ou SATYRION, s. f. (Histoire naturelle, Botanique) genre de plante à fleur polypétale, anomale, et composée de six pétales inégaux, dont il y en a cinq qui occupent la partie supérieure de la fleur, et qui sont disposés de façon qu'ils ont en quelque sorte la figure d'un casque. Le pétale inférieur est profondément découpé, et garni d'une espèce de tête et de queue. Il a la figure d'un homme nud, d'un papillon, d'une abeille, d'un pigeon, d'un singe, d'un lesard, d'un perroquet ou d'une mouche, etc. Le calice devient dans la suite un fruit en forme de vessie, qui a trois ouvertures fermées chacune par un panneau. Ce fruit renferme des semences très-menues comme de la sciure de bois. Ajoutez aux caractères de ce genre, que les racines sont charnues, fibreuses, arrondies, et semblables à des tubercules, ou aplaties, et découpées en main ouverte. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez PLANTE. (I)

Tournefort ne compte pas moins de 85 espèces de ce genre de plante ; et il faut convenir qu'avant lui, les Botanistes, si on en excepte Ray, avaient jeté beaucoup de confusion sur toute leur histoire, et par leurs fausses descriptions, et par leurs figures.

Entre le grand nombre d'espèces d'orchis qui naissent dans les prés, dans les forêts, sur les collines et les montagnes, aux lieux ombrageux ou exposés au soleil, secs ou humides, et qui fleurissent en différents temps, on emploie d'ordinaire, pour l'usage de la Médecine, les espèces à racines bulbeuses, et particulièrement la commune mâle, à feuilles étroites, et celle qui est à larges feuilles.

L'orchis commune mâle, à feuilles étroites, est celle que Tournefort nomme orchis morio mas, foliis maculatis, I. R. H. 432. Sa racine est composée de deux tubercules presque ronds, charnus, gros comme des noix muscades, dont l'un est plein et dur, l'autre est ridé et fongueux, accompagné de grosses fibres. Elle pousse d'abord six ou sept feuilles, et quelquefois davantage, longues, médiocrement larges, lisses, semblables à celles du lis, mais plus petites, ordinairement marquées en-dessus de quelques taches d'un rouge brun, et quelquefois sans taches. Sa tige est haute d'environ un pied, ronde, striée, embrassée par une ou deux feuilles ; elle porte en sa sommité un long épi de fleurs agréables à la vue, purpurines, nombreuses, un peu odorantes, blanchâtres vers le centre, et parsemées de quelques points d'un pourpre foncé.

Chaque fleur est composée de six pétales inégaux, dont les cinq supérieurs forment, en se courbant, une sorte de coèffe. Elle commence par une manière de tête ou de casque, et finit par une pointe aiguë comme un éperon. Les fleurs sont plus ou moins serrées dans l'épi. Quand la fleur est passée, le calice devient un fruit semblable à une lanterne à trois côtés, qui contient des semences aussi fines que de la sciure de bois.

Cette plante fleurit vers la fin de Mai : on la trouve fréquemment dans les prés et les broussailles. M. Vaillant, après avoir observé que quelquefois ses feuilles se couchent à terre, ajoute qu'il a compté jusqu'à quarante-trois fleurs sur un pied.

L'orchis ou satyrion à larges feuilles, orchis militaris major, I. R. H. 432. a la racine composée comme l'espèce précédente, de deux bulbes, ou tubercules charnus, en forme de grosses olives. Elle pousse une tige à la hauteur de près d'une coudée, chargée en sa sommité d'un épi long, pyramidal, plus ou moins serré : il porte des fleurs amples, belles à la vue, blanchâtres en dedans, pointillées de taches purpurines, plus rouges en-dehors, d'une odeur forte et désagréable, lesquelles représentent comme un homme armé, ou un soldat couvert d'un casque, sans mains et sans pieds. Ses feuilles sont très-amples, longues et larges tout-ensemble, et sortent de terre, comme la plupart des orchis, dès le mois de Novembre.

Cette orchis fleurit en Mai. Ses fleurs ont une odeur de bouc insupportable, et varient beaucoup pour la couleur. On lui trouve, de même qu'aux autres espèces d'orchis bulbeux, une bulbe flasque, et l'autre pleine. C'est que tous les ans la bulbe de l'année précédente se flétrit, et qu'il en renait une nouvelle à la place.

Jean Bauhin observe sur les orchis bulbeux qu'il faut prendre pour l'usage qu'on en veut faire, non les deux bulbes, mais la plus dure, la plus pleine, et celle qui a le plus de suc. Toutes les espèces d'orchis contiennent beaucoup d'huîle et de sel volatil. On en fait sécher les racines pour l'usage ; mais entre les préparations différentes de racines ou bulbes d'orchis, il nous parait que la meilleure est celle qui est décrite par M. Geoffroy dans les mém. de l'acad. des Scienc. année 1740.

Il faut prendre les bulbes d'orchis les mieux nourries, leur ôter la peau, les jeter dans l'eau froide ; après qu'elles y ont séjourné quelques heures, on doit les cuire dans une suffisante quantité d'eau, et les faire égoutter : ensuite on les enfilera pour les faire sécher à l'air, choisissant pour cette préparation un temps sec et chaud. Elles deviennent ainsi transparentes, très-dures, et ressemblent à des morceaux de gomme adragant. On les peut conserver saines tant qu'on voudra, pourvu qu'on les tienne dans un lieu sec ; au lieu que les racines qu'on a fait sécher sans cette préparation, s'humectent &moisissent pour peu que le temps soit pluvieux pendant plusieurs jours.

Les bulbes d'orchis ainsi préparées, se mettent en poudre aussi fine que l'on veut : on en prend depuis un scrupule jusqu'à une drachme, qu'on humecte peu-à-peu d'eau bouillante ; la poudre s'y fond entièrement, et forme un mucilage qu'on peut étendre par ébullition dans une chopine ou trois demi-setiers d'eau : l'on est le maître de rendre cette boisson agréable, en y ajoutant du sucre et de légers parfums. Cette poudre peut aussi s'allier au lait, qu'on conseille ordinairement aux malades attaqués de la poitrine. C'est un remède très-adoucissant, propre à réprimer l'âcreté de la lymphe, et convenable dans la phtysie, et dans les dyssenteries bilieuses. (D.J.)