S. m. (Docimasie) on nomme touchaux, des aiguilles d'essai, acus probatrices. Elles servent à connaître exactement les différents degrés d'alliage ou de pureté de l'or, de l'argent et du cuivre. On compare l'enduit de ces métaux avec celui des touchaux, qui sont de petites lames faites des mêmes métaux avec différents titres connus. Ces aiguilles sont larges d'une ligne, épaisses d'une demie, et longues de deux ou trois pouces. Chacune d'elles porte une empreinte qui indique son titre.

L'alliage des touchaux pour argent se fait avec du cuivre, et rarement avec du laiton. Pour en établir les proportions, on se sert du poids de marc en petit divisé en demi-onces et en grains. Mais comme il faut qu'il puisse contrebalancer une molécule métallique assez considérable pour une aiguille, on en prend un qui le double six fais, c'est-à-dire qui équivaut à 96 livres du quintal fictif, donc conséquemment un grain en vaut six du précédent. On pese avec ce poids un marc d'argent pur, on l'enveloppe dans un papier sur lequel on marque seize demi-onces ; ce qui signifie que ce marc est d'argent parfaitement pur. La molécule pesée fait la première aiguille. On pese ensuite quinze demi-onces d'argent pur, et une demi-once de cuivre. Ce dernier métal doit être d'une seule pièce solide, qui ait le moins de surface qu'il soit possible, et que l'on ait ajusté avec une lime. Si l'on n'avait cette attention, c'est-à-dire, si le cuivre était divisé en un grand nombre de petites molécules, ou étendu en feuilles, il arriverait que la plus grande partie s'en scorifierait plutôt que d'entrer en fusion. On enveloppera également les deux derniers morceaux pesés, et on y marquera quinze demi-onces pour faire connaître que la molécule métallique en question, est composée de quinze parties d'argent pur, et d'une de cuivre. C'est pour la seconde aiguille. On pese encore quatorze demi-onces d'argent pur et deux de cuivre, que l'on enveloppe et inscrit quatorze demi-onces, et dont on fait la troisième. L'on continue enfin d'ajuster la matière des autres aiguilles, selon la même progression arithmétique, croissante pour le cuivre, et décroissante pour l'argent, et l'on donne à chacune l'inscription qui lui convient. Tel est l'ordre qu'on suit.

Pour unir le cuivre à l'argent, prenez un creuset neuf dont le fond soit bien uni ; frottez-le intérieurement de borax ; mettez-y en particulier chaque portion de métal contenue dans l'un des papiers, et y ajoutez un peu de borax et de flux noir. Placez votre creuset dans un fourneau de fusion, et l'échauffez rapidement ; ou plutôt jetez votre mélange dans un creuset embrasé ; remuez-le un peu, sitôt qu'il aura acquis une fusion parfaite, et le retirez du feu pour le laisser refroidir ; vous le casserez pour avoir la matière qu'il contient.

Cette fonte se fait aussi avec le chalumeau à un feu de lampe, et peut-être plus commodément. On remet dans le même papier chacune des petites molécules métalliques pour éviter la confusion, et on les pese de nouveau à la balance d'essai. Celles qui peseront près d'un marc seront bonnes ; mais s'il s'en trouve à qui il manque un poids considérable, comme, par exemple, quatre grains ou plus ; c'est une preuve qu'il s'est perdu autant de cuivre à proportion, soit par le déchet ou autrement, parce que le feu aura été ou trop lent, ou trop long. On doit remplacer celle à qui cet inconvénient sera arrivé, en gardant les mêmes proportions qu'auparavant.

On façonnera avec le marteau chacune de ces petites masses pour en former des aiguilles, observant de les recuire de temps-en-temps, en cas qu'elles deviennent trop roides par le martelage. On gravera sur ces aiguilles le nombre des demi-onces d'argent qu'elles contiennent, celui de seize sur la première, de quinze sur la seconde, et ainsi de suite. Chacune sera percée à l'une de ces extrémités, afin qu'on puisse y passer un fil pour les enfiler toutes ensemble ; ce qui se fera dans l'ordre de leurs numéros ; on donne le nom de ligature à la suite de ces aiguilles de différents titres.

Quelques essayeurs insèrent une aiguille d'un titre proportionnel entre chacune de celles dont nous venons de parler ; d'autres y en insèrent un plus grand nombre, comme trois, par exemple ; ce qui en augmente le nombre, et exige une plus grande quantité de combinaisons, ainsi qu'on peut le déduire du paragraphe précédent ; mais quant à la ligature de l'argent, il n'est presque pas possible de mettre de distinction entre deux aiguilles dont la différence de l'alliage est moindre que de la moitié d'une demi-once.

On peut ajouter aussi à ces aiguilles ou touchaux d'argent, une lame de cuivre pour servir de dernière aiguille ; parce qu'on se sert aussi de cette ligature pour connaître la pureté du cuivre, ou les différentes quantités d'argent qu'il peut contenir.

Les aiguilles ou touchaux se font en Flandre avec le poids de marc divisé par grains ; la première est une aiguille de douze deniers, c'est-à-dire d'argent pur. La seconde d'onze deniers dix-huit grains d'argent, et de six grains de cuivre, et ainsi de suite ; en sorte que la proportion de l'argent décroit toujours de la quantité de six grains, ou d'un quart de denier, et que celle du cuivre est en raison inverse. Lorsqu'on en est venu à la quantité d'un denier pour l'argent, et d'onze deniers pour le cuivre, on ne Ve pas plus loin ; cette proportion constitue la dernière aiguille.

Il est toutefois inutîle que la différence de la quantité d'alliage de deux aiguilles proportionnelles voisines, continue d'être aussi petite jusqu'à la fin. Celle de six grains suffira jusqu'à l'aiguille de neuf deniers, et celle de la moitié d'une demi-once, jusqu'à l'aiguille de dix demi-onces en descendant ; c'est-à-dire en commençant par l'argent pur, parce qu'il n'est pas possible de discerner exactement dans les aiguilles suivantes des variétés si peu sensibles.

Les aiguilles d'essai ou les touchaux pour or, sont composées d'or et d'argent, seul ou allié de cuivre en différentes proportions. On donne le nom de carature, caratura, à ces sortes de combinaisons, que l'on règle à l'aide du poids de marc divisé en karats. Au reste, il n'y a d'autre différence entre la préparation de ces aiguilles-ci et celles d'argent, qu'en ce que leur titre est proportionné d'une autre façon. Chaque touchau est du poids d'un marc. La table suivante représente leur ordre et leur division.

La première est d'or pur ou à 24 karats.

Ensorte que l'on Ve toujours en diminuant par karats entiers, jusqu'à ce qu'on soit parvenu au vingt-troisième karat d'argent ; par la raison, ainsi que nous l'avons déjà dit, qu'il n'est pas possible de connaître exactement entre deux aiguilles au-dessous de la neuvième, une différence qui ne consiste qu'en six grains d'or plus ou moins. L'alliage en question de l'or et de l'argent s'appelle carature blanche, caratura alba.

Si l'on mêle le cuivre à l'argent pour faire des touchaux d'or, cette combinaison prend le nom de la carature mixte, caratura mixta. Cette préparation se fait selon les mêmes lois que la précédente ; à cette seule différence près, que la molécule d'argent pur jointe à l'or dans la table précédente, est ici alliée d'une partie, ou à deux parties de cuivre ; ce qui fournit deux espèces d'aiguilles, quant aux proportions de leurs combinaisons. La table suivante présente un exemple de deux parties d'argent, contre une de cuivre.

La première aiguille est d'or pur ou de 24 karats.

Et ainsi de suite, selon l'ordre de la précédente.

Si dans la table ci-dessus on substitue le cuivre pur à l'argent pur, et réciproquement, on a une troisième espèce de touchaux d'or ; et enfin une quatrième, si ces deux métaux sont alliés à quantités égales.

Nous n'avons exposé que les combinaisons de l'or le plus en usage ; car elles sont susceptibles d'être variées d'une infinité de façons qu'il n'est ni possible, ni nécessaire à un essayeur d'imiter ; bien qu'il puisse jusqu'à un certain point, quand il a acquis beaucoup d'usage, distinguer leurs différents titres en les comparant avec les nôtres.

Si l'on trouvait que les aiguilles d'or dussent revenir à un trop haut prix, on pourrait les faire plus petites que les aiguilles d'argent, et les souder à des lames de cuivre pour en rendre l'usage plus commode. Cramer, Docimastique. (D.J.)