adj. pris subst. (Théologie) secte générale composée de plusieurs hérétiques qui s'élevèrent dans le XIIe siècle, et dont le but principal était de détourner les Chrétiens de la réception des sacrements, de renverser l'ordre hiérarchique, et de troubler la discipline de l'Eglise. On les nomma ainsi parce qu'Olivier, un des disciples de Pierre de Valdo, chef des Vaudais ou pauvres de Lyon, répandit le premier leurs erreurs dans Albi, ville du haut Languedoc sur le Tarn, et que cette ville fût comme le centre des Provinces qu'ils infectèrent de leurs opinions.

Cette hérésie qui renouvellait le Manichéisme, l'Arianisme, et d'autres dogmes des anciens sectaires, auxquels elle ajoutait diverses erreurs particulières aux différentes branches de cette secte, avait pris naissance en Bulgarie. Les Cathares en étaient la tige ; et les Pauliciens d'Arménie l'ayant semée en Allemagne, en Italie et en Provence, Pierre de Bruys et Henri la portèrent, dit-on, en Languedoc ; Arnaud de Bresse la fomenta ; ce qui fit donner à ces hérétiques les noms d'Henriciens, de Petrobusiens, d'Arnaudistes, Cathares, Piffres, Patarins, Tisserands, Bons-hommes, Publicains, Passagiens, etc. et à tous ensuite le nom général d'Albigeais.

Ceux-ci étaient proprement des Manichéens. Les erreurs dont les accusent Alanus, moine de Citeaux, et Pierre, moine de Vaux-Cernay, auteurs contemporains qui écrivirent contr'eux, sont 1°. D'admettre deux principes ou deux créateurs, l'un bon, l'autre méchant : le premier, créateur des choses invisibles et spirituelles ; le second, créateur des corps, et auteur de l'ancien Testament qu'ils rejetaient, admettant le nouveau, et néanmoins rejetant l'utilité des sacrements. 2°. D'admettre deux Christs ; l'un méchant, qui avait paru sur la terre avec un corps fantastique, comme l'avaient prétendu les Marcionites, et qui n'avait, disaient-ils, vécu ni n'était ressuscité qu'en apparence ; l'autre bon, mais qui n'a point été Ve en ce monde. 3°. De nier la résurrection de la chair, et de croire que nos âmes sont ou des démons, ou d'autres âmes logées dans nos corps en punition des crimes de leur vie passée ; en conséquence ils niaient le purgatoire, la nécessité de la prière pour les morts, et traitaient de fable la créance des Catholiques sur l'enfer. 4°. De condamner tous les sacrements de l'Eglise ; de rejeter le baptême comme inutîle ; d'avoir l'Eucharistie en horreur ; de ne pratiquer ni confession ni pénitence ; de croire le mariage défendu : à quoi l'on peut ajouter leur haine contre les ministres de l'Eglise ; le mépris qu'ils faisaient des images et des reliques. Ils étaient généralement divisés en deux ordres, les parfaits et les croyans. Les parfaits menaient une vie austère, continente, ayant en horreur le mensonge et le jurement. Les croyans, vivant comme le reste des hommes, et souvent même déréglés, s'imaginaient être sauvés par la foi, et par la seule imposition des mains des parfaits.

Cette hérésie fit en peu de temps de si grands progrès dans les provinces méridionales de la France, qu'en 1176 on la condamna dans un concîle tenu à Lombez, et au concîle général de Latran en 1179. Mais malgré le zèle de S. Dominique et des autres inquisiteurs, ces hérétiques multipliés méprisèrent les foudres de l'Eglise. La puissance temporelle se joignit à la spirituelle pour les terrasser. On publia contr'eux une croisade en 1210 ; et ce ne fut qu'après dix-huit ans d'une guerre sanglante, qu'abandonnés par les comtes de Toulouse leurs protecteurs, et affoiblis par les victoires de Simon de Montfort, les Albigeais poursuivis dans les tribunaux ecclésiastiques, et livrés au bras séculier, furent entièrement détruits, à l'exception de quelques-uns qui se joignirent aux Vaudais des vallées de Piémont, de France et de Savoie. Lorsque les nouveaux réformés parurent, ces hérétiques projettèrent de se joindre aux Zuingliens, et s'unirent enfin aux Calvinistes, sous le règne de François I. L'exécution de Cabrières, et de Mérindol, qu'on peut lire dans notre histoire, acheva de dissiper les restes de cette secte dont on ne connait plus que le nom. Au reste, quoique les Albigeais se soient joints aux Vaudais, il ne faut pas croire que ceux-ci aient adopté les opinions des premiers ; les Vaudais n'ayant jamais été Manichéens, comme M. Bossuet l'a démontré dans son Histoire des Variations, liv. XI. Petrus Vall. Cern. Sanderus, Baronius, Spondan. de Marca, Bossuet, Histoire des Variat. Dupin, Biblioth. eccles. siècle xij et XIIIe (G)