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Catégorie parente: Physique particulière
Catégorie : Physiologie
S. f. (Physiologie) humeur plus ou moins tenue, séparée du sang, selon la plupart des physiciens, &, selon d'autres, par les vaisseaux artériels de Ruysch.

Plusieurs raisons persuadent que la sueur est une liqueur absolument artérielle ; 1°. elle sort par-tout le corps, même où personne n'a Ve des follicules subcutanées, comme à la paume de la main, à la plante des pieds, etc. 2°. l'injection des artères et leur comparaison avec le velouté de l'estomac et les intestins, démontrent qu'une humeur aqueuse est poussée par un canal continu de tuyaux artériels cylindriques ; 3°. quoiqu'un corps sain ne sue pas, la sueur vient en excitant le mouvement du sang artériel par quelque boisson chaude, ou par l'exercice. Et par conséquent, si la filtration de la sueur était glanduleuse, les follicules devraient prodigieusement se distendre dans un corps qui est plusieurs jours sans sueur, et se vider promptement dans la sueur, comme ceux de la vessie et de l'urethre, par exemple, qui desséchés en peu de temps par l'usage des médicaments diurétiques, cessent de filtrer leur mucosité naturelle. 4°. Il parait cependant vrai que les glandes cutanées, toutes les fois que la sueur abonde trop à la peau, ne séparent pas leurs sucs gras bien purs, mais mêlés d'eau, plus copieux, et joints à l'humeur artérielle ; car la même détermination qui force les artères cutanées à filtrer beaucoup de sueur, agit de la même manière dans les artères qui séparent sous la peau des matières muqueuses. De-là vient qu'on sue davantage, et qu'on a une sueur grasse à la tête, aux aisselles, aux aines et au visage ; et c'est en ce sens qu'on doit admettre une sueur glanduleuse.

Après tout, soit que la sueur soit séparée du corps par les glandes miliaires, ou par les petits vaisseaux de Ruysch, il est toujours constant qu'elle est différente, selon les variétés de l'air, du climat, du sexe, de l'âge, du tempérament, du régime de vie, du temps de la coction, de la structure des excrétoires, de l'état de la santé, ou de celui de la maladie.

La sueur en général est aqueuse, un peu gluante, et d'une couleur qui panche vers le jaune, comme le linge le marque. De plus, elle est salée, et donne à-peu-près par la distillation les mêmes principes chymiques que l'urine ; s'ils sont plus doux, c'est qu'elle n'a croupi dans aucun follicule. Si l'on joint à cela ces sueurs des phtisiques, on sera convaincu qu'elle est composée du serum dissous par une circulation réitérée, et de beaucoup d'eau chargée de sel humain. Ce n'est pas tout, il y a divers phénomènes sur l'écoulement de la sueur dont il importe de donner l'explication.

1°. Quand le chyle ne se change pas en sang comme dans les phtisiques, la masse des fluides qui circulent n'est presque que de l'eau ; ainsi il n'est pas surprenant qu'elle s'échappe par les pores, et que les malades soient toujours baignés de sueur. Mais quand les vaisseaux se dilatent dans les chaleurs, quand le sang est poussé avec violence, comme dans les exercices violents, la sueur doit couler, puisque les engorgements qui surviennent alors, ferment les conduits de la transpiration. Cependant si le sang est poussé trop violemment, les artères compriment aussi les tuyaux sudoriferes ; c'est pourquoi les cordiaux suppriment quelquefois la sueur.

2°. Dans l'agonie et la syncope, le sang s'arrête, de-là vient que la partie aqueuse s'en exprime ; les vaisseaux secrétoires qui sont alors relâchés, ne résistent pas à la force qui pousse le sang.

3°. Dans la frayeur, il coule une sueur froide. Les nerfs sont agités par la puissance qui anime nos corps, et les diamètres des vaisseaux capillaires se raccourcissent : alors ces vaisseaux ne reçoivent plus tant de sang ; par conséquent les mouvements de la chaleur y cessent, cependant la liqueur aqueuse qui était dans les organes secrétoires sort par cette contraction ; elle est froide, puisqu'elle sort d'un lieu où la chaleur a été interrompue, et elle se refroidit encore en tombant sur une surface refroidie.

4°. Quand on entre d'un lieu chaud dans un lieu froid, on sue d'abord ; la fraicheur rétrécit la peau, en exprime la liqueur que la chaleur avait ramassée dans les couloirs : cette liqueur sort en gouttes, au lieu que sans cette compression subite, elle serait sortie en vapeurs.

5°. Si l'on descend dans un lieu profond, comme dans des mines, la sueur succede ; cela vient de ce que dans cet endroit profond l'air est plus pesant ; la peau est donc plus comprimée, et par conséquent l'eau ramassée dans les couloirs est exprimée.

6°. Si l'on relâche la peau, alors le sang ne trouvera pas tant de résistance dans les vaisseaux secrétoires ; par conséquent la sueur ou l'humeur aqueuse se séparera et sortira par ces vaisseaux : on relâche les tuyaux de la peau par des vapeurs d'eau tiede et par des bains ; on peut encore procurer le même relâchement par des remèdes internes.

7°. Le sang et la lymphe sont des liqueurs trop épaisses ; mais si on les divise, et si on les réduit parlà en une matière assez fine pour entrer dans les tuyaux secrétoires, on procurera la sueur.

8°. Lorsque le sang se trouve arrêté dans quelque viscère, il doit nécessairement gonfler davantage les vaisseaux : la sueur pourra donc survenir dans les autres parties, par la même raison qu'elle parait quand les muscles par leur contraction chassent le sang avec force de leurs vaisseaux dans d'autres.

9°. Si un corps a beaucoup de graisse, les vaisseaux seront comprimés, et par-là fort étrécis ; ainsi au moindre exercice le sang coulera dans ces vaisseaux avec rapidité, la sueur surviendra donc aisément ; d'ailleurs comme la graisse arrête la transpiration insensiblement, l'humeur aqueuse sera obligée de se déterminer par les gros tuyaux sudoriferes qui vont aboutir à la peau dès qu'il surviendra quelque mouvement. On peut ajouter une troisième raison, savoir, que la graisse doit être regardée comme une couverture ; il n'est donc pas surprenant qu'un corps gras sue facilement.

10°. Dans la fièvre, les extrémités capillaires sont bouchées par une matière visqueuse ; le sang qui ne peut pas passer librement à cause de cet obstacle, dilate davantage les vaisseaux, y excite des battements plus forts et plus fréquents ; mais dès que par le mouvement cette matière a été divisée, il survient nécessairement des sueurs, parce que les passages se débouchent.

11°. La sueur ne coule que par quelque cause violente. Lorsque tout est tranquille dans le corps humain, elle ne parait pas. De plus, la transpiration insensible, qui est la source de notre santé, se trouve interrompue par la sueur, qui n'est pas assez abondante pour tenir lieu de cette évacuation : on doit donc regarder le corps en sueur comme dans un état de maladie.

12°. La matière de la sueur doit être plus grossière que celle de la transpiration, car elle est filtrée dans des tuyaux plus grossiers ; comme ces tuyaux viennent des vaisseaux sanguins, le sang pourrait y passer s'ils se dilatent jusqu'à un certain point ; c'est aussi cette communication des vaisseaux sanguins avec ceux de la sueur, qui fait que quelques aliments communiquent à la sueur leur odeur et leur couleur. Il est rapporté dans les journaux d'Allemagne que la rhubarbe avait coloré la matière de la sueur à M. Mentzel. Salmuth et Bennet citent des exemples de personnes dont l'odeur de l'ail se faisait apercevoir dans leur sueur. Pyrard raconte que la sueur des negres d'Afrique est si fétide quand ils sont échauffés, qu'il n'est pas possible d'approcher d'eux. Voilà les principaux phénomènes de la sueur.

Il ne me reste plus qu'à dire un mot des désavantages de son abondance. Elle nuit toujours par son premier effet, et si quelquefois elle est utile, ce n'est que par accident. On sait que ce sont les mêmes vaisseaux qui transpirent et qui suent ; s'ils se relâchent, ou que la circulation redouble, ce qui n'était qu'une vapeur d'eau forme des gouttes ; de-là vient qu'on sue beaucoup dans toutes les dissolutions du sang, dans le scorbut, dans la phtisie, dans la défaillance et dans tous les maux chroniques. Il y a maladie, dit Hippocrate, où règne la sueur. Cette façon de penser est bien différente de celle de quelques médecins qui attaquent tant de maladies par la provocation artificielle des sueurs. Je ne parle point de ceux qui font usage des sudorifiques dans les maladies inflammatoires, et en particulier dans la petite vérole ; cette pratique ne prendra jamais dans l'esprit des gens éclairés.

Cependant nous reconnaissons qu'il y a des sueurs vraiment critiques et salutaires ; telles sont, par exemple, celles qui avec un signe de coction dans l'urine, prennent vers le septième jour d'une maladie inflammatoire, et sont continuées sans jeter le malade dans la langueur. Hippocrate admet aussi de telles sueurs comme bonnes dans le causus ou fièvre ardente, dans les fièvres aiguës, dans les fièvres remittentes et dans la pleurésie ; mais en général les sueurs ne produisent aucun avantage dans le commencement de ces mêmes maladies, et n'en diminuent point la cause, parce qu'elles dépouillent le sang de la sérosité qui lui est nécessaire pour en surmonter la violence. (D.J.)

SUEUR, (Médecine séméiotique) l'examen de la sueur n'est point ou ne doit point être un objet indifférent pour le praticien, surtout dans le traitement des maladies aiguës ; les signes que lui fournit cette excrétion assez exactement vérifiés, peuvent lui aider à reconnaître quelques maladies, à en distinguer les différents états ; ils répandent principalement des lumières sur le pronostic, partie plus brillante et non moins avantageuse ; non-seulement la sueur peut servir à annoncer un événement futur favorable ou pernicieux, mais souvent elle contribue à le produire ; une sueur abondante survenue un des jours critiques, n'est pas un simple signe passif de la guérison prochaine, elle en est la cause la plus efficace. Des sueurs continuelles en même temps qu'elles annoncent une maladie dangereuse, augmentent beaucoup le danger par le desséchement et l'épuisement qu'elles occasionnent surement ; c'est pourquoi les signes qu'on tire de la sueur sont toujours assez certains, le mal ou le bien qu'ils annoncent étant le plus souvent l'effet de cette excrétion diversement modifiée ; c'est toujours dans les écrits d'Hippocrate qu'il faut puiser les observations, les faits sur lesquels ils sont établis, et les vérités ou les axiomes qui en résultent. Avant lui on aurait inutilement cherché ces signes, et on ne les trouvera dans aucun des auteurs qui l'ont suivi, copié ou commenté, exposés avec plus d'exactitude et de précision. Prosper Alpin, dont les ouvrages seront toujours précieux aux vrais observateurs, a cependant trop raisonné la partie séméiotique qu'il a tirée d'Hippocrate. C'est un défaut qu'il doit sans-doute à Galien dans les volumineux écrits duquel il me parait avoir étudié la doctrine du divin vieillard plutôt que dans les ouvrages-mêmes de cet illustre législateur de la Médecine ; laissant donc à part les aitiologies assez peu satisfaisantes qu'il propose d'après Galien, ne prenons que les faits, et tâchons de les présenter d'une manière et dans un ordre convenables.

On peut, dans les sueurs, considérer la quantité, la qualité, les parties par où elle se fait, le temps de la maladie auquel elle a lieu, et l'état du malade qui l'éprouve. La quantité de la sueur peut être trop grande ou trop petite ; la qualité varie principalement par rapport à l'odeur et à la chaleur. Quelques auteurs ajoutent fort inutilement par rapport au goût ; car qui est-ce qui goute la sueur de ses malades, et quel signe lumineux a produit l'attention à cette qualité ? Les parties par où se fait la sueur peuvent être plus ou moins étendues ; de-là nait la division importante des sueurs en générales et particulières. Le temps de la maladie les fait distinguer en critiques et symptomatiques. L'état du malade favorise la même distinction, et établit celle des sueurs bonnes, mauvaises et mortelles : ce sont-là les principales sources d'où découlent tous les signes qui se tirent de la sueur. Dans l'exposition que nous allons en faire, nous prendrons la méthode suivante ; détaillant d'abord les signes heureux et critiques ; 2°. ceux qui font craindre quelque symptôme fâcheux déterminé ; 3°. ceux qui sont en général mauvais, ou mortels.

I. On doit en général regarder comme avantageuses les sueurs qui paraissent, après la coction, un des jours critiques, qui emportent entièrement la fièvre, et celles qui découlent de tout le corps, sont chaudes, forment de petites gouttes, et diminuent la violence des accidents. Hippocr. prognost. lib. I. n °. 18. Les jours auxquels les sueurs survenues sont bonnes, et même critiques, sont le 3, le 5, le 7, le 9, le 11, le 14, le 17, le 21, le 27, le 31 et le 34. Aphor. 36. lib. IV. Hippocrate n'a point fait à dessein mention du quatrième jour, quoiqu'il passe ordinairement pour un des critiques, parce que, remarque Galien, les fièvres très-aiguès ayant leur redoublement les jours impairs, la crise ne peut se faire que dans ce même temps ; et Prosper Alpin ajoute qu'il n'a presque jamais observé ce jour-là des sueurs favorables. Les sueurs critiques sont ordinairement précédées de frissons ; les fièvres intermittentes en offrent des exemples très-fréquents, où l'on voit encore que la quantité des sueurs est proportionnée à la durée et à l'intensité du frisson ; et quoiqu'elles soient inutiles à critiquer pour le fond de la maladie, pour la cause des accès, elles n'en sont pas moins critiques pour chaque accès particulier dont elles sont la terminaison ordinaire. Cette assertion se trouve aussi confirmée par les histoires de plusieurs malades qu'Hippocrate a rapportées dans ses épidémies, où il dit que les malades frissonnaient, avaient ensuite la fièvre très-aiguè, ardente, , et suaient enfin très-abondamment : ainsi la femme qui demeurait sur le rivage, eut un léger frisson le onzième jour, qui fut suivi d'une fièvre très-vive, la sueur survint, et la fièvre cessa. Charion eut de même un petit frisson, la fièvre et des sueurs entièrement critiques. C'est avec raison que Galien assure que les sueurs qui succedent aux frissons sont très-heureuses si elles paraissent avec des signes de coction. Il n'est pas moins avantageux que les sueurs soient chaudes et universelles ; tous les malades qui en ont été soulagés ou guéris, dont il est parlé dans les épidémies, les ont éprouvées telles ; Cléomastide, Meton, Mélidie, Anaxion, la femme qui demeurait sur le rivage, le malade du jardin de Déalces, etc. Périclès eut sur le midi une sueur abondante et chaude, et qui découla de tout le corps, la fièvre cessa et ne revint plus. Nicodeme éprouva la même chose ; la vierge de Larisse frissonna, et bientôt après eut des sueurs copieuses, chaudes et universelles, et fut parfaitement guérie, epidem. lib. III. sect. 11. aegrot. 8. 10. 11 et 12. Les sueurs venant peu-à-peu sont d'un grand secours dans les convulsions accompagnées d'extinction de voix durable, coac. praenot. n °. 13. cap. xiv. Les personnes grêles, maigres, qui crachent beaucoup, se trouvent très-bien de suer en dormant. Plusieurs malades sont aussi soulagés par les sueurs, ibid. n °. 12. cap. Xe Les douleurs aux hypocondres avec extinction de voix dans le cours des maladies aiguës se terminent heureusement par les sueurs ; et si cette crise n'a pas lieu, ces douleurs sont d'un mauvais caractère et très-dangereuses, prorrhet. lib. I. sect. 11. n °. 57. Les malades qui sont au commencement agités, ont des insomnies, rendent par le nez du sang goutte-à-goutte, qui soulagés le sixième jour, retombent pendant la nuit plus mal qu'auparavant, ont le lendemain des légères sueurs, et tombent ensuite dans l'assoupissement et le délire ; ces malades, dis-je, ont à la fin une hémorragie du nez très-abondante, ibid. sect. 3. n °. 40. Les délires avec refroidissement occasionnés par la crainte, sont terminés par des fièvres accompagnées de sueurs et des sommeils qui interceptent la voix, coac. praen. cap. xxij. n °. 8.

On a lieu d'attendre des sueurs critiques ou avantageuses dans les maladies aiguës, lorsque les signes généraux de coction ont paru, et qu'on observe ceux d'une crise prochaine, lorsque la peau est lâche et molle et qu'elle devient morte ; que la chaleur du corps est humide ; que le visage est très-rouge ; que le frisson survient ; que le ventre est resserré, les urines peu abondantes ; que la saison est convenable, ce qui arrive surtout lorsque l'été est humide et semblable au printemps, aphor. 6. lib. III. Lorsqu'il y a eu des délires, et enfin ce qui est le signe le plus sur et le plus constant, lorsque le pouls devient mol et ondulant ; ce caractère du pouls, avant-coureur de la sueur critique, décrit par Galien, a été copié machinalement par tous les auteurs qui l'ont suivi, et aucun jusqu'à Solano n'a imaginé que les autres évacuations critiques devaient naturellement être précédées et annoncées par un pouls particulier. Ce médecin espagnol a fort bien Ve que le dévoiement et l'hémorragie du nez avaient leur pouls propre ; mais il n'a Ve que cela. Cette partie a reçu beaucoup d'accroissement et de perfection par les observations neuves et intéressantes de M. Bordeu. Voyez l'art. POULS. Solano a dit que le pouls de la sueur, qu'il appelle inciduus, était celui " dans lequel deux pulsations, trois ou quatre tout-au-plus, s'élèvent non-seulement au-dessus des autres, mais aussi par degrés chacune au-dessus de la précédente, la seconde au-dessus de la première, et ainsi de suite jusqu'à la quatrième inclusivement ; car Solano n'a jamais observé plus de quatre pulsations consécutives de cette sorte ". Galien avait déjà remarqué cette élévation graduée des pulsations. M. Bordeu prétend que ce pouls ondulant n'est pas simple, et qu'il tient toujours un peu du pectoral, et que la vrai pouls de la sueur est plein, souple, développé, fort ; que quelques pulsations s'élèvent au-dessus les unes des autres, et vont en augmentant jusqu'à la dernière qui se fait distinguer par une dilatation, et une souplesse plus marquée que dans les autres pulsations. Recherches sur le pouls, chap. XVIe

II. Les sueurs n'annoncent pour l'ordinaire un symptôme ou un accident déterminé que de concert avec quelques autres signes, et dans certains cas particuliers. Ainsi les sueurs abondantes sont rangées parmi les principaux signes d'une suppuration déjà faite dans la poitrine, prognost. lib. II. n °. 59. et on observe dans ce cas que les sueurs commencent à se faire par la poitrine, et qu'elles y sont toujours en plus grande quantité ; ce qui vérifie encore l'axiome, qui dit que le siege du mal est dans la partie par où se fait la sueur, aphor. 38. lib. IV. ou les sueurs copieuses, chaudes ou froides continuelles sont un signe que la maladie sera longue et même dangereuse, ou que le corps a trop d'humidité, et en ce cas elles indiquent les purgatifs émétiques, si le sujet est robuste ; cathartique, s'il est d'une complexion délicate ; et si ces causes n'ont point lieu, ces sueurs dénotent que le malade mange trop, aphor. 42. 56. lib. VII. La fièvre aiguë accompagnée de sueur survenue à un malade dont l'esprit n'est pas tranquille, annoncent et déterminent la phrénésie, prorrhet. l. I. sect. 1. n °. 17. les sueurs qui paraissent avec des tremblements convulsifs, indiquent leur retour, ibid. sect. 3. n °. 13. des légères sueurs, , avec douleur de tête et constipation précèdent et présagent les convulsions, ibid. n °. 23. ramolissement de la langue, dégout, sueurs froides à la suite d'un dévoiement, sont des signes de vomissement de matières noirâtres, coac. praenot. c. VIIe n °. 4.

III. Les sueurs qui fournissent un pronostic fâcheux, ou même qui donnent lieu de craindre la mort, sont en général celles qui paraissent avant la coction, par conséquent aucun des jours critiques qui n'apportent aucun soulagement, qui sont en trop petite ou trop grande quantité, qui ne sont que partielles, qui sont froides et fétides, et qui enfin sont accompagnées de signes pernicieux ; la sueur qui commence en même temps que la fièvre dans les maladies aiguës est très-mauvaise, coac. praenot. e. xxvj. n °. 3. elle annonce une crise imparfaite et très-laborieuse, epidem. lib. II. n °. 2. Waldschmid assure que les sueurs abondantes qui viennent au commencement des petites-véroles, et qui sont accompagnées de beaucoup de faiblesse, sont mortelles ; les sueurs qui n'ont aucun bon effet, sont censées inutiles, si elles n'ont d'ailleurs aucun mauvais caractère ; mais elles deviennent dangereuses, si elles sont trop abondantes, ce qui peut arriver de deux façons, ou si dans peu de temps elles coulent en grande quantité, ou si elles persistent trop longtemps et sont continuelles. Les sueurs abondantes qui fatiguent sont toujours mauvaises ; si la fièvre ne diminue pas, elle en devient plus longue, aphor. 56. lib. IV. lorsqu'elles sont abondantes et chaudes, le danger est moins grand que lorsqu'elles sont en même temps froides, aphor. 42. ibid. La plupart de ceux qui tombèrent malades pendant la constitution pestilentielle décrite, epidem. lib. III. sect. 11. n °. 18. moururent ou trainèrent longtemps, les frissons étaient fréquents, la fièvre aiguë et continuelle, et les sueurs copieuses presque toujours froides paraissaient dans des temps peu convenables. Pythion eut le jour de sa mort le dixième de sa maladie une extinction de voix, un froid vif, la fièvre très-aiguè et des sueurs abondantes, ibid. aegr. 3. Les sueurs survenues même les jours critiques, si elles sont fortes, abondantes et rapides, sont dangereuses ; il en est de même, si elles sortent du front comme des gouttes ; et si elles sont froides et copieuses, elles ne peuvent paraitre ainsi sans beaucoup d'effort et de violence, aphor. 4. lib. VIII. Ceux qui, après le frisson, ont des sueurs abondantes, sont très-dangereusement malades, coac. praen. c. j. n °. 13. Les sueurs assidues, continuelles sont toujours symptomatiques et mauvaises, quand même elles ne seraient pas fort abondantes. Le phrénétique, dont parle Hippocrate dans ses épidémies, lib. III. sect. aegr. 4. vomissait des matières virulentes, avait une fièvre mêlée de frisson et des sueurs continuelles. Ce symptôme est très-ordinaire, et mortel dans le troisième degré de phtisie et dans les consomptions : les sueurs qui cessent trop-tôt, ou qui sont trop légères, les désudations, , ne sont pas moins dangereuses que les précédentes. Galien a fort judicieusement remarqué que les sueurs qui ont commencé à paraitre et qui cessent ensuite tout-à-coup, sont très-mauvaises, comment. in prorrhet. lib. I. Ceux qui ne suent que peu, et surtout aux environs de la tête dans les maladies aiguës, et qui sont inquiets, sont dans un danger pressant, surtout si les urines sont en même temps noires ; il en est de même, s'ils ne peuvent dormir et si la chaleur revient, prorrhet. lib. I. sect. 11. n °. 18. et 33. De légères sueurs sont surtout pernicieuses, si elles se font avec refroidissement à la suite d'un saignement de nez, ibid. sect. III. n °. 34. Si elles succedent à des horripilations fréquentes qui passent et qui reviennent souvent, à des frissons qui accompagnent l'assoupissement, l'ardeur du visage et les douleurs de tête ; si elles se rencontrent avec lassitude, obscurcissement de la vue, vieille toux, et surtout si ces malades sont promptement rechauffés, et lorsque ces sueurs légères paraissent après un frisson suivi de réfroidissement, avec douleur de tête et du col, et perte de voix, les malades meurent avec une gêne dans le gosier, qui empêche la libre sortie de l'air, com. praenot. c. j. n °. 12. 8. 7. 35. 36. 41. 42. 1. Le refroidissement ou le frisson qui succedent à ces légères sueurs, les rendent presque toujours mortelles, surtout s'il y a de fréquentes alternatives de frissons et de sueurs, le ventre se relâche à la fin, et il se fait des suppurations, ibid. n °. 11. et 41. On peut voir combien fréquemment le frisson qui suit et intercepte les sueurs, annonce et précède la mort des malades, dans les histoires de la femme de Droméadus, epidem. lib. I. n °. 34. p. 11. de la fille d'Euryanocté, du jeune homme qui demeurait au marché des menteurs, ibid. lib. III. sect. I. aegr. 6. et 8. de la femme de Théodore, de celle d'Euxenius et d'Aristocrate, epidem. lib. VII. n °. 45, etc. Autant les sueurs générales sont avantageuses, autant celles qui n'ont lieu que par quelque partie du corps, par le front, la tête, le col et les clavicules, la poitrine, etc. sont funestes et de mauvais augure, tous les malades dans lesquels Hippocrate a observé ces sueurs partielles sont morts, aussi les met il au nombre des signes qui caractérisaient dès le commencement les fièvres ardentes qui devaient avoir une terminaison peu favorable, epidem. lib. I. passim. Les sueurs froides sont les plus pernicieuses de toutes, surtout si elles ne sont pas générales, prognost. lib. I. n °. 18. on les observe souvent dans les derniers temps des maladies, lorsque les malades sont prêts à rendre le dernier soupir ; si elles se rencontrent avec une fièvre légère, elles n'annoncent que de la durée ; mais si la fièvre est aiguë, elles dénotent une mort prochaine, aphor. 37. lib. IV. elles viennent quelquefois à la suite des déjections noires, coac. praen. c. xxviij. n °. 43. Philiscus eut le cinquième jour des sueurs froides, et mourut le lendemain. Dans Silenus, après l'apparition de ce symptôme, la mort fut plus lente, mais non pas moins certaine, epidem. lib. I. n °. 24. et 25. aegr. 1. et 2. Enfin quoique les sueurs n'aient aucune mauvaise qualité, si elles paraissent en même temps que d'autres signes fâcheux, elles contribuent à confirmer le pronostic de mort, surtout si elles ne dissipent point ces accidents. Ainsi la femme d'Olympiade avait la voix éteinte, l'orthopnée, mauvaise couleur, et suait principalement des jambes et des pieds, elle était déjà à l'agonie et dans les bras de la mort, ibid. lib. VII. n °. 36. Erasinus dont la sueur était jointe à des convulsions, et qui avait les extrémités froides et livides, mourut le cinquième jour, ibid. lib. III. sect. 3. aegr. 8. d'où l'on peut conclure que, quoique les sueurs soient des signes assez certains par elles-mêmes, on risquerait souvent de se tromper si l'on s'en tenait à ce seul signe, et l'on voit la nécessité de combiner tous les signes pour pouvoir porter un pronostic à-peu-près certain, c'est-à-dire qui ait beaucoup de probabilité : toutes les parties de la séméiotique se prêtent un appui et une force réciproques ; on ne peut, sous quelque prétexte que ce sait, s'exempter de les approfondir toutes avec soin, la moindre négligence sur ce point est impardonnable ; elle peut tourner au déshonneur du médecin coupable, et qui pis est au détriment du malade innocent. (m)

SUEUR ANGLOISE, (Médecine pratique) maladie particulière aux Anglais, dont la sueur est le symptôme principal, et l'unique remède ; elle est connue dans les différents auteurs sous les noms de fièvre sudatoire, , de peste britannique, d'éphemère pestilentielle, de suette, &c.

Cette maladie épidémique en Angleterre, n'y a pas été de tout temps ; l'époque de son invasion dans ce pays, n'est pas bien déterminée : les écrivains qui la font remonter aux temps les plus reculés, ne la placent pas avant l'année 1480 ; tels sont Surius, Cambden, Caïus, et Childrel : d'autres prétendent que cette maladie n'a commencé à faire des ravages qu'au commencement du seizième siècle ; mais ces prétentions sont détruites par les témoignages positifs des premiers, qui ne s'accordent cependant pas entr'eux sur l'année précise de son invasion. Le sentiment le plus commun, et qui parait le plus sur, c'est celui de Caïus, qui assure que la sueur anglaise se répandit pour la première fais, en 1483, dans l'armée d'Henri VII. roi d'Angleterre, dès qu'elle fut abordée au port de Milfort, dans la principauté de Galles ; elle gagna aussi Londres, où elle attaqua et tua un grand nombre de personnes, depuis le premier Septembre jusqu'à la fin du mois d'Octobre, alors les sueurs se calmèrent, et l'on n'en ressentit aucune atteinte jusque à l'été de 1485 ; depuis elle reparut en 1506, et en 1518, et cette année elle fut si violente, qu'elle emportait en trois heures les malades ; aucun sexe, aucun âge, aucune condition, n'échappa à ses coups, plusieurs villes furent entièrement dépeuplées : elle revint avec un peu moins de furie en 1528 ; cependant les malades qui en étaient attaqués succombaient en moins de six heures à la violence du mal, elle prit la plupart de ses victimes parmi les gens de considération : Henri VIII. régnant alors ne fut pas à l'abri de ses fureurs, il en fut frappé en 1529 ; ce fut alors qu'elle se répandit dans les contrées maritimes de la Hollande, de la Zélande, ensuite à Anvers ; de-là, dans la Flandre et le Brabant, et immola dans tous ces pays, des milliers d'habitants ; elle infecta aussi quelques provinces d'Allemagne, et interrompit à Marpurg le fameux colloque de Zuingle et de Luther, sur l'eucharistie. Enfin cette terrible maladie reparut en 1551, avec tant de violence, qu'il mourut dans un seul jour cent-vingt personnes à Westminster. Ses ravages furent encore plus affreux à Shrewsbury, séjour du célèbre Caïus, de qui nous tirons ces détails : ce canton fut presqu'entièrement dépeuplé. Les Anglais effrayés avec raison du danger prochain qu'ils couraient, cherchaient leur salut dans la fuite, remède assuré dans les autres épidémies ; mais ce fut inutilement, le mal les suivait et les attaquait particulièrement dans les pays où ils se réfugiaient ; eux seuls étaient sujets à cette maladie, les autres nations n'en éprouvaient aucune atteinte, et suivant les observations bien constatées, aucun étranger voyageant ou établi dans leur pays, n'en fut attaqué. Ce fut cette année que l'épidémie épuisa ses fureurs ; l'Angleterre en a été depuis ce temps exempte jusqu'à présent.

Les symptômes qui accompagnaient la sueur anglaise étaient différents dans presque tous les sujets ; elle s'annonçait le plus ordinairement par une douleur dans quelque partie, dans le col, les épaules, les bras, les jambes, etc. ou par une espèce de vapeur chaude qui parcourait ces parties ; peu après une chaleur brulante se répandait dans l'intérieur, le malade était tourmenté par une soif inextinguible, par des inquiétudes, des langueurs d'estomac, des maux de cœur, quelquefois il survenait des vomissements ; à ces accidents succédaient plus ou moins promptement des douleurs de tête, le délire, une langueur extrême, un penchant insurmontable au sommeil, le pouls devenait vite et véhément, et la respiration fréquente et laborieuse ; ces symptômes étaient tout-à-coup suivis d'une sueur plus ou moins abondante, qui venant ensuite à cesser, jetait les malades dans l'affaissement avant-coureur de la mort prochaine ; dans les différentes constitutions épidémiques, et dans les différents sujets, la rapidité avec laquelle tous ces phénomènes se succédaient, variait extrêmement ; en 1518, les malades avaient essuyé tous ces accidents, et étaient morts en trois heures ; en 1528, leur durée s'étendait jusqu'à six heures ; en général les malades n'étaient pas sans danger jusqu'à ce que les vingt-quatre heures fussent expirées ; c'était-là le terme le plus ordinaire de la sueur anglaise, qui l'avait fait appeler peste éphémère. On a observé que lorsque ses coups étaient moderés et portés ce semble avec choix, ils ne tombaient que rarement sur les pauvres, les vieillards, les enfants, les atrabilaires, et les personnes d'une constitution faible et délicate : les crapuleux, les personnes sanguines, celles qui faisaient un grand usage du lait, étaient les premières victimes de sa fureur.

Plusieurs objets s'offrent ici aux recherches des théoriciens, 1°. quelle est l'origine de cette maladie, la cause de son invasion en Angleterre ; 2°. pourquoi est-elle si aiguë ; 3°. pourquoi n'exerce-t-elle ses fureurs que sur le sang anglais, etc. Presque tous les auteurs qui en ont écrit, Herman comte de Nvénare, Riquinus, Schiller, et Alexander Benedictus, s'accordent pieusement à regarder cette maladie comme un des fleaux par lesquels un Dieu irrité exerce sa vengeance sur les criminels humains. La sueur anglaise a été principalement destinée à punir l'incrédulité, sans-doute plus familière aux Anglais, suivant ces vers de Pherntophius.

.... Coelestia numina nobis,

Nil sunt quam nugae, fabula, verba, jocus ;

Inde fames nobis, pestes, mars denique fontem

Hinc etiam inclements habet

Saevum, horrendum, atrox, genus immedicabîle morbi,

Nostrae perfidiae debitum, &c.

Et en partant de ces principes, on explique par la volonté de ce même Dieu, tous les autres phénomènes de cette maladie, et surtout son endémicité en Angleterre ; mais ces explications ne sauraient satisfaire le philosophe médecin, quoique infiniment persuadé que Dieu est l'auteur et la première cause de tous les effets, parce qu'il sait que pour les opérer, l'Etre souverain se sert des moyens physiques dont les recherches lui sont permises, et que les lui attribuer toujours, ou comme on dit, recourir sans-cesse à la sacristie, n'est qu'une ressource de la paresse orgueilleuse et de la superstitieuse ignorance. Quelles sont donc les causes physiques de la sueur anglaise ? Schiller pense que l'influence des astres, surtout de saturne, de mars, et de mercure, n'y a pas peu contribué. Voyez INFLUENCE DES ASTRES. Il ajoute que le changement considérable des saisons, le genre de vie, et la mauvaise qualité de l'air, doivent aussi être accusées ; il tire une preuve de l'action de l'air, de l'observation faite sur les oiseaux qui étaient attaqués de cette peste, et qu'on trouvait en grand nombre morts sur les arbres, avec des petits abscès sous les aisselles. Il n'est pas douteux que les mauvaises qualités de l'air ne soient la principale cause de toutes les maladies épidémiques et par conséquent de la sueur anglaise ; mais ce qu'il n'est pas possible de déterminer, pourquoi cet air n'a-t-il été infecté qu'en 1483 ? pourquoi, et comment, cette infection s'est-elle renouvellée de temps-en-temps ? Les mauvaises raisons qu'on en a données, laissant encore ces problèmes à décider. Pourquoi aussi les étrangers en étaient-ils exempts en Angleterre, et pourquoi les Anglais fugitifs dans les autres pays, n'étaient-ils pas à l'abri de ses coups ? Y aurait-il dans le sang des Anglais une disposition sans laquelle on peut impunément s'exposer aux causes morbifiques : porteraient-ils en naissant le germe de cette funeste maladie, qui ne peut être développé que par la constitution analogue de l'air ? cette disposition serait-elle un effet de leur façon de vivre, de l'usage immodéré qu'ils font de la chair des animaux, et de l'état particulier de leur atmosphère ? voilà des questions qu'on aurait pu décider, si les auteurs qui ont écrit sur cette maladie, eussent été meilleurs physiciens et plus exacts observateurs. La crainte peut être regardée comme une des causes des ravages de la sueur anglaise ; dans toutes les pestes et les maladies épidémiques, elle joue un très grand rôle ; mais elle ne produit jamais l'épidémie, elle ne sert qu'à en accélérer les progrès ; plusieurs auteurs se sont manifestement trompés, en généralisant cette cause. Voyez PESTE.

Dès que cette maladie se déclarait, il était très-important de la reconnaître, elle parcourait ses temps avec une si grande rapidité, qu'il eut été dangereux de s'y méprendre ; mais cette même rapidité en était un signe distinctif : d'ailleurs, lorsqu'une maladie est épidémique, il n'est pas à craindre qu'on la méconnaisse, quelque variés qu'en soient les accidents ; il y a toujours un caractère commun qui frappe les moins éclairés, et que la crainte rend encore plus remarquable.

Le danger qui accompagnait la sueur anglaise, n'a pas été ni aussi pressant, ni aussi certain dans tous les différents temps où elle a paru ; les années les plus meurtrières ont été, comme nous avons vu, 1518, 1528, et 1551. La première année que cette maladie se sit connaître, en 1483, l'incertitude des médecins, et les méthodes de traitement peu appropriées qu'ils suivirent, n'ajoutèrent pas peu à la violence des accidents ; et en effet, comme l'ont remarqué Herman, Erasme, et quelques autres, la sueur anglaise presque surement mortelle dès le commencement, se calma au point que personne n'en mourait que par le défaut ou l'ignorance du médecin ; ceux qui succombaient étaient toujours morts avant vingt-quatre heures : aucun, dit Thomas Morus, n'a péri de cette maladie que le premier jour ; Erasme a observé que les mêmes personnes étaient souvent attaquées trois ou quatre fois de cette maladie, jusqu'à ce qu'enfin elles devenaient hydropiques, epist. 57. lib. XXVI. la sueur qui paraissait était, suivant toutes les observations, plutôt une crise salutaire, qu'un symptôme dangereux ; sa cessation seule était l'accident le plus à craindre, la cause et le signe d'une mort prochaine ; ceux, dit Herman, dans qui on repercutait la sueur, mouraient en peu d'heures, et bientôt après leur cadavre détruit par la putréfaction, s'en allait en lambeaux et exhalait une odeur insupportable.

La sueur étant l'unique remède de cette maladie, il parait évidemment que le médecin n'a autre chose à faire qu'à seconder la nature, ou suppléer à son défaut si elle est trop faible ; il ne faut négliger aucun secours pour faire suer, les frictions doivent d'abord être employées ; si leur effet n'est pas assez considérable, il faut avoir recours aux sudorifiques internes ; la manière de les administrer est assez indifférente, peu importe qu'on les donne en opiate, en potion, en tisane, etc. il faut bien se garder d'employer les préparations de pavot, qu'on est assez dans l'usage de mêler aux potions sudorifiques, pour en assurer et en augmenter l'effet ; le sommeil que ces remèdes occasionnent est mortel dans ces maladies, et loin de l'exciter, il faut le prévenir et l'empêcher, en secouant le malade, en lui parlant à haute voix ; cette précaution est recommandée par tous les auteurs, ils s'accordent aussi tous à défendre tout aliment solide ou liquide, à moins que la faiblesse ne soit extrême, et que la syncope ne soit à craindre : alors on peut permettre un potage, ou un peu de poulet roti, et pendant tout le jour que dure, ou peut durer la maladie, il faut tenir le malade dans un lit bien chaud, bien couvert, sans cependant l'affaisser sous le poids des couvertures, avoir attention que l'air froid n'y pénètre pas ; dans cet état on le laisse suer sans le changer de linge ; dès qu'il a cessé et que les symptômes sont dissipés, on le frotte avec des serviettes chaudes, on lui met du linge blanc, et on le transporte dans un autre lit : on peut alors lui donner un bouillon, et le laisser dormir pendant quelques-heures, après quoi il n'est pas indifférent de lui provoquer de nouveau la sueur, si elle ne revient pas naturellement ; par ce moyen on prévient des rechutes presque toujours funestes. Riquinus raconte qu'un paysan attaqué de la sueur anglaise, méprisant les règles ordinaires de traitement, s'avisa de se jeter dans un four d'où l'on venait de tirer les pains, il y sua prodigieusement, on l'en retira après quelque temps extrêmement faible, mais guéri ; et ce qu'il y eut de plus singulier, c'est que, s'il en faut croire cet auteur, les pains qu'on cuisit après dans ce four, prirent une qualité venimeuse, et tous ceux qui en mangèrent moururent enragés. Il parait par-là qu'il n'y aurait pas de secours plus prompt et plus assuré dans la sueur anglaise que de mettre les malades dans une étuve, si l'on n'avait pas à craindre le même inconvénient : cette crainte est fondée sur une autre observation semblable, rapportée par Herman. Un médecin ayant des bubons pestilentiels sous l'aisselle gauche, Ve comme pour se laver au bain public, il fait allumer plus qu'à l'ordinaire le feu des poêles, et dans cette espèce d'étuve, il se fait frotter avec force par deux domestiques, pour exciter plutôt et plus abondamment la sueur qui ne tarda pas à couler de toutes parts ; il remédie à la faiblesse qu'il éprouvait par quelques verres de vin spiritueux, et sort ainsi du bain parfaitement guéri ; mais sa sueur avait tellement infecté le lieu du bain, que celui qui en avait la direction, ses domestiques, et tous ceux qui vinrent ensuite se baigner, y moururent aussitôt ; le gouvernement fut obligé de faire murer cet endroit, pour prévenir d'autres accidents aussi funestes.

La fuite étant un expédient observé inutîle pour se garantir de la sueur anglaise, les auteurs conseillent d'allumer de grands feux avec des bois odoriférants, dans les rues et les maisons, précaution conseillée par Hippocrate dans la peste, et couronnée par le succès ; de prendre des poudres et des infusions aromatiques, alexipharmaques, etc. et lorsqu'on en a heureusement réchappé, il faut bien se garder du froid qui ne manque pas d'occasionner un cours de ventre presque toujours mortel, comme le prouve la triste expérience de ceux qui étant guéris, s'y sont inconsidérément exposés. (m)

SUEUR, s. m. (Corroyeur) ouvrier qui autrefois travaillait les cuirs au sortir de la main du tanneur. C'était celui qui les mettait en suin ou en graisse, qu'on nomme alors souin ; les Sueurs, comme on le voit dans les anciens statuts des Corroyeurs, faisaient une communauté particulière, qui, aussi-bien que celle des Baudroyeurs et des Cordonniers, a été réunie à la communauté des Corroyeurs. Savary. (D.J.)