RIEN, ou NÉGATION, (Métaphysique) suivant les philosophes scolastiques, est une chose qui n'a point d'être réel, et qui ne se conçoit et ne se nomme que par une négation.

On voit des gens qui se plaignent qu'après tous les efforts imaginables pour concevoir le néant, ils n'en peuvent venir à bout. Qu'est-ce qui a précédé la création du monde ? qu'est-ce qui en tenait la place ? Rien. Mais le moyen de se représenter ce rien ? Il est plus aisé de se représenter une matière éternelle. Ces gens-là font des efforts là où il n'en faudrait point faire, et voilà justement ce qui les embarrasse, ils veulent former quelque idée qui leur représente le rien ; mais comme chaque idée est réelle, ce qu'elle leur représente est aussi réel. Quand nous parlons du néant, afin que nos pensées se disposent conformément à notre langage, et qu'elles y répondent, il faut s'abstenir de représenter quoi que ce sait. Avant la création Dieu existait ; mais qu'est-ce qui existait, qu'est-ce qui tenait la place du monde ? Rien ; point de place ; la place a été faite avec l'univers qui est sa propre place, car il est en soi-même, et non hors de soi-même. Il n'y avait donc rien ; mais comment le concevoir. Il ne faut rien concevoir. Qui dit rien déclare par son langage qu'il éloigne toute réalité ; il faut donc que la pensée pour répondre à ce langage écarte toute idée, et ne porte son attention sur quoi que ce soit de représentatif ; à la vérité on ne s'abstient pas de toute pensée, on pense toujours ; mais dans ce cas-là penser c'est sentir simplement soi-même, c'est sentir qu'on s'abstient de se former des représentations.

NEANT, (Jurisprudence) est un terme de pratique qui sert à exprimer qu'une procédure est rejetée ; les cours souveraines mettent l'appelation au néant quand elles confirment la sentence dont est appel ; quand elles l'infirment, elles mettent l'appelation et ce au néant. En matière du grand criminel elles ne mettent pas au néant, elles prononcent qu'il a été bien jugé, mal et sans grief appelé ; les juges inférieurs ne peuvent pas se servir de ces termes, au néant, ils doivent seulement prononcer par bien ou mal jugé.

Au conseil du roi, quand une requête en cassation est rejetée, on met sur la requête néant. Voyez APPEL, INFIRMER, SENTENCE. (A)