(Botanique) plante fort connue par la propriété qu'elle a de donner des signes de sensibilité, et pour ainsi dire de vie quand on la touche. On rapporte qu'un philosophe de Malabar est devenu fou à examiner les singularités de cette plante, et à en rechercher la cause. Je ne sache pas que cet accident soit arrivé à aucun de nos physiciens de l'Europe ; ils sont si accoutumés à ces sortes de phénomènes, difficiles à expliquer, qu'après tout celui-ci ne sera jamais pour eux qu'un feuillet de plus à ajouter à un grand livre. Tandis que nos dames ont la curiosité d'aller voir cette merveille végétale dans les jardins où elle se trouve, les botanistes qui la cultivent la caractérisent de la manière suivante.

Ses caractères. Ses fleurs, ramassées en têtes, sont monopétales, faites en forme d'entonnoir, ordinairement munies d'un grand nombre d'étamines dans le centre. Sa silique est ou simple, à deux panneaux, et remplie de semences oblongues ; ou composée de plusieurs parties unies par des nœuds transverses, dont chacun contient une semence arrondie. Ses feuilles ont un mouvement de systole et de diastole. Elle s'appelle en latin mimosa frutex, sensibilis herba viva. On en compte cinq espèces, qu'on cultive communément. Les anciens les nommaient plantae aeschynomenae. Décrivons ici l'espèce ordinaire.

Description de la sensitive ordinaire. Elle pousse plusieurs tiges ou rameaux, la plupart rampans et inclinés vers terre, chargés de feuilles longuettes, polies, étroites à-peu-près comme celles des lentilles, rangées de côté et d'autre en ordre ou par paires sur une côte, se rapprochant l'une de l'autre quand on les touche, comme si elles avaient de la sensation. Il sort des aisselles des feuilles, des pédicules qui soutiennent chacun un bouquet de fleurs fait en forme d'entonnoir, incarnates, agréables à la vue, poussant de leurs fonds une touffe d'étamines, et une silique à deux panneaux, qui renferme ordinairement des semences oblongues et plates. Sa racine est petite.

Cette plante merveilleuse méritait un traité à part par la singularité de ses phénomènes. Hook en Angleterre les a le premier examinés avec beaucoup d'attention ; mais son examen au lieu d'empêcher MM. du Fay et du Hamel d'en faire en France une étude particulière, les y a invités. Voyez les mém. de l'acad. des Scienc. ann. 1736.

Plusieurs plantes, telles que les acacias, les casses, les cassies, ont la même disposition de feuilles par paires sur une côte, comme à la sensitive ; elles ferment aussi leurs feuilles le soir, et les r'ouvrent le matin, comme la sensitive fait les siennes. Ce n'est pas ce mouvement périodique qui fait le merveilleux de la sensitive, il lui est commun avec d'autres plantes ; c'est ce même mouvement entant qu'il n'est point périodique et naturel, mais accidentel en quelque sorte, parce qu'on n'a qu'à toucher la sensitive pour lui faire fermer ses feuilles, qu'elle r'ouvre ensuite naturellement. C'est-là ce qui lui est particulier, et qui a fait donner le nom de mimosa, imitatrice, d'un animal qu'on aurait incommodé ou effrayé en le touchant. Mais ce mouvement est beaucoup plus considérable que nous ne disons encore ; et il a un grand nombre de circonstances dignes d'attention. Voici donc les principaux faits qui attachent nos regards sur cette plante.

Observations détaillées qui la concernent. 1. Il est difficîle de toucher une feuille d'une sensitive vigoureuse et bien saine, si légèrement et si délicatement, qu'elle ne le sente pas et ne se ferme : sa plus grosse nervure étant prise pour son milieu, c'est sur ce milieu, comme sur une charnière, que les deux moitiés se meuvent en s'approchant l'une de l'autre, jusqu'à ce qu'elles se soient appliquées l'une contre l'autre exactement. Si l'attouchement a été un peu fort, la feuille opposée et de la même paire, en fait autant par une espèce de sympathie.

2. Quand une feuille se ferme, non-seulement ses deux moitiés vont l'une vers l'autre, mais en même temps le pédicule de la feuille Ve vers la côte feuillée d'où il sort, fait avec elle un moindre angle qu'il ne faisait auparavant, et s'en rapproche plus ou moins. Le mouvement total de la feuille est donc composé de celui-là et du sien propre.

3. Si l'attouchement a été plus fort, toutes les feuilles de la même côte s'en ressentent et se ferment. A un plus grand degré de force, la côte elle-même s'en ressent, et se ferme à sa manière, c'est-à-dire se rapproche du rameau d'où elle sort. Et enfin la force de l'attouchement peut être telle, qu'aux mouvements précédents s'ajoutera encore celui par lequel les rameaux se rapprochent de la grosse branche d'où ils sortent, et toute la plante paraitra se vouloir réduire en un faisceau long et étroit, et s'y réduira jusqu'à un certain point.

4. Le mouvement qui fait le plus grand effet, est une espèce de secousse.

5. Trais des mouvements de la plante se font sur autant d'articulations sensibles ; le premier sur l'articulation du pédicule de la feuille avec la côte feuillée ; le second sur l'articulation de cette côte avec son rameau ; le troisième sur celle du rameau avec sa grosse branche ; un quatriéme mouvement, le premier de tous, celui par lequel la feuille se plie et se ferme, doit se faire aussi sur une espèce d'articulation qui sera au milieu de la feuille, mais sans être aussi sensible que les autres.

6. Ces mouvements sont indépendants les uns des autres, et si indépendants, que quoiqu'il semble que quand un rameau se plie ou se ferme, à plus forte raison ses feuilles se plieront et se fermeront ; il est cependant possible de toucher le rameau si délicatement, que lui seul recevra une impression de mouvement ; mais il faut de plus que le rameau en se pliant n'aille pas porter ses feuilles contre quelqu'autre partie de la plante, car dès qu'elles en seraient touchées elles s'en ressentiraient.

7. Des feuilles entièrement fanées et jaunes, ou plutôt blanches et prêtes à mourir, conservent encore leur sensibilité, ce qui confirme qu'elle réside principalement dans les articulations.

8. Le vent et la pluie font fermer la sensitive, par l'agitation qu'ils lui causent ; une pluie douce et fine n'y fait rien.

9. Les parties de la plante qui ont reçu du mouvement, et qui se sont fermées chacune à sa manière, se r'ouvrent ensuite d'elles-mêmes, et se rétablissent dans leur premier état. Le temps nécessaire pour ce rétablissement est inégal, suivant différentes circonstances, la vigueur de la plante, la saison, l'heure du jour : quelquefois il faut 30 minutes, quelquefois moins de 10. L'ordre dans lequel se fait le rétablissement, varie aussi ; quelquefois il commence par les feuilles ou les côtes feuillées, quelquefois par les rameaux, bien entendu qu'alors toute la plante a été en mouvement.

10. Si l'on veut se faire une idée, quoique fort vague et fort superficielle, de la cause des mouvements que nous avons décrits, il paraitra qu'ils s'exécutent sur des espèces de charnières très-déliées, qui communiquent ensemble par des petites cordes extrêmement fines, qui les tirent et les font jouer dès qu'elles sont suffisamment ébranlées ; et ce qui le confirme assez, c'est que des feuilles fanées et prêtes à mourir, sont encore sensibles ; elles n'ont plus de suc nourricier, plus de parenchime, plus de chair, mais elles ont conservé leur charpente solide, ce petit appareil, et cette disposition particulière des cordages qui fait tout le jeu.

11. Ces mouvements que nous avons appelés accidentels, parce qu'ils peuvent être imprimés à la plante par une cause étrangère visible, ne laissent pas d'être naturels aussi, comme nous l'avons dit d'abord ; ils accompagnent celui par lequel elle se ferme naturellement le soir, et se r'ouvre le matin, mais ils sont ordinairement plus faibles que quand ils sont accidentels. La cause étrangère peut être dès qu'elle le veut, et est presque toujours plus forte que la cause naturelle.

Nous allons rapporter maintenant les principales circonstances du mouvement total naturel de la sensitive.

12. Il a été dit dans l'histoire de l'académie des Sciences, année 1729, que dans un lieu obscur et d'une température assez uniforme, la sensitive ne laisse pas d'avoir le mouvement périodique de se fermer le soir, et de se r'ouvrir le matin. Cela n'est pas conforme aux observations de MM. du Fay et du Hamel. Un pot de sensitive étant porté au mois d'Aout dans une cave plus obscure, et d'une température plus égale que le lieu des observations de 1739, la plante se ferma à la vérité, mais ce fut, selon toutes apparences, par le mouvement du transport, elle se r'ouvrit le lendemain au bout de 24 heures à-peu-près, et demeura près de trois jours continuellement ouverte, quoiqu'un peu moins que dans son état naturel. Elle fut rapportée à l'air libre, où elle se tint encore ouverte pendant la première nuit qu'elle y passa, après quoi elle se remit dans sa règle ordinaire, sans avoir été aucunement affoiblie par le temps de ce dérèglement forcé, sans avoir été pendant tout ce temps-là que très-peu moins sensible.

13. De cette expérience, qui n'a pas été la seule, il suit que ce n'est pas la clarté du jour qui ouvre la sensitive, ni l'obscurité de la nuit qui la ferme : ce ne sont pas non plus le chaud et le froid alternatifs du jour et de la nuit ; elle se ferme pendant des nuits plus chaudes que les jours où elle avait été ouverte. Dans un lieu qu'on aura fort échauffé, et où le thermomètre apporté de dehors hausse très-promtement et d'un grand nombre de degrés, elle ne s'en ferme pas plus tard qu'elle n'eut fait à l'air libre, peut-être même plus tôt : d'où l'on pourrait soupçonner que c'est le grand et soudain changement de température d'air qui agit sur elle ; et ce qui aiderait à le croire, c'est que si on lève une cloche de verre, où elle était bien exposée au soleil et bien échauffée, elle se ferme presque dans le moment à un air moins chaud.

14. Cependant il faut que le chaud et le froid contribuent de quelque chose par eux-mêmes à son mouvement alternatif ; elle est certainement moins sensible, plus paresseuse en hiver qu'en été ; elle se ressent de l'hiver même dans de bonnes serres, où elle fait ses fonctions avec moins de vivacité.

15. Le grand chaud, celui de midi des jours bien ardents, lui fait presque le même effet que le froid ; elle se ferme ordinairement un peu. Le bon temps pour l'observer est sur les neuf heures du matin d'un jour bien chaud, et le soleil étant un peu couvert.

16. Un rameau coupé et détaché de la plante, continue encore à se fermer, soit quand on le touche, soit à l'approche de la nuit ; il se r'ouvre ensuite. Il a quelque analogie avec ces parties d'animaux retranchées qui se meuvent encore. Il conservera plus longtemps sa vie, s'il trempe dans l'eau par un bout.

17. La nuit lorsque la sensitive est fermée, et qu'il n'y a que ses feuilles qui le soient, si on les touche, les côtes feuillées et les rameaux se ferment, se plient comme ils eussent fait pendant le jour, et quelquefois avec plus de force.

18. Il n'importe avec quel corps on touche la plante, il y a dans les articulations des feuilles un petit endroit, reconnaissable à sa couleur blanchâtre, où il parait que réside sa plus grande sensibilité.

19. La sensitive plongée dans l'eau, ferme ses feuilles et par l'attouchement, et par le froid de l'eau. Ensuite elle les rouvre, et si en cet état on les touche, elles se referment, comme elles eussent fait à l'air ; mais non pas avec tant de vivacité. Il en Ve de même des rameaux. Du jour au lendemain la plante se rétablit dans le même état que si elle n'avait pas été tirée de son élément naturel.

20. Si on brule ou avec une bougie, ou avec un miroir ardent, ou avec une pince chaude, l'extrémité d'une feuille, elle se ferme aussitôt, et dans le même moment son opposée ; après quoi toute la côte feuillée, et les autres côtes, même le rameau, et même les autres rameaux de la branche en font autant, si l'impression de la brulure a été assez forte, et selon qu'elle l'a été plus ou moins : cela marque une communication, une correspondance bien fine et bien étroite entre les parties de la plante. On pourrait croire que la chaleur les a toutes frappées ; mais on peut faire en sorte qu'elle ne frappe que l'extrémité de la feuille brulée : on fera passer l'action du feu par un petit trou étroit d'une plaque solide, qui en garantira tout le reste de la plante, et l'effet sera presque entièrement le même.

21. Une goutte d'eau-forte étant mise sur une feuille, assez adroitement pour ne la pas ébranler, la sensitive ne s'en aperçoit point, jusqu'à ce que l'eau-forte ait commencé à ronger la feuille ; alors toutes celles du rameau se ferment. La vapeur du soufre brulant fait dans le moment cet effet sur un grand nombre de feuilles, selon qu'elles y sont plus ou moins exposées. La plante ne parait pas avoir souffert de cette expérience. Une bouteille d'esprit de vitriol très-sulphureux et très-volatil, placée sous une branche, n'a causé aucun mouvement. Il n'y en a eu non plus aucune altération à la plante, quand les feuilles ont été frottées d'esprit de vin ; ni même quand elles l'ont été d'huîle d'amande douce, quoique cette huîle agisse si fortement sur plusieurs plantes, qu'elle les fait périr.

22. Un rameau dont on avait coupé, mais avec la dextérité requise, les trois quarts du diamètre, ne laissa pas de faire sur le champ son jeu ordinaire ; il se plia, ses feuilles se fermèrent et puis se rouvrirent, et il conserva dans la suite toute sa sensibilité. Il est pourtant difficîle de concevoir qu'une si grande blessure ne lui ait point fait de mal.

23. Lorsqu'on coupe une grosse branche de sensitive, avec un canif tranchant et bien poli, la lame reste teinte d'une tache rouge qui s'en Ve facilement à l'eau, et qui est âcre sur la langue. Cette liqueur blanchit en séchant, et s'épaissit en forme de mucilage. M. Hook rapporte que si l'on arrache une branche de sensitive lorsque les feuilles sont fermées, il ne sort point de liqueur par la partie arrachée ; mais que si on l'arrache adroitement sans faire fermer les feuilles, il en sort une goutte. MM. du Fay et du Hamel ont fait cette expérience avec soin ; mais il leur a paru que la goutte de liqueur sortait toujours, soit que les feuilles fussent ouvertes ou fermées lorsque l'on coupe ou que l'on arrache la branche ; cependant ce qui est arrivé dans le cas rapporté par M. Hook, dépend peut-être de quelque autre circonstance, comme de la grosseur de la branche, ou du plus ou moins de vigueur de la plante ; d'ailleurs cette expérience n'est pas facîle à exécuter, parce qu'il faut user de beaucoup de précautions, pour couper ou arracher une branche sans faire fermer les feuilles.

24. La vapeur de l'eau bouillante dirigée sous les bouts des feuilles, fait le même effet que si on les brulait, ou si on les coupait ; mais son effet s'étend sur toutes les feuilles voisines, et elles sont engourdies pendant plusieurs heures, et même ne se rouvrent pas entièrement du reste de la journée.

25. La transpiration de la plante empêchée ou diminuée par une cloche de verre, dont elle sera couverte, ne nuit point à son mouvement périodique.

26. Il est troublé, déréglé par le vide de la machine pneumatique, mais non pas anéanti ; la plante tombe en langueur, comme toute autre y tomberait.

Explications imaginées de ses phénomènes. Tels sont les faits résultants des observations faites en France sur la sensitive : on a tenté de les expliquer sans les connaître, et cela n'est ni rare ni nouveau.

M. Parent dit que ce sont des mouvements convulsifs ; il imagine qu'il y a dans cette plante un fluide très-subtil comme des esprits, que l'impression reçue de dehors agite plus qu'à l'ordinaire, et détermine à couler plus abondamment dans certains canaux. Mais cette idée n'approfondit rien, et n'est qu'un jeu d'esprit.

Miller a recours à la structure des fibres, des nerfs, des valvules et des pores de la plante. Son explication plait, parce qu'elle parait mécanique ; cependant dans l'exposition, elle est si confuse et si chargée d'autres suppositions, que je n'ai pas le courage de les détailler. D'ailleurs il est certain que toutes les explications ne peuvent être qu'imparfaites et fausses, si elles ne sont auparavant appuyées sur la connaissance des faits et des expériences multipliées. MM. Hook, du Fay et du Hamel, ont montré l'exemple ; ils se sont attachés à l'observation des phénomènes de la sensitive ; mais il y en a peut-être d'autres aussi importants qui leur ont échappé, et qui nous sont encore inconnus. Enfin quand on les connaitra tous, les expliquera-t-on ?

De la culture de cette plante. En attendant l'événement, cette plante par sa singularité mérite, plus qu'aucune autre, d'être cultivée dans les jardins des curieux ; et voici la méthode de s'y prendre, avec des remarques particulières sur la plupart de ses espèces.

Les sensitives se multiplient toutes de graines, qui doivent être semées sur couche de bonne heure au printemps ; et quand elles ont poussé, être transplantées dans de petits pots remplis de bonne terre légère. On plongera ces pots dans un lit chaud préparé, et l'on aura soin d'arroser et d'abrier les plantes, jusqu'à ce qu'elles aient pris racine. Alors on les arrosera plus souvent, et l'on leur donnera de l'air à proportion de la chaleur de la saison. On observera toujours de leur conserver une bonne chaleur, et de couvrir les verres tous les soirs avec des nattes, ce qui contribuera fort à l'accroissement de ces plantes.

De cette manière dans l'espace d'un mois, leurs racines rempliront les pots ; c'est pourquoi il faudra les transplanter dans de plus grands, en faisant sortir les plantes par secousses des petits pots où elles étaient, avec la terre qui se trouvera attachée à leurs racines. On continuera de les tenir dans un lit chaud, de les arroser, et de leur donner de l'air à proportion que la saison deviendra plus chaude ; mais il ne faut pas les exposer trop longtemps à l'air, parce qu'il détruirait leur qualité sensitive.

La première des espèces dont nous avons parlé, étant ainsi soignée, croitra dans le terme d'une saison, à 8 ou 9 pieds de haut, et produira abondance de fleurs ; mais sa graine vient rarement en maturité, excepté que l'automne ne soit chaude ; et comme cette espèce est plus délicate que les autres, on a de la peine à la conserver pendant l'hiver.

La seconde espèce, mimosa humilis, spinosa, frutescens, est beaucoup plus petite, s'élevant rarement au-dessus de deux pieds de haut ; mais elle est épineuse, et pousse plusieurs rameaux. Elle subsiste 2 ou 3 ans, si on la tient dans une bonne serre, et produit coutumièrement des graines chaque année : c'est la plus commune dans les jardins de France et d'Angleterre, la plus facîle à conserver, et la plus abondante en graines.

La troisième espèce, mimosa spinis horridiuscula ; a des feuilles larges et est armée d'épines pointues ; elle s'élève à la hauteur de 5 ou 6 pieds, pousse des tiges très-déliées. Elle graine rarement dans nos pays.

La quatrième espèce, mimosa latifolia, parait être de toutes la plus sensible. Elle ressemble à la troisième, excepté qu'elle est plus droite, qu'elle a moins d'épines et qu'elle produit des fleurs d'une couleur différente. On apporte souvent de sa graine en Angleterre de l'île des Barbades, d'où l'on juge que c'est l'espèce la plus commune de tout ce pays-là.

La cinquième espèce, mimosa spuria, italica dicta ; n'est cultivée dans les jardins que pour l'amour de la variété, car elle est moins estimée que les autres, parce qu'elle n'a aucun mouvement de contraction quand on la touche.

On croyait autrefois que ces plantes étaient annuelles, parce qu'elles périssaient à l'approche de l'hiver ; mais depuis l'invention des lits de tan et des serres, la plupart de ces espèces se conservent fort bien deux ou trois ans, et produisent des semences.

La serre dans laquelle on mettra ces plantes en hiver, doit être graduée à la chaleur des ananas ; on les arrosera fréquemment, mais en petite quantité d'une eau un peu tiede. On aura encore soin d'émonder toutes les feuilles flétries, qui ne feraient que servir de nid aux insectes, et porter préjudice.

Si l'on manque de serres pour conserver ces plantes pendant l'hiver, il faut en élever chaque année de graine, et les tenir dans un lit chaud, où elles subsisteront jusqu'au froid de l'automne ; ainsi que divers particuliers le pratiquent.

Des sensitives étrangères. Ce sont là les sensitives les plus communes qu'on cultive en Europe. Il y en a beaucoup d'autres espèces dans les Indes orientales et en Amérique, que nous ne connaissons point. Les voyageurs disent qu'à Toqué près de Panama, on en trouve des champs couverts.

Christophle de la Coste (Christophorus à Costa), décrit dans son Traité des drogues d'Amérique, une espèce de sensitive rampante, qui s'appuie sur les arbrisseaux et sur les murailles voisines ; sa tige est menue, presque ronde, d'une belle couleur verte, parsemée par intervalles de petites épines piquantes ; ses feuilles d'en-haut ressemblent à celles de la fougère femelle, et ont l'odeur et le goût de la réglisse ; sa racine est longue. Cette sensitive croit dans les jardins, aux lieux humides et pierreux.

On parle d'une autre espèce de sensitive des Indes orientales beaucoup plus curieuse, et que les Malabares appellent todda-vaddi. Elle est aussi sensible au toucher que les mimoses qui le sont le plus ; mais aulieu que toutes les autres ferment leurs feuilles en-dessus, c'est-à-dire en élevant les deux moitiés de chaque feuille pour les appliquer l'une contre l'autre, celle-ci les ferme en-dessous. Si lorsqu'elles sont dans leur position orbiculaire, on les relève un peu avec les doigts pour les regarder de ce côté-là, elles se ferment aussi-tôt malgré qu'on en ait, et cachent ce qu'on voulait voir. Elles en font autant au coucher du soleil ; et il semble que la plante se prépare à dormir : aussi est-elle appelée tantôt dormeuse, tantôt chaste. Mais outre ces noms qui lui conviennent assez, on lui a donné quantité de vertus imaginaires ; et il n'était guère possible que des peuples ignorants s'en dispensassent.

Les vertus médicinales de la sensitive sont imaginaires. Quelques-uns même de nos médecins, par l'admiration qu'ils portaient à notre sensitive, lui ont attribué les qualités de calmer la toux, d'éclaircir la voix, de mitiger les douleurs des reins ; que ne lui donnaient-ils plutôt la vertu de consolider les plaies, d'arrêter les hémorrhagies, de guérir les convulsions ? Chimères pour chimères, ces dernières étaient plus attrayantes, et plus analogues aux phénomènes de la mimose. (D.J.)