S. f. (Théologie) prise pour l'exercice de la pénitence, peut être définie, une punition volontaire ou imposée par une autorité légitime, pour l'expiation des fautes qu'une personne a commises. Voyez PUNITION.

Les théologiens catholiques considèrent la pénitence sous deux différents rapports, ou comme vertu, ou comme sacrement. A ne considérer la pénitence que comme vertu, on la définit une détestation sincère des péchés qu'on a commis, jointe à une ferme résolution de n'y plus retomber, et de les expier par des œuvres pénibles et humiliantes : l'écriture et les pères donnent des idées exactes de toutes ces conditions. La pénitence considérée comme vertu a été de tout temps absolument nécessaire, et l'est encore aujourd'hui, pour rentrer en grâce avec Dieu.

Ils définissent la pénitence, envisagée comme sacrement, un sacrement de la loi nouvelle, institué par notre Seigneur Jesus-Christ pour remettre les péchés commis après le baptême, c'est pourquoi les pères l'ont appelé une seconde planche qui sauve du naufrage de la mort spirituelle ceux qui ont perdu l'innocence baptismale, secunda post naufragium tabula est poenitentia. Hyeronim. in cap. IIIe Isaïae.

L'institution du sacrement de pénitence suppose trois choses ; 1°. que Jesus-Christ a donné à son Eglise le pouvoir de remettre les péchés commis après le baptême : or c'est ce qu'on voit expressément dans S. Jean, c. xx. . 21. 22. et 23. et ce qui est attesté par toute la tradition ; 2°. que ce pouvoir dont l'Eglise est revêtue, est une autorité vraiment judiciaire, qui influe réellement dans la rémission des péchés commis après le baptême, et non simplement déclarative que ces péchés sont remis, comme il parait par saint Matthieu, ch. XVIe . 19. et par la pratique constante de l'Eglise depuis son établissement ; 3°. que l'Eglise n'exerce judiciairement ce pouvoir qu'en se servant de quelque signe sensible qui en manifeste l'usage et qui en dénote l'effet, ce qui exige une accusation de la part du coupable, et une absolution de la part du ministre qui exerce cette fonction au nom de Jesus-Christ.

Les Théologiens sont partagés sur ce qui constitue la matière du sacrement de pénitence : le plus grand nombre pense qu'elle consiste dans les trois actes du pénitent, la contrition, la confession, et la satisfaction : d'autres soutiennent que l'imposition des mains du prêtre fait la matière du sacrement. Quand à la forme, on en peut distinguer de trois sortes : l'une indicative, ego te absolvo à peccatis tuis, in nomine patris, etc. c'est celle qui est en usage depuis le XIIIe siècle dans l'église latine, qui employait auparavant la forme déprécative : l'autre déprécative ou conçue en forme de prières, telle que celle qui est en usage chez les Grecs, et qui commence par ces termes, Domine Jesu Christe fili Dei vivi, relaxa, remitte, condona peccata, etc. et enfin une impérative, comme absolvatur, etc. on convient que ces trois formules sont également bonnes.

Le concîle de Trente, session 14. de penit. can. 10. a décidé que les prêtres, et par conséquent les évêques, sont les seuls ministres du sacrement de pénitence : mais outre la puissance d'ordre qu'ils reçoivent dans leur ordination, il leur faut encore une puissance de juridiction ou ordinaire comme à titre de curé, ou de juridiction déléguée, telle que l'approbation de l'évêque, sans quoi ils ne peuvent ni licitement ni validement absoudre, excepté dans les cas de nécessité.

Pénitence se dit aussi particulièrement de la peine que le confesseur impose pour la satisfaction des péchés dont il absout. Voyez ABSOLUTION, CONFESSION.

PENITENCE, chez les Chrétiens, est une peine imposée après la confession des péchés : elle était secrète ou publique, selon que l'évêque ou les prêtres par lui commis le jugeaient à propos pour l'édification des Chrétiens : plusieurs faisaient pénitence publique sans que l'on sut pour quels péchés ils la faisaient : d'autres faisaient pénitence en secret, même pour de grands crimes, lorsque la pénitence publique aurait causé trop de scandale, ou les aurait exposés au danger. Le temps des pénitences était plus ou moins long, selon les différents usages des églises, et nous voyons encore une grande diversité entre les canons pénitenciaux qui nous restent ; mais les plus anciens sont d'ordinaire les plus sévères. Saint Basîle marque deux ans pour le larcin, sept pour la fornication, onze pour le parjure, quinze pour l'adultère, vingt pour l'homicide, et toute la vie pour l'apostasie. Ceux à qui il était prescrit de faire pénitence publique, s'adressaient à l'archiprêtre ou autre prêtre pénitencier, qui prenait leurs noms par écrit ; puis le premier du carême ils se présentaient à la porte de l'église en habits pauvres, sales, et déchirés, car tels étaient chez les anciens les habits de deuil : étant entrés dans l'église, ils recevaient des mains du prélat des cendres sur la tête, et des cilices pour s'en couvrir ; puis on les mettait hors de l'église, dont les portes étaient aussi-tôt fermées devant eux. Les pénitens demeuraient d'ordinaire enfermés, et passaient ce temps à pleurer et à gémir, sinon les jours de fêtes, auxquels ils venaient se présenter à la porte de l'église sans y entrer : quelque temps après on les y admettait pour entendre les lectures et les sermons, à la charge d'en sortir avant les prières : au bout d'un certain temps ils étaient admis à prier avec les fidèles, mais prosternés contre terre ; et enfin promettaient de prier debout jusqu'à l'offertoire qu'ils sortaient : ainsi il y avait quatre ordres de pénitens, les pleurants, les auditeurs, les prosternés, et les connitants, ou ceux qui priaient debout.

Tout le temps de la pénitence était divisé en quatre parties, par rapport à ces quatre états : par exemple, celui qui avait tué volontairement était quatre ans entre les pleurants, c'est-à-dire qu'il se trouvait à la porte de l'église aux heures de la prière, et demeurait dehors revêtu d'un cilice, ayant de la cendre sur la tête et le poil non rasé, en cet état il se recommandait aux prières des fidèles qui entraient dans l'église : les cinq années suivantes il était au rang des auditeurs, et entrait dans l'église pour y entendre les instructions : après cela il était du nombre des prosternés pendant sept ans : et enfin il passait au rang des connitants, priant debout, jusqu'à ce que les vingt ans étant accomplis, il était admis à la participation de l'Eucharistie ; ce temps était souvent abrégé par les évêques, lorsqu'ils s'apercevaient que les pénitens méritaient quelqu'indulgence ; que si le pénitent mourait pendant le cours de sa pénitence et avant que de l'avoir accomplie, on avait bonne opinion de son salut, et l'on offrait pour lui le saint sacrifice. Lorsque les pénitens étaient admis à la reconciliation, ils se présentaient à la porte de l'église où le prélat les faisait entrer et leur donnait l'absolution solennelle : alors ils se faisaient faire le poil et quittaient leurs habits de pénitence pour vivre comme les autres fidèles ; cette rigueur était sagement instituée, parce que, dit saint Augustin, si l'homme revenait promptement dans son premier état, il regarderait comme un jeu la chute du péché.

Dans les deux premiers siècles de l'église le temps de cette pénitence ni la manière n'étaient pas réglés, mais dans le troisième on fixa la manière de vivre des pénitens et le temps de leur pénitence. Ils étaient séparés de la communion des fidèles, privés de la participation et même de la vue des saints mystères, obligés de pratiquer diverses austérités jusqu'à ce qu'ils reçussent l'absolution. La rigueur de cette pénitence a été si grande en quelques églises, que pour le crime d'idolâtrie, d'homicide, et d'adultère, on laissait les pécheurs en pénitence pendant le reste de leur vie, et qu'on ne leur accordait pas même l'absolution à la mort. On se relâcha à l'égard des derniers, mais pour les apostats cette sévérité a duré plus longtemps. Ce point fut résolu du temps de S. Cyprien à Rome et à Carthage, mais on n'accordait l'absolution à la mort qu'à ceux qui l'avaient demandée étant en santé ; et si par hasard le pénitent revenait de sa maladie, il était obligé d'accomplir la pénitence. Mais jusqu'au sixième siècle quand les pécheurs après avoir fait pénitence retombaient dans des crimes, ils n'étaient plus reçus au bénéfice de l'absolution et demeuraient en pénitence séparés de la communion de l'église, qui laissait leur salut entre les mains de Dieu ; non que l'on en désespérât, dit saint Augustin, mais pour maintenir la rigueur de la discipline, non desperatione veniae factum est, sed rigore disciplinae.

Au reste, les degrés de cette pénitence ne furent entièrement réglés que dans le iv. siècle, et n'ont été exactement observés que dans l'église grecque. Les clercs dans les quatorze premiers siècles étaient soumis à la pénitence comme les autres : dans les suivants ils étaient seulement déposés de leur ordre et réduits au rang des laïcs quand ils tombaient dans des crimes pour lesquels les laïcs étaient mis en pénitence. Vers la fin du Ve siècle il s'introduisit une pénitence mitoyenne entre la publique et la secrète, laquelle se faisait pour certains crimes commis dans les monastères ou dans d'autres lieux en présence de quelques personnes pieuses. Enfin vers le VIIe siècle la pénitence publique pour les péchés occultes cessa tout à fait. Théodore, archevêque de Cantorbery, est regardé comme le premier auteur de la pénitence secrète pour les péchés secrets en Occident. Vers la fin du VIIIe siècle on introduisit le rachat ou plutôt la commutation des pénitences imposées que l'on changeait en quelques bonnes œuvres, comme en aumônes, en prières, en pélérinages. Dans le XIIe on imagina celle de racheter le temps de la pénitence canonique avec une somme d'argent, qui était appliquée au bâtiment d'une église, et quelquefois à des ouvrages pour la commodité publique : cette pratique fut d'abord nommée relaxation ou relâchement, et depuis indulgence. Voyez INDULGENCE.

Dans le XIIIe siècle les hommes s'étant tout à fait éloignés de la pénitence canonique, les prêtres se virent contraints à les y exhorter pour les péchés secrets et ordinaires ; car pour les péchés publics et énormes, on imposait encore des pénitences très-rigoureuses. Dans le xiv. et le XVe on commença à ordonner des pénitences très-légères pour des péchés très-griefs, ce qui a donné lieu à la réformation faite à ce sujet par le concîle de Trente, qui enjoint aux confesseurs de proportionner la rigueur des pénitences à l'énormité des cas, et veut que la pénitence publique soit rétablie à l'égard des pécheurs publics. Tertull. de poenit. S. Cypr. epist. et tract. de lapsis. Laubespine, observ. Morin, de poenit. Godeau, Histoire de l'Eglise liv. IV. Fleury, mœurs des Chrét. n. xxv.

PENITENCE, dans le droit canon anglais, se dit d'une punition ecclésiastique que l'on inflige particulièrement pour cause de fornication. Voyez FORNICATION.

Voici ce que les canons prescrivent à cet égard. Celui qui a commis le péché de fornication doit se tenir pendant quelques jours de dimanche dans le porche ou vestibule de l'église, la tête et les pieds nuds, enveloppé dans un drap blanc, avec une baguette blanche en main, se lamentant et suppliant tout le monde de prier Dieu pour lui. Il doit ensuite entrer dans l'église, s'y prosterner, et baiser la terre, et enfin placé au milieu de l'église sur un endroit élevé, il doit déclarer l'impureté de son crime scandaleux aux yeux des hommes et détestable aux yeux de Dieu.

Si le crime n'est pas de notoriété publique, les canons permettent de commuer la peine à la requête de la partie en une amende pécuniaire au profit des pauvres.

PENITENCE, chez les Juifs, nommée thejourtha, nom qui signifie changement ou conversion. La véritable pénitence doit être, selon eux, conçue par l'amour de Dieu, et suivie de bonnes œuvres. Ils faisaient une confession le jour des expiations, ou quelque temps auparavant. Ils imposaient des pénitences réglées pour les péchés, et ils ont chez eux des pénitenciels qui marquent les peines qu'il faut imposer aux pécheurs ; lorsqu'ils viennent confesser leurs péchés. Cette confession est d'obligation parmi eux ; on les trouve dans les cérémonies du sacrifice pour le péché : celui qui l'offrait confessait son péché, et en chargeait la victime. Ils reconnaissaient un lieu destiné à la purification des âmes après la mort ; on offrait des sacrifices pour elles, maintenant ils se contentent de simples prières. Ainsi parmi les péchés ils en distinguent de deux sortes, les uns qui se pardonnent dans l'autre vie, les autres qui sont irrémissibles. Josephe nous apprend que les Pharisiens avaient une opinion particulière là-dessus. Ils enseignaient que les âmes des gens de bien, au sortir d'un corps, entraient dans un autre, mais que celles des méchants allaient d'abord dans l'enfer. Hérode le tetrarque, prévenu de ce sentiment, croyait que l'âme de saint Jean, qu'il avait fait mourir, était passée dans la personne de Jesus-Christ. Le P. Morin, de poenitentiâ, le père Lamy de l'Oratoire, introduction à l'Ecriture-sainte. Voyez EXPIATION, RESURRECTION, SACRIFICE.