S. m. terme de Chirurgie, est une solution de continuité, ou une perte de substance dans les parties molles du corps, avec écoulement de pus provenant d'une cause interne, ou d'une plaie qui n'a pas été réunie.

Galien définit l'ulcère une érosion invétérée des parties molles du corps, en conséquence de quoi elles rendent, au-lieu de sang, une espèce de pus, ou de sanie ; ce qui empêche la consolidation.

Ettmuller définit l'ulcère une solution de continuité provenant de quelqu'acidité corrosive, qui ronge les parties, et convertit la nourriture propre du corps en une matière sanieuse. Lorsqu'il arrive une pareille solution de continuité dans une partie osseuse, elle se nomme carie. Voyez CARIE.

Galien pour l'ordinaire emploie indifféremment les mots d'ulcère et de plaie ; mais les Arabes et les modernes après eux, y mettent une distinction. Voyez PLAIE.

On a exclu du nombre des plaies toutes les divisions des parties molles, qui ont pour cause le mouvement insensible des liqueurs renfermées dans le corps même, ou qui sont occasionnées par l'application extérieure de quelques substances corrosives ; et on leur a donné le nom d'ulcères. Toutes les plaies dont les bords enflammés viennent à suppurer, dégénèrent en ulcères.

On croit communément que les ulcères spontanés viennent d'une acrimonie, ou d'une disposition corrosive des humeurs du corps, soit qu'elle soit produite par des poisons, par un levain vérolique, ou par d'autres causes.

Les ulcères se divisent en simples et en compliqués. Ils se divisent encore par rapport aux circonstances qui les accompagnent, en putrides ou sordides, dont la chair d'alentour est corrompue et fétide ; en vermineux, dont la matière étant épaisse ne flue pas, mais engendre des vers, etc. en virulents, qui au-lieu de pus ou de sanie, rendent un pus de mauvaise qualité, etc.

On les distingue encore par rapport à leur figure en sinueux, fistuleux, variqueux, carieux, etc. Voyez SINUS, FISTULE, VARICES, CARIE.

Lorsqu'il survient un ulcère dans un bon tempérament, et qu'il est aisé à guerir, on le nomme simple.

Lorsqu'il est accompagné d'autres symptômes, comme d'une cacochimie qui retarde beaucoup, ou empêche la guérison, on le nomme ulcère compliqué.

Un ulcère simple n'est accompagné que d'érosion. Mais les ulcères compliqués qui surviennent à des personnes sujettes au scorbut, à l'hydropisie, aux écrouelles, peuvent être accompagnés de douleur, de fièvre, de convulsions, d'un flux abondant de matière, qui amaigrit le malade, d'inflammation et d'enflure de la partie, de callosité des bords de l'ulcère, de carie des os, etc.

ULCERE putride ou sordide, est celui dont les bords sont enduits d'une humeur visqueuse et tenace, et qui est aussi accompagné de chaleur, de douleur, d'inflammation, et d'une grande abondance d'humeurs qui se jettent sur la partie. Avec le temps l'ulcère devient plus sordide, change de couleur et se corrompt ; la matière devient fétide, et quelquefois la partie se gangrene. Les fièvres putrides donnent souvent lieu à ces sortes d'ulcères.

ULCERE phagédenique, est un ulcère rongeant, qui détruit les parties voisines tout-à-l'entour, tandis que ses bords demeurent tuméfiés. Lorsque cet ulcère ronge profondément, et se répand beaucoup, sans être accompagné d'enflure, mais se pourrit, et devient sale et fétide, on l'appelle noma. Ces deux sortes d'ulcères phagédeniques, à cause de la difficulté qu'ils ont à se consolider, se nomment aussi dysepulota. Voyez PHAGEDAENA, etc.

ULCERES variqueux, sont accompagnés de la dilatation de quelques veines. Voyez VARICE. Ils sont douloureux, enflammés et tuméfient la partie qu'ils occupent. Quand ils sont nouveaux, et qu'ils sont occasionnés par l'usage des corrosifs, ou proviennent de la rupture d'une varice, ils sont souvent accompagnés d'hémorrhagie.

Les veines voisines de l'ulcère sont alors distendues contre nature ; et on peut quelquefois les sentir entrelacées ensemble en façon de réseau autour de la partie.

Ces sortes d'ulcères surviennent communément aux jambes des artisans obligés par leur état d'être debout. Pour remplir l'indication des veines, il faut avoir recours à un bandage qu'on doit même continuer assez longtemps après la guérison. Le bandage le plus convenable est un bas étroit, qui dans ce cas est d'une utilité particulière. On se sert avec un grand succès d'un bas de peau de chien qu'on lace, afin qu'il serre plus exactement.

On peut ouvrir une varice pour faire dégorger les vaisseaux tuméfiés. Quand il n'y a qu'une varice, qu'elle est grosse et douloureuse, on peut l'emporter en faisant la ligature de la veine au-dessus et au-dessous de la poche variqueuse, comme on fait dans l'anevrisme vrai.

ULCERES sinueux sont ceux qui de leur orifice s'étendent obliquement ou en ligne courbe. On peut les reconnaître au moyen de la sonde, ou d'une bougie, etc. ou par la quantité de matière qu'ils rendent à-proportion de leur grandeur apparente.

Ils vont quelquefois profondément, et ont divers contours. On ne les distingue des fistules que parce qu'ils n'ont point de callosités, sinon à leur orifice. Voyez SINUS.

ULCERES fistuleux, sont des ulcères sinueux et calleux, et qui rendent une matière claire, séreuse et fétide. Voyez FISTULE.

ULCERES vieux, se guérissent rarement sans le secours des remèdes internes, qui doivent être propres à absorber et à détruire le vice humoral. Tels sont particulièrement les sudorifiques, les décoctions des bois, les antimoniaux, les préparations tirées de la vipere, les volatils ; mais par-dessus tous les vomitifs souvent réitérés.

Dans les ulcères rébelles, la salivation mercurielle est souvent nécessaire. Les vieux ulcères sont souvent incurables, à moins qu'on n'ouvre un cautère à la partie opposée.

La guérison en serait même fort dangereuse sans cette précaution. Car la matière dont la nature avait coutume de se débarrasser par ces ulcères invétérés, séjournant dans la masse du sang, se dépose sur quelque viscère, ou cause une diarrhée colliquative, ou une fièvre qui emportent le malade.

Les ulcères simples et superficiels se guérissent ordinairement en appliquant sur le mal un plumasseau chargé de baume d'arcaeus ou de basilicum, et pardessus le plumasseau un emplâtre de diachylum simple, ou de minium, et pansant une fois le jour, ou plus rarement.

La fréquence des pansements doit se régler sur la quantité et sur la qualité du pus. Un ulcère dont le pus est en quantité modérée, et de qualité louable, doit être pansé plus rarement que celui qui suppure beaucoup, ou dont les matières acrimonieuses pourraient en séjournant dans la cavité de l'ulcère, occasionner des fusées et autres accidents.

S'il n'y a que l'épiderme de rongé, il suffit d'appliquer un petit onguent, comme le dessicatif rouge ou le diapompholyx, etc. que l'on étend mince sur un linge.

S'il pousse des chairs fongueuses, on peut les ronger avec la pierre infernale, ou avec un cérat dans lequel on a mis un peu de précipité rouge ou d'alun calciné, etc. Lorsqu'il s'agit de guérir les ulcères simples, qui sont produits par l'ouverture des tumeurs ordinaires ; on fait d'abord suppurer l'ulcère avec les digestifs. Voyez DIGESTIFS. Dès que la suppuration commence à diminuer, et que l'on voit paraitre dans toute l'étendue de la plaie des grains charnus, rouges et vermeils l'on cesse entièrement l'usage des onguents, de peur que la suppuration venant à continuer, ne nuise au malade par la dissipation qu'elle produirait du suc nourricier ; et pour empêcher en même temps l'excroissance des chairs fongueuses sur les lèvres de la plaie, on fait usage des détersifs, parmi lesquels les lotions lixivielles sont les plus efficaces ; on passe ensuite à l'usage des remèdes dessicatifs et cicatrisans. Voyez DETERSIFS et CICATRISANS.

Les évacuations sont absolument nécessaires dans le traitement des ulcères compliqués, lorsque l'état du malade permet de les employer. Si l'ulcère est fistuleux, sinueux, carcinomateux, etc. et la matière fétide, séreuse ou sanieuse, il est à propos de joindre le calomelas aux purgatifs, ou de le donner par petites doses entre les purgatifs, afin de ne pas exciter la salivation.

Outre l'usage des purgatifs, il faut ordonner aussi une tisane sudorifique, surtout quand on soupçonne que l'ulcère est vénérien. Durant ce temps-là on fera les pansements convenables.

Lorsque l'ulcère ne cede pas à ce traitement, on propose ordinairement l'usage des antivénériens ; ils ne manquent guère de procurer la guérison, quoique tous les autres remèdes aient été inutiles. Si le malade est trop faible pour soutenir la fatigue d'une salivation continue, on peut la modérer, et l'entretenir plus longtemps, à proportion de ses forces.

Les remèdes externes pour les ulcères sont des digestifs, des détersifs, des sarcotiques, et des cicatrisans.

Belloste propose un remède, qu'il dit être excellent pour la guérison des ulcères. Ce n'est autre chose qu'une décoction de feuilles de noyer dans de l'eau avec un peu de sucre ; on trempe dans cette décoction un linge, que l'on applique sur l'ulcère, et on réïtère cela de deux en deux, ou de trois en trois jours.

L'auteur trouve que ce remède simple et commun fait suppurer, déterge, cicatrise, empêche la pourriture, etc. mieux qu'aucun autre remède connu.

Un ulcère aux poumons cause la phtisie. Voyez PHTHISIE.

La maladie vénérienne produit beaucoup d'ulcères, surtout au prépuce et au gland dans les hommes ; au vagin, etc. dans les femmes ; à la bouche et au palais dans les uns et les autres. Voyez VENERIENNE.

Les ulcères vénériens sont de différentes sortes ; ceux qui deviennent calleux et carcinomateux sont appelés chancres. Voyez CHANCRE.

Le traité des ulcères est un des plus importants de la chirurgie ; on ne peut dans un dictionnaire que donner des notions très-générales sur un genre de maladie, qui pourrait, sous la plume d'un écrivain éclairé et précis, fournir la matière de deux volumes in-4°. hoc opus, hic labor. (Y)