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Catégorie parente: Physique particulière
Catégorie : Chirurgie
adj. pl. terme de Chirurgie concernant la matière médicale externe. Ce sont des médicaments qui ont la vertu de mondifier, de nettoyer, de purger l'ulcère, et d'enlever tout ce qui pourrait être un obstacle à la cicatrisation. Les détersifs ont lieu dans la cure des ulcères, lorsqu'on a discontinué l'application des suppuratifs et des digestifs, dont l'usage porté plus loin, relâcherait trop les orifices des vaisseaux, et ferait croitre des chairs fongueuses. La fin curative des ulcères consiste dans leur dessiccation ; mais il n'est pas possible de passer des remèdes simplement pourrissants aux moyens purement dessiccatifs : il faut suivre une gradation, et observer dans l'administration des remèdes toutes les nuances, si j'ose parler ainsi, qui se trouvent entre les propriétés opposées des médicaments suppuratifs et desséchans. C'est cette gradation qui établit l'usage successif des digestifs, des détersifs, des sarcotiques, et des épulotiques ou cicatrisans. Voyez INCARNATION et ULCERE.

Ambraise Paré, et depuis lui Fabrice d'Aquapendente ; cet excellent chirurgien-médecin ; appuyé sur l'autorité d'Hippocrate et de Galien, dit que les vues générales qu'on doit avoir dans le traitement des ulcères, sont de les dessécher : on voit par-là que les premiers détersifs dont on puisse faire usage, doivent être des digestifs rendus desséchants par le mélange de quelques médicaments qui aient cette dernière vertu. Les premiers détersifs sont nommés mondificatifs ; ils sont composés de substances digestives et suppurantes, telles que le suif, les graisses et les huiles grasses, auxquelles on joint dominamment des substances résineuses ; telles sont la térébenthine, la poix, la myrrhe, la gomme-lacque, le styrax, l'encens, le mastic, le laudanum, le sapagenum, le baume de Copahu, de Canada etc. Toutes ces huiles balsamiques, tant solides que fluides, sont remplies de parties actives et irritantes ; elles contiennent beaucoup de sels volatils-huileux, et des parties terrestres qui modèrent la suppuration, préservent les humeurs de la pourriture, et donnent de l'astriction aux solides sur lesquels elles agissent : Employées seules, elles seraient puissamment dessiccatives ; mais de leur mélange avec des substances grasses et huileuses, il résulte des mondificatifs capables d'exciter les chairs à une douce suppuration qui les débarrasse des humeurs dont elles pourraient être encore infiltrées.

Les plantes balsamiques fournissent aussi des détersifs doux, lorsqu'elles sont infusées dans les huiles, ou que leur suc exprimé est uni à des substances onctueuses ; telles sont l'hypericum, la menthe, le lierre terrestre, la véronique, etc.

Lorsque les chairs ont beaucoup de sensibilité, elles sont fort susceptibles d'irritation : dans ce cas on se sert de mondificatifs les plus doux. Mais lorsque le sentiment des chairs n'est point vif, et qu'il n'y a aucun ménagement à garder à cet égard, on pourra se servir des huiles de méla, d'absinthe, de camomille, d'armoise, d'aigremoine, de petite centaurée, etc. lesquelles ont plus d'activité que les premiers. Parmi ces plantes nous ne devons point oublier l'ache, dont on fait un onguent nommé mondificatif, dont la préparation est décrite dans toutes les pharmacopées.

Le traitement des ulcères est fort aisé, lorsque la nature se trouve favorablement disposée, et qu'elle ne trouve aucun obstacle à ses opérations ; mais le moindre vice, soit de la part des humeurs, soit de la part des solides, exige dans le chirurgien des vues plus profondes et des lumières plus étendues.

Lorsque les chairs sont blaffardes, le pus est épais et glutineux, parce qu'il s'épaissit dans les chairs par le défaut d'action des solides : dans ce cas il faut avoir recours à des remèdes plus actifs que les mondifiants, et employer une autre sorte de détersifs qu'on peut appeler atténuans et incisifs, parce qu'ils excitent l'action des solides, et qu'ils dissolvent les humeurs. Les médicaments de la première classe peuvent remplir cette indication sous une combinaison différente, c'est-à-dire en augmentant la proportion des substances balsamiques, ou, ce qui est la même chose, en diminuant la quantité des substances onctueuses et relâchantes, qui réprimaient leur qualité astringente.

Les détersifs salins ont aussi la vertu atténuante et incisive ; telles sont les douches d'eaux thermales, et principalement celles de balaruc, auxquelles on substitue très-efficacement la lessive, les cendres de sarment, de genêt, de chêne, ou les sels lixiviels de ces plantes, le sel fixe de tartre, etc. dans une quantité d'eau suffisante, pour qu'elle ne soit pas trop irritante et cathérétique.

L'urine est un détersif salin, atténuant et incisif, de même que les remèdes savonneux, naturels et artificiels : les naturels sont la bîle des animaux, dont on peut corriger l'acrimonie en la mêlant avec un jaune d'œuf, le miel, la manne, le sucre, le suc de saponaire, etc.

Le miel a particulièrement la vertu détersive. Cette substance végéto-animale est laxative dans l'usage intérieur ; c'est le sel tartareux qu'elle contient, qui lui donne cette vertu, et c'est probablement ce sel qui rend le miel détersif ou purgatif des ulcères. Parmi les préparations usitées, le miel rosat est la principale. On pourrait déterger efficacement des ulcères avec le miel préparé avec les sommités de romarin, et connu sous le nom de mel anthosatum. Les oximels sont de très-bons atténuans et incisifs. L'oximel simple et l'oximel scillitique s'opposent à la pourriture, et sont de très-bons détersifs dans les ulcères d'où découlent des sucs putrides.

Parmi les détersifs antiputrides on peut ranger les remèdes spiritueux, comme l'esprit-de-vin, le baume de Fioraventi, le sel armoniac, le camphre. Ces remèdes agissent en donnant beaucoup de fermeté aux solides ; et en préservant les liqueurs de l'action des causes putrides, que l'on sait être dissolvantes.

Les ulcères vénériens et scorbutiques exigent des attentions particulières. Dans la cure des premiers on mêle aux remèdes convenables à leur état l'onguent napolitain, qui par sa vertu spécifique borne puissamment les effets du vice local. Les ulcères scorbutiques qui attaquent d'autres parties que celles de l'intérieur de la bouche, se détergent fort bien aussi par les mondificatifs ordinaires, dans lesquels on fait dominer l'onguent de stirax ou la gomme lacque. La dissolution de cette gomme dans l'esprit-de-vin, passe même pour un spécifique contre les ulcères scorbutiques des gencives. Voyez SCORBUT.

L'usage des détersifs diminue la suppuration, rend les chairs vives et fermes, et prépare les ulcères à l'administration des remèdes qui dessechent et consolident. Voyez DESSICCATIFS. Mais si l'on n'a pu réussir à réprimer les chairs ; si par la négligence des soins convenables elles sont devenues flasques, il faut employer des détersifs plus actifs encore que tous ceux dont nous avons parlé jusqu'ici ; nous les nommerons détersifs irritants : il faut qu'ils aient la vertu d'enlever les fibres inanimées, et de les détacher des chairs vives sans causer de douleur. C'est même cette séparation des fibres mollasses et fongueuses, qui a fait que quelques auteurs ont regardé les détersifs comme des remèdes qui ratissent et raclent, pour ainsi dire, la surface des chairs, en emportant les matières purulentes. Boerhaave dit expressément que les détersifs sont des médicaments qui ont la vertu de délayer et de faire sortir les matières endurcies, et d'enlever les fibres inanimées, sans douleur. Pour produire cet effet sur les solides, il faut que les détersifs soient en quelque façon des caustiques imperceptibles : aussi sont-ce les remèdes corrosifs qui fournissent les détersifs les plus forts. La propriété détersive irritante dépend du mélange et de la préparation des corrosifs avec des matières onctueuses et relâchantes, capables de modérer et d'adoucir leur causticité.

Les détersifs irritants ont plus ou moins d'activité, suivant la combinaison des substances qui les composent ; c'est au chirurgien à en régler les proportions suivant les indications que lui fournit l'etat de l'ulcère qu'il veut déterger.

Le verd-de-gris sert à la préparation de plusieurs compositions détersives très-recommandables, telles que sont le baume verd de Metz, le collyre de Lamfranc, l'onguent aegyptiac, etc. On peut faire des lotions détersives irritantes avec de fortes lessives des plantes vulnéraires. On voit par ce qui a été dit, que le chirurgien dans l'administration des remèdes convenables pour la détersion des ulcères, doit raisonner sur les indications avec autant de discernement, que le médecin dans celle des remèdes intérieurs, pour les maladies qui sont du ressort de la Médecine ; que la variété des circonstances exige autant dans l'un que dans l'autre un esprit de combinaison et beaucoup de sagacité. Si cependant la difficulté de saisir le vrai ajoute au mérite de celui qui le rencontre, il faut convenir que le chirurgien en a moins ; mais dans les choses obscures, et où l'on ne pourrait que conjecturer, il est difficîle qu'un homme ait beaucoup d'avantage sur un autre, formé par les mêmes études fondamentales. La Chirurgie même a paru fournir, par la certitude de ses principes, des lumières pour s'égarer moins dans les routes difficiles de la Médecine interne. C'était le sentiment du grand Boerhaave, qui dit, aphor. 557. internos morbos externis reapse congruere ; externos, chirurgicos primò pertractandos ; nec aliter ordinati quid, vel veri, in praxi medicâ fieri posse, aut doceri. (Y)