Imprimer
Catégorie parente: Physique particulière
Catégorie : Médecine séméiotique
ou SEMEIOLOGIE, (Médecine séméiotique) science des signes. Ce nom est grec, dérivé de , signe, et , discours. La plupart des institutaires distinguant la semeiotique de la physiologie et de la pathologie, avec qui elle devrait être confondue, en font la troisième partie des instituts ou principes de médecine. Son objet est l'exposition des signes propres à l'état de santé et aux différentes maladies. Voyez SIGNE. De-là nait la division de cette partie en semeiotique de la santé et semeiotique de la maladie. Elles ne sont l'une et l'autre que des corollaires, qui devraient être déduits à la suite des traités de pathologie et de physiologie. Ce n'est en effet que par la connaissance exacte de l'homme dans l'état sain qu'on peut connaître sa santé présente, et déterminer si elle sera constante ; c'est dans les divers phénomènes que présente l'exposition de la santé, qu'on peut puiser les signes qui la font reconnaître et qui servent à juger de sa durée. J'en dis de même par rapport à la pathologie : après avoir détaillé les causes générales de maladie et les symptômes qu'elles excitent, il n'y avait qu'à remonter des effets aux causes, qu'à fixer leur correspondance réciproque, leur enchainement mutuel, et cette gradation naturelle aurait établi les signes de maladie.

Il n'y a point de partie dans le corps humain qui ne puisse fournir à l'observateur éclairé quelque signe ; toutes les actions, tous les mouvements de cette merveilleuse machine sont à ses yeux comme autant de miroirs, dans lesquels viennent se réfléchir et se peindre les dispositions intérieures, soit naturelles ou contre nature ; il peut seul porter une vue pénétrante dans les replis les plus cachés du corps, y distinguer l'état et les dérangements des différentes parties, connaître par des signes extérieurs les maladies qui attaquent les organes internes, et en déterminer le caractère propre et le siège particulier. Il semble, à la facilité avec laquelle il est instruit de ce qui se passe dans l'intérieur du corps, que ce soit une machine transparente ; mais s'élevant plus haut et presque au-dessus de l'homme, le semeioticien instruit porte plus loin ses regards : le voîle mystérieux qui cache aux faibles mortels la connaissance de l'avenir se déchire devant lui ; il voit d'un oeil assuré les changements divers qui doivent arriver dans la santé ou les maladies ; il tient la chaîne qui lie tous les événements, et les premiers chainons qui sont sous sa main lui font connaître la nature de ceux qui viennent après, parce que la nature n'a que les dehors variés, et qu'elle est dans le fond toujours uniforme, toujours attachée à la même marche. D'autres fois le médecin, à l'occasion des phénomènes présents, rappelle le souvenir des événements qui ont précédé ; telle est la base de la division générale de la semeiotique, ou des signes en diagnostics, pronostics et anamnestiques. Les uns sont uniquement destinés à répandre de la lumière sur des objets dérobés au témoignage des sens intérieurs, ou cachés ; les seconds servent à peindre les événements futurs comme présents, à en former une espèce de perspective diversement éclairée ; les derniers enfin retracent la mémoire des changements passés. Voyez tous ces articles et SIGNE.

Les auteurs classiques ont distingué trois principales sortes de signes, ce qui forme une autre division de la semeiotique. Parmi les signes, disent-ils, les uns sont tirés de l'examen des fonctions, tels que le pouls, la respiration, etc. les autres de ce qui s'observe dans les excrétions, tels sont les signes que fournissent les selles, les sueurs, les urines, etc. et les derniers enfin des phénomènes dans les qualités changées in qualitatibus mutatis. De ce nombre sont les signes qu'on puise dans l'observation des changements qui arrivent dans la couleur, la chaleur, et les autres qualités des différentes parties ; cette division, assez mal entendue, tout à fait arbitraire, qui semble indiquer que les secrétions ne sont pas des fonctions, peut cependant servir, au défaut d'autres meilleures, à fixer l'esprit des jeunes gens qui étudient cette scien ce, et qui sont toujours attachés aux méthodes bonnes ou mauvaises.

Uniquement bornés aux généralités de la sémeiotique, nous laissons à part tout détail sur ces différents signes. On peut consulter là-dessus les articles particuliers de sémeiotique. Voyez POULS, RESPIRATION, SUEUR, URINE, etc. Nous ne suivrons pas non plus la sémeiotique propre de chaque maladie ; il n'est personne qui ne voie que cette exposition déplacée ici, nous menerait trop loin, et nous mettrait dans le cas de répéter inutilement ce qui est dit à ce sujet dans les différents articles de maladie, vice essentiel, et qu'on ne saurait trop soigneusement éviter dans un ouvrage de cette espèce.

Pour ce qui regarde la sémeiotique de la santé, elle parait au premier coup d'oeil assez bornée, parce qu'on se représente la santé comme un point, dont les signes doivent par conséquent être en petit nombre bien constatés et invariables. Mais cette idée métaphysique de la santé est bien éloignée de ce que l'observation nous découvre, en la consultant plutôt que le raisonnement ; en sortant de son cabinet, en promenant ses regards sur l'ensemble des hommes, le médecin verra qu'il y a presque autant de santés différentes, qu'il y a de sujets différents ; qu'elle varie d'une manière plus sensible dans les divers tempéraments ; que par conséquent les signes de la santé ne sont pas les mêmes dans un homme mélancolique et dans un pituiteux, dans un sanguin et un bilieux ; on les trouverait même différents dans Pierre, Jean, Joseph, etc. en un mot, dans chaque individu ; car chacun a sa santé particulière, qu'on a exprimée sous le nom usité dans les écoles d'idiosyncrasie. On pourra bien en général décider que la santé est bonne, si toutes les fonctions s'exercent, ou peuvent s'exercer avec facilité, alacrité et constance. J'ajoute, peuvent s'exercer, parce que comme il est facîle de s'apercevoir, l'exercice continuel de toutes les fonctions, non seulement n'est pas nécessaire pour la santé, mais même est impossible, il suffit qu'il y ait de l'aptitude : les exemples n'ont pas besoin d'être indiqués. Il y a d'autres fonctions qui sont succédanées, qui ne peuvent être exercées que les unes après les autres ; telles sont la veille et le sommeil, la digestion, la sanguification et certaines excrétions, etc. Voyez SANTE. Il est certain que toutes les personnes dans qui on observera ces qualités, dans l'exercice des fonctions, jouiront d'une santé parfaite. Mais il n'y a point de mesure générale pour s'assurer de leur présence dans tous les tempéraments, et tous les sujets ; c'est pourquoi il faut que le séméiologiste descende dans des détails particuliers les uns aux autres, détails trop longs pour nous occuper ici. Voyez SANTE, TEMPERAMENT, etc. Mais un autre point d'une plus grande étendue, et plus difficîle encore à discuter se présente ici. Il ne suffit pas de décider si la santé présente est bonne, il faut déterminer si elle sera constante, si le sujet peut, à l'abri des accidents, se promettre de longues années. Pour résoudre ce problême intéressant, il faut non seulement examiner la manière dont les fonctions s'exercent dans l'état actuel ; mais surtout tirer des signes ultérieurs de la manière dont la personne a vécu, soit dans sa jeunesse, soit dans son enfance ; si elle a été sujette à différentes maladies qui en font craindre pour la suite ; si elle en a éprouvé d'autres auxquelles on échappe rarement. Il faut porter plus loin les recherches, faire attention au temps du sevrage, à l'allaitement, à la naissance et au temps qui l'a précédé ; examiner en conséquence, si le sevrage a été trop précipité, ou trop retardé ; si la nourrice était bonne ; si on n'avait aucun vice capital à lui reprocher ; si le nourrisson n'a point eu d'incommodités extraordinaires ; si l'accouchement a été naturel ; si l'enfant n'a point souffert en naissant ; s'il est venu à terme ; si sa mère a eu une grossesse heureuse ; si enfin, aussi-bien que le père, elle jouissait d'une bonne santé ; s'ils ne portaient, ni l'un ni l'autre, le germe de quelque maladie héréditaire ; s'ils n'étaient ni trop jeunes ni trop vieux ; s'ils ne s'adonnaient pas avec excès aux plaisirs de l'amour, etc. On peut aussi tirer quelques lumières de la saison où il a été formé ; on a observé que le printemps de l'année, de même que celui de la vie, étaient les saisons les plus favorables à la formation de l'enfant. On pourrait présager une longue vie, si l'on ne trouvait rien à redire sur tous ces articles ; si en même temps toutes les fonctions s'exerçaient comme il faut, et que le corps fût bien constitué ; savoir la tête grosse, la poitrine large, les membres toreux, et le corps d'une grande taille, suivant l'observation d'Hippocrate, aphor. 54. lib. II., etc.

De tous les auteurs qui ont écrit sur la sémeiotique, Hippocrate est presque le seul dont les ouvrages méritent d'être consultés, et surtout sur celle qui regarde les maladies ; tous les autres n'ont fait que le transcrire ou le défigurer. Le lecteur ne pourra lire sans admiration les écrits de ce grand observateur, la plupart des autres ne lui inspireraient que du dégout. Nous ajouterons seulement quelques traités nouveaux sur le pouls signe, qu'Hippocrate a négligé, et qui mérite d'être approfondi. Voyez POULS, et les ouvrages de Solano, Nihell, Bordeu, Michel, etc.