S. m. (Chimie) signifie en général tout sel dont les effets sont différents et contraires à ceux des acides. Il ne faut pas pour cela dire que les alkalis sont d'une nature différente et opposée à celle des acides, puisqu'il est de l'essence saline des alkalis de contenir de l'acide. Voyez ACIDE.

Alkali est un mot arabe : les Arabes nomment kali une plante que les François connaissent sous le nom de soude ; on tire de la lessive des cendres de cette plante, un sel qui fermente avec les acides, et les émousse ; et parce que ce sel est celui de cette espèce qui est le plus connu, on a donné le nom d'alkali à tous les sels qui fermentent avec les acides, et leur font perdre leur acidité.

Les propriétés de ces corps, par lesquelles on les considère comme alkalis, ne sont que des rapports de ces corps, comparés avec d'autres qui sont acides pour eux ; c'est pourquoi il y a des matières qui sont alkalines pour quelques corps, et qui se trouvent acides pour d'autres.

Les alkalis sont ou fluides, comme est la liqueur de nitre fixé ; ou solides, comme la soude.

Les alkalis, tant les fluides que les solides, sont ou fixes, comme sont le sel alkali de tartre, et la liqueur alkaline de tartre, qu'on nomme vulgairement huîle de tartre par défaillance ; ou les alkalis sont volatils, comme sont le sel et l'esprit de corne de cerf.

On peut distinguer les alkalis fixes des alkalis volatils, en ce que les fixes font prendre au sublimé corrosif dissous dans de l'eau, ou à la dissolution de mercure faite par l'esprit de nitre, une couleur rouge orangée ; au lieu que les alkalis volatils donnent à ces dissolutions une couleur blanche laiteuse.

Pour savoir dans l'instant si une matière est alkaline, on l'éprouve avec une teinture violette : par exemple, en les mêlant avec du sirop de violette, dissous dans l'eau, les alkalis, tant les fixes que les volatils, verdissent ces teintures violettes ; au lieu que les acides les rougissent.

Les alkalis ont la propriété de se fondre aisément au feu ; et plus un alkali est pur, plus aisément il s'y fond ; au contraire lorsqu'il contient de la terre, ou quelqu'autre matière, il n'est pas facîle à fondre.

Les alkalis s'humectent aussi fort aisément à l'air ; ils s'imbibent de son humidité lorsqu'ils ne sont pas exactement renfermés.

Ces trois genres de corps donnent des alkalis : le genre des animaux fournit beaucoup d'alkalis volatils, et presque point de fixes ; le genre des végétaux donne plus d'alkalis fixes que de volatils ; il y a beaucoup d'alkalis fixes du genre minéral, et presque point de volatils ; et même il n'y a pas longtemps qu'on sait qu'on peut tirer des alkalis volatils urineux du genre minéral. Voyez les Mémoires de l'Académie Royale des Scienc. de l'année 1746. Analyse des eaux minérales de Plombières, par M. Malouin.

Il y a un alkali fixe naturel qui est du genre minéral, tel qu'est le natrum ; cet alkali naturel est peu connu, et plus commun qu'on ne le croit ; c'est pourquoi on en trouve dans presque toutes les eaux minérales, parce qu'elles l'ont emporté des terres qu'elles ont traversées : c'est pourquoi aussi on trouve dans la plupart de ces eaux du sel de Glauber dont la base est un alkali de la nature du natrum. Enfin cet alkali naturel est la base du sel le plus commun par ses usages et par la quantité qu'on en trouve, savoir le sel gemme et le sel marin.

Quoiqu'on n'admette point communément d'alkali naturel dans le genre des végétaux, on conçoit cependant qu'il n'est pas impossible qu'ils en aient tiré de la terre dont elles se nourrissent ; il est vrai que la plus grande partie de cet alkali naturel change de nature dans la plupart des plantes.

Il y a encore moins d'alkali naturel dans les animaux, que dans les végétaux : cependant on en tire plus d'alkali, que des végétaux, parce que le feu peut alkaliser plus aisément les principes des animaux.

Les sels fixes des plantes sont des sels alkalis, qu'on en tire après les avoir brulées et avoir lessivé leurs cendres : c'est pourquoi on appelle ces sels, sels lixiviels. On n'entend communément sous le nom de sels alkalis fixes, que les sels lixiviels des plantes.

Les sels naturels ou essentiels des plantes sont le plus souvent ou de la nature du nitre, ou de la nature du tartre, ou de la nature du sel commun ; de sorte qu'en brulant ces plantes, on fixe leurs sels par leur charbon, et ces sels sont aluns, ou de la nature de nitre fixe, ou de la nature de l'alkali du tartre, ou de la nature de l'alkali du sel commun, qui est une espèce de soude, savoir le sel alkali proprement dit. Quelques plantes ont de tous ces sels ensemble.

La méthode de Tachenius, pour faire les sels alkalis fixes, est de bruler les plantes en charbon avant que de les convertir tout à fait en cendres ; au lieu qu'en les brulant à feu ouvert, par la façon ordinaire, elles tombent en cendres tout de suite. Les sels fixes, faits à la manière de Tachenius, sont moins alkalis et plus huileux que les sels faits à l'ordinaire.

Ce qui reste dans la cornue après la distillation des plantes, diminue environ des deux tiers, lorsqu'on le calcine à feu ouvert. Cette partie qui s'évapore est une portion d'huîle de la plante, qui ayant été saisie par la chaleur et combinée avec la partie terreuse et saline fixe de la plante, n'a pu en être séparée, par le feu clos et plus faible, dans la cornue.

Il entre dans la composition des sels alkalis fixes des plantes, une partie de leur huile, qui fait que ces sels ont quelque chose de doux au toucher. Le nitre fixe contient un peu de la partie grasse de la matière inflammable avec laquelle on l'a fixé ; et quoiqu'en versant de l'acide de nitre sur du nitre fixé, on forme de nouveau un nitre qui ne contient point cette partie grasse, on n'en peut pas conclure que pour fixer le nitre, c'est-à-dire, pour en faire un alkali fixe, le principe huileux n'y soit nécessaire. Si on demande ce que devient cette partie grasse du nitre fixe, dans la reproduction du nitre ; il est facîle de répondre à cette question, en faisant voir que cette partie grasse qui faisait partie du nitre fixe, reste dans l'eau-mère de la dissolution qu'on fait pour crystalliser ce nitre régénéré : on y trouverait, si on s'en donnait la peine, un résidu gras qui après avoir été desséché pourrait s'enflammer au feu.

Il est vrai qu'en général les huiles se dissipent par le feu : mais il y a des cas où elles se fixent aussi par le feu. Il y a lieu de soupçonner que les alkalis sont gras au toucher, par l'huîle qui y est fixée. La salure et l'acreté des alkalis ne sont pas une preuve qu'ils ne contiennent point de l'huîle : les huiles qui ont passé par le feu sont salées et acres comme est l'huîle de corne de cerf.

Les alkalis diffèrent entre eux par la terre qui en fait la base, par l'acide qui les constitue sel, et par la matière grasse qui entre dans leur composition.

On n'alkalise pas tous les sels avec les matières grasses, comme on fait le nitre, parce qu'il n'y a que l'acide du nitre qui dissolve bien les huiles.

Personne sans doute n'a pensé qu'il ne se faisait pas de dissipation dans l'opération par laquelle on fixe du nitre : et il est bon de savoir que le charbon ne donne presque point de sel alkali.

Les alkalis fixes sont en général plus forts que les alkalis volatils : on tire l'esprit volatil de sel ammoniac, par le moyen de l'alkali du tartre et de la potasse ; cependant il y a des occasions où les alkalis volatils sont plus forts que les alkalis fixes. Par exemple, si dans une dissolution de cuivre précipitée par l'alkali du tartre, on verse une suffisante quantité d'esprit volatil, cet alkali volatil fera quitter prise à l'alkali fixe ; il se saisira du cuivre, et il le redissoudra. Ce qui prouve encore que l'alkali volatil est quelquefois plus fort que l'alkali fixe, c'est que si on met du cuivre dans un alkali volatil, il le dissoudra plus parfaitement que ne le dissoudrait un alkali fixe.

Les sels alkalis fixes des plantes sont composés d'une petite partie de la terre de la plante, dans laquelle est concentré un peu de son acide par le feu même qui dissipe le reste, pendant qu'on brule la plante, ce qui fait un corps salin poreux ; et c'est par cet acide que contient cette terre, que le sel qui résulte de cette combinaison est dissoluble. Voyez ACIDE.

Un sel alkali peut être plus ou moins alkali, selon qu'il a plus ou moins d'acide concentré dans sa terre. Les alkalis qui ont plus d'acide approchent plus de la nature des sels moyens, et ainsi ils sont moins alkalis, que ceux qui n'ont d'acide que pour rendre dissoluble la terre absorbante qui leur sert de base, et pour faire l'analogie des sels alkalis avec les acides, les choses de même nature étant naturellement portées à s'unir ; ainsi les choses grasses s'unissent aisément ensemble.

Si au contraire les alkalis avaient moins d'acide, ils seraient moins alkalis ; ils tiendraient plus de la nature des terres absorbantes, ils s'uniraient avec moins de vivacité avec les acides, et ils seraient moins dissolubles dans l'eau.

Il ne faut pas lessiver les cendres des plantes avec de l'eau chaude, pour en tirer les sels, si on veut ne pas dissoudre une trop grande quantité d'huile, qui les rendrait noirâtres ou roussâtres : ils sont plus blancs lorsqu'on a employé l'eau froide. A la vérité on tire plus de ces sels par l'eau chaude, que par l'eau froide : mais le feu qu'il faut employer pour blanchir les sels tirés par l'eau chaude, dissipe cet excédent ; de sorte qu'après la calcination qui est moindre pour les sels tirés par l'eau froide, que pour ceux qui sont tirés par l'eau chaude, on tire autant, et même plus de sel d'une même quantité de cendre, lorsqu'on a employé l'eau froide, que lorsqu'on a employé l'eau chaude.

Les sels alkalis volatils diffèrent entre eux, comme les sels alkalis fixes diffèrent entre eux. C'est faire tort à la Pharmacie, à la Médecine, et surtout aux malades, que de dire que les sels volatils tirés du genre des animaux, ont tous les mêmes vertus : on peut dire au contraire qu'ils sont différents en propriétés, selon les différentes matières desquelles on les tire. Les sels volatils de crane humain sont spécifiques pour l'épilepsie, ceux de vipere sont à préférer dans les fièvres, surtout pour celles qui portent à la peau ; ceux de corne de cerf sont recommandables dans les maladies qui sont avec affection des nerfs.

A la vérité, les esprits volatils urineux, tirés des animaux, ont des propriétés qui sont communes à tous : mais il faut reconnaître aussi qu'ils en ont de particulières, qui sont plus différentes dans les uns que dans les autres ; comme en reconnaissant que les vins ont des qualités communes à tous les vins en général, il faut reconnaître en même temps qu'ils en ont qui sont particulières à chaque vin.

Dans la grande quantité d'analyses de plantes qui ont été faites à l'Académie des Sciences, M. Homberg a observé qu'on trouvait rarement deux sels alkalis de deux différentes plantes, qui fussent d'égale force d'alkali.

Les alkalis diffèrent par leurs différentes terres, par leurs différents acides, et par les différentes proportions et combinaisons de ces deux choses ; ils diffèrent aussi par le plus ou le moins d'huîle qu'ils contiennent, et par le plus ou moins de sels moyens qui y sont joints, et enfin par la différente espèce de ces sels moyens.

Les alkalis fixes sont des dissolvants des matières grasses, avec lesquelles ils forment des corps savonneux, qui ont de grandes propriétés. Ces sels sont apéritifs des conduits urinaires : c'est pourquoi ils sont mis au nombre des plus forts diurétiques que fournisse la Médecine. On sait combien cette vertu diurétique des sels lixiviels est utîle dans le sel de genêt, pour la guérison des hydropisies.

Souvent on emploie aux mêmes usages des cendres des plantes, au lieu de leur sel, et ils n'en font que mieux, parce que pour les tirer de leurs cendres, la lessive et ensuite l'exsiccation et la calcination de ces sels, ne les rendent pas meilleurs pour cela.

Il y en a qui emploient l'eau même distillée de la plante, pour tirer le sel de ses cendres.

En général, les alkalis sont de puissants fondants, c'est-à-dire, les alkalis dissolvent fortement les humeurs épaisses et visqueuses : c'est pourquoi ils sont apéritifs, et propres à remédier aux maladies qui viennent d'obstruction, lorsqu'un médecin sage et habîle les met en œuvre.

Les savons ne sont composés que d'alkalis et d'huiles joints ensemble ; les Médecins peuvent faire préparer différents savons pour différentes maladies, en faisant employer différents alkalis et différentes huiles, selon les différents cas où ils jugent les savons convenables.

On peut dans bien des occasions employer les sels fixes des plantes dans les médecines, pour tirer la teinture des purgatifs résineux, et employer ceux de ces sels qui conviennent dans la maladie. Voyez la Chimie médicinale de M. Malouin. (M)

LES ALKALIS fixes sont considérés comme remèdes, et ont les propriétés suivantes.

On s'en sert comme évacuans, purgatifs, diurétiques, sudorifiques. Leur propriété est de détruire en peu de temps l'acide des humeurs contenues dans les premières voies, en formant avec lui un sel neutre qui devient purgatif.

On s'en sert pour résoudre les obstructions du foie, et faire couler la bîle ; ils deviennent diurétiques en donnant un mouvement plus fort au sang, et en débarrassant les reins des parties glaireuses qui s'opposent au passage des urines ; c'est par la même raison qu'ils sont aussi quelquefois sudorifiques. Enfin, ces sels sont d'un très-grand secours dans les maladies extérieures ; on emploie avec succès la lessive qu'on en tire pour nettoyer les ulcères sanieux, et arrêter les progrès de la mortification.

Il faut cependant en faire usage intérieurement avec beaucoup de précaution ; car ils sont très-dangereux dans le cas de chaleur et de putréfaction alkaline, et lorsque les humeurs sont beaucoup exaltées ; enfin lorsqu'elles sont en dissolution, ce que l'on connait par la puanteur de l'haleine et l'urine du malade.

Manière d'employer les alkalis. On aura soin d'abord que l'estomac soit vide : la dose est depuis quatre grains jusqu'à un gros, selon l'état des forces du malade, sur lesquelles on doit consulter un Médecin.

Le véhicule ordinaire dans lequel on les fait prendre est l'eau commune. Selon l'intention que l'on aura, et l'indication que l'on voudra remplir, on changera la boisson que l'on fera prendre par-dessus, c'est-à-dire, que lorsque l'on aura dessein de faire suer ou d'augmenter la transpiration, cette boisson sera légèrement sudorifique, ou lorsqu'il sera question de pousser par la voie des urines, alors on la rendra un peu diurétique. Voyez SUDORIFIQUE et DIURETIQUE.

Mais si les alkalis sont des remèdes, ils sont aussi causes de maladies : ces maladies sont l'alkalescence du sang et des autres humeurs, les fièvres de tout genre, la dissolution du sang, la crispation des solides, le scorbut, la goutte même et les rhumatismes. Ces sels agissant sur les liquides, les atténuent, en exaltent les soufres, séparent l'humeur aqueuse, la rendent plus acre et plus saline ; il serait imprudent d'ordonner dans ces cas l'usage des alkalis.

Les causes antécédentes de l'alkalescence sont les suivantes : les aliments alkalescens, c'est-à-dire, tirés des végétaux alkalescens ou des animaux, excepté le lait de ceux qui se nourrissent d'herbes, les poissons, leur foie, et leur peau, les oiseaux qui vivent de poissons, tous les oiseaux qui se nourrissent d'animaux, ou d'insectes, ou qui se donnent beaucoup d'exercice ; comme aussi les animaux que l'on tue pendant qu'ils sont encore échauffés, sont plus sujets que les autres à une putréfaction alkaline. Les aliments tirés de certains animaux, comme les graisses, les œufs, les viandes aromatisées, le poisson vieux et pris en grande quantité, la marée gardée longtemps, produisent une alkalescence dans les humeurs qui exalte les soufres, et dispose le corps aux maladies inflammatoires.

La faiblesse des organes de la digestion ; car dans ce cas l'aliment qu'on a pris se corrompt dans l'estomac, et cause ce que nous appelons ordinairement indigestion ; le chyle mal fait qui en résulte se mêle avec le sang, et le dispose à devenir plus alkalescent.

La force excessive des organes de la digestion destinés à l'assimilation des sucs, produit une grande quantité de sang extrêmement exalté, et une bîle de même nature. Alors les aliments acescens se convertissent en alkalescens. Lors donc que ces organes agissent avec trop de force sur un aliment qui est déjà alkalescent, il le devient davantage, et approche de plus en plus de la corruption.

De-là vient que les personnes pléthoriques sont plus sujettes aux maladies épidémiques que les autres ; que celles qui jouissent d'une santé parfaite sont plutôt attaquées de fièvres malignes que d'autres qui ne sont pas aussi bien constituées. Ceux qui sont d'une constitution mâle et athlétique sont plus sujets aux maladies pestilentielles et aux fièvres putrides que les valétudinaires.

Aussi Hippocrate, lib. I. aph. 3. veut que l'on se méfie d'une santé excessive : car la même force de complexion qui suffit pour porter le sang et les sucs à ce degré de perfection, les exalte enfin au point d'occasionner les maladies. Celse prétend qu'une trop bonne santé doit être suspecte. " Si quelqu'un, dit-il, est trop rempli d'humeurs bonnes et louables, d'un grand embonpoint, et d'un coloris brillant, il doit se méfier de ses forces ; parce que ne pouvant persister au même degré, ni aller au-delà, il se fait un bouleversement qui ruine le tempérament ".

Une longue abstinence ; car lorsque le sang n'est pas continuellement délayé et rafraichi par un nouveau chyle, il contracte une acrimonie alkaline qui rend une haleine puante, et dégénere en une fièvre putride dont la mort est la suite. En effet les effets de l'abstinence sont plus difficiles à guérir que ceux de l'intempérance.

La stagnation de quelque partie du sang et des humeurs ; parce que les sucs animaux qui croupissent suivant le penchant naturel qu'ils ont à se corrompre, s'exaltent et acquièrent une expansion qui ne tarde guère à se manifester.

La chaleur excessive des saisons, du climat ; aussi dans l'été les maladies aiguës sont-elles plus fréquentes et plus dangereuses.

La violente agitation du sang qui produit la chaleur. Lorsque quelqu'une de ces causes ou plusieurs ensemble ont occasionné une putréfaction alkaline, elle se manifeste par les signes suivants dans les premières voies.

1°. La soif. On se sent altéré, c'est-à-dire, porté à boire une grande quantité de délayans, qui noyant les sels acres et alkalis, font cesser ce sentiment incommode, et disposent la matière qui se putréfie ou qui est déjà putréfiée à sortir de l'estomac et des intestins, par le vomissement ou par les selles. Si on se sert d'acides dans ces cas, leur union avec les alkalis forme un sel neutre.

2°. La perte totale de l'appétit, et l'aversion pour les aliments alkalescens ; l'appétit ne pouvant être que nuisible, lorsque l'estomac ne peut digérer les aliments.

3°. Les rots nidoreux, ou les rapports qui laissent dans la bouche un goût d'œufs pourris, à cause de la portion des sels putrides et d'huîle rance qui sort en même temps que l'air.

4°. Les matières épaisses qui s'amassent sur la langue et le palais, affectent les organes du goût d'une sensation d'amertume, à cause que les sucs animaux contractent un goût amer, en devenant rances ; il peut se faire aussi que ce goût soit causé par une bîle trop exaltée et prête à se corrompre.

5°. Les maux d'estomac causés par l'irritation des sels acrimonieux, la vue ou même l'idée d'un aliment alkalescent prêt à se corrompre, suffisent quelquefois pour les augmenter. Cette irritation augmentant produit un vomissement salutaire, si la matière putréfiée ne séjourne que dans les premières voies. Si cette acrimonie affecte les intestins, elle sollicite des diarrhées symptomatiques. C'est ainsi que le poisson et les œufs putréfiés gardés longtemps dans les premières voies causent de pareils effets.

6°. Cette acrimonie alkaline produit une lassitude spontanée, une inquiétude universelle, un sentiment de chaleur incommode, et des douleurs iliaques inflammatoires. Les inflammations de bas-ventre sont souvent la suite des fièvres putrides.

7°. Cette acrimonie mêlée dans le sang le dénature et le décompose au point que les huiles deviennent rances, les sels acres et corrosifs, les terres alkalines. La lymphe nourricière perd sa consistance et sa qualité balsamique et nourrissante, devient acre, irritante, corrosive ; et loin de pouvoir réparer les solides et les fluides, les ronge et les détruit.

8°. Les humeurs qui se séparent par les secrétions sont acres, l'urine est rouge et puante, la transpiration picote et déchire les pores de la peau.

Enfin la putréfaction alkaline du sang et des humeurs doit être suivie d'une dépravation ou d'une destruction totale des actions naturelles, animales et vitales, d'une altération générale dans la circulation, dans les secrétions et dans les excrétions, d'inflammations générales ou locales, de fièvres qui dégénèrent en suppurations, gangrenes et sphaceles qui ne se terminent que par la mort.

Cure des maladies occasionnées par les alkalis ou l'alkalescence des humeurs. La différence des parties affectées par la putréfaction alkaline en apporte aussi à la cure. Si les aliments alkalins dont la quantité est trop grande pour être digérée, pourrissent dans l'estomac et dans les intestins, et produisent les effets dont nous avons parlé, on ne peut mieux faire que d'en procurer l'évacuation par le vomissement ou les selles. Les vomitifs convenables sont l'eau chaude, le thé, l'hypecacuanha à la dose d'un scrupule.

Lorsque la putréfaction alkaline a passé dans les vaisseaux sanguins, la saignée est un des remèdes les plus propres à aider la cure ; elle ralentit l'action des solides sur les fluides, ce qui diminue la chaleur, et par conséquent l'alkalescence.

La cessation des exercices violents soulage aussi beaucoup ; l'agitation accélérant la progression du sang et les secrétions, augmente la chaleur et tous ses effets.

Les bains émolliens, les fomentations et les lavements de même espèce sont utiles ; en relâchant les fibres, ils diminuent la chaleur : d'ailleurs les vaisseaux absorbans recevant une partie du liquide, les bains deviennent plus efficaces.

L'air que le malade respire doit être frais, tempéré.

Les viandes qu'on pourra permettre sont l'agneau, le veau, le chevreau, les poules domestiques, les poulets, parce que ces animaux étant nourris de végétaux ont les sucs moins alkalins. On peut faire de ces viandes des bouillons legers qu'on donnera de trois heures en trois heures.

On ordonnera des tisanes, des aposemes, ou des infusions faites avec les végétaux farineux.

On peut ordonner tous les fruits acides en général que l'été et l'automne nous fournissent.

Il y a une infinité de remèdes propres à détruire l'acrimonie alkaline : mais nous n'en citerons qu'un petit nombre qui pourront servir dans les différentes occasions.

Prenez avoine avec son écorce, deux onces ; eau de rivière, trois livres ; faites bouillir, filtrez et mêlez à deux livres de cette décoction suc de citron récent, une once ; eau de canelle distillée, deux gros ; de sirop de mûres de haies, deux onces : le malade en usera pour boisson ordinaire. Boerhaave, Mat. med.

Mais tous ces remèdes seront inutiles sans le régime, et sans une boisson abondante qui délaye et détrempe les humeurs ; il faut avant tout débarrasser les premières voies des matières alkalines qu'elles contiennent.

L'abstinence des viandes dures et alkalines, le mouvement modéré, un exercice alternatif des muscles du corps pris dans un air frais et tempéré, soulagera beaucoup dans l'acrimonie alkaline. Il faut encore éviter l'usage des plantes alkalines qui d'elles-mêmes sont bonnes dans des cas opposés à celui dont nous parlons. (N)

ALKALI de Rotrou ; c'est l'alkali des coquilles d'œufs préparées. Rotrou préparait l'alkali de coquilles d'œufs, en les faisant sécher au soleil, après en avoir ôté les petites peaux, et après les avoir bien lavées ; ensuite il les broyait, et les réduisait en poudre fine sur le porphyre. Voyez ROTROU.