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Catégorie parente: Physique particulière
Catégorie : Maladie
S. f. (Maladie) est l'état d'une personne qui est privée du sens de l'ouïe ; ou c'est une maladie de l'oreille, qui empêche cet organe de recevoir les sons. Voyez OUÏE et OREILLE.

La surdité vient en général ou d'une obstruction, ou compression du nerf auditif, ou de quelque amas de matière dans la cavité interne de l'oreille, ou de ce que le conduit auditif est bouché par quelque excroissance dure ; ou enfin de quelque gonflement des glandes, ou de quelque corps étranger qui ferme le conduit, etc.

Les sourds de naissance sont aussi muets, au-moins ordinairement ; parce qu'ils ne sont pas capables d'apprendre à parler. Cependant comme les yeux aident les oreilles, au-moins en partie, ils peuvent, à la rigueur, entendre ce qu'on dit, en observant le mouvement des lèvres et de la bouche ; ils peuvent même s'accoutumer à faire des mouvements semblables, et par ce moyen apprendre à parler.

Ainsi le Dr. Wallis parle de deux jeunes gens qui étaient sourds de naissance, et qui ne laissaient pas d'entendre ce qu'on leur disait, et d'y répondre pertinemment. Le chevalier Digby nous dit avoir Ve un autre exemple de la même chose. Il n'y a pas longtemps qu'il y avait à Amsterdam un médecin suisse nommé Jean Conrad Amman, qui apprenait avec succès à parler à des enfants nés sourds : il avait réduit cette pratique à des règles fixes, et à une espèce d'art et de méthode qu'il a publiée dans son surdus loquents, Amst. 1692. et dans son traité de loquelâ, ibid. 1700.

M. Waller, secrétaire de la S. R. de Londres, parle dans les Transactions philosophiques, n °. 313. d'un frère et d'une sœur, âgés d'environ 50 ans chacun, et nés dans la même ville que M. Waller, qui tous deux étaient entièrement sourds : cependant l'un et l'autre savaient tout ce qu'on leur disait, en examinant seulement le mouvement des lèvres ; et ils y répondaient sur le champ.

Il parait qu'ils avaient tous deux joui du sens de l'ouïe étant enfants, et qu'ils l'avaient perdu dans la suite ; mais qu'ils avaient conservé une espèce de langage qui, quoique barbare, était cependant intelligible.

L'évêque Burnet nous a rapporté encore un autre exemple de la même chose dans l'histoire de la fille de M. Gaudy, ministre de S. Gervais, à Geneve. Cette fille devint sourde à l'âge de deux ans ; depuis ce temps, elle n'entendait plus que le grand bruit, mais rien de ce qu'on lui disait ; mais en observant le mouvement des lèvres de ceux qui lui parlaient, elle apprit un certain nombre de mots, dont elle composa une espèce de jargon ; au moyen duquel elle pouvait converser avec ceux qui étaient en état d'entendre son langage. Elle ne savait rien de ce qu'on lui disait, à-moins qu'elle ne vit le mouvement des lèvres de la personne qui lui parlait ; de sorte que pendant la nuit, on ne pouvait lui parler sans lumière. Mais ce qui doit paraitre plus extraordinaire, c'est que cette fille avait une sœur, avec laquelle elle conversait plus aisément qu'avec personne ; et pendant la nuit, il lui suffisait de mettre la main sur la bouche de sa sœur, pour savoir ce qu'elle lui disait, et pour pouvoir lui parler dans l'obscurité. Burn. lit. IV. p. 248. C'est une chose digne de remarque, que les sourds, et en général ceux qui ont l'ouïe dure, entendent mieux, et avec plus de facilité, lorsqu'il se fait un grand bruit dans le temps même qu'on leur parle ; ce qui doit être attribué sans-doute à la grande tension du tympan dans ces occasions. Le sieur Willis parle d'une femme sourde, qui entendait fort distinctement ce qu'on lui disait, lorsqu'on battait du tambour ; de sorte que son mari pour pouvoir converser plus aisément avec elle, prit à son service un tymbalier. Le même auteur parle d'une autre personne, qui demeurait proche d'un clocher, et qui entendait fort bien trois ou quatre coups de cloches ; mais rien de plus.

SURDITE, (Médecine séméiotiq.) les signes que l'on tire de la surdité qu'on observe dans les maladies aiguës varient suivant les circonstances où se trouve le malade, de façon que dans certains cas, ils annoncent une crise salutaire ; d'autrefois ils font craindre ou la mort, ou quelqu'accident fâcheux ; en général la surdité au commencement d'une maladie aiguë n'est point d'un mauvais augure, surtout si on n'aperçoit aucun autre mauvais signe ; lorsqu'elle parait sur la fin, et que les évacuations critiques ne la dissipent point, ou qu'elle leur succede, on a tout à craindre pour les jours du malade ; et s'il se rencontre en même temps quelque signe funeste, elle en confirme et augmente le danger : c'est sur cette observation qu'Hyppocrate a prononcé que la mort était prochaine, si la surdité était jointe à des douleurs de tête et de col, aux tremblements des mains, et des urines épaisses, à des déjections noires par les selles, à la résolution de la langue, et à l'engourdissement de tout le corps, coac. praenot. cap. Ve n °. 9. il porte le même pronostic sur la surdité qui arrive aux malades extrêmement faibles ; si lorsque les forces sont tout à fait épuisées, l'oeil ne voit pas, et l'oreille n'entend pas, le malade n'a plus qu'un instant à vivre, aphor. 49. lib. IV. le même auteur, dans les différents ouvrages de qui nous puisons tous ces axiomes de séméiotique, détaille avec une justesse infinie les différents cas où la surdité est funeste, et ceux où elle est favorable ; nous ne faisons que traduire ses propres paroles, sans entrer dans aucune discussion théorique, et sans les étendre dans un commentaire superflu : la surdité, dit-il, qui survient aux fièvres aiguës accompagnées de beaucoup d'inquiétude et de trouble est un mauvais signe, prorrhet. lib. I. sect. 1. n °. 32. elle annonce le plus souvent un délire furieux, coac. praenot. cap. V. n °. 8. elle est aussi d'un mauvais augure dans les maladies chroniques, et elle présage d'ordinaire des douleurs aux cuisses, ibid. n °. 2. Lorsque les évacuations critiques, loin de soulager le malade, donnent naissance à quelque phénomène qui n'existait pas auparavant, et que sur ces entrefaites le malade devient sourd, sa vie est en danger, prorrhet. IIIe text. 35. de tous les malades dans qui Hippocrate a observé ce symptôme, Horophon seul, suivant la remarque de Galien, en a échappé ; il en est de même si la surdité ayant paru avant la crise, subsiste après qu'elle a eu lieu, Philista mourut au cinquième jour avec ce symptôme. La surdité, avons-nous dit, est quelquefois un signe de délire prochain : nous ajouterons ici, qu'on doit d'autant plus compter sur la vérité de ce signe, qu'il sera joint dans le cas de douleur de tête avec le vomissement de matières porracées, rugineuses, et de veilles opiniâtres ; alors, dit notre grand observateur, le malade ne tarde pas à extravaguer, et d'une manière violente, prorrhet. lib. et sect. I. n °. 10. de même la surdité qui se rencontre avec des urines rougeâtres sans sédiment, qui n'ont que des nuages, annoncent surement un dérangement d'esprit, l'ictère survenant dans ces circonstances serait pernicieux, et plus encore s'il était suivi d'imbécillité ; ibid. n ° 31. et coac. praenot. cap. Ve n °. 10.

Dans bien des cas la surdité fait espérer une hémorragie du nez, ou un dévoyement critiques ; et si ces évacuations surviennent, la maladie se termine heureusement. Aphor. 60. lib. IV. On peut s'attendre à cette issue favorable, lorsque la coction est faite, et que les autres signes sont bons ; le dévoyement surtout bilieux, et la surdité, se succedent et se dissipent mutuellement, aphor. 28. lib. IV. j'ai observé cette succession à plusieurs reprises chez un malade qui guérit très-bien. L'hémorragie est plus surement indiquée par la surdité, si en même temps la tête est lourde, les hypochondres tendus, et les yeux fatigués par la lumière, coac. praenot. cap. V. n °. 7. si dans cet état l'hémorragie est petite, il y a quelqu'obstacle que le vomissement ou la diarrhée peuvent emporter avec succès, ibid. n °. 20. Si par ces différentes crises la surdité ne disparait pas en entier, qu'elle ne soit que diminuée, c'est signe qu'elles ont été incomplete s ; et il faut s'attendre qu'elles seront réitérées tant que la surdité subsistera ; on voit un exemple frappant de cette remarque dans l'histoire qu'Hippocrate donne de la maladie d'une fille d'Abderos, epidem. lib. III. text. 78. au huitième jour d'une fièvre aiguë, la surdité survint avec dégout, frisson sans délire et sans aucun changement dans les urines ; elle dura ainsi jusqu'au quatorzième jour ; alors il y eut un peu de délire, la fièvre s'apaisa ; et le dix-septième l'hémorragie du nez fut abondante, la surdité en fut diminuée ; les jours suivants même symptôme, surdité, dégoût et délire : le 20, la malade sentit une douleur aux pieds ; à l'instant ces symptômes disparurent, la malade saigna du nez quelque peu, eut une légère sueur, et fut tout à fait exempte de fièvre. Le 24 la surdité, le délire et la fièvre revinrent ; la douleur des pieds se maintint : le 27 il y eut des sueurs copieuses, et en même temps la surdité et la fièvre cessèrent pour toujours et la malade entra en convalescence. De tout ce que nous avons dit, nous pouvons conclure avec Waldschmid, que la surdité qui se fait par un effort critique, criticè, dans les maladies aiguës est un bon signe ; et qu'au-contraire celle qui vient par intervalle, et qui est plutôt dû. à la violence du mal, qu'à l'opération critique de la nature, est un signe fâcheux.