S. f. (Physique) est l'action de sucer ou attirer un fluide, comme l'air, l'eau, etc. par la bouche et les poumons. On suce l'air par la bouche, par le moyen des muscles du thorax et de l'abdomen, qui étendent la capacité des poumons et de l'abdomen. Ainsi l'air qui y est renfermé, est rarefié et cesse d'être en équilibre avec l'air extérieur qui, par conséquent pressé par l'atmosphère, est poussé dans la bouche et les narines. Voyez RESPIRATION.

On suce l'air avec un tuyau de même qu'avec la bouche seule ; c'est la même chose que si la bouche était allongée de la longueur du tuyau.

La succion des liqueurs plus pesantes que l'air se fait de la même manière, par exemple, quand on se couche par terre pour boire à une source, etc. on applique les lèvres précisément sur la surface de l'eau, et on les place de façon à empêcher l'air de s'y insinuer : ensuite on élargit la cavité de l'abdomen, etc. et l'air qui presse sur la surface de l'eau hors de la circonférence de la bouche, étant plus pesant que celui qui presse la surface de l'eau occupée par la circonférence de la bouche, l'eau est obligée de monter, par le même principe qui la fait monter dans une pompe. Voyez AIR et POMPE.

Quand on suce une liqueur pesante comme l'eau, à-travers un tube, plus le tube est long, plus on a de peine à sucer ; et la grosseur et le diamètre du tube augmentent encore la difficulté : la raison de cela est fondée sur les principes d'Hydrostatique.

En effet, si on veut sucer une liqueur, par exemple avec un tuyau d'un pied de long, il faut que l'air extérieur ait assez de force pour porter par sa pression la liqueur à la bouche, et par conséquent pour soutenir cette liqueur à la hauteur d'un pied ; et plus le tube est gros, plus la quantité de la liqueur que l'air doit soutenir est grande : c'est pourquoi plus le tube est long et gros, plus il faut que la pression de l'air extérieur surpasse celle de l'air qui est dilaté dans les poumons, et comme la pression de l'air extérieur est toujours la même à-très-peu près, il faut donc que l'air des poumons ait d'autant moins de force que le tube est plus long et plus gros, c'est-à-dire que l'inspiration ou la dilatation de l'air, doit être d'autant plus grande, et par conséquent la succion plus difficile.

De ce que nous venons de dire il parait évidemment que ce que nous appelons succion, ne se fait pas par quelque faculté active qui réside dans la bouche, le poumon, etc. mais par la seule impulsion et par la pression de l'atmosphère.

SUCCION, l'action de sucer. Il y a dans les troupes du roi des soldats qu'on appelle superstitieusement pour la cure des plaies, et principalement celles qui sont faites par instrument piquant, et qui pénétrent dans la cavité de la poitrine ou du bas-ventre. Ces hommes n'ont aucune idée de la Chirurgie ; ils le signifient eux-mêmes : ils pansent du secret, c'est leur expression. Ce secret consiste à sucer les plaies, à y faire couler ensuite quelque peu d'huîle et de vin, en marmottant quelques paroles et disposant les compresses en forme de croix. On trouve des personnes assez dépourvues de sens pour se mettre entre les mains de ces ignorants et imposteurs, et qui se laissent tellement prévenir par leurs promesses, qu'elles refusent tout secours de la part de la Chirurgie.

On sent assez que la plaie du bas-ventre avec lésion des intestins, les plaies de tête qui exigent le trépan, les plaies des gros vaisseaux dans les extrémités, et tant d'autres qui exigent une grande expérience et beaucoup de soins intelligens de la part du chirurgien, soit par leurs causes, soit par leurs complications, ne sont pas susceptibles d'une guérison par un moyen aussi simple que l'est la succion.

La méthode de sucer pourrait cependant être bonne dans quelques cas. Un coup d'épée dans une partie charnue, où il n'y a aucun vaisseau considérable d'intéressé, occasionne un épanchement de sang dans tout le trajet du coup : on procurerait une prompte guérison en suçant une pareille plaie, parce qu'on la débarrasserait du sang dont la présence devient une cause de douleur, d'inflammation et d'abscès dans les interstices des muscles, accidents qui mettent quelquefois dans la nécessité de faire des incisions douloureuses.

Les plaies de poitrine avec épanchement de sang sur le diaphragme, peuvent être guéries très-promtement par la succion, pourvu qu'elle soit faite à-temps, c'est-à-dire avant la coagulation du sang épanché.

M. Anel, docteur en chirurgie et chirurgien de madame royale de Savoie, bisaïeule de Louis XV. persuadé de l'utilité de la succion des plaies, dans les circonstances que nous venons d'exposer, a donné un moyen de le faire sans se servir de la bouche. Il y a effectivement du danger à sucer la plaie d'un blessé qui se trouverait atteint de quelque maladie contagieuse, comme la vérole, le scorbut, etc. et les blessés qui seraient d'une bonne constitution ne risqueraient pas moins de la part d'un suceur qui aurait quelque mauvaise disposition.

L'invention de M. Anel consiste dans l'usage de la seringue ordinaire, à laquelle il a adapté des tuyaux d'une figure particulière. Voyez Pl. XXXI. fig. 4. et 5.

Pour se servir de cette seringue, il faut dégorger l'entrée de la plaie des caillots de sang, si elle en était bouchée. Si c'est par exemple, une plaie pénétrante dans la poitrine, on introduit une sonde jusque dans la cavité. Cette sonde cannelée, fig. 1. Pl. X. sera armée d'un fil ; on étend ce fil à droite et à gauche pour qu'il se trouve engagé et pressé par l'orifice du tuyau qui doit être appliqué sur la circonférence de la plaie, en manière de ventouse : par ce moyen la sonde est assujettie.

On ajuste la seringue à ce tuyau, on en tire le piston, et l'on pompe ainsi tout le sang qui est épanché. On doit injecter ensuite dans la plaie un peu de baume tiede ; et couvrir l'orifice externe de la plaie pendant un quart d'heure, avec une compresse trempée dans l'eau vulnéraire. Alors on suce la plaie pour la seconde fais, afin d'ôter le baume superflu, qui restant dans la plaie et écartant les parais, empêcherait la réunion ; et afin d'évacuer l'épanchement des humeurs qui aurait pu se faire depuis l'injection du baume. On applique une compresse et un bandage contentif, et on ne néglige point les autres secours qui peuvent favoriser la guérison, lesquels se tirent du régime, et de l'administration des remèdes convenables. (Y)