S. m. (Théologie) terme dont les septante et la vulgate se sont souvent servis pour exprimer les devins, les magiciens, les ventriloques, ou ceux qui parlaient du ventre. Voyez DEVINS, MAGICIENS, etc.

Il y avait dans toutes ces sortes de gens beaucoup de friponnerie, de souplesse, d'imagination, et quelquefois aussi de l'opération du démon. Dieu, dans l'ancienne loi, avait défendu, sous peine de la vie, de consulter ces sortes de devins. Saul les chassa et les extermina des terres d'Israèl, et cependant il eut après cela lui-même la faiblesse d'aller consulter une pythonisse. Moïse, Lévit. xx. 27. veut qu'on lapide ceux qui sont remplis de l'esprit de python. Les rois de Juda qui abandonnèrent le Seigneur, comme Manassé, multiplièrent les devins ; et les rois pieux, comme Josias, les exterminèrent de leur pays. On lit, dans les actes des apôtres, ch. XVIe que S. Paul ayant trouvé dans la ville de Philippes en Macédoine, une fille payenne qui avait un esprit de python, et qui procurait un grand gain à ses maîtres en devinant, chassa ce mauvais esprit et en délivra la fille, ce qui irrita tellement ses maîtres qu'ils excitèrent une violente sédition contre cet apôtre.

Le terme hébreu ob ou oboths, qu'on traduit par python, signifie aussi un outre ou vase de peau, où l'on mettait des liqueurs. Peut-être a-t-on donné ce nom aux devins, parce que dans le moment qu'ils étaient remplis de leur enthousiasme, feint ou vrai, ils s'enflaient et se grossissaient comme un outre, et qu'on leur entendait tirer leurs paroles comme du creux de leur estomac, d'où vient que les Latins les appelaient ventriloqui, et les Grecs , c'est-à-dire gens qui parlent du ventre. Isaïe, ch. xxix. Ve 3. dit que Jérusalem affligée et humiliée parlera comme du creux de la terre, ainsi qu'une pythonisse ; qu'elle gémira et tirera ses paroles comme du fond d'une caverne.

L'apparition de Samuel à Saul, opérée par la pythonisse d'Endor, et rapportée dans le premier livre des Rais, ch. xxviij. donne lieu à une question importante, qui partage les anciens et les modernes, savoir si l'âme de Samuel a véritablement apparu à Saul, ou si tout ce qui est raconté à ce sujet n'est qu'un jeu ou une friponnerie de la pythonisse ou magicienne qui parla à Saul, et qu'il feignit de voir Samuel. On demande si cela arriva par la puissance du démon et par les forces de l'art magique, ou si Dieu permit que Samuel apparut par un effet miraculeux de sa puissance, et non par aucun effet de la magie.

Ceux qui tiennent pour la réalité de l'apparition de Samuel, comme saint Justin, Origène, Anastase d'Antioche, etc. ont cru que les démons avaient quelque pouvoir sur les âmes des saints avant que Jesus-Christ descendit aux enfers ; et saint Augustin, de doct. Christ. liv. II. ch. xxxij. ne trouve aucun inconvénient à dire que le démon fit apparaitre l'âme de Samuel, comme nous n'en trouvons point à dire que le démon transporta Jesus-Christ sur le pinacle du temple ; d'ailleurs le récit de l'Ecriture dit expressément que Samuel parut, qu'il parla, qu'il annonça au roi sa mort prochaine et la défaite de son armée.

Ceux qui soutiennent que Samuel n'apparut point à Saul, sont partagés entr'eux ; les uns, comme Tertullien, saint Basile, saint Grégoire de Nysse, croient que le démon prit la forme de Samuel, et parla ainsi à Saul. Les autres, tels qu'Eustache d'Antioche, saint Cyrille d'Alexandrie, etc. tiennent que la magicienne ne vit rien, mais qu'elle feignit de voir le vrai Samuel ; qu'elle parla en son nom, et trompa ainsi Saul et tous les assistants ; d'autres enfin, comme saint Ambraise, Zénon de Vérone, saint Thomas, pensent que le démon ne parut point, et ne prit point la forme de Samuel, mais que Dieu, à l'occasion des évocations de la pythonisse, fit par sa propre vertu et indépendamment de l'art magique, paraitre aux yeux de Saul une figure de Samuel, qui prononça à ce prince l'arrêt de sa mort et de sa perte entière. Le rabbin Levi-Ben-Gerson veut que tout ceci se soit passé dans l'imagination de Saul. Ce prince frappé des menaces que Dieu lui avait faites, et troublé par la vue du danger présent, s'imagina, dit-il, voir Samuel qui lui réitérait ses menaces, et qui lui annonçait sa mort prochaine.

Le père Calmet, de qui nous empruntons ceci, croit que de tous ces sentiments, le mieux fondé est celui qui prétend que Samuel apparut véritablement à Saul ; non que ce fût par la force de la magie de la pythonisse, ni par la vertu du démon, mais par la vertu toute puissante de Dieu, qui pour punir Saul de sa vaine curiosité, permit qu'à l'occasion des évocations de la magicienne, le vrai Samuel lui apparut et lui découvrit son dernier malheur. Il renvoye à ce sujet aux notes de Leon Allatius sur le traité d'Eustathe, intitulé de Engastrimytho, et à sa dissertation particulière sur ce sujet.

Or dans cette dissertation où il expose et refute fort savamment les divers sentiments que nous avons rapportés ci-dessus, il établit ensuite le sien principalement sur ce passage de l'Ecclésiastesiastique, ch. xlvj. . 21. après cela Samuel mourut, et il déclara et fit connaître au roi que la fin de sa vie était proche. Il éleva sa voix du fond de la terre, et prophétisa pour détruire l'impiété de la nation : ce qu'il confirme par un autre des Paralipomenes où il est dit que, Saul mourut pour avoir consulté la pythonisse, et Samuel lui répondit (disent les septante), et il ne rechercha pas le Seigneur. Or en comparant ces paroles avec le texte sacré du vingt-huitième chapitre du premier livre des Rais, il en résulte que Saul vit véritablement Samuel ; car 1°. la magicienne ne se fut pas plutôt mis en devoir d'évoquer les manes de celui que Saul demandait, qu'elle vit Samuel, et jugeant par son air terrible et menaçant qu'il en voulait à Saul, elle jette un grand cri et dit à ce prince, pourquoi m'avez-vous trompée, car vous êtes Saul ? Celui-ci demande à la pythonisse ce qu'elle voit, elle lui répond qu'elle voit des dieux, ou un juge, un prince, un magistrat qui sort du fond de la terre, et qui a la forme d'un vénérable vieillard revêtu d'un manteau. Saul reconnait Samuel à cette description, le prophète lui déclare entr'autres choses d'une manière précise, que Dieu le livrera lui et le camp d'Israèl entre les mains des Philistins, et il ajoute, vous et vos fils serez demain avec moi. Dire que la pythonisse dans tout ceci contrefit la voix de Samuel, c'est supposer que Saul et aucun de ceux de sa suite n'auraient pu s'apercevoir de la supercherie ; et avancer que le démon fit des prédictions aussi certaines d'évenements casuels, c'est lui attribuer le don de prédire certainement l'avenir, qu'il ne connait tout-au-plus que par conjecture. Au reste, cet auteur reconnait que l'Eglise n'ayant prononcé sur aucun de ces sentiments, il est libre d'embrasser celui qu'on croit le plus vraisemblable. Le sien a ces deux avantages, qu'il n'altère point le sens littéral, et qu'il ne déroge pas à la puissance de Dieu en n'attribuant pas un trop grand pouvoir au démon. Calmet, Dictionnaire de la Bibl. tom. III. pag. 327. et 465. et Dissertat. sur l'apparit. de Samuel à Saul, vers la fin.

PYTHON, s. m. (Mythologie) les écrits des Poètes ont rendu ce monstre très-célèbre. On en raconte l'histoire bien diversement, et il n'est pas aisé de démêler ce qu'il peut y avoir de vrai dans le prodigieux amas de circonstances fabuleuses dont on l'a enveloppé. Je me garderai bien d'entrer dans ce détail. Je ne m'arrêterai pas davantage à recueillir les moralités qu'on a tirées de cette fable, ni les explications physiques que Macrobe et d'autres en ont données, ni moins encore les rêveries où les Alchimistes se sont abandonnés sur ce sujet. On aurait autant d'ennui à les lire, que j'en ai eu moi-même, et des esprits raisonnables n'adopteraient point des explications qui n'ont jamais eu de fondement que dans les fictions de l'imagination, ou dans le cerveau de quelques visionnaires qui voulaient faire des livres.

Pausanias en recherchant l'origine du nom de pytho, nous apprend que Delphus, petit-fils de Lycorus, eut un fils nommé Pythis, qui donna le nom de Pytho à la ville de Delphes. Nous trouvons dans ce Pythis le Typhon d'Homère, et le tyran dont parle Plutarque ; car Pausanias écrit à son sujet, que l'histoire qui avait le plus de cours, était qu'il avait été tué par Apollon à coups de traits, c'est-à-dire qu'on avait attribué la cause de sa mort à la colere d'Apollon, dont il avait voulu abolir le culte. On sait de quelle manière Apollon vengea son prêtre Crysès de l'enlevement de Chryséis, et quels furent les traits qui firent périr tant de braves soldats de l'armée grecque. Pythis après sa mort, continue Pausanias, fut abandonné à la pourriture dans le lieu même où il avait été tué. On ne pouvait marquer plus de haine contre un homme après son décès, que de le priver des honneurs de la sépulture. Enfin Pausanias ajoute que les Poètes avaient fait de ce Pythis un dragon que la terre avait commis pour garder l'oracle, et pour empêcher qu'on n'en approchât. C'est ainsi que les premiers poètes ont commencé à déguiser l'histoire de Python sous le voîle de la fiction. Ceux qui les ont suivis y ont ajouté de nouvelles circonstances, qui ont achevé de la défigurer.

Il y a encore une autre tradition que le même Pausanias nous a conservée, qui a tous les caractères de la vraisemblance, et qui est à-peu-près de la même date que la première. Un roi de l'île d'Eubée, nommé Crius, eut un fils qui fut un insigne scélérat ; il s'empara de Delphes, pilla le temple d'Apollon, et les maisons des plus riches particuliers, et s'en retourna chargé de butin. Il revint une seconde fois à Delphes, pour y commettre de nouveaux désordres ; les habitants eurent recours à Apollon, et le supplièrent de les garantir du danger qui les menaçait. Phémonoé, pour lors prêtresse d'Apollon, leur fit cette réponse de la part de son dieu : " Le moment fatal approche, Apollon Ve lancer ses traits sur le brigand du Parnasse. Les prêtres crétois ne souillent point leurs mains dans le sang humain. La mémoire de ce châtiment ne périra jamais ".

Plutarque, dans son traité du silence des oracles, rejette tout ce qu'on dit du combat d'Apollon contre Python, et de la fuite de Python. Il prétend que cette cabane de feuilles que l'on construisait tous les neuf ans dans le temple d'Apollon, ne représentait point la demeure d'un dragon, mais celle d'un tyran ou d'un roi, et que le reste de la cérémonie avait rapport à quelque grand crime commis anciennement par ce tyran.

Si l'on veut prendre la peine de lire son traité d'Isis et d'Osiris, on y verra que la fable du combat d'Apollon contre Python a pris naissance chez les Egyptiens. Orus, fils d'Isis et d'Osiris, était parmi les Egyptiens le même qu'Apollon chez les Grecs. Tout ce que les Egyptiens contaient des combats d'Orus contre Typhon, et de son entière défaite, était passé de l'Egypte dans la Grèce, et avait été appliqué au prétendu combat d'Apollon contre le tyran de Delphes, que Homère a appelé Typhon pour le rendre plus odieux ; car le nom de Typhon était en abomination chez les Egyptiens. Voyez TYPHON. (D.J.)