médecins, qui le regardaient comme une espèce de panacée. Ils employaient les feuilles, les baies et l'écorce des racines ; cette dernière partie est absolument inusitée aujourd'hui, les feuilles sont assez communément employées pour l'usage extérieur ; on les fait entrer dans les décoctions et les infusions pro-foetu ; on emploie aussi la décoction de ces feuilles en lavement pour dissiper la colique : ce secours est cependant peu usité. On les fait entrer aussi dans les espèces pour les fumigations, qu'on emploie quelquefois dans les descentes et les relâchements de matrice, et dans la stérilité des femmes.

Les baies de laurier sont plus employées que les feuilles ; on s'en sert intérieurement et extérieurement ; elles sont regardées comme stomachiques, vulnéraires, résolutives, excitant les urines et les règles ; elles passent surtout pour utiles dans les concrétions bilieuses du foie : on peut les ordonner dans ce cas en infusion ou en substance à la dose de trois ou quatre. Appliquées extérieurement elles résolvent et fortifient puissamment, et apaisent les douleurs.

On peut s'appuyer des connaissances que l'analyse chymique nous en fournit, pour établir la réalité de la plupart de ces vertus. En effet, les baies de laurier contiennent une quantité considérable d'une huîle grasse de la nature des huiles par expression (voyez HUILE,) et une autre huîle éthérée et aromatique, qu'on peut séparer de ces baies par une seule et même opération ; savoir, la distillation avec l'eau ; car l'huîle grasse ou beurre de baie de laurier en est séparée par la décoction, et vient nager sous la forme d'une graisse verdâtre, et ensuite se figer sur la surface de l'eau employée dans la distillation.

C'est cette dernière huîle ou beurre qui constitue la partie médicamenteuse vraiment spéciale de ces baies ; elle est résolutive, adoucissante, discussive, vulnéraire.

Les baies de laurier épuisées des deux huiles dont nous venons de parler, en fournissent encore une troisième si on les pîle et qu'on les mette à la presse : celle-ci est principalement fournie par la semence ou amende contenue dans le noyau de la baie ; elle est moins douce que les huiles ordinaires tirées par expression des semences émulsives, parce qu'elle est chargée d'un peu de beurre ou d'huîle essentielle, on l'emploie, mais très-rarement, dans les liniments, les onguents et les emplâtres.

On recommande ces deux dernières huiles contre la galle ; mais elles ne fournissent par elles-mêmes qu'un secours fort impuissant contre cette maladie. Si on les mêle avec du soufre, qui est dans ce cas le véritable spécifique, elles pourront être utiles, comme correctif de l'odeur desagréable.

Les feuilles, les baies de laurier, et les trois différentes huiles dont nous venons de parler, entrent dans un grand nombre de préparations officinales, tant extérieures qu'intérieures. Les baies donnent leur nom à un électuaire stomachique, hystérique et emménagogue, qui est fort peu employé dans la pratique ordinaire de la Médecine.

Outre les huiles de baies de laurier dont nous avons parlé ci-dessus, on en prépare encore une quatrième en les faisant infuser et bouillir dans de l'huîle d'olive : on emploie celle-ci aux mêmes usages que l'huîle par décoction et l'huîle par expression ; elle est parfaitement analogue à la matière qui résulterait du mélange de ces deux dernières.

On connait assez l'emploi qu'on fait dans nos cuisines des feuilles de laurier. La consommation en est assez considérable à Paris pour que certains paysans trouvent moyen de gagner leur vie en apportant de plus de 50 lieues de grosses branches de laurier avec leurs feuilles, qu'ils y viennent vendre. On les fait entrer surtout comme assaisonnement dans les sauces que l'on fait à certains poissons. Plusieurs médecins ont prétendu qu'elles étaient nuisibles à l'estomac ; d'autres ont cru au contraire qu'elles le fortifiaient et qu'elles aidaient la digestion. L'opinion des premiers parait pouvoir tirer quelque appui de l'analogie du laurier-franc avec le laurier-rose, qui a été de tous les temps reconnu pour un poison, et de la découverte qu'on a faite depuis quelques années en Angleterre, des qualités dangereuses d'un autre arbre de la même classe ; savoir, le laurier-cerise. Voyez LAURIER-ROSE et LAURIER-CERISE. Cependant cette induction ne suffit point assurément pour rendre l'usage des feuilles de laurier suspect. (b)

LAURIER-ROSE, (Médecine) le laurier-rose doit être regardé comme un poison non-seulement pour les hommes, mais encore pour toute sorte d'animaux qui en mangent, selon le sentiment de Galien, et contre celui de Dioscoride et de Pline qui disent que les fruits et les feuilles du laurier-rose sont un poison pour la plupart des quadrupedes, mais que les hommes peuvent en user intérieurement contre les morsures des serpens, etc.

Les remèdes contre ce poison sont ceux qu'on prescrit contre tous les poisons corrosifs en général ; savoir, les huiles par expression, le lait, le beurre, la décoction des fruits doux, des racines et des graines mucilagineuses, etc.

Les feuilles de laurier-rose écrasées et appliquées extérieurement, sont bonnes, selon Galien, contre la morsure des bêtes venimeuses.

Ces mêmes feuilles sont employées dans la poudre sternutatoire de la pharmacopée de Paris. Extrait de la suite de la mat. med. de Geoffroy.

LAURIER, (Littérature et Mythologie) cet arbre, nommé daphné () par les Grecs, est de tous les arbres celui qui fut le plus en honneur chez les anciens. Ils tenaient pour prodige un laurier frappé de la foudre. Admis dans leurs cérémonies religieuses, il entrait dans leurs mystères, et ses feuilles étaient regardées comme un instrument de divination. Si jetées au feu elles rendaient beaucoup de bruit, c'était un bon présage ; si au contraire elles ne pétillaient point du tout, c'était un signe funeste. Voulait-on avoir des songes sur la vérité desquels on put compter, il fallait mettre des feuilles de cet arbre sous le chevet de son lit. Voulait-on donner des protecteurs à sa maison il fallait planter des lauriers au-devant de son logis. Les Laboureurs, intéressés à détruire ces sortes de mouches si redoutées des bœufs pendant l'été, qu'elles les jettent quelquefois dans une espèce de fureur, ne connaissaient point de meilleurs remèdes que les feuilles de laurier. Dans combien de graves maladies son suc préparé, ou l'huîle tirée de ses baies, passaient-ils pour des contre-poisons salutaires ? On mettait des branches de cet arbre à la porte des malades ; on en couronnait les statues d'Esculape. Tant de vertus qu'on attribue au laurier, le firent envisager comme un arbre divin, et comme l'arbre du bon génie.

Mais personne n'ignore qu'il était particulièrement consacré à Apollon, et que c'est pour cela qu'on en ornait ses temples, ses autels et le trépié de la Pythie. L'amour de ce dieu pour la nymphe Daphné, est la raison qu'en donnent les Mythologistes ; cependant la véritable est la croyance où l'on était qu'il communiquait l'esprit de prophétie et l'enthousiasme poétique. De-là vint qu'on couronnait les Poètes de laurier, ainsi que ceux qui remportaient les prix aux jeux pythiques. On prétend que sur la coupole du tombeau de Virgile, qui est près de Pouzzoles, il est né des lauriers qui semblent couronner l'édifice, et que ceux qu'on a coupés sont revenus, comme si la nature même eut voulu célébrer la gloire de ce grand poète.

Les faisceaux des premiers magistrats de Rome, des dictateurs et des consuls, étaient entourés de lauriers, lorsqu'ils s'en étaient rendus dignes par leurs exploits. Plutarque parlant de l'entrevue de Lucullus et de Pompée, nous apprend qu'on portait devant tous les deux des faisceaux surmontés de lauriers, en considération de leurs victoires.

Virgile fait remonter jusqu'au siècle de son héros la coutume d'en ceindre le front des vainqueurs : il est du moins certain que les Romains l'adoptérent de bonne heure ; mais c'était dans les triomphes qu'ils en faisaient le plus noble usage. Là les généraux le portaient non-seulement autour de la tête, mais encore dans la main, comme le prouvent les médailles. On décorait même de laurier ceux qui étaient morts en triomphant : ce fut ainsi qu'Annibal en usa à l'égard de Marcellus.

Parmi les Grecs, ceux qui venaient de consulter l'oracle d'Apollon, se couronnaient de laurier s'ils avaient reçu du dieu une réponse favorable ; c'est pourquoi dans Sophocle, Oedipe voyant Oreste revenir de Delphes la tête ceinte de lauriers, conjecture qu'il rapporte une bonne nouvelle. Ainsi chez les Romains tous les messagers qui en étaient porteurs, ornaient de lauriers la pointe de leurs javelines. La mort de Mithridate fut annoncée de cette manière à Pompée. On entourait semblablement de laurier les lettres et les tablettes qui renfermaient le récit des bons succès : on faisait la même chose pour les vaisseaux victorieux. Cet ornement se mettait à la poupe, parce que c'était là que résidaient les dieux tutelaires du vaisseau, et que c'était à ces dieux que les matelots menacés du naufrage adressaient leurs vœux et leurs prières. J'ajoute encore que le laurier était un signe de paix et d'amitié, car au milieu de la mêlée l'ennemi le tendait à son ennemi, pour marquer qu'il se rendait à lui.

Enfin l'adulation pour les empereurs introduisit l'usage de planter des branches de laurier aux portes de leurs demeures : voilà d'où vient que Pline appelle cet arbre, le portier des Césars, le seul ornement et le fidèle gardien de leurs palais, gratissima domibus janitrix, quae sola et domos exornat, et ante limina Caesarum excubat. Voyez si vous êtes curieux de plus grands détails, la Dissertation de Madrisio dell' Alloro, e suoi vari usi presso gli Antichi.

Mais parcourez tant que vous voudrez tout ce qu'on a pris soin de recueillir en littérature à l'honneur du laurier, vous ne trouverez rien au dessus de l'éloge charmant qu'Ovide en a fait. Je ne connais point de morceau dans ses ouvrages sur un pareil sujet, qui soit plus joli, plus agréable et plus ingénieux ; c'est dans l'endroit de ses métamorphoses, où Apollon ayant atteint Daphné déjà changée en laurier, la sent encore palpiter sous la nouvelle écorce qui l'enveloppe : lisez cette peinture.

Complexusque suis ramos, ut membra lacertis,

Oscula dat ligno : réfugit tamen oscula lignum.

Cui deus : At quoniam conjux mea non potes esse,

Arbor eris certè, dixit, mea ; semper habebunt

Te coma, te citharae, te nostrae, laure, pharetrae.

Tu ducibus laetis aderis, cum laeta triumphum

Vox canet ; et longas visent capitolia pompas.

Postibus augustis, eadem fidissima custos,

Ante fores stabis, mediamque tuebere quercum.

Utque meum intonsis caput est juvenîle capillis,

Tu quoque perpetuos semper gère frondis honores ;

Finierat Poean : factis modo laurea ramis,

Annuit, utque caput, visa est agitasse cacumen.

" Apollon serre entre ses bras les rameaux du laurier, comme si c'était encore la belle nymphe qu'il vient de poursuivre. Il applique au bois des baisers que le bois semble dédaigner. Ce dieu lui adresse alors ces paroles : puisque tu ne peux être mon épouse, tu seras du moins mon arbre chéri ; laurier, tu seras à jamais l'ornement de ma tête, de ma lyre et de mon carquois. Tu seras l'ornement des généraux qui monteront triomphans au capitole, au milieu d'une pompe magnifique, et des chants de victoire et d'allégresse. Tu décoreras l'entrée de ces demeures augustes où sont renfermées les couronnes civiques que tu prendras sous ta protection. Enfin, comme la chevelure de ton amant ne vieillit jamais, et qu'elle n'est jamais coupée, je veux que tes rameaux soient toujours verts et toujours les mêmes. Ainsi parla le Dieu. Le laurier applaudit à ce discours, et parut agiter son sommet, comme si la nymphe encore vivante eut fait un signe de tête ". (D.J.)