S. f. (Chimie, Pharmacie, Matière médicale, Diète) Le système des connaissances chimiques bien résumé, porte à croire qu'il existe une huîle générale universelle, un principe huileux primitif, très-analogue au soufre commun, du même ordre de composition que ce corps, formé même très-probablement des mêmes principes de l'acide vitriolique et du phlogistique.

Le principe huileux, consideré sous ce point de vue, ne différera du soufre commun que comme la plupart des substances végétales et animales diffèrent des substances analogues que renferme le règne minéral, le vinaigre radical de l'acide du vitriol, par exemple, c'est-à-dire, par une grande atténuation, un degré supérieur de subtilité, une mixtion plus délicate dû. aux élaborations propres à l'oeconomie végétale ou animale, et peut-être à la surabondance du principe aqueux qui est particulier à ces deux règnes. L'huîle peut être conçue aussi comme étant au soufre ce qu'une huîle rectifiée est à la même huîle brute. Ce rapport serait démontré sans-doute, si on réussissait à porter, par des rectifications, le soufre commun à l'état de ténuité spécifique de l'huile, à décomposer l'huîle et à démontrer ses principes aussi clairement qu'on a démontré ceux du soufre, et enfin à composer de l'huîle artificielle, comme on sait produire du soufre par art, et à la former des mêmes principes. Or je crois bien que ces trois problèmes pratiques doivent se ranger parmi les recherches chimiques les plus sublimes, mais non pas parmi les tentatives téméraires, les efforts supérieurs à l'art. Je crois même pouvoir me promettre de fournir cette démonstration complete , si je trouve le loisir nécessaire pour continuer, sur l'analyse végétale, les travaux que j'avais commencé dans le laboratoire de feu M. le Duc d'Orléans.

Ce qui augmente la difficulté de l'entreprise, c'est que la nature ne présente point de cette huîle pure primitive, et que l'art n'est pas parvenu jusqu'à présent à dépouiller les moins composées de tout principe hétérogène, de tout alliage. Celle de toutes les huiles connues qui approche le plus de la simplicité absolue, c'est l'éther des chimistes modernes, ou l'huîle retirée de l'esprit-de-vin par l'intermède des acides minéraux. Voyez ETHER.

Les diverses huiles que nous connaissons, sont composées de l'huîle primitive, et d'un autre principe ou de plusieurs autres principes. Ce sont ces divers principes et leurs différentes portions qui en constituent les genres et les espèces. Cette idée de la composition et des différences essentielles qui distinguent les huiles entr'elles, est, ce me semble, plus exacte et plus lumineuse que celle qu'on s'en ferait communément, en considérant chaque espèce d'huîle comme un composé ou un mixte essentiellement différent, ou n'ayant tout au plus de commun avec les autres espèces que la phlogistique ; car il n'est pas égal de dire qu'une telle huîle est formée par l'union d'un principe huileux universel, et de plus ou moins d'acide ; ou que cette huîle admet plus ou moins d'acide dans sa mixtion ou dans sa composition primordiale. D'après la dernière théorie, que je crois une erreur, on pourra déduire que l'acide est un des principes constitutifs de l'huile, de ce que " si on triture longtemps certaines huiles avec un sel alkali, et qu'on dissolve ensuite cet alkali dans l'eau il donne des crystaux d'un véritable sel neutre " ; au lieu que d'après la première manière d'envisager notre objet, cette apparition d'un sel neutre n'annoncera qu'un acide étranger à huile, combiné au principe huileux dans celle qui présente ce phénomène, de même qu'une substance comme gommeuse est combinée au principe huileux dans les huiles par expression, ou l'alkali fixe à une huîle quelconque dans le savon. Et certes, les compositions aussi intimes que celles d'un corps très-simple, tel qu'est l'huile, ne se détruisent pas par des moyens aussi vulgaires que la trituration avec un sel alkali ; c'est bien une opération d'un autre ordre que de démontrer la composition primitive de l'huile.

On range les diverses huiles sous le petit nombre des classes générales suivantes : on a les huiles essentielles, les huiles grasses, et les huiles empyreumatiques. La seule qualité vraiement générale ou essentielle qui convient à toute huîle sans exception, c'est l'inflammabilité et la miscibilité à une autre huîle quelconque.

Huiles essentielles. Toutes les parties des végétaux qui sont aromatiques ou odorantes, du moins le plus grand nombre, contiennent une huîle subtile, légère, volatile, renfermée dans de petites loges ou vésicules, sensibles même aux yeux nuds dans quelques sujets, comme dans les fleurs d'orange, l'écorce d'orange, de citron, les feuilles de millepertuis, etc. Cette huîle est libre, exemte de toute union chimique dans ces petits réservoirs ; il ne faut opérer aucune divulsion chimique pour l'en retirer ; les opérations par lesquelles on l'obtient, sont tout aussi mécaniques, ou, si l'on veut, tout aussi physiques que l'action de vider une bouteille ; elles ne font point partie de l'analyse végétale. Voyez DISTILLATION et VEGETALE ANALYSE. Les baumes liquides fournissent aussi une pareille huîle : quelques insectes, comme la fourmi, en contiennent aussi.

Cette huîle est appelée encore éthérée et aromatique. Le principe odorant dont elle est pénétrée, parait étrange à sa composition : on peut retirer ce principe des végétaux chargés d'huîle essentielle, pur, seul, au moins étendu seulement dans le principe aqueux, libre, volatil, de ces végétaux, et sans qu'un atome d'huîle soit entrainé avec lui, en un mot, sous la forme d'eau essentielle, voyez l'art. EAUX DISTILLEES. Il parait aussi que c'est à ce principe que les huiles essentielles doivent leur volatilité ; car dès qu'elles en ont été dépouillées, dès qu'un végétal a donné son eau essentielle, l'huîle restée dans ses réservoirs a perdu sa volatilité, un végétal épuisé de sa partie aromatique par une opération qui n'a pas entrainé en même temps son huîle essentielle, ne donne plus cette huîle par la même opération qui l'enlève toute entière, lorsqu'elle est chargée du principe aromatique.

La méthode la plus usitée et la plus générale, qu'on emploie pour obtenir les huiles essentielles, est précisément celle qui est décrite à l'art. EAUX DISTILLEES, sous le nom de second appareil ou second procédé ; savoir, la distillation de ces matières avec addition d'eau commune, ou mieux encore d'eau distillée de la même plante, toutes les fois qu'on en a ; et au moins n'en manque-t-on point pour les opérations qui suivent la première, quand on fait plusieurs distillations de suite. Cette opération exécutée sur les plantes aromatiques, donne constamment ces deux produits, l'eau distillée, et l'huîle essentielle. La seule manœuvre particulière qu'elle exige donc, relativement à ce dernier produit, c'est celle par laquelle on la sépare de l'eau : la voici. Si on reçoit l'eau mêlée de gouttes d'huîle dans les matras ordinaires, on laisse rassembler ces gouttes par le repos, ce qui se fait en fort peu de temps. Si l'huîle est plus légère que l'eau, on remplit le matras au point qu'elle s'élève jusqu'au plus haut de son cou ; alors on verse prestement toute l'huile, et une bonne partie de l'eau contenue sous elle, dans un entonnoir de verre à queue fort étroite, et dont on bouche la petite ouverture inférieure avec le doigt ; on attend que l'huîle se soit ramassée au-dessus de l'eau, alors on débouche une partie de l'ouverture inférieure, en retirant tout doucement le doigt, et on laisse échapper l'eau par un petit filet, jusqu'à la dernière goutte ; on referme l'ouverture dès que l'huîle est parvenue sur le doigt, et on la laisse tomber ensuite dans le vaisseau où on veut la serrer. Si l'huîle est plus pesante que l'eau, on sépare par inclination la plus grande partie de l'eau, et on verse l'huile, avec ce qui reste d'eau, dans l'entonnoir, etc. Il y a un récipient particulier, destiné à faciliter la séparation des huiles essentielles plus légères que l'eau : c'est un matras, qui porte en-dehors une espèce de chantepleure, ou de tuyau recourbé, qui part du fond du vaisseau, et dont la courbure s'élève jusqu'à un pouce près de l'embouchure ou goulot du matras. Voyez les Planches de Chimie. Il est clair que lorsque la liqueur reçue dans un pareil vaisseau, s'est élevée dans le cou jusqu'au-dessus du niveau de la courbure du tuyau, la liqueur contenue dans ce vaisseau doit se répandre par le tuyau, et que c'est la couche inférieure de cette liqueur qui doit se vider la première ; ainsi, la liqueur provenue de la distillation, tendant continuellement à élever la liqueur du matras au-dessus de ce niveau, la partie aqueuse de cette liqueur, qui est la dominante, et qui gagne le fond du vaisseau, est vuidée à mesure que le produit de la distillation y est reçu ; et l'huile, qui surnage, se ramasse dans la partie supérieure du vaisseau, en gagne peu-à-peu la partie moyenne, et peut parvenir enfin à le remplir presque tout entier. Quand l'opération, ou le nombre d'opérations qu'on se proposait d'exécuter de suite est fini, on vide par le même tuyau l'eau qui peut être restée dans le fond du matras, en l'inclinant doucement. Il est évident qu'un pareil instrument ne peut être employé à la séparation des huiles plus pesantes que l'eau, mais qu'on peut, pour la séparation de celles-là, en composer un sur le même principe, en renversant la disposition du tuyau, la faisant partir du haut du matras, et portant le bec de l'alembic, ou du serpentin, jusqu'au milieu du matras.

L'eau employée dans la distillation des huiles essentielles, ne parait servir qu'à ramollir les parois des vésicules qui la contiennent, à les disposer ainsi à être facilement rompues par l'huîle rarefiée, tendant à l'état d'expansion vaporeuse ou de volatilité, et à borner, à déterminer, d'une manière invariable, le degré de feu propre à les élever aussi inaltérées qu'il est possible ; peut-être aussi que la vapeur de l'eau qui les accompagne favorise leur volatilité, soit en soutenant leur expansion, leur état de vapeur, par sa chaleur, soit en les entrainant dans son propre tourbillon. Il serait démontré que l'eau ne concourt point à la distillation des huiles essentielles à ce dernier titre, si une huîle essentielle, déjà délivrée de ses petites prisons, s'élevait presqu'entièrement dans un appareil où elle serait renfermée seule dans la cucurbite, et où on lui appliquerait le même degré de chaleur qu'elle éprouve étant répandue dans de l'eau bouillante. Ce degré est supérieur à la chaleur du bain-marie. (Voyez l'article FEU.)

Les huiles essentielles de citron, de cédra, et de tous les fruits de cette classe, qu'on nous apporte de Toscane et de la côte de Gènes, sous le nom d'essences, sont retirées sans le secours du feu. Les écorces de ces fruits contiennent beaucoup d'huile, et elle est ramassée, en masses assez considérables, dans des vessies très-minces, pour qu'elle en découle abondamment, en perçant ou rompant ces vessies. Il n'est personne qui n'ait pressé entre ses doigts un zeste d'orange ou de citron ; la liqueur qu'on en exprime est de l'huîle essentielle. Les Toscans et les Génois expriment ces écorces contre des plateaux de verre, appliqués sur de la glace, ou bien roulent ces fruits sur l'embouchure hérissée de pointes d'un entonnoir, placé sur un vaisseau, où toutes les gouttes sorties des petites blessures infiniment multipliées, vont se ramasser. On retire encore des huiles essentielles de quelques substances aromatiques, des cloux de girofle, par exemple, en les distillant per descensum ; mais cette méthode est imparfaite. Voyez GIROFLE et DESCENSUM.

Propriétés chimiques des huiles essentielles. Elles sont solubles par l'esprit-de-vin, et d'autant plus qu'elles sont plus dures. Elles s'épaississent en vieillissant, et prennent la consistance de baume, et même de résine. Voyez BAUME et RESINE. On les préserve, autant qu'il est possible, de cet accident, en les gardant dans des vaisseaux exactement fermés, et mieux encore sous l'eau, et dans des lieux frais. Elles peuvent être ressuscitées, du moins en partie, c'est-à-dire rétablies en état d'huîle fluide, par la distillation avec l'eau ; elles ont perdu cependant, en s'épaississant, une partie de leur odeur, qui ne se rappelle point par la distillation, ou à la place de laquelle il ne s'en développe point de nouvelle qui la répare. Les huiles essentielles, retirées de divers végétaux, varient considérablement entr'elles, soit par la consistance, soit par la disposition plus ou moins grande à s'épaissir, soit par la gravité spécifique, soit par la couleur, etc. Une différence très-générale, est celle qui distingue les huiles qui sont naturellement concrettes, comme le camphre, ou celles qui le deviennent, qui se gèlent à un très-léger degré de froid, comme celle d'anis, etc. de celles qui sont très-fluides, et constamment fluides, comme celle de térébenthine, de citron, etc. ces caractères particuliers, quand ils sont remarquables, sont exposés aux articles particuliers. Une distinction générale, assez singulière encore, c'est celle qui divise les huiles essentielles en plus légères que l'eau, et en plus pesantes que ce liquide. Celles qui sont fournies par les plantes de notre pays, de ces climats tempérés, sont toutes, sans exception, plus légères que l'eau, et celles qui sont fournies par les végétaux des pays chauds, par tous les bois, écorces, fruits, racines exotiques, par les épiceries, les aromates des Indes, soit occidentales, soit orientales : en un mot, de tous les climats très-chauds, sont plus pesantes que l'eau, à l'exception du camphre. Il y a sur ce point quelques autres variétés, peut-être accidentelles, qui ne sont pas encore bien déterminées.

Toute l'huîle qu'on retire des baumes, des résines et des bitumes, par la violence du feu, est très-analogue aux huiles essentielles. Voyez RESINE et TEREBENTHINE.

Les parties aromatiques des plantes que nous avons exceptées plus haut, de l'observation générale qui attribue de l'huîle essentielle à toutes ces substances, sont les fleurs de jasmin, de tubéreuse, de muguet, de jacinthe, de narcisse, et de lys, qui ont toutes entr'elles une analogie sensible. L'essence de jasmin, qu'on trouve communément chez les Parfumeurs, est une huîle par expression, de l'excellente huîle de ben, imprégnée du parfum du jasmin, par une manœuvre fort simple. Voyez JASMIN.

Usages médicinaux, thérapeutiques et diététiques des huiles essentielles. Les huiles essentielles, récentes, subtiles, très aromatiques, ont un goût amer, acre, vif, brulant, qui annonce les vertus suivantes, qu'elles possèdent en effet : elles sont, dans l'usage intérieur, cordiales, toniques, échauffantes, diurétiques, sudorifiques, stomachiques, aphrodisiaques ; utiles pour corriger la mauvaise odeur de la bouche, gravem spiritum. On doit les donner toujours sous la forme d'eleosaccharum (Voyez ELEOSACCHARUM), soit pour les rendre miscibles aux humeurs digestives aqueuses, soit pour châtrer leur trop grande activité, par laquelle elles pourraient irriter et même enflammer l'estomac et les intestins. Malgré ce correctif, on ne doit les donner encore qu'aux sujets d'une constitution lâche, peu mobile, peu inflammable. Leur usage externe est plus général ; ces huiles, surtout celles qu'on retire de la térébenthine, sous le nom d'esprit, sont éminemment résolutives, antiseptiques, brulantes, cathaeretica ; ces vertus les rendent très-efficaces, pour résoudre les tumeurs molles, indolentes, lymphatiques, et pour dissiper les douleurs des membres. La dissolution de ces huiles dans l'esprit de vin, le baume spiritueux de Fioravanti, par exemple, qui n'est autre chose qu'une pareille dissolution, remplit les mêmes vues d'une manière encore plus assurée. Les huiles essentielles, vives, sont employées, presque à titre de spécifique, dans les plaies des membranes, des nerfs, des tendons ; c'est surtout dans ces cas qu'on emploie communément l'huîle très-subtile, ou esprit de térébenthine. On emploie encore cette huîle dans le traitement de la carie ; un brin de coton, imbibé de quelques gouttes d'une huîle essentielle très-aromatique, de celle de girofle, par exemple, et introduit dans le creux d'une dent cariée, suspend puissamment la douleur qui accompagne quelquefois la carie des dents.

Une huîle essentielle, unie chimiquement au soufre, forme avec lui un composé, connu sous le nom de baume de soufre. Ce composé est un remède, qui doit principalement ses qualités médicamenteuses au soufre. Voyez SOUFRE.

Une huîle essentielle, combinée avec l'alkali fixe ordinaire, forme une espèce de savon, appelé par les gens de l'art savon de Starkey. Voyez SAVON.

Les esprits volatils, aromatiques, huileux, de Sylvius, doivent leur qualité d'huileux et d'aromatique à des huiles essentielles. Voyez ESPRIT VOLATIL, AROMATIQUE, HUILEUX.

Les huiles essentielles fournissent aux Apoticaires une des matières avec lesquelles ils aromatisent plusieurs préparations pharmaceutiques, comme potions, syrops, gelées, juleps, emplâtres même. Il faut toujours les employer, sous la forme d'éleosaccharum, dans les liqueurs aqueuses destinées à l'usage intérieur.

C'est encore à des huiles essentielles que plusieurs liqueurs spiritueuses, destinées à l'usage de nos tables, doivent leur parfum. Celles qui joignent à la saveur connue de l'esprit de vin, un goût vif, brulant, passager, momentané, telle que la bonne eau de canelle, et l'anis rouge de Bologne, doivent ce piquant à un peu d'huîle essentielle : la même saveur est dû. à la même cause dans les diabolini d'Italie.

On parfume la limonade avec l'huîle essentielle de l'écorce des citrons même qu'on emploie, dont on forme sur-le-champ un éleosaccharum. Voyez ELEOSACCHARUM.

Huiles grasses. Celles-ci sont encore libres, nues, isolées, ramassées à part dans des petits réservoirs, et elles appartiennent proprement au règne végétal. Les graisses animales ont à la vérité la plus grande analogie avec ces substances, mais elles ne sont pas, dans le langage de l'art, comprises sous la même dénomination. Les huiles grasses sont répandues dans toute la substance des sujets qui les contiennent, au lieu que les cellules des huiles essentielles ne sont placées qu'à la surface, dans l'enveloppe ou membrane extérieure des végétaux pourvus de cette substance.

Les semences appelées émulsives (Voyez SEMENCES EMULSIVES), c'est-à-dire celles qui étant pilées avec de l'eau donnent une liqueur laiteuse, ou une émulsion (Voyez ÉMULSION), contiennent de l'huîle grasse. La semence, proprement dite, de tous les fruits à noyau, ou à coque, de notre pays : tels que celle de noix, d'amande, de pignon, de naisette, de pêche, d'olive, etc. celle de tous les fruits à pepins, c'est-à-dire tous les pepins ; les semences appelées froides, les semences de lin, de toutes les espèces de chou, de rave, de navet, de pavot, etc. contiennent une pareille huile. La chair ou pulpe qui recouvre le noyau de l'olive, en contient beaucoup aussi ; c'est une substance jusqu'à présent unique à cet égard. Le jaune d'œuf fournit aussi une huîle très-analogue à celles-ci.

On retire l'huîle grasse de tous ces sujets en les écrasant, les pilant, les réduisant en pâte, et en exprimant cette pâte, par le moyen d'une presse, ou d'un fort pressoir, pour l'opération en grand. Cette manœuvre est variée, sur les divers sujets, par quelques circonstances de manuel. Voyez les articles particuliers LIN, NAVETTE, OLIVE. Ce moyen de retirer les huiles grasses, a fait donner à l'espèce, dont nous avons seulement parlé jusqu'à présent, le nom d'huiles par expression, en latin olea pressa ou expressa, et c'est-là leur dénomination spécifique et la plus ordinaire.

Il y a une autre espèce d'huîle grasse, caractérisée par la circonstance de se séparer des corps qui la renferment, par le moyen de l'eau bouillante, ou de la décoction de ces corps. Le cacao, le macis, la muscade, les baies de laurier, contiennent une pareille huile. Voyez ces articles particuliers. Le beurre de cacao est la plus connue de ces huiles, parce qu'elle est la plus employée en Médecine. Les huiles par expression n'abandonnent pas leurs loges, par l'action de l'eau bouillante ; on n'en retire point de semences émulsives par la décoction.

Propriétés chimiques des huiles grasses. Elles sont insolubles par l'esprit-de-vin ; elles contractent une espèce d'union, quoique fort imparfaite, avec le vinaigre, et même avec l'eau (ce qui fait soupçonner que l'acide du vinaigre n'entre pour rien dans cette union), si on les bat longtemps ensemble. Elles rancissent facilement, si on les expose à un air chaud, et même quelques-unes, comme celle d'amandes douces, quelque précaution qu'on prenne. Voyez RANCIR. Elles sont toutes plus légères que l'eau ; elles sont fixes, c'est-à-dire qu'elles ne peuvent être élevées par le feu, sans être considérablement altérées, sans passer à l'état d'huîle empyreumatique. Il y a apparence que le caractère spécifique de ces huiles dépend d'une matière de nature gommeuse ou mucilagineuse, avec laquelle est combiné le principe huileux.

Vertus médicinales, et usages diététiques des huiles grasses. Ce n'est presque que l'huîle d'amandes douces qu'on emploie en Médecine par l'usage intérieur. La bonne huîle d'olives vaudrait bien pour le moins autant, et elle a, au-dessus de l'huîle d'amandes douces, la faculté d'être peu sujette à rancir. Le beurre de cacao n'est pas employé pour des qualités assez génériques, pour devoir être rangé avec ces huiles par expression ; et d'ailleurs, ce remède est plus magnifique qu'utile, du moins que nécessaire.

Les huiles par expression, représentées dans l'usage ordinaire par l'huîle d'amandes douces, sont le souverain adoucissant, relâchant, lubréfiant, émollient, béchique, sédatif, le plus benin des purgatifs, en un mot, la suprême ressource, le grand cheval de bataille, comme on s'exprime vulgairement, de cette pratique de Médecine, appelée dans l'art, et par les gens du monde, anodine, tempérante, calmante, qui voit partout des spasmes, des éréthismes, des incendies, etc. Cette drogue remplit quelquefois très-utilement, il est vrai, les indications d'adoucir, de relâcher, d'apaiser les douleurs des entrailles, de lâcher très-doucement le ventre ; mais plus souvent encore, c'est un remède inutile, infidèle, et même pernicieux.

Les huiles par expression, prises à très-haute dose sans mesure, fournissent une des ressources les plus assurées pour défendre l'estomac et les intestins contre l'action des poisons corrosifs.

L'huîle d'olive est la seule huîle par expression, que nous mêlons à nos aliments à titre d'assaisonnement. Voyez OLIVE.

L'usage extérieur des huiles grasses pures est fort rare. On emploie communément à leur place des huiles composées, dont nous parlerons à la fin de cet article. Ces huiles entrent dans la composition de plusieurs onguents, liniments, etc.

Les huiles par expression, unies à l'un et l'autre alkali fixe, forment des savons employés en Médecine et dans divers arts. Voyez SAVON.

Huiles empyreumatiques. Le principe huileux est un des matériaux universels de la composition de tout végétal ou animal, de tout corps organisé, du tissu des Stahliens. L'huîle est aussi un des principes généraux de l'ancienne analyse, de celle qui s'exécute par la violence du feu sur tous ces corps ; un des principes de Paracelse, ou plutôt de Basîle Valentin, ou d'Isaac le Hollandais, (Voyez dans l'historique du mot CHIMIE, les morceaux qui regardent ces auteurs) ; le soufre de ces Chimistes, de Willis, de Boyle, et de ceux de leurs sectateurs qui n'ont pas désigné par ce mot le phlogistique pur.

Toute huîle qui ayant été réellement combinée dans un corps quelconque, en est extraite, dégagée par la violence du feu, est une huîle empyreumatique. Nous avons excepté d'avance les huiles retirées par ce moyen des baumes, des résines et des bitumes. On l'appelle aussi foetide, parce que le corps à la décomposition duquel elle est dû., a fourni en même-temps un principe salin, le plus souvent alkali-volatil, d'une odeur forte et désagréable, dont cette huîle est empreinte, et auquel elle doit vraisemblablement sa mauvaise odeur. Les huiles empyreumatiques sont communément aussi noires et épaisses : elles doivent ces deux qualités, surtout la première, à une quantité considérable de matière charbonneuse qu'elles ont entrainée avec elles. Voyez VEGETALE ANALYSE et SUBSTANCES ANIMALES.

Non-seulement les tissus, c'est-à-dire les végétaux et les animaux entiers, ou leurs parties entières, mais encore les huiles grasses, les graisses, tous les sucs animaux, et toutes les substances végétales solubles par l'eau, excepté les sels purs, telles que la matière extractive, le corps muqueux, le tartre, etc. tous ces sujets, dis-je, donnent dans la distillation analytique de l'huîle empyreumatique, et une huîle empyreumatique chargée d'alkali-volatil, excepté celle qui provient de la distillation du lait et du corps muqueux. Voyez LAIT et MUQUEUX.

La théorie du dégagement de l'huîle empyreumatique, celle de sa composition chimique, et celle des produits et des phénomènes de son analyse, appartiennent au traité général de l'analyse des corps, dont elle est un principe si essentiel. Voyez SUBSTANCES ANIMALES et VEGETALE ANALYSE, surtout ce dernier article.

Les huiles empyreumatiques sont considérablement atténuées, deviennent limpides, volatiles, perdent en très-grande partie, et même absolument leur odeur étrangère et desagréable, par des rectifications répétées, qu'on exécute communément à feu nud et sans intermède : les premières distillations demandent en effet un degré de feu assez fort, mais les huiles empyreumatiques parviennent enfin par ces opérations répetées, à un état de volatilité qui les rend capables de s'élever, du moins en grande partie, avec l'eau bouillante ; et même par la chaleur du bain-marie. Dans cet état, elles ont toutes les propriétés chimiques des huiles essentielles. La rectification des huiles empyreumatiques est considérablement hâtée par l'addition de la chaux-vive ou de l'alkali-fixe ; mais ces intermèdes, surtout le premier, en détruisent une partie très-considérable. Voyez CHAUX (Chimie.)

Usages médicinaux des huiles empyreumatiques ; huîle animale de Dippelius ; huîle de cade ; huîle de tartre ; huîle des philosophes ; huîle de papier. Ce sont à peu près toutes les huiles empyreumatiques employées, ou du moins les plus employées en Médecine ; la première, destinée à l'usage intérieur, est une huîle empyreumatique animale, communément celle de corne de cerf, rectifiée par quarante ou cinquante distillations successives, et vantée comme un spécifique éprouvé contre l'épilepsie. Si cette vertu est confirmée par des observations décisives, ces observations ne sont pas encore publiques. Les quatre autres s'emploient extérieurement, quoiqu'assez rarement, à titre de très-puissant résolutif. L'huîle de cade est retirée de l'oxycedre, ou grand genevrier. Voyez GENEVRIER, (Chimie et Matière médicale) L'huîle des philosophes, ou de briques, de l'huîle d'olive. Voyez OLIVE.

Rapport (HABITUS) des huiles en général avec quelques autres substances.

L'huîle est immiscible à l'eau, aux sels neutres et aux acides végétaux et animaux vulgaires, tels que le tartre, le vinaigre et l'esprit de fourmi ; aux sucs aqueux végétaux, à la gomme, au mucilage, au corps doux (excepté qu'il ne soit dans un état éminemment concret, comme le sucre), à la lymphe et à la gelée animale.

L'huîle est miscible au soufre, aux baumes, aux résines, aux graisses, aux bitumes, au phosphore de Kunckel ; elle s'unit au sucre et au jaune d'œuf, et devient miscible aux liqueurs aqueuses par l'intermède de ces substances ; elle dissout le cuivre et le plomb, principalement les chaux de ces métaux, et surtout celles de plomb ; elle se combine avec les sels alkalis sous la forme de savon. Voyez SAVON. Les acides minéraux agissent puissamment sur elle, principalement le vitriolique et le nitreux ; car l'acide du sel marin les attaque à peine, du moins dans les mélanges ordinaires. L'acide vitriolique, médiocrement concentré et aidé d'une faible chaleur, se combine avec l'huîle la plus pure, c'est-à-dire l'huîle essentielle, ou l'huîle empyreumatique rectifiée. Ce mélange produit un corps concret de nature résineuse, et d'un rouge brun plus ou moins foncé. L'acide vitriolique concentré éprouve même à froid avec la même huîle une violente effervescence, accompagnée d'épaisses fumées et de chaleur considérable, et se combine avec en un corps noirâtre, résineux, cassant. L'effervescence est plus prompte et plus violente, si on a exposé le mélange à l'action du feu. Voyez RESINE ARTIFICIELLE à l'article RESINE. L'acide nitreux produit avec l'huîle dans les mêmes circonstances des effets semblables. Le phénomène le plus remarquable de l'action mutuelle des acides vitrioliques ou nitreux, et des huiles, c'est l'inflammation spontanée, ou excitée sans le concours d'aucune chaleur étrangère. Ce phénomène singulier mérite d'être considéré avec quelque détail.

Inflammation des huiles. Les expériences successives de Glauber, de Beccher, de Borrichius, de Boyle, de Tournefort, de Homberg, de Rouvière, de Frideric Hoffman, de Géoffroy le cadet, et enfin de M. Rouelle, nous ont appris que toutes les huiles sans exception, aussi bien que les baumes liquides, étaient inflammables lorsqu'on les mêlait à froid au double de leur poids d'un acide, composé de parties égales d'esprit de nitre bien concentré, et d'huîle de vitriol.

Ces proportions varient dans les expériences de ces auteurs. Ils augmentent la dose de l'acide composé, et la proportion de l'acide nitreux dans l'acide composé à mesure que l'huile, mise en expérience, est plus difficîle à enflammer. La proportion que nous venons d'assigner est pourtant assez généralement efficace ; car les huiles d'une médiocre inflammabilité prennent feu mêlées à partie égale d'acide nitreux, et à une demi-partie d'acide vitriolique.

Cet acide composé est l'instrument général de l'inflammation de toutes les huiles, et des substances éminemment huileuses, telles que les baumes liquides ; mais il n'est nécessaire que pour produire ce phénomène dans les plus rebelles de ces substances, Beccher a dit (Physica subterranea ; sect. V, cap. IIIe n°. 106.) que l'huîle de vitriol et l'esprit de vin, l'un et l'autre très-rectifiés, prenaient feu dès l'instant qu'ils étaient mêlés ; et même que si on éteignait ce feu en bouchant le vaisseau qui contenait le mélange, il se rallumait dès qu'on le débouchait. Homberg assure avoir enflammé par l'huîle de vitriol déphlegmée autant qu'il est possible, l'huîle de térébenthine, épaisse comme du syrop, et de couleur rousse, qui passe la dernière dans la distillation. Mém. de l'Acad. royale des Scien. 1701. Borrichius rapporte, Acta medica et philosophica Haffniensium ann. 1661. que l'esprit de nitre récent enflamme l'huîle de térébenthine nouvellement tirée.

L'inflammation de l'esprit-de-vin par l'huîle de vitriol est aujourd'hui généralement contestée ; et beaucoup de chimistes doutent de celle de l'huîle épaisse de térébenthine par l'acide du vitriol seul.

Tous les chimistes qui avaient répété le procédé de Borrichius, l'avaient fait sans succès, lorsqu'enfin M. Rouelle publia en 1747, dans les Mémoires de l'académie des Sciences, des expériences, par lesquelles non-seulement il prouve la réalité du phénomène annoncé par Borrichius, mais même fixe le succès de cette expérience par un manuel fondé sur des observations très-ingénieuses, et sur la meilleure théorie chimique. Ce manuel consiste à appliquer à un charbon rare, spongieux, sec, embrasé, qui s'élève au sein du mélange pendant la plus vive effervescence, quelques gouttes d'acide nitreux. Cette application se fait quelquefois par hasard, et presque toujours dans les huiles les plus propres à s'enflammer ; et alors l'inflammation se fait d'elle-même : c'est pour cela que les arbitres, qui n'avaient découvert ni cette cause ni le moyen de l'appliquer à volonté, ont réussi assez constamment sur les huiles de cette dernière classe.

Nous avons déjà parlé plusieurs fois d'une différence observée entre les différentes huiles, relativement à des degrés d'inflammabilité. Les éminemment inflammables sont les huiles essentielles pesantes, denses, des substances végétales aromatiques des Indes ; certaines huiles empyreumatiques, et les baumes liquides viennent ensuite ; les huiles essentielles très-subtiles, telles que l'huîle de térébenthine, de cédra, de lavande, sont plus difficiles à s'enflammer que toutes les précédentes ; enfin, les plus difficiles absolument, les plus difficiles de toutes les huiles, sont les huiles par expression ; et les éminemment difficiles dans cette classe, sont les plus douces ou les plus mucilagineuses, telles que celles d'amandes douces, d'olive, de fêne et de navette.

Ce sont ces dernières huiles seulement que M. Rouelle n'a pu enflammer par l'acide nitreux seul, lors même qu'il l'a porté jusqu'à un degré de concentration auquel il est vraisemblable qu'on ne l'avait pas porté avant lui. Il a été obligé de concentrer encore davantage l'acide nitreux qu'il a employé, en le mêlant, à parties égales de bon acide vitriolique ; car il est connu en Chimie que l'acide vitriolique a plus de rapport avec l'eau que l'acide nitreux : le premier doit donc l'enlever au dernier, lorsqu'on les applique intimement l'un à l'autre en les mêlant. Voilà du moins la théorie qu'adopte M. Rouelle. Il prétend que l'acide vitriolique ne contribue d'ailleurs en rien à la production de la flamme ; d'où il est aisé de conclure qu'il regarde comme impossible l'inflammation des huiles par l'acide vitriolique seul. Pour moi je doute peu de la vérité du phénomène rapporté par Homberg, et je n'aperçais dans la bonne théorie, dans l'ensemble des faits chimiques fondamentaux, rien qui puisse justifier le doute qu'on pourrait concevoir sur le fait, et encore moins qui puisse porter à le regarder comme impossible.

Pour donner une idée complete de tonte la manœuvre nécessaire dans l'exécution du procédé de l'inflammation des huiles en général, voici celui de M. Rouelle sur la plus difficîle de toutes les huiles, sur l'huîle d'olive. " Je prends de l'huîle d'olive, de l'acide nitreux le plus concentré, nouvellement fait, et de l'acide vitriolique concentré, de chacun une demi-once. Je mêle d'abord ensemble l'acide nitreux et l'acide vitriolique, et je les verse sur l'huile, qui est contenue dans une capsule ou segment de ballon : ces matières sont un instant sans agir ; mais le mouvement s'excite bientôt, et elles entrent dans une violente effervescence ; alors ayant à la main une fiole, où il y a une demi-once du même acide nitreux concentré, j'en verse environ un tiers sur les matières : ce nouvel acide accélere considérablement l'effervescence : les vapeurs qui s'élèvent sont beaucoup plus considérables et plus blanches. Un instant après je verse dessus l'autre tiers de l'acide nitreux ; pour lors le mouvement s'accélere, et l'effervescence acquiert une rapidité étonnante ; les vapeurs redoublent et sont très-blanches ; et je verse le reste de l'acide nitreux sur le charbon embrasé : il parait tout-d'un-coup scintillant, et l'huîle s'enflamme. Les espaces de temps pour verser ainsi les portions d'acide nitreux, doivent être momentanés, cependant sans précipitation ".

Les doses absolues employées dans cette expérience sont suffisantes ; mais en général, l'inflammation réussit d'autant mieux, qu'on emploie des quantités absolues plus considérables ; mais sur les huiles très-inflammables, l'expérience réussit à deux gros, et même à un de chaque matière.

Huiles pharmaceutiques, ou par infusion et décoction. On fait infuser ou bouillir dans l'huîle d'olive un grand nombre de substances végétales et quelques substances animales, comme les petits chiens, les lésards, les crapaux, les vers de terre, le castor, etc. On passe ensuite ces huiles, ou même on les garde sur le marc. Ces compositions sont destinées à l'usage extérieur, et elles sont, pour la plupart, des préparations monstrueuses, parce que l'huîle n'a aucune action sur la plus grande partie des matières végétales qu'on y fait entrer ; et la décoction altère inutilement la nature de l'huile. Les vertus vraies ou prétendues de ces diverses huiles sont rapportées aux articles particuliers. Voyez par exemple CHIEN, LEZARD, IRIS, ROSE, CAMOMILLE, MELILOT, MUCILAGE, etc. (b)

Huîle d'antimoine, d'arsenic, de Jupiter, de Mars, de Mercure, de Saturne, de Vénus. Ce sont des noms qu'on a donnés à des liqueurs épaisses, denses, approchant, quoique d'une manière fort éloignée, de la consistance de l'huîle commune, et qui sont des dissolutions des substances métalliques, dont chacune porte le nom dans divers acides. Voyez les articles particuliers de ces substances métalliques.

Huîle de chaux. C'est le nom ordinaire du sel neutre, formé par l'union de l'acide marin et de la chaux, lorsqu'il est sous la forme d'une liqueur concentrée. Voyez CHAUX (Chimie).

Huîle de tartre, huîle de tartre par défaillance. On appelle communément ainsi le sel de tartre ou alkali fixe ordinaire en état de défaillance ou deliquium. Voyez TARTRE.

Huîle de vitriol. C'est le nom vulgaire de l'acide vitriolique concentré. Voyez VITRIOL. (b)

Falsification des huiles essentielles. Les huiles essentielles peuvent être falsifiées par le mélange d'une huîle par expression, par celui d'un esprit de vin, ou par celui d'autres huiles essentielles.

Les huiles essentielles des aromates des Indes, que les Hollandais nous vendent très-cher, sortent rarement de leurs boutiques sans quelque falsification. L'huîle de canelle, celle de girofle, de macis et de muscade, sont ordinairement mêlées d'huîle d'amandes ou d'huîle de ben. Cette fraude se découvre aisément : on n'a qu'à tenter de dissoudre dans l'esprit-de-vin une huîle ainsi falsifiée ; car, comme l'esprit-de-vin est le menstrue des huiles essentielles, et qu'il ne touche point aux huiles par expression, il enlevera toute l'huîle essentielle, et laissera au fond du vaisseau dans lequel on fera l'expérience, l'huîle par expression très-pure, très-reconnaissable, et souvent en une quantité très-considérable.

Des fripons plus adroits mêlent l'huîle de canelle ou de girofle avec une quantité très-considérable d'esprit-de-vin : ce mélange peut être porté jusqu'à parties égales de chaque liqueur ; et il retient encore, à cette proportion, la couleur et l'odeur qui sont propres à ces huiles essentielles. Il n'est pas plus difficîle de reconnaître cette fraude que la précédente. Si on noye d'une grande quantité d'eau une huîle essentielle fourrée d'esprit-de-vin, on produit une liqueur laiteuse ; au lieu que ces mêmes huiles nagent sur l'eau, et s'en séparent sans la blanchir lorsqu'elles ne renferment point d'esprit-de-vin.

La troisième espèce de falsification, qui consiste à mêler une huîle essentielle de vil prix à une autre huîle essentielle plus chère, ne peut avoir lieu que pour les huiles qui ont une odeur forte, et capable de couvrir celle de l'huîle qu'on y mêle, qui est toujours celle de térébenthine. Les huiles des plantes à fleurs labiées de notre pays, telles que le thim, la menthe, l'origan, la sauge, le romarin, la lavande, etc. sont très-propres à être ainsi falsifiées. Mais cette fraude se découvre bientôt, et par l'action seule du temps ; car l'odeur spécifique et agréable des huiles de ces plantes se dissipe lorsqu'on les a gardées un certain temps, et l'odeur forte de l'huîle de térébenthine perce et se fait reconnaître aux moins expérimentés. Mais il y a un moyen plus prompt et plus abrégé pour produire dans ces huiles mélangées l'altération qui développe et fait dominer l'odeur de l'huîle de térébenthine. On n'a qu'à imbiber de ces huiles des morceaux de linge ou de papier, et les approcher d'un corps chaud, des parois d'un fourneau, par exemple ; alors l'odeur plus subtîle et plus douce de l'huîle de lavande, de thym, etc. se dissipe la première, et il ne reste bientôt plus que l'odeur forte de l'huîle de térébenthine. On peut ajouter à cette épreuve deux signes assez démonstratifs de cette dernière falsification : le premier se déduit de ce que les huiles falsifiées par l'huîle de térébenthine sont plus limpides et plus fluides que ces huiles pures ; et le second, de ce que les étiquettes appliquées assez ordinairement sur le bouchon des fioles qui contiennent ces huiles, sont effacées en tout ou en partie par les exhalaisons de l'huîle de térébenthine ; propriété qui est particulière à cette dernière huile, et que n'ont pas au moins les huiles des plantes dont nous parlons.

On prétend encore que certains Artistes distillent les plantes qui ne donnent qu'une très-petite quantité d'huîle essentielle, avec des substances très-chargées d'huîle par expression, la rue, par exemple, avec les semences de pavot ; et que dans cette opération, une assez bonne quantité d'huîle par expression, qui est naturellement fixe, est enlevée dans la distillation par le secours de l'huîle essentielle. Mais cette prétention a besoin d'être confirmée par des expériences ; et si elle se trouve fondée, il restera à savoir encore si l'huîle par expression enlevée dans cette distillation, a changé de nature, et quel est son nouvel état. Voyez Frid. Hoffman, Observat. physico-chimic. Lib. I, obs. IIe

HUILE DES METAUX, (Chimie) c'est ainsi que quelques chimistes ont appelé le phlogistique, ou la partie inflammable qui entre dans la combinaison des métaux. Voyez l'article PHLOGISTIQUE.

HUILE D'ONCTION, (Histoire sacrée) c'est celle que Moyse avait composée pour l'onction et la consécration du roi, du souverain sacrificateur, et de tous les vaisseaux sacrés, dont on se servait dans la première maison de Dieu.

Nous apprenons dans l'exode, chap. 30, que cette huîle était faite de myrrhe, de cinamome, de calamus aromaticus et d'huîle d'olive, le tout confi par artifice de parfumeur.

Moyse ordonna aux israèlites de garder précieusement cette huîle de génération en génération ; voilà pourquoi elle était déposée dans le lieu très-saint.

Chaque roi n'était pas oint, mais seulement le premier de la famille, tant pour lui-même, que pour tous les successeurs de sa race ; il ne fallait pas d'autre onction, à moins qu'il ne s'élevât quelque difficulté touchant la succession, auquel cas celui qui l'avait obtenue, quoiqu'il fût de la même famille, recevait l'huîle d'onction pour mettre fin à toute dispute, personne n'étant en droit, après cette cérémonie, de lui contester son titre : ce fut le cas de Salomon, de Joas et de Jéhoahaz ; mais chaque souverain sacrificateur était oint à sa consécration, ou lorsqu'il entrait en charge, et il en était de même du prêtre qui allait à la guerre en sa place.

Les vaisseaux et les ustensiles qu'on oignait avec l'huîle d'onction, étaient l'arche de l'alliance, l'autel des parfums, la table des pains de proposition, le chandelier d'or, l'autel des holocaustes, le lavoir et les vases qui en dépendaient.

Comme Moyse consacra toutes ces choses par l'huîle d'onction à l'érection du tabernacle, aussi lorsque quelqu'une venait à être détruite, à s'user, ou à se perdre, elle pouvait, tant que cette huîle subsista, être rétablie et réparée, en faisant et consacrant d'autres ustensiles à la place, qui acquéraient la même sainteté que les premiers, au moyen de l'existence de l'huîle d'onction ; mais malheureusement cette huîle ayant péri avec le premier temple, et manquant dans le second temple, ce triste accident causa un défaut de sainteté dans toutes les autres choses qui y appartenaient. En vain, les Juifs, à leur retour de Babylone, et après le rétablissement de leur temple, eurent une arche, un autel des parfums, une table des pains de proposition, un chandelier d'or, un autel des holocaustes, un lavoir avec les vases qui y appartenaient, et le tout plus beau que dans le premier temple, cela ne servit de rien ; en vain, ils mirent toutes ces choses dans leur première place, et les appliquèrent aux mêmes usages ; le manque d'huîle d'onction rendit le tout défectueux.

Ajoutons aussi, qu'outre ce défaut d'huile, le second temple fut encore privé de cinq choses qui constituaient la gloire principale du premier ; savoir, 1°. de l'arche de l'alliance, qui était un petit coffret de bois de cédre, de trois pieds neuf pouces de long, sur deux pieds trois pouces de large, et deux pieds trois pouces de haut. Il renfermait la cruche où était la manne, et la verge d'Aaron qui avait fleuri ; le propitiatoire faisait le couvercle de ce coffre. 2°. Il manquait au second temple le Schekina, c'est-à-dire, la présence divine se manifestant dans une nuée qui reposait sur le propitiatoire. 3°. Il manquait l'urim et le thummin, qui était quelque chose que nous ignorons, et que Moyse mit dans le pectoral du souverain sacrificateur. Exode 28, 30, Lévitiq. 8, 8. On sait que le pectoral était une pièce d'étoffe en double de la grandeur de quelques pouces en carré, dans laquelle pièce d'étoffe étaient enchassées douze pierres précieuses gravées des noms des douze tribus. 4°. Il manquait au second temple le feu sacré qui fut éteint lors de la destruction du premier temple ; en sorte qu'on ne vit plus que du feu commun dans le second temple. 5°. L'esprit de prophétie y manquait, ce qui pourtant ne doit pas être entendu à la rigueur ; car Aggée, Zacharie et Malachie prophétisèrent encore.

Il ne faut donc pas être surpris que toutes ces choses, outre l'huîle d'onction, manquant dans le second temple, les vieillards, lorsqu'on en posait les fondements, versassent des larmes au souvenir du premier ; mais tout cela fut abondamment réparé, lorsque, pour me servir des termes des prophetes, le désir des nations, le seigneur qu'elles cherchaient entra dans son temple ; lors, dis-je, que J. C. le véritable Schékinna, honora le dernier temple de sa présence ; et à cet égard, la gloire de la seconde maison l'a emporté de beaucoup sur celle de la première. (D.J.)

HUILE DE CADE, (Histoire des Drog.) huîle fétide, rousse ou noire, empyreumatique, qui se tire du tronc et des rameaux de l'oxycédre et du genevrier en arbre que l'on brule dans quelques fours destinés à cet usage. Cette huîle appliquée en liniment à l'extérieur, est puissamment résolutive ; ou s'en sert dans les provinces, pour les ulcères qui viennent aux brebis et aux moutons, après qu'on les a tondus. Les maréchaux s'en servent aussi pour la gale et les ulcères des chevaux. En Languedoc, on fait beaucoup d'huîle de cade, semblable à celle du genevrier à baies rougeâtres ; on en tire de l'huile, en distillant son bois par la cornue. (D.J.)

HUILE DE MEDIE, (Pharmacie ancienne) autrement dit huîle des Medes, ou huîle de Médée, en latin oleum medicum, nom que les anciens ont donné à une huîle célèbre qui avait la propriété de bruler dans l'eau, malgré tout ce qu'on pouvait faire pour l'éteindre. On l'appela huîle de Médie, parce qu'on la recevait de ce pays-là ; d'autres la nommèrent huîle de Médée, parce qu'ils imaginèrent que c'était avec cette huîle que la fille d'Hécate avait brulé la couronne de sa rivale.

Ammien Marcellin raconte que, si l'on trempe une flèche dans cette huile, et qu'on la tire avec un arc contre quelque corps inflammable, le tout prend feu immédiatement sans possibilité de l'éteindre avec de l'eau.

Le poison de Pharos, venenum pharicum de Nicandre, passait pour être la même chose que l'huîle de Médie ; et tout ce qu'il en dit convient parfaitement au récit que font d'autres auteurs, des propriétés de l'huîle de Médée, de sorte qu'on ne peut douter que ces deux liqueurs ne soient la même chose.

Quelques-uns prétendent qu'on tirait cette huîle d'une plante ; mais Pline assure positivement que c'était un minéral bitumineux, liquide, de la nature du naphte, ce qui est très-apparent, parce que les huiles minérales sont les substances les plus inflammables que nous connaissions. Babylone est fameuse chez plusieurs auteurs, pour fournir cette liqueur ; il est certain que le naphte s'y trouve abondamment. Strabon dit qu'elle en produit deux espèces, l'une blanche, et l'autre noire. La blanche était vraisemblablement ce qu'on nommait l'huîle de Médie, ou de Médée ; mais on ne doit pas douter que les anciens n'aient extrêmement exagéré les effets, les propriétés et les vertus qu'ils lui ont attribuées ; l'hyperbole leur est familière dans tous les récits qu'ils nous ont fait des choses étrangères à leurs pays, en quoi nous les avons assez bien imités. (D.J.)

HUILE GRASSE, (Peinture) est celle que les Peintres mêlent dans leurs couleurs pour les faire sécher. Cette liqueur est composée d'huîle de noix ou de lin, et de litarge qu'on fait bouillir ; puis on laisse reposer la litarge au fond du vase, et ce qui surnage est l'huîle grasse. Voyez LITARGE.

L'huîle est aussi employée dans les différents ouvrages d'Horlogerie, pour donner plus de mobilité aux pièces et en retarder l'usure ; car ses particules étant autant de petits rouleaux, elles diminuent considérablement le frottement, en remplissant les intervalles qui se trouvent toujours entre les parties des corps, quelque polis qu'ils soient ; et elles empêchent ces parties d'engrener aussi avant les unes dans les autres. Il est d'une grande conséquence, dans les montres surtout, que l'huîle que l'on emploie soit bien pure et bien fluide. Voyez l'article TIGERON, où l'on explique la manière dont les horlogers s'y prennent pour conserver l'huîle aux parties d'une montre ou pendule, etc. où elle est nécessaire. (T)

HUILE, (Reliure) les Relieurs-doreurs se servent d'huîle pour mettre sur le dos des livres qui sont prêts à dorer ; ils ont une éponge très-fine attachée à une petite palette de bois, avec laquelle ils prennent l'huîle et en frottent légérement tous les endroits à dorer.