Imprimer
Catégorie parente: Histoire
Catégorie : Fortification
FOURNEAU

FOURNEAU SUPERFICIEL, terme de Fortification qui signifie la même chose que caisson. C'est une caisse remplie de trois, quatre, cinq ou six bombes, et souvent remplie simplement de poudre. On s'en est servi dans les sièges pour faire sauter les logements du chemin couvert et du fossé sec ; mais ces caissons ne sont plus guère d'usage. On leur a substitué les fougasses. Voyez ci-dev. FOUGASSE ou FOUGADE. (Q)

* FOURNEAU, chez les Bimblotiers faiseurs de dragées pour la chasse ; c'est un massif de maçonnerie qui entoure une chaudière de fer dans laquelle on fond le plomb dont on doit faire les balles ou dragées. Voyez la Planche de la fonte des dragées. C est le fourneau ; A la chaudière, autour de laquelle sont deux anneaux de fer qui garantissent la maçonnerie du fourneau du frottement des moules qui la détruirait en peu de temps ; D l'ouverture par laquelle on met le bois allumé sous la chaudière ; E la cheminée du fourneau par laquelle la fumée du bois qui est sous la chaudière passe dans la grande cheminée F qui couvre tout le fourneau, d'où elle se perd hors de l'attelier ; B une ouvrière assise près du fourneau, et qui tient un moule dans ses mains qu'elle ouvre pour en faire sortir la branche (voyez BRANCHE), qu'elle tire avec des béquettes, sorte de pinces plates ; les branches sorties du moule sont posées à terre sur un ais placé en G à côté de l'ouvrière.

FOURNEAU à fondre les caractères d'Imprimerie ; il est fait de la terre dont se servent les Fournalistes pour la fabrique des creusets, mais moins fine. C'est un mélange de ciment de pot-à-beurre cassé et de terre glaise petris ensemble ; sa grandeur ou hauteur est de 18 à 20 pouces, 10 à 12 de diamètre, sur deux pieds et demi de longueur. Il est séparé en deux dans la hauteur ; on met le bois dans la partie supérieure, au bout de laquelle est une grille aussi de terre qui donne l'air qui est nécessaire pour faire allumer le bois. La partie inférieure est composée du cendrier et des ventouses pour l'air ; on pose sur la partie supérieure dudit fourneau la cuillière dans laquelle est le métal qui est toujours en fusion par le feu continuel qui est dessous. Depuis la grille jusqu'à la partie supérieure, on ménage une ouverture sur laquelle on met un tuyau de tôle, qui sert de passage à la fumée qui s'échappe hors l'attelier. Voyez les Planches de la Fonderie en caractères.

* FOURNEAU, (Chapelier) Ces ouvriers en ont de trois sortes : un qu'ils mettent sous les plaques, lorsqu'ils bâtissent et dressent ; un plus grand dans la foulerie sous la petite chaudière, qui contient l'eau chaude et la lie à fouler ; un troisième très-grand sous la chaudière à teinture. Ces fourneaux n'ont rien de particulier, qu'on n'aperçoive d'un coup-d'oeil sur les Planches. Voyez les Planches de Chapellerie et leur explication.

* FOURNEAU, (Cuisine) c'est un ouvrage de maçonnerie qui est fait de brique, qui a environ trois pieds de haut, et sur lequel sont scellés des réchaux qui déposent leurs cendres dans une espèce de voute pratiquée sous le fourneau, et à-peu-près vers le milieu. Le bâti qui soutient cette maçonnerie est de pierre. Les contours de la partie supérieure sont garnis et liés de bandes de fer.

FOURNEAU DES GRANDES FONDERIES ; voyez l'article BRONZE.

FOURNEAU DES USINES EN CUIVRE ; voyez l'article CUIVRE.

FOURNEAU DES USINES EN FONTE ; voyez ci-devant à l'article FORGE, FORGES (GROSSES-).

FOURNEAU DES USINES EN FER ; voyez aussi ci-devant à l'article FORGES (GROSSES-).

* FOURNEAU des Tailleurs de limes ; c'est une espèce de moufle faite de brique. Le tailleur de limes les y renferme avec la suie, et autres matières de la trempe en paquet. Voyez l'article TREMPE. Voyez aussi Planches de Taillanderie et FOURNEAU, 9 le fourneau, 5 son cendrier, l les supports de la grille qui porte le paquet.

FOURNEAU, chez les Mégissiers ; voyez l'article CHAMOISEUR.

FOURNEAU DES FONDEURS EN SABLE ; voyez à l'article SABLE, FONDEUR EN SABLE.

* FOURNEAU, (Plombier) ils en ont trois ; la fosse, la poesle, et le fourneau à étamer.

Ils fondent dans la fosse le plomb destiné pour les grandes et petites tables ; et c'est-là qu'ils jettent aussi d'autres ouvrages. Voyez l'article FOSSE.

La poesle est une partie de la fosse. Voyez le même article et l'article POESLE.

Le fourneau à étamer est un châssis carré de grosses pièces de bois ou massif de maçonnerie, sur lequel est un foyer de brique. Il est élevé de terre d'environ deux pieds et demi, sur quatre pieds de longueur, et presque la même largeur ; il est bordé de brique ou de terre grasse tout-autour ; mais le rebord est plus haut par-derrière et par-devant, que par les côtés : c'est-là que les Plombiers étament. Voyez l'article ETAMER.

Leur étamage occupe deux ou trois ouvriers qui tiennent la pièce à étamer élevée au-dessus du fourneau, jusqu'à ce qu'elle ait pris le degré de chaleur convenable. Voyez nos Planches de Plomberie et leur explication.

* FOURNEAU, (Potier d'etain) il est comme le fourneau de cuisine, fait de brique, long d'environ huit à dix pouces, de la même profondeur, large de six à sept pouces, ouvert par-devant, coupé par une grille qui porte le charbon. On y met chauffer les fers à souder ; fondre l'étain dans la cuillière à jeter les anses ou autres garnitures, etc. Les Potiers d'étain ont des fourneaux portatifs de fer, de tôle ou de brique, qui leur servent aux mêmes usages.

* FOURNEAU, en termes de Raffineur de sucre, est un massif de brique à plusieurs feux, d'environ six pieds de large sur quinze de long ; il est ordinairement chargé de trois chaudières, séparées par des élévations triangulaires, sous lesquelles sont les évents des fourneaux. Au-dessous des chaudières qui y sont descendues jusqu'à un pied de leur bord, sont des grilles sur lesquelles on jette le charbon, et qui donnent passage aux cendres et au vent qui vient des aspiraux. Voyez ASPIRAUX. Ce fourneau est fermé sur le devant d'une porte de fer, couvert de plomb et garni de trois poeslettes. Voyez POESLETTE et nos Planches.

FOURNEAU, (Fontaine salante) Voyez les articles SEL et SALINES.

FOURNEAU des Teinturiers. Voyez l'article TEINTURE.

FOURNEAU de Verrerie ; voyez l'article VERRERIE.

Il y a dans les Arts un beaucoup plus grand nombre de fourneaux ; mais nous croyons devoir en renvoyer la construction et les usages aux articles principaux de ces Arts.

FOURNEAU, (Chimie philosophique.) furnus de furvus, c'est-à-dire noir ; in furnum calidum condito, Plaut. cas. act. II. scène Ve vers 1. Il se rend encore en latin par fornax et fornacula, qui ont de même été employés forcément pour signifier les fourneaux dont nous avons à parler, pendant qu'il est évident qu'ils ont toujours désigné de grands fours ou fourneaux : quantis fluèrent fornacibus aera effigies ductura tuas. Claud. etc. Les fourneaux sont des ustensiles destinés à contenir la pâture du feu, et à appliquer cet élément comme instrument aux substances qu'on veut changer par son action : on peut les ranger parmi les vaisseaux. Nous allons proposer des exemples des différentes espèces de ceux que des travaux assidus et une longue suite d'expériences ont perfectionnés, notre but n'étant point d'en donner un traité complet, c'est-à-dire une vaste compilation de tout ce qui a été fait de bon et de mauvais dans ce genre. La plupart de ceux qui se trouvent dans nos Planches sont représentés avec les vaisseaux qu'on a coutume de leur adapter, afin de donner une idée des différents appareils. Ici il ne sera question quant au fond que des fourneaux : si on y parle des vaisseaux, ce ne sera qu'en passant ; réservant pour leur article le détail qu'ils exigent chacun séparément, la manière de les ajuster ensemble et avec leurs fourneaux ; en sorte que par cette réunion qui porte le nom d'appareil, il y sera question des fourneaux, comme ici des vaisseaux.

Pour observer quelqu'ordre, nous tirerons notre division des opérations.

Des fourneaux à distiller par ascension. Ce sont ceux qui se trouvent représentés dans nos Planches de Chimie, fig. 2. 14. 76. 84. 96. et 123. Du-moins ce dernier-ci l'est-il en partie ; celui de la fig. 2. est fait en terre. Il a un pied 10 pouces de haut, sur quatorze pouces de diamètre à sa partie inférieure, et dix-sept à la supérieure, hors d'œuvre. Voyez son explication. On commence par faire une plaque circulaire de terre épaisse de deux pouces, et on élève les parois de la même épaisseur. Il est divisé en trois corps ; l'inférieur a sept pouces de haut : on l'appelle le cendrier, cinerarium, conisterium ; on y ouvre une porte ou soupirail large de cinq pouces, et haute de trois. Cette porte est embrasée ; on peut toutefois se dispenser de séparer ce corps du suivant : celui-ci s'appelle le foyer, focus, pyriaterium : il a huit pouces et demi de haut ; à sa partie inférieure il a trois ou quatre pitons en terre pour soutenir une grille de fer ; ces pitons paraissent imités de ceux que le Fêvre met dans son fourneau à lampe. Immédiatement au-dessus de cette grille est la porte ou bouche du foyer ; elle est large et haute de trois pouces et demi, et sémi-circulaire par sa partie supérieure ; au milieu de ce corps extérieurement sont deux poignées ou anses de terre pour le manier aisément. Reste enfin le troisième corps ou supérieur qu'on appelle l'ouvroir, le laboratoire, ergasterium : celui-ci n'a rien de particulier que trois ou quatre trous faits à sa partie supérieure pour servir de regitres. Ces trous vont de bas en haut, et sont très-larges intérieurement. Au-dessus, dans le bord intérieur et supérieur de ce corps est un rebord de terre appliqué dans le temps qu'on a fait le fourneau, qui sert à éloigner le vaisseau distillatoire de ses parois : ce fourneau est donc conique. Il est mieux de le faire d'une seule pièce que de trois ; on le relie avec de gros fil d'archal pour le soutenir et empêcher qu'il ne se fende ; on s'en sert pour distiller avec l'alembic de cuivre polychreste ; on le monte ordinairement sur un piédestal qui le met plus à portée des mains de l'artiste.

La grille, craticula, doit être faite premièrement d'un cercle de fer auquel on cloue de petites barres de cinq ou six lignes d'équarrissage, posées en losange, et éloignées de cinq ou six lignes aussi les unes des autres. Cette disposition a pour but de favoriser la chute des cendres et des petits charbons qui pourraient nuire au passage de l'air. C'est par la même raison qu'il faut que la grille soit de telle grandeur, qu'il y ait un bon doigt entre sa circonférence et les parois du fourneau. Nous parlerons plus particulièrement dans la suite de la manière dont on construit un fourneau en terre, et nous dirons les raisons de la plupart des faits que nous avons avancés.

Ce fourneau doit être garni de ses portes pour le soupirail et la bouche du feu. On les trouve marquées lettres o p ; ces deux portes sont les mêmes pour le fourneau que nous venons de décrire, et pour celui de la fig. 1. La porte o est creusée par deux petites fossettes faites de façon qu'on peut le prendre avec des pinces ou les doigts, et la porte q a une petite poignée pour le même sujet. Il est bon de remarquer que cette poignée ne peut la faire tomber, par la raison qu'elle porte sur une mentonnière ou saillie extérieure qui est de niveau avec la bouche du feu. Nous n'avons point donné ici de grille en particulier ; nous aurons assez occasion d'en voir dans la suite. Ce fourneau n'est que celui de la Pl. V. de Lémery, dont on a ôté le dôme. On le trouve communément chez les fournalistes de Paris.

Le fourneau marqué fig. 14. ne diffère guère du précédent que par ses dimensions ; il est destiné aux cucurbites de verre basses. Il est de terre et a treize pouces de haut sur dix et demi de diamètre par le bas, et un pied par le haut hors d'œuvre. Le sol du cendrier, ainsi que les autres parais, sont épais d'un pouce et demi ; il est d'une seule pièce ; son soupirail est large de trois pouces et haut de deux ; la bouche du feu est arquée et a les mêmes dimensions ; la grille est éloignée de trois pouces du sol du cendrier ; il a deux anses de terre extérieurement, quatre regitres au haut comme la fig. 2. et une grille de la même façon : mais à trois ou quatre pouc. au-dessus la grille, sont deux trous qui percent ses parois de part en part, destinés à recevoir une barre de fer capable de soutenir le vaisseau qu'on y met ; il lui faut aussi deux portes comme à la fig. 2.

Le fourneau de la fig. 76. destiné à renfermer entièrement une cucurbite, peut être considéré comme celui de la fig. 2. à laquelle on a ajusté un dôme, fornix ; il est de terre et conique également ; il est haut de deux pieds deux pouces ; il a neuf pouces de diamètre par le bas, et quatorze à la partie la plus large de son dôme hors d'œuvre ; il est communément divisé en quatre corps ; le premier ou cendrier et les deux suivants sont hauts de sept pouces, et le dôme l'est de cinq ; le sol du cendrier et les parois des autres corps ont deux pouces d'épais, excepté que le dôme est un peu aminci vers sa grande ouverture. La porte du cendrier est large de trois pouces et haute de deux ; la grille ni ce qui la porte n'ont rien de particulier. La bouche du feu qui se trouve au second corps est large et haute de trois pouces, et demi-circulaire par le haut ; il est comme les précédents muni de deux anses ; le troisième corps ou l'ouvroir n'a rien de particulier : ce n'est qu'un cercle de terre fait en cône renversé. Dans l'endroit où il se joint avec le second, on a fait au bord supérieur et intérieur de celui-ci quatre échancrures pour loger deux barres de fer. Ces deux barres destinées à soutenir la cucurbite, sont également éloignées entr'elles et des parois du fourneau ; elles sont parallèles : ainsi on sait la situation des échancrures ; on a soin de les creuser ou de choisir les barres, de façon que le second et troisième corps du fourneau joignent bien ensemble. Au reste une seule barre peut suffire, quoique deux ne nuisent pas et fassent même mieux. Le quatrième corps ou dôme est une espèce de voute demi-circulaire, qui a au milieu de son élévation un trou assez grand pour passer le col d'une cucurbite de terre ou de verre. On voit dans sa partie inférieure quatre trous servant de regitres. Il serait mieux pour donner plus de chaleur, de les faire le plus près du grand qu'il serait possible ; mais alors le chapiteau en serait échauffé. Les portes dont nous avons parlé, sont comme celles des fourneaux précédents, faites en embrasure et garnies chacune de leur fermeture. On met aussi ce fourneau sur un piédestal convenable ; ce piédestal au reste ne sert pas plus pour l'élever que pour le garantir de l'humidité que les corps chauds ne manquent pas d'attirer, et des inégalités du pavé qui l'endommagerait. Il est le même que le fourneau de reverbere qu'on voit Pl. V. dans Lémery.

On observera que les corps des trois fourneaux que nous venons de décrire s'agencent ensemble au moyen d'une languette qu'on pratique à la partie supérieure du corps inférieur, et d'une rainure faite à l'inférieure du supérieur. Ainsi placée elle ne se remplit pas d'ordures qui empêchent les deux corps de s'ajuster exactement ensemble, et font toujours perdre du temps. La languette et la rainure ont à-peu-près le tiers de largeur de l'épaisseur des corps.

La fig. 84. n'est guère remarquable que par son vaisseau ; le fourneau qui en fait partie ne différe de la fig. 14. qu'en ce qu'il est cylindrique. On peut le faire en tôle comme en terre ; mais on garnit la tôle comme nous le dirons des fourneaux de fusion. Le cendrier fait environ un tiers de sa hauteur totale, et est ouvert aux deux côtés par deux trous qui servent à transmettre le col de deux cornues qui reçoivent leur chaleur du foyer supérieur. Ainsi ce corps doit être séparé du foyer ; les portes n'ont rien de particulier ; elles sont toujours en proportion avec les regitres, le diamètre du fourneau, et ce qu'on doit y introduire. Les regitres sont pratiqués un peu au-dessous du bord inférieur de la partie qu'on peut appeler l'ouvroir, quoiqu'elle ne soit pas séparée du reste ; la grille est comme à l'ordinaire. Il faut pourtant remarquer que, comme la cucurbite ou vessie ne remplit pas exactement le fourneau par le haut, il est souvent nécessaire d'avoir un cercle de tôle ou de terre qui soit posé sur les bords supérieurs du fourneau pour boucher l'intervalle que laisse la cucurbite. Nous ne parlons point des soutiens qu'on y voit attachés ; peu importe qu'ils tiennent au fourneau, ou qu'ils en soient isolés. Les fermetures des portes sont de tôle, et roulent sur des gonds. Nous détaillerons dans la suite des fourneaux qui répandront beaucoup de clarté sur la construction de celui-ci qui se trouve page 316. de Libavius.

La fig. 96. est un fourneau en briques ; il est carré extérieurement ; il doit être rond intérieurement ; il a un cendrier, une grille, un foyer, un ouvroir, et quatre regitres comme les précédents. La porte du foyer est carrée, parce qu'il est plus aisé de lui donner cette figure avec des briques. Au reste, peu importe celle qu'elle aura, soit dans ce fourneau, soit dans ceux qui précédent ; il faut des fermetures à l'ordinaire. Il est dans Manget, Pl. X. et en remontant dans Lémery, Pl. II. qui l'a pris dans la Pl. IV. de Charas, qui l'a pris dans la Pl. I. de le Fêvre, tome I. Ce dernier le tient de Béguin, p. 162.

La fig. 123. représente un fourneau, au moyen duquel on peut distiller par en-haut et par le côté tout-à-la fais. Comme cette espèce de fourneau est mixte du côté de l'opération, et que les vaisseaux qu'il contient le sont aussi, nous n'en donnerons la description qu'à l'article VAISSEAUX. Voyez Libavius, page 322.

On a Ve que les fourneaux que nous venons de décrire ne différent pas essentiellement entr'eux ; nous ajouterons ici que quand ils sont extrêmement grands, et qu'ils doivent recevoir un alembic de cuivre de deux pieds de diamétre, par exemple ; on les fait en briques, comme celui de la fig. 96. et l'on ne fait pas le foyer de toute la largeur de la cucurbite, parce qu'il se consumerait trop de bois inutilement.

Nous mettrons encore les fourneaux à lampe au rang de ceux qui servent à la distillation ascensoire. On en trouve deux dans nos Planches, marqués fig. 64. et 65. Le premier est un cylindre creux de tôle, de cuivre, ou de laiton, qui a environ neuf pouces de haut sur sept ou huit de large ; il a une ouverture au-bas pour recevoir le canal d'une lampe à pompe qui brule à trois ou quatre meches ; on y brule de l'huîle d'olives à vil prix, ou de l'huîle de navette ; mais il vaut mieux, si l'on peut, n'employer que celle d'olives, parce que celle de navette donne une forte odeur qui incommode. D'ailleurs elle produit plus de champignons que l'autre, toutes choses égales d'ailleurs. On aura soin de faire les lumignons courts, terminés en un petit pinceau, et assez gros pour remplir exactement les petits tuyaux par lesquels ils passent ; on allume le nombre de meches nécessaire au degré de feu qu'on veut donner. Ce fourneau se trouve dans Libavius, d'où il a passé successivement dans les ouvrages de Béguin, de Sgobbis, connu sous le nom de Montagnana sa patrie, de Lémery, et de M. l'abbé Nollet, t. IV. de ses leçons de Physiq. expérim. mais avec quelques accessoires différents.

Le second, dont nous croyons le Fêvre l'inventeur, ou tout au-moins celui qui le premier en a donné la description, se trouve aussi tome II. de la bibliothèque pharmaceutique de Manget, Pl. XI. fig. 2. On le voit dans la II. Planche de le Fêvre, et il est marqué fig. 65. dans les nôtres. Ce fourneau, dit l'auteur où nous l'avons pris, peut servir à plusieurs opérations de chimie capables de satisfaire et de piquer les plus curieux. Il doit être fait d'une bonne terre bolaire, compacte, bien pétrie, bien liée, et bien cuite, afin que la chaleur de la lampe s'y conserve bien. Si l'on craignait qu'elle ne transpirât, on pourrait enduire le dehors et le dedans du fourneau, après sa cuisson, avec des blancs-d'œufs qu'on aurait réduits en eau par une continuelle agitation.

Ce fourneau doit être de trois pièces, qui auront en tout 21 pouces de haut. Il sera épais d'un pouce, et en aura 8 de diamètre dans œuvre. La première pièce ou base en aura huit de hauteur ; son sol sera percé d'un trou de 4 pouces et demi de diamètre. Cette ouverture est faite pour le passage de la lampe qui en aura 3 de diamètre, et 2 de profondeur. Cette lampe sera ronde et couverte d'une platine ayant dans son milieu un trou environné de six autres également éloignés entr'eux, et de celui du milieu. Chacun de ces trous sera assez grand pour admettre une meche de 12 fils au plus. Le second corps aura 7 pouces de haut ; il faut qu'il s'emboite juste dans le premier, et qu'il ait quatre pattes de terre qui aient un pouce de saillie dans le fourneau, pour soutenir un vaisseau de terre ou de cuivre qui aura six pouces de diamètre et quatre de haut. Ce vaisseau de terre est une capsule dans laquelle on mettra à volonté de l'eau, des cendres, ou du sable, pour servir d'intermède et faire un bain qui en tirera son nom. Ce que nous disons ici, est une modification qui ne se trouve point dans la figure. Car on n'y voit qu'un petit rebord saillant d'un pouce tout-autour, qui soutient un trépié ; ainsi on pourra choisir. Il faut aussi que cette seconde pièce ou corps soit percé de deux trous à l'opposite l'un de l'autre, d'un pouce et demi de diamètre. On y ajustera deux crystaux de Venise. Ces deux trous doivent être pris à la hauteur de 4 pouces du second corps, et ne lui laisser conséquemment qu'un pouce et demi au-dessus d'eux. Tout vis-à-vis, dans le vaisseau qui enferme l'œuf philosophique, seront ouvertes deux autres fenêtres, auxquelles on ajustera aussi deux verres pour voir le changement des couleurs, etc. dans l'opération, au moyen d'une chandelle qu'on mettra à la fenêtre opposée à celle à laquelle on regardera. La troisième pièce du fourneau doit être de 6 pouces, pour achever les 21 pouces de la hauteur entière. Elle doit être faite en dôme ou en hémisphère, et avoir dans son milieu un trou d'un pouce de diamètre. Il servira à recevoir plusieurs pièces pyramidales de trois lignes chacune, ayant un rebord qui s'appliquera sur le bord du trou, qu'on bouchera par ce moyen autant et aussi peu qu'on le voudra. On aura une autre pièce aussi pyramidale, qui fermera le milieu s'il est nécessaire. Il faut qu'il y ait encore quatre autres trous faits comme le premier. Ils seront faits dans le troisième et quatrième pouce de la hauteur, et également éloignés les uns des autres. Ce sont ces trous qui servent de regitre au fourneau de lampe, c'est-à-dire au moyen desquels on gouverne la chaleur ; sans compter qu'on remplit encore les mêmes vues par l'éloignement ou l'approximation de la lampe. Cette lampe sera posée sur un rond de bois ajusté sur une vis qui l'élevera ou l'abaissera à volonté. On changera encore le degré de chaleur selon les différentes opérations, en allumant plus ou moins de meches, et les faisant avec plus ou moins de fils chacune. Mais on ne fixe guère bien le degré de chaleur au point où il convient, qu'au moyen d'un thermomètre qui peut s'introduire aisément dans le fourneau. On pourra rectifier les huiles dont on se servira pour la lampe, sur de l'alkali fixe bien calciné. Par-là elles donneront moins de suie et plus de chaleur, parce qu'on leur enlève leur humidité et mucosité. Les meches doivent être d'or, ou d'alun de plume, ou d'amiante. On peut cependant leur substituer la moèlle de sureau ou de jonc bien desséchée, qu'on changera toutes les 24 heures ; ce qui fait qu'il faut avoir deux lampes qu'on substituera l'une à l'autre, afin qu'il n'y ait aucune interruption dans la chaleur. Si on emploie la moèlle de sureau, il faut qu'il y ait une petite pointe de fer aiguë, qui soit soudée au fond de la lampe, et qui réponde au milieu du trou du couvercle qui doit contenir la meche. Ce couvercle peut encore être flottant, au moyen de quelques petits morceaux de liège, selon une méthode qui est trop connue pour que nous en parlions davantage.

Au reste, il est évident que ces fourneaux de lampe, particulièrement ce dernier, et même tous ceux dont nous avons parlé jusqu'ici, sont employés à d'autres opérations. Nous en parlerons en son lieu.

Les fourneaux à capsule qui sont indiqués dans les auteurs latins sous le nom de furni catinarii, doivent être aussi placés avec les fourneaux à distiller par ascension, soit parce qu'ils y servent souvent, soit parce qu'ils sont du genre des autres bains, qui trouveront ici leur place. Ces fourneaux sont principalement de deux espèces ; ou ils servent par emprunt aux capsules, ou bien ils y sont particulièrement destinés ; et cette seconde espèce se trouve quelquefois comprise sous le nom d'athanor. Quant à la première, elle est composée d'individus semblables à quelques uns de ceux que nous avons déjà mentionnés, et à d'autres que nous verrons dans la suite sous le nom de fourneau de distillation latérale, et même d'athanors. Aussi n'en avons-nous représenté qu'un, pour l'appareil dont il est suivi ; c'est celui de la figure 13. il ressemble parfaitement à la fig. 14. ainsi nous n'en donnerons point de description. Nous dirons seulement un mot en passant du vaisseau d'où ils tirent leur dénomination.

Une capsule est un petit vaisseau hémisphérique de terre, de tôle, ou de fonte, et souvent une poêle dont on a coupé la queue, ou ce que les officiers appellent un diable, qui sert à contenir l'intermède sec dont on se sert quand on ne veut pas exposer un corps à feu nud.

La seconde espèce est un genre particulier, dont nous n'avons point encore Ve d'exemple jusqu'ici. Nous renverrons à leur place ceux dont quelqu'accessoire a changé le nom. Ainsi nous ne parlerons ici que de la fig. 23. qui est un fourneau à capsule propre, ou un bain de sable uniquement employé à ce dont il porte le nom. On l'a pris dans la Planc. IV. tom. I. de Schlutter, qui l'employait à départir. On apprendra par la suite que l'usage du bain de sable est très-étendu. L'auteur en question s'en servait à placer plusieurs matras ou cucurbites. Pour cet effet, on construira des murs de briques, dont la longueur en-dehors sera de 4 pieds sur 2 pieds de large, et la hauteur de 2 pieds 3 pouces. Il aura en-dedans un pied de large sur 3 pieds de long à l'endroit du foyer. Son soupirail sera de 9 pouces en carré. Le cendrier regnant dans toute la longueur du fourneau, sera de même largeur. Au-dessus seront des barres de fer posées sur un petit mur d'appui qui se trouve tout fait par cette construction. Ces barres serviront de grille à la chauffe ou foyer. A quelques pouces au-dessus du foyer, seront maçonnées au même temps que la brique, des barres de fer pour soutenir une plaque de tôle épaisse, sur laquelle on mettra le sable. Au bout du fourneau est un regitre pour l'issue de la flamme et de la fumée. On lui ajuste un tuyau de poêle qu'on porte dans une cheminée, etc.

Les différentes espèces de bains ne sont que des fourneaux semblables à quelques-uns de ceux dont nous avons déjà parlé, mais qui portent des noms différents, relativement à l'intermède qui constitue ce bain. Ainsi nous ne parlerons pour le moment que d'un seul fourneau particulièrement destiné au bain-marie. Ce fourneau ne diffère du précédent qu'en ce qu'au lieu d'une simple plaque de tôle ou de fonte, on y a encastré un chauderon de cuivre pour tenir de l'eau. Mais ce chauderon pourrait également contenir du sable, des cendres, etc. s'il se brulait trop vite, on le ferait de fonte. Ce fourneau est notre fig. 11. On fait donc des murs de briques de telle épaisseur et longueur qu'on veut. La largeur est aussi indifférente ; mais on ne donne que peu de largeur à l'endroit où l'on met le bois, pour l'épargner, et parce qu'il ne faut pas un grand feu. On lui donne, par exemple, un pied de large, et autant de haut, si ce fourneau est de la même grandeur que le précédent, et si on ne lui met point de grille comme à nôtre fig. 11. et quand il est élevé à la hauteur convenable pour admettre un chauderon de 10 pouces de profondeur, par exemple, on l'y encastre en ménageant au bout opposé au soupirail un trou pour la fumée. On ajuste un tuyau de poêle à ce trou, et l'on couvre ce chauderon rond ou carré, ou carré-long, d'une plaque de cuivre ou de tôle, dans laquelle on fait des trous. Ces trous servent à passer les vaisseaux distillatoires, digestoires, etc. ou les plats, terrines, évaporatoires qu'on veut mettre au bain-marie. Le fourneau de la fig. 118. sert au bain-marie ou diplome des anciens. Outre les bains dont on a parlé à leur article, nous dirons qu'il y en a encore d'autres, comme par ex.

Le bain de limaille, où ce corps est employé à la place du sable.

Le bain de fumier, ou celui qui se fait au moyen du fumier échauffé par sa seule fermentation, ou par l'eau chaude, comme nous le verrons en parlant des vaisseaux, et le bain de marc de raisin. Voyez VERDET.

Le bain de sciure ou de rapure de bois dont parle Cartheuser, seconde édition de sa Chimie.

Le bain sec qui est de deux espèces : celui où il n'y a d'autre intermède qu'une capsule, et il est opposé à l'humide ou au bain-marie, et celui où le vaisseau contenant la liqueur à distiller, par exemple, est exposé au feu immédiat, ce qu'on appelle encore feu nud.

Les fourneaux qu'on appelle de décoctions, sont encore des fourneaux de l'espèce de ceux que nous avons vu. Dans ce rang nous placerons les fig. 12. 69. 72. et 162.

La fig. 12. est précisément la même que les 13. et 14. ainsi nous n'en donnerons point de description. On en voit un à-peu-près semblable dans la Pl. III. de Lémery, lettre s ; il parait que s'il lui manque un cendrier, c'est par la négligence du dessinateur.

Les 69. et 72. n'en diffèrent que parce qu'elles représentent des fourneaux de fonte à pieds, dont le premier est couvert ; celui-ci est de Glauber, Part. I. de ses fourneaux, et celui-là de Lémery, Pl. VI.

La 162. n'a rien qui demande une description particulière quant au fourneau ; il est dans Libavius, p. 331.

On emploie encore d'autres fourneaux en Chimie, qui sont à peu de chose près les mêmes que la plupart de ceux qui précèdent. Je veux parler des fourneaux à aludels ou de sublimation, qui est à proprement parler une distillation ascensoire seche. Tels sont ceux qu'on a marqués fig. 5. 66. 98. et 167.

Le premier est de l'adepte Géber. Il se trouve page 65. de sa somme. Outre les fourneaux usités actuellement en Chimie, nous avons cru que nous devions exposer quelques figures des premiers qui ont été représentés, afin qu'on put voir le point d'où l'on est parti, et sentir les additions et corrections qui ont été faites depuis. Géber, qu'on appelle le roi, à cause de son habileté en Chimie, est l'auteur le plus ancien qui les ait figurés, et qui y ait joint une description assez claire, et meilleure que ses figures qui n'y répondent pas trop exactement. Géber vivait au VIIe siècle, selon Boerhaave ; au VIIIe selon Moréri, et au IXe selon son continuateur, qui parle d'après l'abbé Lenglet, fondé sur la même autorité que Boerhaave. Quoi qu'il en sait, il est très-certain que Géber est fort ancien, et se trouve cité dans Albert le grand et Arnaud de Villeneuve, qu'il n'a point cités. Avant cet artiste, l'ignorance et la mauvaise foi s'étaient toujours enveloppées du voîle de l'emblème et de l'énigme, même pour les plus petites choses, comme cela est encore arrivé depuis, et même de notre temps. Tout auteur qui écrivait des choses inintelligibles, était un homme respectable, précisément parce qu'on ne l'entendait point. Aujourd'hui la raison a repris le dessus ; et tout homme qui voudrait ramener ces temps précieux où l'on ne parlait ni n'écrivait pour se faire entendre, et où la crédulité était la dupe du jargon mystérieux, ferait croire qu'il aurait de bonnes raisons pour en user de la sorte. Si Géber est tombé dans cet inconvénient quant aux opérations, au-moins a-t-il pu être de quelqu'utilité par la description de ses ustensiles. Il avertit que le fourneau qu'il décrit et destine aux aludels, doit être plus ou moins épais et plus ou moins grand, selon la grandeur des vaisseaux qu'on y veut mettre, et l'intensité du feu auquel on veut les exposer. On élève des parois circulaires à la hauteur de 9 pouces, en pratiquant une porte pour le bois, dont la partie inférieure soit de niveau avec le sol ou piédestal du fourneau. On assujettit pour lors une barre de fer grosse comme le doigt, pour soutenir l'aludel. On donne à-peu-près autant de hauteur au fourneau au-dessus qu'au-dessous de la barre de fer ; et au milieu de la partie du fourneau supérieure à cette barre, qu'on peut appeler le second corps, ou l'ouvroir du fourneau, on fait quatre trous ou regitres, dont la grandeur doit être déterminée par celle du fourneau, et la vivacité nécessaire au feu. On couvre le tout d'un dôme un peu convexe, et ayant un grand trou au milieu pour recevoir l'aludel, quoique Géber et sa figure n'en disent rien. Entre ces vaisseaux et les parois du fourneau, il doit y avoir un espace de deux doigts, plus ou moins, selon le degré de chaleur nécessaire. On lutte l'aludel au fourneau. Ces deux vaisseaux ont la proportion qu'ils doivent avoir entre eux et avec le feu qu'on y tient, quand celui-ci circule bien autour de l'aludel, que la matière qui y est contenue reçoit le degré de feu convenable, et que la flamme et la fumée sortent bien par les regitres. Si ces conditions ne se trouvent pas remplies, on diminue l'aludel, ou on agrandit le fourneau : et on augmente ou retrécit les regitres jusqu'à ce qu'on ait trouvé le juste point qu'on désire.

Pour peu que l'on compare ce fourneau avec ceux qui ont été faits depuis, on y trouvera, je pense, assez de ressemblance pour conjecturer qu'il n'a pas peu servi à contribuer à leur perfection et aux avantages qu'on en retire. Au-moins voit-on que l'auteur a bien entendu la mécanique du feu.

Le fourneau de la fig. 66. est non-seulement un fourneau sublimatoire, mais encore un fourneau où la matière est exposée à feu nud. Nous en parlerons en particulier dans la section des fourneaux à distiller par le côté, pour ne pas le séparer d'un autre de cette espèce.

La fig. 98. représente encore un fourneau tiré de Géber, p. 72. Il est destiné aux aludels dans lesquels on doit faire la sublimation de la marcassite, etc. Il dit que ce fourneau doit donner un degré de feu capable de fondre le cuivre ou l'argent, si cela est nécessaire. Le haut doit être fermé avec un disque percé pour recevoir la cucurbite, qu'on lutte à ce disque, pour empêcher que le feu ne vienne à échauffer l'aludel, et à fondre la matière sublimée. On fait seulement quatre petits regitres dans ce disque, avec autant de bouchons. C'est par-là qu'on met le charbon dans le fourneau. On en fait encore quatre autres dans les parois du fourneau, pour mettre également les charbons ; sans compter qu'il en faut encore 7 ou 8 capables d'admettre le petit doigt. Ces derniers doivent être toujours ouverts, pour que le fourneau puisse se délivrer de ses fumosités. Ils seront pratiqués dans l'endroit où le fourneau se joint avec son couvercle.

Le fourneau qui donne un grand degré de feu, est celui dont les parois sont élevés de 3 pieds, ayant dans leur milieu une grille de terre capable de soutenir le grand feu, percée de quantité de petits trous en entonnoir renversé, afin que la cendre et les charbons puissent tomber aisément, et laisser une libre entrée à l'air. C'est cette liberté qu'a l'air d'entrer en grande quantité par ces trous inférieurs, qui excite un grand feu dans ce fourneau. Ainsi il n'est que de s'exercer sur ce point de vue, et l'on en viendra à son but.

Il est aisé de voir que Géber vient de décrire un fourneau de fusion, quoiqu'il l'applique à ses aludels ; en suivant sa description, on doit réussir presque comme aujourd'hui à en construire un, excepté qu'on y a ajouté quelque chose ; ainsi je ne vois pas pour quelle raison Glauber a eu tant de peine à trouver le sien, que nous décrirons à la section des fourneaux de fusion. On remarquera en passant qu'il semble que Géber n'ait pas dessiné lui-même ses figures, quoiqu'il en parle comme les ayant données. C'est une faute qu'on ne peut attribuer qu'au dessinateur ou graveur qui nous les a transmises.

L'édition de Géber dont nous avons tiré ce que nous avons donné de lui, est celle de Dantzic, faite en 1682, d'après un manuscrit du Vatican. C'est la meilleure ; elle est très-rare, comme l'a fort bien remarqué M. l'abbé Lenglet dans sa bibliothèque hermétique. Mais on la trouve imprimée en latin dans le vol. I. de la bibliothèque chimique curieuse de Manget, avec les planches fidèlement copiées. Elle se trouve aussi, mais traduite en français, dans le tom. I. de la philosophie chim. donnée par Salmon, en 4 vol. in-12.

Enfin le quatrième ou dernier fourneau sublimatoire est celui de la fig. 167. Il ne se trouve dans nos Planches que pour l'élégance de l'appareil ; car ce n'est au fond qu'un pur fourneau de décoction ou à capsule, qui a un rebord à sa partie supérieure, et une barre pour soutenir un aludel. Cet appareil est de Manget, Pl. IX. qui l'a pris dans la Pl. III. de Charas, ou bien Pl. II. de le Fêvre, ou Charas l'a pris. Mais nous nous apercevons qu'il ne suffit pas de donner des proportions pour les fourneaux ; nous allons donc exposer la composition et la manière de construire ceux qui sont en terre, avant que de passer à notre seconde section.

Les Fournalistes de Paris font leurs fourneaux avec de l'argille qu'ils prennent à Gentilli ou à Vanvres, et avec les taissons des pots de grais élevés et cylindriques, où l'on apporte à Paris le beurre salé de Bretagne et de Normandie ; ils font tremper pendant une nuit leur argille divisée en grosses pelotes, après quoi ils la corroyent et la pétrissent avec les pieds, pour en écarter les corps étrangers, comme les pierres, les pyrites, etc. d'un autre côté, ils pilent les pots de grais et les passent par différents cribles pour en avoir des morceaux de même grosseur à-peu-près. La partie la plus fine est réservée pour les creusets, mouffles, scorificatoires, etc. on emploie pour les fourneaux celle qui est réduite en morceaux gros comme du millet, de chénevis, des lentilles, relativement à l'épaisseur de leurs murailles, quoiqu'une exactitude scrupuleuse ne soit pas nécessaire à cet égard. On met environ égales parties de ce ciment et d'argille préparée ; on les mêle bien intimement : on garde cette composition à la cave pour la tenir fraiche jusqu'à ce qu'on la mette en œuvre.

Pour construire un fourneau, soit donné, par exemple, celui de la fig. 2. l'artiste prend un morceau de sa composition qu'il juge assez volumineuse pour faire le sol du cendrier ; il la pétrit et en fait une plaque qu'il pose sur une pierre plate saupoudrée de cendres criblées, et portée horizontalement sur un billot de hauteur convenable. Quand il lui a eu donné la même épaisseur par-tout, et qu'il l'a eu arrondie à vue d'oeil, il échancre ses bords en les pinçant, afin que l'argille qu'il doit ajouter s'y incorpore : pour élever la paroi, il prend un autre morceau de sa pâte, le pétrit et le réduit en un cylindre long de trois ou quatre pieds, suivant la quantité de cette pâte ; il en applique une extrémité sur la circonférence du sol, la presse avec le pouce, et continue ainsi d'en imprimer les empreintes sur toute la longueur du cylindre qu'il applique au sol. Ainsi la grosseur de ce cylindre est déterminée par l'épaisseur qu'on veut donner aux parois du fourneau ; non qu'il doive avoir un diamètre égal à cette épaisseur, car il en faut retrancher ce qu'il peut acquérir étant aplati. A ce premier cylindre en succede un second, et ainsi de suite, jusqu'à ce que les parois soient élevées jusqu'au foyer. Alors l'artiste donne le premier poli à son ouvrage, en ôtant l'excédent par-dehors avec un doigt qu'il passe à-peu-près perpendiculairement de bas-en-haut ; il passe presque de la sorte sa main par-dedans, pour voir s'il n'a rien à retrancher ; car si son fourneau est trop épais, il passe un couteau tout-autour pour emporter l'excédent, et il polit ensuite avec la main, puis avec une petite palette ou pelle de bois qu'il trempe de-temps-en-temps dans l'eau : on conçoit bien que cette palette doit être convexe d'un côté. Pour lors il enlève son ouvrage de dessus la pierre pour le placer sur la planche sur laquelle il doit sécher.

S'il veut faire le sol du foyer en terre, et qu'il veuille que ce sol soit fixe, il fait une plaque semblable à la première, mais convexe supérieurement, et en couvre les parois ; il l'échancre aussi en la pinçant, et il continue d'appliquer ses cylindres.

Mais s'il ne veut faire qu'un rebord, ou même que trois ou quatre mentonnets pour soutenir une grille de terre ou de fer ; il se contente d'appliquer en-dedans et à la hauteur requise, un cylindre qui parcoure la circonférence du cendrier une fois ou deux, suivant la saillie qu'il veut faire, ou bien il ne l'applique que dans trois ou quatre endroits, mais à diverses reprises, pour faire la saillie nécessaire ; après quoi il continue comme auparavant, d'élever ses parais.

Quand le fourneau est fini, il examine s'il est bien rond, s'il n'est point plus panché d'un côté que d'un autre, ou si un bord n'est point plus haut que l'autre : quant à la rondeur, elle se donne aisément en pressant avec les deux mains le grand diamètre du fourneau. On ajoute au bord qui n'est pas assez élevé, ou l'on diminue celui qui l'est trop ; mais on ne corrige l'obliquitté qu'en pressant avec les deux mains placées vis-à-vis l'une de l'autre, le côté qui rentre dans le fourneau, pour lui donner plus d'étendue et l'en faire sortir, et en frappant doucement avec la main le côté opposé qu'on doit refouler : on le polit ensuite comme avant, premièrement avec les mains, et ensuite avec la palette, avec laquelle on le frappe d'abord également de toutes parts pour remplir les petits interstices qui peuvent y être restés. On fait tout-de-suite la mentonnière, les poignées du fourneau, et celles des parties qui doivent devenir les portes ; après quoi on les met sécher à l'ombre.

Telle est la pratique de l'artiste à qui un long exercice a donné le coup-d'oeil qui supplée aux instruments nécessaires à arrondir un fourneau, ou qui se soucie peu d'une exactitude géométrique qui d'ailleurs ne subsiste pas toujours. Il n'en est pas de même de ceux qui commencent et qui veulent travailler avec soin : les uns ont pour guide un petit bâton poli planté perpendiculairement dans la planche sur laquelle ils construisent leur fourneau tout-autour de cet axe, et ils l'arrondissent en le mesurant avec une ficelle qui joue aisément autour de l'axe passé dans son anneau ; d'autres se servent d'une fausse équerre qu'ils ouvrent à angle droit, par exemple, quand c'est un fourneau cylindrique, et à angle aigu quand c'en est un en cone renversé qu'ils veulent faire.

Quand il a essuyé sa plus grande humidité, on le frappe et on le polit encore ; on coupe avec un couteau mince les portes en embrasure, on ouvre les regitres, et on expose de nouveau le tout à l'air jusqu'à parfaite dessication ; après quoi on fait cuire.

Le four qui sert à cet usage est une cavité de cinq pieds de profondeur sur quatre de large, cinq de haut dans le fond, et cinq et demi ou plus à l'embouchure ; il est fait en-dehors d'une maçonnerie capable de soutenir la poussée de la voute, et revêtu en-dedans de briques de Bourgogne placées sur deux rangs, excepté à la voute. Du fond à l'embouchure règnent des deux côtés deux petits murs de brique, épais et hauts de neuf pouces, appliqués aux murs du fourneau : sa porte est marquée par deux petits pieds droits, de même largeur et épaisseur que les deux petits murs d'appui : ils s'étendent de bas en-haut.

Quand on veut ranger les fourneaux dans ce four, on met pour les soutenir, des barres de fer sur les petits murs d'appui, et on les place debout ou couchés ; peu importe : c'est le sens qui permet qu'on en mette davantage, qui décide. Le four étant plein, on ferme le devant avec de grands carreaux ou de grandes pierres plates qui s'étendent d'un côté à l'autre de la porte, avec toutefois la précaution de le laisser ouvert en bas à la hauteur des petits murs d'appui, pour le passage du bois, et en haut d'environ autant dans toute la largeur de la porte, pour le passage de la flamme : on remplit de menu bois tout l'espace compris entre les petits murs, et on entretient le feu de la sorte pendant huit heures ; on consume environ le quart d'une voie de bois. La cheminée de ce four est placée comme celle du four du boulanger, avec cette exception que la sablière en est presque aussi basse que la partie inférieure de l'ouverture qu'on a laissée pour le passage de la flamme.

L'endroit du four ou le feu est le plus vif, c'est la partie de la voute qui est près du passage de la flamme : le fournaliste met cependant au milieu les grosses pièces qu'il a à cuire, sans-doute parce qu'elles sont environnées d'une plus grande masse de feu, et non pas parce que le feu y est plus actif. L'ouverture supérieure ne devrait avoir que la moitié ou les deux tiers tout-au-plus de l'inférieure. Si l'on examine ce qui se trouve dans la cheminée, on voit à la paroi antérieure quantité de cendres bien calcinées ; et à celle qui est mitoyenne avec le four, un noir de fumée fort sec ; ce qui indique que la matière fuligineuse est mêlée en petite quantité avec beaucoup de cendres.

L'argille de Gentilli est d'un bleuâtre assez foncé ; ce qui, joint aux pyrites qui s'y trouvent fréquemment, peut faire soupçonner qu'elle contient du fer ; aussi est-il inutîle d'y ajouter de la limaille, que quelques artistes regardent comme nécessaire à la composition de leur pâte. Toute argille s'amollit dans l'eau et y devient une pâte ténace et bien liée ; elle se durcit quand on la seche à l'air : si on ne l'expose qu'à un feu médiocre, d'abord elle devient dure ; mais si on augmente son activité, elle se convertit en un verre demi-opaque, d'un verd tirant sur le roux. C'est pour cette raison que les fournalistes ne donnent un feu ni trop long ni trop vif ; car leur argille est d'autant mieux disposée à prendre la vitrification, qu'elle est mêlée d'une matière (les pots de grais) qui la favorise. On sait par expérience qu'un corps vitrifié veut être échauffé et refroidi lentement ; mais on ne peut pas observer ces précautions à l'égard des fourneaux, dans lesquels il faut pouvoir mettre le feu tout-d'un-coup, de même qu'il faut être le maître de l'en retirer de la sorte : ils ne doivent donc pas être vitrifiés ; il y a plus, c'est qu'il faut qu'ils soient assez poreux pour soutenir constamment sans altération les vicissitudes de chaleur et de refroidissement qu'exigent l'opération ou la commodité de l'artiste. On n'a pas encore trouvé de matière qui remplit mieux ces vues que l'argille mêlée d'un corps étranger tel que le grais. L'argille a assez de consistance pour se lier malgré les obstacles qu'elle trouve ; mais en même temps ses parties ne s'unissent pas assez fortement pour former un corps qui ait les inconvénients du verre : d'ailleurs le grais, quoique susceptible de se vitrifier avec cette terre, demande pourtant un feu assez vif ; en sorte que celui qu'on donne aux fourneaux ne produit tout-au-plus qu'un petit commencement de liaison.

On trouve différentes compositions pour les fourneaux dans les auteurs, qui mériteraient de trouver place ici, parce que ce sont des faits qui peuvent être utiles et qui sont dû. à une longue expérience : mais comme le même lut est applicable à différentes circonstances qui ne se trouvent point dans cet article, nous en ferons un article particulier auquel nous renvoyons. Voyez LUT et VAISSEAU.

Des fourneaux à distiller par le côté. Tels sont ceux de nos fig. 1. 3. 7. 67. 69. 73. 145. et 161. celui de la fig. 1. est composé de quatre corps ; il est cylindrique, haut de deux pieds cinq pouces, et large de 14 pouces en-dehors : son épaisseur est de deux par-tout, excepté vers le trou de son dôme où il s'amincit ; son cendrier est haut de six pouces, en comptant l'épaisseur du sol ; le soupirail est large de quatre et haut de trois. Le second corps ou le foyer est haut de neuf pouces ; dans sa partie inférieure, on laisse en le construisant trois ou quatre pitons pour soutenir la grille ; c'est pour cela que le second corps est plus élévé que le premier. La porte du foyer est haute et large de quatre ou cinq pouces, et demi-circulaire à sa partie supérieure. L'inférieure est élevée de deux pouces au-dessus de la grille : à la partie supérieure de ce corps, on pratique quatre échancrures pour loger les barres de fer qui doivent soutenir la cornue, ainsi que nous l'avons dit en parlant de la fig. 74. au commencement de cet article. Ces barres de fer ont communément huit ou dix lignes d'équarrissage. Le troisième corps ou l'ouvroir est un cercle cylindrique, dont le bord supérieur est échancré pour le passage du cou de la retorte : on fait toujours cette échancrure demi-circulaire plus grande qu'il ne faut, parce qu'on bouche ce que la cornue laisse d'espace avec un lut convenable. Ce corps est haut de sept pouces ; le dôme ou quatrième corps a la même hauteur ; il est, ainsi que le précédent, échancré demi-circulairement, avec cette différence que son échancrure est moins profonde que celle de l'ouvroir, quoique aussi large ; enfin ces deux échancrures font à elles deux une ovale dont le grand diamètre est perpendiculaire : on sent bien que cela était nécessaire pour loger commodément le cou de la retorte qui est incliné pour l'ordinaire. Au milieu du dôme est un trou circulaire de deux pouces de diamètre ; on le garnit quelquefois de terre qu'on termine en une naissance de tuyau, auquel on en ajuste un autre : ce fourneau se met, ainsi que la plupart des précédents, sur un dez de hauteur convenable. Nous avons déjà parlé de ses portes de soupirail et de foyer, en décrivant la fig. 2. Nous avons ajouté une troisième pièce de terre tout-près de ces deux premières ; elle est marquée q : elle sert à boucher l'échancrure du cou de la cornue, du-moins celle de l'ouvroir ; il en faut une seconde pour le dôme, de la grandeur réquise : chacune de ces pièces s'emboite dans son lieu au moyen d'une petite languette de chaque côté qui entre dans une petite rainure pratiquée dans l'échancrure, et elles ont outre cela la languette et la rainure qui se trouvent dans tous les corps de ce fourneau et des autres qui sont de même faits en terre. La grille est d'un fer de huit ou dix lignes d'équarrissage, et laisse entre elle et les parois du fourneau un espace d'un bon doigt, comme nous l'avons déjà dit. Ce fourneau est portatif, comme tous ceux que nous avons décrits, à l'exception de ceux qui sont en briques : on l'appelle aussi fourneau de réverbere ; qualité qui lui est commune avec d'autres bien différents ; il ressemble beaucoup à l'athanor de la Roquetaillade, que nous décrirons en son lieu. Il est le même que celui que Béguin a donné, p. 148. car celui-ci a 4 corps cylindriques et un seul trou au milieu du dôme : il a pourtant cette différence qui le met au-dessus du nôtre ; c'est que son foyer est elliptique par le bas, en sorte que le diamètre de la grille n'a que la moitié de celui du fourneau. La cornue y est encore appuyée sur une tourte ; Béguin le chauffait avec le bois de chêne ou de cornouiller, et s'en servait aux mêmes usages qu'on l'emploie aujourd'hui, c'est-à-dire à distiller les acides minéraux. Au reste, il ne faut pas confondre ce fourneau avec celui qu'il qualifie, pag. 80. servant à toutes les opérations de Chimie ; nous en toucherons deux mots à la section des polychrestes. Nous avons figuré le couvercle dont on se sert quelquefois pour fermer en partie la naissance du tuyau et ralentir le feu. On voit dans le laboratoire chimique de Kunckel, un fourneau de distillation latérale dont le foyer est elliptique par le bas, comme ceux de Charas, Béguin, etc. mais la grille dans ces auteurs, est à-proportion plus grande que dans Teichmeyer.

Le fourneau de distillation latérale marqué fig. 3. diffère du précédent en ce qu'il est fixe, construit en briques et d'une seule pièce, quant à ce qui répond aux trois corps de la fig. 1. Il se trouve dans la Pl. II. de Glaser deux fois et dans la Pl. I. de Lémery, qui l'a mieux décrit qu'il ne l'a représenté ; il y a toute apparence que lui et Manget le tiennent de Charas, au-moins ces deux derniers se ressemblent-ils parfaitement ; mais ils diffèrent de celui de Glaser en ce qu'ils ont la figure elliptique de celui de Béguin. Voyez Manget, Pl. XI. Charas, Pl. V. et Rhenanus, Pl. X. et XIII. Il est destiné aux mêmes opérations que le précédent, avec cette différence qu'on y fait celles qui demandent un feu violent et longtemps continué, comme le phosphore, par ex. on lui donne des dimensions qui varient à-proportion de la quantité de matière qu'on y veut traiter. Cependant comme il faut y placer une grosse cornue, on agit en conséquence, et on le fait assez grand pour qu'il puisse la contenir : on commencera donc par élever des murs de briques à double rang, qu'on liera bien selon les moyens que nous dirons dans la suite ; on lui donne de l'épaisseur afin que la chaleur s'y puisse conserver plus longtemps. On fera le cendrier haut d'un pied pour le moins, rond ou carré, peu importe ; on en tournera la porte, qu'on fera haute et large d'un demi-pié, du côté que vient l'air, s'il est possible : on posera dessus des barres de fer épaisses de cinq ou six lignes et larges de deux ou trois pouces, pour soutenir les briques qu'on posera ensuite. Quelquefois au lieu de commencer tout-d'un-coup à élever son cendrier, on avance les deux premiers rangs de briques ou de grais, pour plus d'élégance, comme nous l'avons marqué dans notre fig. mais c'est un ornement qui ne sert qu'à embarrasser, et il n'en doit être guère question en Chimie. Ce que nous disons ici doit également s'entendre de tous les autres fourneaux massifs, comme de la forge, par exemple, pour laquelle on est encore dans l'usage d'entrer dans cette minutie. Après avoir élevé le cendrier de la hauteur convenable, et avant que d'élever le foyer, on pose deux grosses barres de fer, d'un pouce d'équarrissage au-moins, qu'on scelle bien dans les murs : on ne les met pas en losange pour l'ordinaire, quoique ce n'en serait que mieux d'observer cette position à leur égard. Ces barres sont destinées à soutenir la grille qu'on peut faire d'une seule pièce, comme celles dont nous avons parlé jusqu'ici, mais plus grosse et plus large, ou bien qui est brisée, c'est-à-dire composée de plusieurs morceaux de barres de fer qui ne tiennent point les uns aux autres : en ce cas on les lutte à chaque extrémité, pour les tenir en losange sur les deux premières. Ces deux pratiques valent mieux que si on scellait dans le mur du fourneau les différentes barres qui constituent la grille par leur réunion, parce qu'on n'est plus le maître de les changer quand elles sont usées, ou de les nettoyer quand elles s'obstruent. On élève ensuite le foyer du même diamétre que le cendrier, mais en rond ; et si on ne lui donne pas cette figure avec les briques, on en remplit les coins d'un lut ordinaire, comme Charas le conseille pour presque tous ses fourneaux. Le foyer sera haut de huit ou neuf pouces environ, depuis la grille jusqu'à deux barres de fer qu'on scellera dans le fourneau pour soutenir la cornue : ces barres seront encore de dix lignes ou d'un pouce d'équarrissage : au-dessus de ces barres, on élevera encore ce fourneau à la hauteur nécessaire, pour qu'il puisse cacher la retorte, d'un pied, par exemple, parce qu'il s'agit ici d'un vaisseau qui a quelquefois ce diamétre ; mais on laisse à côté une échancrure pour passer son cou, comme nous l'avons dit de la fig. 1. telle est la construction du massif du fourneau. On couvre ce massif d'une pièce de terre mobîle pour réverbérer la flamme ; c'est un dôme comme celui du fourneau de la fig. 1. qui a un trou dans son milieu avec une naissance du tuyau à laquelle on en adapte quelquefois plusieurs pieds. Ordinairement on ne fait point d'échancrure à ce dôme, parce que celle du corps du fourneau est assez profonde ; et quand on veut l'employer à d'autres usages, comme par ex. au bain de sable, avant que d'y mettre une capsule, on a une pièce qui remplit l'échancrure, comme nous l'avons dit de la fig. 1. Ce dôme et cette pièce sont faits de la même pâte que les autres fourneaux en terre. Il est bon d'observer que comme ce fourneau est sujet à se fendre en conséquence de la violence du feu, on l'arme vis-à-vis de la grille et à sa partie supérieure, sous l'échancrure, de barres de fer larges d'environ deux pouces, et épaisses de cinq ou six lignes, pliées comme il convient. On les scelle dans le mur auprès duquel le fourneau est construit ; ou elles font le tour, s'il est isolé. On rentre quelquefois les briques qui doivent en être couvertes, afin que les barres soient au même niveau que le fourneau : il n'y a nul inconvénient à se permettre cette élégance, quand la chose est possible du côté de l'exécution.

La porte du foyer est de même largeur que celle du cendrier, mais moins élevée ; on les ferme l'une et l'autre avec des briques taillées exprès.

Charas voulait que la figure du foyer fût ronde non-seulement, mais encore elliptique par le bas, comme nous l'avons dit du fourneau de Béguin, pour épargner, disait-il, le charbon, et pour que la chaleur put se porter vers le haut. Boerhaave aussi fait son fourneau elliptique : mais Charas après avoir si bien dit, veut que les quatre regitres qu'il fait à son fourneau, dans le cas où il l'emploie au bain de sable, commencent dès la grille. Ces quatre trous, quand on les fait, doivent être placés de façon qu'ils puissent être recouverts par le dôme, sans quoi ils diminueraient la violence du feu. Pag. 77.

On multiplie, pour ainsi dire, ce fourneau, en le construisant assez grand pour qu'il puisse contenir plusieurs cornues ; on en voit un Pl. I. de Lémery, qui en contient six ; il ressemble assez à la galere des distillateurs de Paris : Charas en a représenté un à quatre cornues, qui a passé dans la Pl. IX. de Manget ; mais nous allons décrire le plus grand de tous, c'est celui des distillateurs de Paris.

On l'appelle la galere (voyez notre fig. 7.) c'est un grand fourneau long, construit en briques qu'on joint ensemble à plusieurs rangs. On en élève tout simplement sur le pavé deux murs parallèles de la longueur que demande la quantité de vaisseaux qu'on veut y placer, et à telle distance l'un de l'autre, que deux de ces vaisseaux puissent y aller de front : à un pied de haut, on scelle dans le mur du fourneau des barres de fer plates, de distance en distance, pour soutenir les vaisseaux : on l'élève encore de façon qu'il puisse cacher ces vaisseaux, et on fait le mur en talud extérieurement. La porte est de la largeur du fourneau ; elle est couverte par un ou deux rangs de briques qui font une petite élévation par-dessus, qui se trouve précisément de niveau avec la partie supérieure des vaisseaux. A l'extrémité opposée est un tuyau de poêle de cinq ou six pouces de diamètre. Quand on veut distiller, on met un double rang de cuines tout le long du fourneau ; on les ajuste à d'autres qui servent de récipient et qui portent sur le mur en talud. Nous proscrirons cette mauvaise pratique en parlant des vaisseaux. On couvre tous les vaisseaux qui sont dans le fourneau avec des tuiles et des carreaux dont on bouche les intervalles avec de la terre à four, et l'on allume le feu qu'on fait de bois ; tel est l'appareil avec lequel les distillateurs font l'eau-forte à Paris.

La fig. 67. est non-seulement un appareil de distillation latérale, mais encore d'une distillation où l'on expose le corps à distiller au feu nud, sans l'intermède d'aucun vaisseau : nous avons promis, en parlant des fourneaux à aludels, de parler de la fig. 66. en même temps ; c'est aussi ce que nous allons faire, parce qu'elle est dans le même genre, quoiqu'elle soit pour la sublimation. Voyez Glauber, furn. nov. philosoph. page 1.

La grandeur du fourneau, fig. 67. n'est point fixée, on peut lui donner celle qu'on voudra ; cela dépend encore de la quantité de matière qu'on a à traiter ; peu importe aussi qu'il soit rond ou carré, en briques, ou en terre. Sur un pan de diamètre, il doit en avoir quatre de haut ; un depuis le sol jusqu'à la grille, un depuis la grille jusqu'au trou par où l'on jette le charbon, et les deux autres depuis ce trou jusqu'à celui qui est destiné au canal enfilé par les vapeurs, qui doit sortir au-moins d'un pan hors de la paroi, pour empêcher que les récipiens ne s'échauffent par la proximité du fourneau. Ce canal doit avoir à son extrémité le tiers du diamètre du fourneau, sans compter que la partie qui y est scellée doit être plus large. Il faut que la grille soit telle qu'on ait la facilité de l'ôter au besoin pour la nettoyer ; car comme elle est aisément obstruée dans la distillation des sels qui se fondent à-travers les charbons, il arrive que la communication de l'air avec le feu est interceptée, et conséquemment la distillation interrompue. Pour plus grande commodité, on peut la faire de quatre ou cinq barres de fer isolées, soutenues par deux autres ; il y aura entre elles un travers de doigt de distance, et elles sortiront du fourneau, afin qu'on ait la facilité de les en tirer avec une tenaille dans le cas où il faudra les nettoyer ; ensuite de quoi on les remet en place : il est même à-propos que le fourneau soit ouvert vis-à-vis la grille, pour plus de facilité.

Ce fourneau doit être couvert d'une pierre ou d'un carreau de terre ayant un trou au milieu, avec une rainure tout-autour pour recevoir ce couvercle et l'appliquer plus juste, à l'aide du sable ou des cendres qu'on y mettra : par ce moyen, le cercle bouchera, et empêchera mieux la dissipation des esprits des corps qu'on jettera dans le fourneau ; ainsi ils seront forcés de passer totalement dans les récipiens : nous ne parlerons point ici de ces vaisseaux, c'est à leur article qu'ils doivent être renvoyés, et qu'on doit voir ce que nous avons à dire du manuel général de la distillation dans ce fourneau. Après ce que nous avons dit de celui qui sert pour la distillation latérale, nous n'avons que peu de choses à ajouter au sujet de celui qui sert à la sublimation : le trou du premier, qu'on ferme d'un couvercle, est dans la fig. 66. fermé par le bas du premier aludel qui y entre ; son dôme n'a point de regitre, les aludels en servent.

Nous avons déjà parlé de la figure 69 : nous l'avons mise au nombre des fourneaux de décoctions ; mais elle peut encore trouver sa place ici en qualité de fourneau servant aux distillations latérales ; comme il parait par le vaisseau dont elle est chargée. Nous ne nous étendrons sur cet article qu'en parlant des vaisseaux.

La figure 73. n'est au fond que la répétition de la première, qu'on a mise ici plus pour l'appareil que pour l'utilité : nous en donnerons cependant les proportions, parce qu'elles sont un peu différentes. La figure en question a 22 pouces de haut, sur huit de diamètre en-bas, et neuf et demi dans le haut, à la partie la plus large de son dôme, hors d'œuvre. Son épaisseur est d'un pouce et demi. Le cendrier a cinq pouces de haut, y compris l'épaisseur du sol ; le soupirail est large de trois pouces, et haut de deux et demi. Le foyer est haut de huit pouces, et a sa bouche arquée, ses pitons et sa grille, comme nous l'avons détaillé en parlant de la figure première : cette bouche est haute et large de trois pouces. L'ouvroir a son échancrure pour la cornue ; il est haut de quatre pouces et demi. Le dôme est de même hauteur, et a un trou ou regitre au milieu d'un pouce de diamètre, qu'on diminue à volonté au moyen d'un couvercle. Les portes ont leur fermeture à l'ordinaire.

La figure 145. est dans Libavius, pag. 322. qui l'a prise dans Evonymus, pag. 90. C'est un fourneau en briques carré, pour distiller les acides minéraux à feu nud : on y voit deux matras posés horizontalement, dont l'un est le vaisseau distillatoire, et l'autre le récipient. Les barres sont courbées, pour s'ajuster au vaisseau qui passe par un trou, comme nous l'avons déjà Ve fig. 69. tirée de Glauber. Le dôme a un trou ou regitre au milieu, comme il convient ; mais on voit encore quatre regitres inutiles et nuisibles aux quatre coins. On a isolé exprès une des barres pour en donner l'idée. La même courbure se trouve aussi dans Dornaeus. Nous n'en dirons pas davantage sur ce fourneau ; une plus longue explication serait inutile. On en peut voir la figure.

La figure 161. est encore un fourneau dont nous avons parlé à la section des fourneaux à distiller par ascension, et dans ses subdivisions en fourneaux à capsule, à aludel ; et elle n'est en effet autre chose que les ustensiles représentés figure 12, 13 et 14. L'appareil, qui est de Glauber, en fait la différence : cet auteur n'y met pourtant qu'un gros ballon ; mais on sait depuis longtemps qu'on en a enfilé des centaines ensemble. Ainsi l'on voit de plus en plus qu'un même fourneau peut être employé à différentes opérations. C'est en partie pour cette raison que nous en avons présenté quelques-uns sous différents aspects. Nous examinerons pourtant, en parlant des polychrestes, jusqu'à quel point cela peut être vrai.

On fait encore des distillations latérales dans les fourneaux dont nous parlerons dans la suite ; comme aussi plusieurs des opérations auxquelles sont employés ceux de notre première section, nous en parlerons à-mesure que l'occasion s'en présentera.

Des fourneaux à distiller par descension. Comme ces sortes de fourneaux ne sont pas d'un grand usage, et que d'ailleurs on y peut suppléer par d'autres appareils, nous n'en avons donné qu'un seul exemple : il est tiré de la pharmacopée italienne de M. de Sgobbis. On le construit en briques, de la hauteur nécessaire pour contenir les vaisseaux. On ouvre de plusieurs côtés le cendrier, qui n'en est point un au fond, et on ne lui laisse même la plupart du temps que quatre piliers, qui font les quatre coins : ensuite on place une grille à un pied de haut environ du sol ou pavé. Cette grille a un trou au milieu assez grand pour admettre le cou du matras descensoire ; il est même bon d'observer qu'on n'y en met que pour employer ce fourneau à un autre usage ; car dans le cas du descensoire il ne faut qu'un disque de terre cuite, au milieu duquel on introduit le vaisseau descensoire : ainsi on en met donc un de terre ou de tôle sur la grille. On place le vaisseau, et on allume le feu tout-autour : cet appareil ne peut donner qu'un feu doux. On pourrait toutefois l'augmenter si l'on voulait ; ce serait de conserver la grille, et de garantir le récipient par un entonnoir métallique dont il serait couvert ; le sommet en serait près de la grille, et la base environnerait le ventre du récipient. Nous avons ouvert tout le devant de ce fourneau, afin qu'en y vit la situation des vaisseaux ; et nous y avons ajouté un dôme en cas de besoin. On peut voir la figure 161 ; on y trouve le corps inférieur d'un fourneau descensoire soutenant un tonneau.

Des fourneaux à calciner. Ils peuvent encore être divisés en propres, et en impropres, ou qui sont particulièrement destinés aux opérations en question, et qui peuvent y servir, quoiqu'ils soient construits pour d'autres. Dans ce second rang, on peut placer tous ceux dont nous avons parlé jusqu'ici et dont nous parlerons dans la suite, excepté les bains-marie propres, comme celui de la fig. 11. etc. Dans le premier nous compterons celui qui est marqué figures 15. et 16. nous en avons donné la coupe 15, avec l'élévation 16, pour en faciliter l'intelligence. Ce fourneau est construit en briques, est long de trois pieds et demi, et haut de deux pieds quatre pouces ; il est large de deux pieds en-devant. Si on l'élève davantage, ce n'en est que mieux ; il est plus commode, mais cela ne change rien à sa construction : comme il serait un peu bas, nous supposerons que nous allons le construire sur un foyer élevé d'un pied environ pour y manœuvrer aisément. On commence par asseoir un lit de briques de six pouces d'épaisseur ; on élève ensuite deux murs à chaque côté de quatre pouces d'épais : le mur de derrière est de même épaisseur. La porte de ce foyer est large de 10 pouces et demi, et haute de sept en-dehors, réduite à un peu moins en-dedans : quand les murs ont cette hauteur, on met des barres de fer plates dessus en-travers, depuis la porte jusqu'à près de quatre pouces du fond ; on les couvre d'une couche ou deux de briques, en laissant une ouverture au fond, comme nous l'avons marqué en d dans la coupe 15 : on continue d'élever les murs à la hauteur de six pouces, après quoi on les couvre de barres de fer, qui soutiennent les briques du dessus. La languette qui est entre le foyer a et l'ouvroir b, est en tout épaisse de trois pouces. La couche de briques qui couvre l'ouvroir est épaisse de six pouces ; le mur de devant est épais de quatre pouces, comme les autres ; la porte de l'ouvroir est de même grandeur, et un peu embrasée comme celle du foyer. Entre le mur du devant et la couverture du fourneau, règne dans toute la largeur du fourneau un espace, comme par derrière, pour la languette ou plancher, mais qui n'est que de deux pouces de large, qui se termine en une petite cheminée, c, épaisse de huit pouces et large de 14, hors d'œuvre. La longueur intérieure de la cheminée et sa hauteur sont de huit pouces. A un mur latéral, on voit à l'ouvroir b deux portes marquées d, d, fig. 16. en embrasure, hautes de cinq pouces, et larges de quatre en-dehors. Ces quatre portes doivent avoir leurs fermetures de briques cuites, et presque épaisses comme le mur dont elles ferment le trou. Ce fourneau sert à la calcination de la potasse, des cendres qu'on veut lessiver, et des métaux qu'on veut réduire en safran, en chaux : c'est celui de Glaser simplifié, c'est-à-dire qui n'a qu'un plancher, au lieu que Glaser en met deux ; en sorte que le feu sort à la partie postérieure, qu'il y a trois portes en-devant, point de cheminée, et quatre portes latérales ; Glaser dit qu'on y ajoute un quatrième, et même un sixième étage et au-delà. Nous verrons dans la suite où cette idée peut avoir été prise, ou du-moins quelque chose qui lui ressemble. Au reste le fourneau de Kunckel, aussi destiné à calciner la potasse, qu'on trouve Pl. XIII. pag. 311. de sa verrerie, ne diffère du nôtre qu'en ce qu'il est rond, plus grand, et a un trou au milieu. Sa figure approche assez de celle d'un four de boulanger.

On peut encore mettre au nombre des fourneaux de calcination ceux d'essais ; parce qu'on n'essaye presque point de mines qu'on ne calcine, et cela dans ce fourneau sous la moufle.

Des fourneaux de fusion. Cette section sera un peu plus nombreuse que les deux précédentes, et par le nombre de ses individus, et par leur importance. Nous y ferons entrer les figures 6, 8-10, 25, 2635, 36, 37, n°. 1. et 37, n°. 2. 38, 39-44, et 71, sans compter que nous toucherons quelques mots d'une figure, qui est trop commune pour avoir eu place dans nos Planches, qui d'ailleurs s'y trouve assez bien sous un autre nom, et qu'on peut encore voir dans d'autres Planches. Je veux parler de la forge ou fourneau à soufflet.

Le fourneau de la figure 6. est dû à Glauber, du-moins c'est lui qui en a tout l'honneur, puisqu'il lui a donné son nom. Nous verrons dans la suite ce qui peut l'y avoir conduit sans peine. C'est dans Boerhaave que nous avons pris celui que nous donnons. Nous y avons conservé le tuyau de Glauber, comme étant plus propre à en recevoir un autre, que la cheminée de Boerhaave, et nous avons mis à côté le dôme de ceux qui ont été faits d'après celui de Glauber, au lieu de la voute qu'il a jointe ainsi que Boerhaave, à son fourneau.

Tout le monde sait qu'un fourneau de fusion sert à fondre les métaux ; son nom le porte. Celui de tous qui est le plus en usage, est celui dont il s'agit : on le voit dans Glauber, part. IV. de ses fourneaux. Sur le sol ou pavé du laboratoire, on commence par élever un massif de pierres ou de briques constituant le cendrier du fourneau, à la hauteur de 3 pieds, et d'un pied de diamètre dans œuvre ; on lui donne cette hauteur, afin que la bouche du feu soit à portée des mains de l'artiste, et on laisse ce cendrier ouvert en-devant à la hauteur d'un pied, qui est plus que suffisante. On pose la grille ; elle doit être faite de barres de fer qui aient presque un pouce d'équarrissage, et qui soient éloignées d'à-peu-près autant ; elle a le même diamètre que le cendrier. Par-dessus on élève encore le fourneau cylindriquement comme d'abord, à la hauteur de six pouces ; après quoi on lui donne intérieurement la forme d'un cone parabolique, dont l'axe est de huit pouces, l'ordonnée inférieure de six ; en sorte que le côté droit est de quatre pouces et demi, et le foyer est à un pouce un huitième du sommet. Quand cette figure parabolique a été élevée à la hauteur de six pouces au-dessus de sa base cylindrique, on construit par-dessus une cheminée cylindrique de trois pouces de diamètre et de deux pieds de haut, si l'on veut ; mais nous aimons mieux, pour plus de commodité, faire au-dessus de ce trou de trois pouces de diamètre, une naissance de tuyau de même diamètre, à laquelle on en peut ajouter un tant long qu'on voudra. A la partie antérieure du foyer à deux pouces au-dessus de la grille, il faut ouvrir une bouche de feu de cinq pouces de large, de six de haut, et arquée comme un arc de cercle de 12 pouces de diamètre. Un pouce au-dessus de cette porte, on fera un trou conique d'un pouce de diamètre, dont la direction soit telle qu'on puisse voir dans le creuset, pour examiner si la matière est fondue ou non. Il faut un bouchon de même dimension pour le fermer. Les pierres ou les briques qu'on emploie à ce fourneau, doivent être capables de résister au feu. Ses murailles sont épaisses de cinq pouces, bien maçonnées, et couvertes intérieurement de chaux bien polie. Ce fourneau donne un feu d'une vivacité prodigieuse, quand il est une fois échauffé, principalement au milieu de son axe, et dans sa hauteur supérieure. C'est ce que les Géomètres sont en état de démontrer. On fermera la bouche du feu avec une porte de fer, qui remplira exactement la feuillure dans laquelle elle sera logée. Le sol du cendrier sera fait d'une plaque de fer, afin qu'on puisse recueillir le métal qui pourrait tomber d'un creuset cassé, ou qui fluerait.

Quoique nous ayons préféré la figure et la description de Boerhaave à toutes les autres, nous ne laisserons pas d'ajouter des traits de la description de Glauber, qui ne se trouvent point dans le premier.

Il dit que son fourneau n'a point de grandeur fixe, et qu'elle est déterminée par la quantité de la matière qu'on veut examiner, car il l'appelle son fourneau d'essai. Dans la supposition où on lui donnera un pied de diamètre, on y pourra placer un creuset contenant deux ou trois livres de matière. Sous la grille, qu'on peut faire brisée à l'imitation de celle du fourneau de la fig. 67, on place à l'un des côtés un regitre fait d'une lame de tôle, pour gouverner le feu. On fait la porte du foyer de six pouces de large, et d'un pied de haut ou à peu de chose près, pour introduire les creusets, les charbons et les autres ustensiles nécessaires, et cette hauteur est souvent indispensable : à la bonne-heure que la porte en soit de deux pièces pour contenir le charbon, dont il me parait autrement fort difficîle de mettre une suffisante quantité dans le fourneau. Cette porte doit fermer si exactement, que l'air n'y puisse entrer, car il faut qu'il vienne tout du cendrier. Par-dessus cette porte on élève une voute parabolique à la hauteur de huit pouces, terminée par un trou circulaire, dont le diamètre soit le tiers du fourneau. A ce trou l'on ajuste un tuyau de tôle de cinq, six, et même de douze pieds de haut, quand on veut un feu de la dernière violence. On peut, si l'on veut, construire au-dessus de la voute, deux ou trois chambres garnies de leurs portes : c'est ainsi qu'on peut mettre à profit la flamme qui y entrera, pour diverses opérations, selon le degré de chaleur de chacune. L'inférieure peut mettre en fonte les sels, les minéraux et les métaux qui prennent aisément cet état ; elle peut servir aux calcinations, cémentations, réverbérations, à cuire et vitrifier les creusets et autres vaisseaux de terre, aux essais, grillages, etc. La seconde servira aux torréfactions des minéraux, et aux calcinations du plomb, de l'étain, du fer, du cuivre, du tartre, des os et des cendres du bois. La troisième peut être employée à la dessication des vaisseaux de terre qu'on veut préparer à la cuisson. On peut encore se servir de ces chambres pour quantité d'autres usages, qu'il serait trop long de détailler. Si l'on veut augmenter la vivacité du feu, on peut, au lieu d'ajuster une trompe au soupirail, bâtir ce fourneau dans une chambre haute, dont la cheminée ait pour contre-cœur la languette de la cheminée d'une chambre inférieure. On fera une ouverture à cette languette, qui percera dans le cendrier du fourneau, pour y dériver l'air de la chambre inférieure. Il faudra mettre un regitre à ce trou pour gouverner le feu, et avoir soin de tenir la chambre inférieure ouverte : par ce mécanisme le feu sera plus violent que s'il était animé par les soufflets, et il le sera même au point, qu'on pourrait voir le fourneau se fondre lui-même, s'il n'était d'une terre bien fine ; car il arrive souvent que les meilleurs creusets coulent : de-là la nécessité du regitre, ou plutôt d'avoir de meilleurs ustensiles.

Avec un pareil fourneau l'on n'est point obligé de se fatiguer à souffler, et l'on n'a point à craindre de vapeurs empoisonnées, ni de chaleur excessive : toute la fumée s'échappe par le haut, et cela est si vrai que quand on ouvre la bouche du foyer, il tire une vapeur étrangère à la distance d'une coudée ; et ainsi il n'y a rien à craindre de la part du feu, puisqu'il se concentre en lui-même. Il faut cependant avoir soin de garantir la main qui tient la tenaille avec un gant mouillé fait de linge en trois doubles, et d'avoir un écran dans l'autre pour ménager ses yeux. Ces précautions indiquent tous les inconvénients qui sont à craindre.

L'écran dont il est ici question a été décrit en son lieu. Nous en avons donné plusieurs espèces, et nous ajouterons ici que celui qui a un verre se trouve en usage chez les Emailleurs, et est représenté Pl. XII. fig. 37. de la mécanique du feu de Gauger ; un peu de différence dans la figure ne fait rien au fond.

Quand on se sert d'un fourneau à soufflet, il faut un second qui en tire la brimbale ; d'ailleurs le vent venant à frapper le creuset, il le casse, surtout quand le charbon manque vis-à-vis ; ce qui est fort sujet à arriver, parce qu'il se consume plus vite en cet endroit. Le creuset peut encore se renverser ; et comme il faut qu'il soit tout couvert de charbons, ce qui n'est pas nécessaire dans le fourneau à vent, il peut y tomber quelques matières étrangères.

Glauber met un regitre à son fourneau, sous la grille immédiatement ; mais il est mal placé, il doit retenir les cendres. Il vaut mieux le mettre dans le tuyau, comme dans la fig. 8-10.

Ce fourneau n'est pas rendu dans Glaser ; il n'a pas le sens commun dans Manget, qui en a pris la figure et la description de Barner. On le voit pag. 75. de celui-ci, et Pl. VI. de celui-là. Celui de Lémery en est une mauvaise imitation, comme on peut le voir dans sa Pl. I. d'ailleurs il est percé tout-autour.

Au reste quoique nous n'approuvions pas les trous dans l'ouvroir, et qu'il y a toute apparence même qu'ils doivent être proscrits, nous croyons malgré cela qu'on n'a pas encore bien examiné jusqu'à quel point ils sont nuisibles, ou seraient peut-être utiles ; la raison en est que celui de Glauber attire l'air, et qu'on ne sait pas encore ce que l'air, attiré avec la force dont il parle, apporte de changement au feu. Il est bien vrai que quand on ouvre la grande porte de celui de Glaser, le feu diminue de vivacité : mais pourquoi celui-ci n'attire-t-il pas comme l'autre ? Ce que j'improuve dans le fourneau à vent de Glaser, c'est que son dôme soit fait d'une autre pièce que son foyer. Il est vrai que ce dôme revient en quelque sorte à cette voute parabolique que Boerhaave et Glauber demandent ; mais c'est une pièce séparée qui ne peut pas s'échauffer aussi-bien que si elle était unie au foyer, comme dans ces deux derniers auteurs. Je sens bien que Glaser en a usé ainsi pour avoir un fourneau de réverbere : mais nous examinerons si l'on peut avoir beaucoup de fourneaux en un seul.

Il parait que Glauber est le premier qui ait introduit les tuyaux dans les fourneaux de la Chimie, car on n'en trouve point que je sache dans les chimistes qui ont écrit avant lui. On n'en voit point dans Libavius, etc. cependant il pouvait y en avoir de son temps, et à plus forte raison de celui de Glauber, comme nous le dirons plus bas. Il est vrai qu'ils existaient dans l'économie domestique, où Glauber en a pu faire la conquête.

Il n'en est pas de même des figures elliptique ou parabolique, que nous mettons ensemble parce qu'on les emploie aussi souvent l'une que l'autre, et que l'une a nécessairement dû mener à l'autre presque dans le même instant. On voit, p. 107. de Libavius un fourneau de fusion elliptique, qu'il a pris dans Ercker ; et pag. 252 du même auteur, un fourneau de fusion qui ressemble à notre fig. 1. excepté qu'il n'a point de bouche du feu, et qu'il a trois regitres dans son dôme. Le dedans en diffère encore, en ce que la grille n'est qu'au-haut du deuxième corps ; ce qui n'est pas un défaut ; et en ce que sur les bords du troisième il y a deux barres de cuivre en croix, qui se fendent en deux à l'endroit où elles doivent se croiser, pour former un trou rond destiné à soutenir les creusets.

Le fourneau marqué fig. 8-10. diffère de celui de fusion de Glauber, par quelques accessoires ; il est fixe, construit en briques, haut de trois pieds et demi, et large de 16 pouces, tant sur le devant que sur les côtés. On élève le cendrier de 10 pouces et demi jusqu'à la grille, et on y laisse une porte de six pouces de large, qu'on discontinue à la hauteur de sept pouces : peu importe que l'intérieur du cendrier qui a neuf pouces de large, soit rond ou carré ; mais le foyer est rond, et a neuf pouces de diamètre. La grille est faite de barres de fer de 10 lignes d'équarrissage, posées en losange, et est de la grandeur requise. Il faut observer les mêmes précautions que pour les grilles déjà mentionnées. Au-dessus de la grille, dont l'épaisseur est comptée pour un pouce, on élève le foyer à la hauteur de treize ; on continue encore à l'élever, mais on laisse une porte en-devant de sept pouces de large, et haute de dix et demi : cette porte est bordée par un cadre de fer, dont l'usage est de conserver les briques et de joindre mieux avec la porte brisée dont nous parlerons. Il est encore bon d'observer que dès le bas de la porte on diminue tout d'un coup l'épaisseur du fourneau, de celle de son mur antérieur, ou de trois pouces et demi : outre cela, le cadre qui en fait les jambages n'est pas perpendiculaire, mais incliné, de façon que sa partie supérieure est de deux pouces de plus en-arrière que l'inférieure ; ainsi, avec le secours de la figure que nous avons donnée, et en se la représentant de profil, on peut avoir une idée de l'effet que cela doit faire. Au-dessus de la porte, la paroi antérieure du fourneau s'approche insensiblement de la postérieure, et les deux latérales l'une de l'autre, de façon que le diamètre du fourneau, qui n'était plus pour lors que de cinq ou six pouces, se trouve réduit à un rectangle de trois pouces et demi de large d'arrière en-avant, et à quatre pouces et demi de long d'un côté à l'autre, à quatre pouces et demi au-dessus de la porte : c'est dans cet endroit qu'on a mis un regitre. Il est fait d'une brique un peu plus large que le trou qu'elle couvre, et assez longue pour sortir encore quand le trou est tout fermé : cette brique est logée dans une coulisse ; et elle est censée avoir un pouce ou un pouce et demi d'épais. Le fourneau se termine à deux pouces au-dessus, par une ouverture semblable aux dimensions qu'il a à l'endroit de son regitre : on y ajuste un petit dôme, qui n'est guère que la naissance d'un tuyau qu'on met de la longueur qu'on veut. C'est ce que nous avons marqué fig. 10. La porte est brisée, c'est-à-dire qu'elle est faite de plusieurs pièces. C'est la fig. 9. Elle est composée de trois barres de fer plates, épaisses de six lignes, longues de neuf pouces, et assez larges pour faire à elles trois la hauteur d'un pied environ quand elles sont posées : elles ont un crampon au milieu, pour avoir la facilité de les prendre.

L'avantage de ce fourneau consiste en ce qu'on peut, au moyen de la construction de sa porte, regarder dans le creuset ; car dans celui de Glauber, on aurait de la peine à y voir une petite quantité de matière. Il est d'ailleurs construit selon les bons principes. Il n'y a à y ajouter que ce qu'on peut ajouter à tous les autres. Je veux parler d'une trompe au soupirail. Nous l'avons fait dessiner d'après nature dans le laboratoire de M. Rouelle.

La fig. 25. est un grand fourneau de fusion en briques, dont le devant est ouvert, pour avoir la facilité de puiser dans les grands creusets, qui sont chargés de quelques quintaux de métal. Quand on n'a besoin que d'un feu médiocre pour fondre une grande quantité de métal à-la-fais, on construit avec des pierres des grands fourneaux quadrangulaires, dont les plus considérables ont leurs côtés larges de 4 pieds ; en sorte qu'on y peut placer des creusets d'ipsen, capables de contenir ce qu'on a à fondre. Pendant la fusion on en tient le devant fermé avec des briques, qu'on ôte quand on veut puiser le métal. Par-là on évite les efforts nécessaires à les élever, et le danger qui en résulterait. Le sol du cendrier est en glacis, et incliné en-avant, pour déterminer le métal qui peut tomber des creusets fêlés, à couler dans un creux fait devant la porte du même cendrier. Il est bon de remarquer que cette fig. qui est la 17. de la Pl. IV. de M. Cramer, doit être élevée, et se terminer en une pyramide comme un fourneau d'essai.

Nous comprendrons la forge, qui est un fourneau de fusion, au nombre des ustensiles nécessaires dans un laboratoire philosophique, quoique nous n'en ayons pas représenté, et cela par les raisons que nous avons alléguées. Mais nous croyons devoir avertir que la casse en doit être plus grande que trop petite.

La casse est cette boite ou foyer rond ou carré, d'un pied de diamètre, et profond d'à-peu-près autant, où les charbons allumés sont contenus autour du creuset, et reçoivent le vent d'un soufflet double qui vient par-dessous ; elle est carrée pour l'ordinaire. On donne encore ce nom à la boite ou foyer d'un fourneau de fusion à vent.

On fait communément la casse plus grande qu'il ne le faut pour l'ordinaire, parce qu'on la diminue avec des carreaux qu'on fait faire au fournaliste. On en ferme le dessus avec un carreau qu'on leur fait faire aussi, qui a dans le milieu un gros bouton servant de poignée, pour réverbérer la flamme et augmenter la vivacité du feu. Le soufflet en doit être fait comme celui du maréchal, à deux vents, et de cuir épais, afin qu'on puisse forcer le vent à volonté. Ceux qui ressemblent aux soufflets d'orgue, ont bien le vent plus égal, mais il est plus faible ; et il ne s'agit pas ici d'une grande précision. C'est la coutume de diviser en deux le tuyau descendant du soufflet à une certaine hauteur. On suppose que le soufflet soit plus élevé que la forge. Cette division se fait par un sommier à-peu-près semblable à celui de l'orgue ; au moyen duquel on donne à volonté le vent au tuyau de la casse, ou à un autre tuyau qui Ve s'ouvrir sur le foyer de la forge, pour servir au petit fourneau de fusion de la fig. 37. n°. 1. par exemple, mais quelques artistes y renoncent, par la raison que ce regitre est sujet à se déjeter, en conséquence de la chaleur voisine, et perd le vent du soufflet. Je crois cependant que s'il était fait de bois de vauge ou de Hollande, la chose n'arriverait pas. En voici la construction : le tuyau du soufflet porte son vent dans une petite chambre du sommier, que nous nommerons la laie. La paroi opposée à celle qui reçoit le tuyau du soufflet, est composée de trois petites planches couchées les unes sur les autres. Celle du milieu n'est pas si large que les deux autres, mais elle est plus longue ; c'est celle qu'on appelle proprement regitre. Elle n'a qu'un trou, et les deux autres en ont deux. Ce qui lui manque de largeur à chaque côté, est rempli par des liteaux ajoutés à l'une des deux autres, ou bien pris sur leur épaisseur. Les trous de la planchette extérieure reçoivent les deux tuyaux qui vont à la casse et au foyer de la forge. Ces deux tuyaux sont bien étoupés comme ceux des porte-vents, pour boucher juste. Les trous de la planchette intérieure reçoivent le vent de la laie, et le communiquent au tuyau, vis-à-vis duquel se trouve le trou du regitre. Ce trou se rencontre justement vis-à-vis l'un des deux tuyaux au moyen de deux arêtes qu'il a à chaque extrémité. On conçoit que les deux planches entre lesquelles il glisse, sont garnies de peau blanche pour empêcher la dissipation du vent.

Au reste, si l'on ne veut pas se donner la peine de construire ce sommier, ou si l'on craint d'en manquer le succès, on peut y suppléer par un autre moyen, qui n'est pas non plus sans inconvénient ; c'est d'avoir un boyau de cuir qui établisse la communication entre le tuyau du soufflet et le tuyau de la casse, qui sont en droite ligne, ou qui doivent y être. Ce boyau de cuir sera attaché par ses deux bouts à deux cercles de fer-blanc fort, dont le supérieur recevra la partie du tuyau venant du soufflet, et l'inférieur sera reçu dans celle qui Ve à la casse : en sorte que quand on voudra appliquer le soufflet de la forge au petit fourneau de fusion placé sur son foyer ou en-dehors, on retirera la partie inférieure du boyau du tuyau allant à la casse, pour l'introduire dans le tuyau postiche représenté avec ce petit fourneau de fusion fig. 37. n°. 1. Ce boyau est sujet à dessécher, et à tirer à lui l'un de ses anneaux quand il est trop juste, ou bien à rapprocher ses parois quand il est trop long. Il est bon d'observer que ces sortes de tuyaux ne veulent pas être recourbés à angles droits. La vivacité du souffle en est amortie. Ainsi, au lieu d'un angle droit, il en faut faire deux ou trois obtus, ce qui approchera d'une courbe.

Le soufflet doit être à deux vents, sans quoi il serait bien-tôt brulé. Les tuyaux de cuivre valent mieux que ceux de fer-blanc. On tient toujours le soufflet tendu quand on ne s'en sert pas, pour empêcher le cuir de se couper, et on le frotte trois ou quatre fois l'année d'huîle de baleine.

On trouve une forge semblable à celle qui convient dans un laboratoire philosophique dans la Pl. X. de Manget, qui la tient de la Pl. XI. de Charas, ou de la page 6. de Rhenanus. Nous avons indiqué les corrections qu'il y faudrait faire.

Il faut encore dans un laboratoire philosophique, un soufflet comme celui dont nous venons de parler, monté sur un châssis, afin de l'appliquer aux fourneaux où il est nécessaire. Ce châssis doit être construit de façon qu'on puisse monter le soufflet au point nécessaire. Nous n'en avons point représenté dans nos Planches ; la chose se comprend assez aisément. Ceux qui voudront voir quelque détail là-dessus, peuvent consulter les docimastiques de Cramer et de Schlutter, ou le laboratoire portatif de Beccher.

Au lieu d'un soufflet, on peut faire usage d'une éolipyle. C'est une sphère creuse de cuivre. On la fait de 16 pouces de diamètre à-peu-près. On y soude un tuyau gros comme celui d'un soufflet, dans la direction d'une tangente ; on la remplit d'eau jusqu'aux deux tiers : on la fait bouillir, et elle souffle vivement le feu vers lequel on tourne son tuyau. Faute de cet instrument, on peut employer tout vaisseau qui en approchera, c'est-à-dire où l'on pourra faire bouillir de l'eau, et qui aura un bec à-peu-près dans le même gout. Cependant le soufflet double mérite la préférence, parce qu'on est mieux le maître de gouverner le feu quand on s'en sert, sans compter qu'il en est de l'éolipyle comme du chalumeau dans lequel on souffle. Il sort de l'un et de l'autre des gouttes d'eau qui peuvent troubler l'opération. Elle est malgré cela en usage depuis plus de cent ans pour les fourneaux et pour les lampes de l'émailleur, comme on peut le voir dans un livre anglais intitulé the art of distillation un peu postérieur à Glauber, qu'il a copié, et dans Libavius, page 107. Vitruve l'a employée pour empêcher la fumée.

La fig. 37. n°. 1. représente le petit fourneau de fusion fait en terre des fournalistes de Paris. Il a 13 pouces de haut et 11 pouces de diamètre hors d'œuvre. Il est épais de 2 pouces, et d'une seule pièce. Il a deux anses pour la facilité du transport. La porte du soupirail est large de trois pouces, et haute de deux. On la tient fermée et lutée quand on se sert du gros soufflet. A côté est un trou pour recevoir le tuyau qui en vient. La grille est forte, à trois pouces du sol, claire, et bien détachée des parois sur lesquelles elle porte au moyen de trois mentonnets. Quand on emploie ce fourneau pour la fusion, on le couvre du dôme de Glaser, que nous avons représenté avec le fourneau de Glauber, fig. 6. On en anime le feu au moyen du soufflet monté sur un châssis, ou bien avec celui de la forge, par les moyens que nous avons indiqués en en parlant ; c'est pour cela qu'il a été représenté avec le tuyau qui doit communiquer avec son gros soufflet double. Ce fourneau est trait pour trait une petite forge portative ronde.

On trouve encore chez les mêmes fournalistes d'autres fourneaux portatifs à vent ; ce sont aussi des petites tours ou cylindres creux sans fond, qui se posent sur un trépié où l'on a mis une grille de fer. Ces espèces de tours, qui sont quelquefois renflées vers le milieu, sont percées tout-autour de plusieurs trous : ainsi ce fourneau prend l'air par-dessous et par les côtés. On met dessus un dôme qui finit en-haut par un tuyau d'un demi-pié, qu'on peut allonger à volonté. A ce dôme il y a une porte par laquelle on introduit ce qui est nécessaire à l'opération. Cette notice est de M. Hellot ; on ne l'a mise ici que pour en dissuader l'usage, comme cet illustre artiste, qui a reconnu qu'ils étaient peu propres à la fusion, et conséquemment aux essais, pag. 90. Elle répond et à la description du petit fourneau de fusion qu'on voit Pl. I. de Lémery, et à celle du dôme de Glaser, dont nous avons dit qu'on appliquait l'usage au petit fourneau fig. 37. n°. 1. qu'on peut voir avec la fig. 6. dans nos Planches.

La fig. 36. représente un petit fourneau carré portatif pour les essais. Il a 7 ou 8 pouces d'ouverture, et 8 ou 9 de hauteur. On s'en sert à la place de la forge dont nous avons parlé. On y fait faire à un pouce au-dessus de son fond, deux trous opposés, ou vis-à-vis l'un de l'autre, dans lesquels on ajuste avec du lut deux goulots de bouteilles de grès pour servir de tuyere, et diriger le vent de deux soufflets, quand on a besoin d'un feu extrême, sur la partie de la tute où le bouton doit se rassembler. Dans le troisième côté de ce fourneau carré, M. Hellot a fait faire une porte qui lui sert, lorsqu'un essai est fini, à retirer la braise, pour pouvoir y placer le creuset d'un nouvel essai sans être exposé à la grande chaleur de cette braise, qu'il est difficîle d'enlever entièrement sans cette porte. Si l'on a à faire un essai de mine douce, comme le sont presque toutes les mines de plomb, on approche d'une seule tuyere le soufflet à deux vents, qu'on suppose monté pour cet usage sur un châssis de fer mobile. Si c'est une mine de cuivre jointe à une roche de fusion difficile, à laquelle il faille un feu plus fort que pour la mine de plomb, on couvre le fourneau d'un couvercle aussi carré, pour concentrer la flamme du charbon et la réverbérer sur le creuset. Dans l'un et dans l'autre cas, il faut boucher exactement d'un bouchon de terre enduit de lut, la tuyere qui est vis-à-vis celle par laquelle on introduit le vent du soufflet double. Enfin lorsqu'il s'agit de fondre une mine de fer, ou pour connaître la quantité de fer qu'elle peut rendre dans les travaux en grand, ou pour scorifier le fer avec du plomb, et introduire dans celui-ci l'argent et l'or que celui-là peut contenir, on se sert de deux soufflets qu'on applique aux deux tuyeres opposées. L'un est le soufflet double dont on vient de parler, l'autre peut être absolument un soufflet simple. Mais il faut que le canal de fer qu'on ajuste à son tuyau soit long de 2 pieds au-moins ; sans quoi il pomperait la flamme jusque dans son intérieur, et se brulerait, pag. 88. Mais il vaut mieux que les deux soufflets soient chacun à deux ames. Cela peut se trouver dans un laboratoire où il y a une forge et un soufflet monté sur un châssis. En mettant le fourneau sur l'aire de la forge, il n'est plus question que d'avoir un canal un peu recourbé, qui aille du soufflet mobîle à la seconde tuyere du fourneau.

La figure 26. avec laquelle doivent aller les suivantes jusqu'à la 35e inclusivement, est un fourneau de fusion de tôle, varié pour la facilité de l'appliquer à différentes opérations. C'est le second de ceux qui sont nécessaires à l'essayeur, celui de coupelle étant le premier. On le fait de tôle ; on peut le construire à l'aide du moule elliptique, fig. 35. Ainsi on fera une ellipse creuse, de façon que ses deux foyers soient éloignés l'un de l'autre de douze pouces, et les ordonnées soient de cinq pouces. On retranchera ensuite les deux extrémités comprises entre le foyer et le sommet de la figure : en sorte que celle qui en résultera, sera notre 26. 1°. On fera près de son bord inférieur quatre trous de 8 lignes de diamètre, deux desquels seront vis-à-vis des deux autres c c. 2°. Les bords inférieur et supérieur de cette cavité elliptique seront garnis chacun d'un anneau de tôle d, large de près d'un pouce et demi, que l'on attachera en-dedans. On placera aussi intérieurement à 3 ou 4 pouces les uns des autres, de petits crochets de fer de la longueur de 6 lignes, pour tenir conjointement avec les anneaux, le garni qu'on y appliquera. Voyez cet article. Reste maintenant pour que le corps du fourneau soit achevé, à lui attacher supérieurement en-dehors deux anses de fer pour avoir la commodité de le transporter. 3°. Quant au dôme, fig. 27. on pourra lui donner la figure des parties retranchées de l'ellipse, fig. 35. a. On y fera une porte haute de 4 pouces, large de 5 par le bas, et de 4 par le haut, à laquelle on appliquera une fermeture convenable roulant sur des gonds, fig. 34. Sa surface interne sera garnie d'un rebord qui remplira exactement l'ouverture de la porte ; la largeur doit en être telle, que la saillie qu'il formera intérieurement, soit au niveau de la surface du lut, au soutien duquel il est destiné. L'aire qu'il renferme sera aussi munie de quelques crochets de fer. L'on garantira également de l'action du feu le dôme, fig. 27. dont on garnira le dedans de terre, après y avoir enfoncé des crochets de fer et ajusté un anneau de tôle pour le soutenir, comme nous l'avons prescrit pour le corps du fourneau fig. 26. On attachera en-dehors à la partie supérieure du dôme, fig. 27. deux crochets de fer longs de six pouces, pour le prendre avec des tenailles quand il sera chaud. On pratiquera à son sommet une ouverture circulaire de 3 pouces de diamètre, à laquelle on attachera un bout de tuyau long de quelques pouces, presque cylindrique, destiné à être reçu dans un autre tuyau de tôle, semblable à celui de la fig. 38. Ce fourneau exige encore deux pié-d'estaux mobiles : l'un pour recevoir les cendres et l'air qui doit animer le feu, l'autre destiné aux réductions et fusions des métaux qui se font en stratifiant avec les charbons les mines métalliques ou les chaux, ou scories métalliques. Le premier, fig. 28. se fait de tôle et est cylindrique. On laisse la partie supérieure ouverte, mais on ferme l'inférieure avec une plaque de même matière. On lui donne cinq pouces de haut, et un diamètre tel qu'il puisse recevoir un demi-pouce du corps du fourneau fig. 26. On est aussi obligé pour cet effet d'attacher à la partie intérieure de ce piédestal, à un demi-pouce de son bord supérieur, un cercle de fer large d'un demi-pouce, pour soutenir le corps du fourneau. Ce piédestal ou cendrier doit avoir un soupirail haut et large de 4 pouces, qui se ferme exactement avec une porte roulant sur deux gonds, afin de pouvoir à son aide augmenter ou diminuer le jeu de l'air, et conséquemment gouverner le feu. Au côté gauche de cette porte, environ à la moitié de la hauteur du cendrier, on fera un trou rond d'un pouce et demi de diamètre, pour recevoir la tuyere d'un soufflet, en cas que les circonstances l'exigent. Le second cendrier, fig. 32. sera semblable au premier pour la figure, la matière et le diamètre ; mais il aura le double de hauteur. On y attachera pareillement à un demi-pouce au-dessus de son bord supérieur, un anneau semblable à celui du premier cendrier, et destiné aux mêmes usages. Immédiatement au-dessous de cet anneau, on fera une ouverture arquée par sa partie supérieure, large de trois pouces et haute de deux. Au côté gauche de celle-ci, en commençant également tout-près de l'anneau, on en fera une seconde large de deux pouces, et s'étendant en hauteur jusqu'à la moitié de celle du cendrier. Cette ouverture est destinée à recevoir le cone o, qui doit lui-même admettre une tuyere de soufflet. A droite de la première, à 3 pouces du sol du cendrier, on en fera une troisième circulaire, de deux pouces et demi de diamètre. On appliquera dans tout l'intérieur de ce cendrier, excepté au-dessus de l'anneau, un garni composé de terre glaise préparée et mêlée d'une bonne quantité de sable et de petites pierres, qui fassent l'office d'un mur. On fera au fond du même cendrier un bassin ou catin, dont la figure sera celle qu'on voit décrite par la ligne f g h.

Un bassin ou catin de reception est donc un accommodage qu'on fait dans un fourneau, ou par-dehors avec une matière appropriée à l'opération. Cette matière est ce qu'on appelle une brasque.

La brasque est de deux espèces ; il y a la pesante et la légère. La brasque pesante est composée d'argille séchée et de charbon pilé et tamisé, mêlés à parties égales. On humecte le tout jusqu'à ce qu'on puisse le manier sans qu'il s'attache aux mains. Si l'argille était trop grasse et trop compacte, et conséquemment se fendait aisément au feu, on en prendrait qui en eut déjà éprouvé l'action. On la pile, on la tamise, et on en ajoute une moitié ou un tiers à celle qui n'a pas encore servi ; car toute argille n'est pas propre à recevoir une quantité de charbon pilé qui réponde à toutes les circonstances ; n'en admettant que difficilement un volume qui excède le double du sien. La différente nature des substances qu'on a à fondre, celle de l'argille qui doit être combinée avec le charbon, empêchent qu'on ne puisse établir de proportion entre ces deux dernières matières. La brasque légère n'est autre chose que du frésil ou poussier de charbon ; on en connait les propriétés. Quand on réduit une mine de fer dans le fourneau dont il s'agit, elle est d'une nécessité absolue. Sans elle l'opération manquerait. On met encore de la brasque légère entre la pierre de zinc et la chemise du fourneau, où l'on traite la mine de Rammelsberg. Voyez Schlutter, tome II. page 241. Planche XX.

Il y a une chose à remarquer à l'égard de la préparation et de l'usage de la brasque pesante : c'est que plus on y fait entrer d'argille, plus elle est solide et durable, et par conséquent plus difficilement rongée par les matières fondues qu'il reçoit. Mais aussi d'un autre côté, la quantité de scorie devient plus considérable ; il faut pour lui donner le degré de chaleur nécessaire, avant qu'on puisse mettre dans le fourneau les matières qu'on y doit fondre, un feu plus violent et plus longtemps continué. Lorsque c'est au contraire le charbon pilé qui excède la quantité de l'argille, le mélange est rongé plus aisément par les matières en fonte, surtout si elles sont arsénicales, sulphureuses, ou demi-métalliques ; pendant que le métal n'y déchait pas tant, que le bassin se seche plus aisément, et exige pour être échauffé moins de temps et de feu. Le meilleur parti qu'il y ait à prendre en pareille occurrence, c'est de prendre le juste milieu en-deçà et au-delà duquel on serait exposé aux inconvénients en question.

Il est bon d'observer en général que les effets du froid et de la chaleur ne se communiquent jamais avec plus de difficulté que quand ils ont à traverser des corps solides qui sont en même temps rares, caverneux, et spongieux. Ainsi on peut empêcher un corps fondu et qui a un grand degré de chaleur, de se refroidir promptement en le couvrant de charbon pilé ; et l'on ne peut pas soupçonner que cette chaleur soit entretenue par le feu que ce corps embrasé peut avoir mis au corps, puisqu'il faut pour cela le contact de l'air, et qu'on ne voit point d'ailleurs de cendres qui en aient été produites. Il s'ensuit que c'est autant pour conserver au métal l'état de fusion que l'état métallique par le phlogistique, qu'on mêle le poussier de charbon à l'argille. On peut se convaincre de la vérité de cette doctrine, si on examine la disposition des grands fourneaux des fonderies et des travaux qui s'y font ; comme aussi les inconvénients qui en naissent, et les remèdes qu'on y apporte.

Pour rendre notre bassin plus durable, on le saupoudrera avec des scories pilées, et on l'applanira avec une boule de laiton. On choisira celles qui ne peuvent plus donner rien de métallique par une réduction ordinaire, et qui ne contiennent ni soufre, ni arsénic. Si on n'en a point de semblables à celles qui doivent rester après la fusion qu'on est sur le point de faire, lesquelles sont préférables à toutes les autres, on leur substituera du verre pilé. On observera que le bassin en question doit avoir au milieu une petite cavité g, qui soit le segment d'une sphère creuse plus petite que celle qui aurait formé la cavité totale. Cette cavité exige les mêmes précautions que les grandes coupelles, c'est-à-dire qu'il en faut tasser la brasque avec un pilon à dents, l'applanir avec une boule de laiton, et y passer aussi une plane courbe.

Le fourneau fig. 26. est principalement destiné aux fusions : on les y peut faire avec des vaisseaux, ou même sans ce secours. Si l'on s'en sert, on mettra le corps du fourneau fig. 26. sur le premier piédestal, fig. 28. garni d'une porte roulant sur deux gonds ; l'on introduira deux barres de fer dans les trous c c de la partie inférieure de la fig. 26. pour soutenir la grille fig. 29. qu'on y fera entrer par l'ouverture supérieure. Au milieu de cette grille on placera une tourte ou culot de terre cuite, très-unie, et d'égale épaisseur ; on la fera rougir pour la sécher ; sans quoi l'on risquerait de faire fêler les vaisseaux, les grands surtout qu'elle soutiendrait, en conséquence des vapeurs humides qui s'en éleveraient pendant l'opération. Sa hauteur et son diamètre doivent excéder un peu celui du fond du creuset qu'on veut mettre dessus, qui n'est convenablement échauffé qu'à la faveur de cette élévation, et suffisamment stable que par la largeur en question. On met ensuite sur cette tourte le creuset contenant la matière à fondre ; on l'entoure de toutes parts de charbons qu'on range avec les précautions que nous avons indiquées, en parlant du fourneau de coupelle à l'article ESSAI. On gouverne le feu en ouvrant ou fermant la porte du cendrier, fig. 28. on l'augmente en mettant le dôme fig. 27. et ensuite le tuyau de la fig. 38. au moyen duquel on a un feu de fusion très-violent : mais l'on surpasse de beaucoup celui d'une fournaise ordinaire, si l'on introduit la tuyere d'un soufflet par le trou du cendrier, (fig. 28.) destiné à cet usage d ; après avoir préalablement lutté exactement avec une fine pâte d'argille les jointures du corps du fourneau et du cendrier, et même celles de la porte, qui ne peut jamais fermer assez bien, pour qu'on puisse s'en dispenser. L'avantage qu'on retire de cette méthode consiste en ce que les creusets ne sont pas si sujets à se briser, le vent du soufflet ne donnant pas directement dessus, et animant également le feu de tous côtes. Ainsi voilà une expérience qui contredit celle de Glauber ; mais il y a toute apparence que ce chimiste n'avait pas la précaution de faire passer de même le vent de son soufflet par un cendrier, comme il passe aussi dans la forge dont nous avons parlé. Cet appareil peut servir à examiner les pierres, lorsqu'on veut savoir quel sera sur elles l'effet d'un feu extrême. Nous ne nous croyons pourtant pas dispensés pour cela de donner le fourneau de M. Pott ; les effets en sont connus ; au lieu qu'il n'est pas de même aussi évident que celui de la fig. 26. donne les mêmes résultats.

Mais si l'on veut fondre à feu une des mines de cuivre, de plomb, d'étain, de fer, ou réduire leurs chaux ou scories, on se servira du cendrier, (fig. 32.) qui contient un catin ou accommodage, et l'on observera de déboucher d'abord avec un couteau les ouvertures e et d fermées par le garni, de retrancher proprement les bavures, et de remplir d'argille les petites cavités. On assujettira dans l'ouverture d, à gauche du soupirail, le cône de tôle o destiné à recevoir la tuyere du soufflet à deux ames. On parlera de la disposition que doivent avoir le cone et le soufflet, quand on traitera les opérations qui exigeront cet appareil. Le trou arqué c du cendrier sert à différents usages ; on connait par-là, au moyen d'un crochet de fer, si la matière contenue dans le bassin de réception est fondue ou non : par-là on a la facilité d'écarter les corps qui pourraient fermer le passage du vent du soufflet, comme aussi de retirer les scories qui s'y trouvent dans de certaines occasions. Il est à-propos de luter intérieurement la jointure qui résulte de l'assemblage du cendrier, et du corps du fourneau, afin de ne plus faire qu'une seule et même surface de ce qui était séparé avant. Avant que de mettre dans le fourneau la matière qu'on a à fondre, on y jette du charbon de la hauteur d'un pan ; on l'allume et on l'anime avec le soufflet, afin de rougir le bassin : faute de cette attention, ces scories se refroidissent et se congèlent avant que la matière réguline se soit précipitée et réunie. On fournit de nouveau charbon à mesure qu'il s'en consume ; le bassin étant convenablement échauffé, on met du charbon de nouveau, puis de la matière à fondre : mais il faut faire attention que la quantité n'en soit pas assez considérable pour empêcher l'action nécessaire du feu. On ne peut déterminer ici cette quantité, parce qu'il n'y a que l'expérience seule qui puisse l'apprendre. On met un nouveau lit de charbon, et par-dessus un lit de matière à fondre ; et ainsi successivement, en faisant plusieurs couches les unes sur les autres. Si la matière fondue n'était pas capable de soutenir un certain temps l'action du feu, ou que l'on en voulut fondre à-la-fais une plus grande quantité que le bassin n'en peut contenir ; on creuserait pour lors dans le lut du bassin un canal, qui, commençant dès sa petite cavité g, irait aboutir à l'ouverture circulaire (fig. 32. e) du cendrier ; et l'on recevrait dans un catin ou autre vaisseau garni d'un mélange d'argille et de charbon (fig. 33. i), la matière qui découlerait du premier. Nous avons déjà dit que ce ne serait qu'en décrivant les opérations qui se font par cet appareil, qu'on pourrait détailler les précautions qu'elles exigent par leurs variétés.

Le fourneau qui vient d'être décrit peut encore servir à d'autres opérations, soit en l'employant tel qu'il est, soit en y faisant des changements. Nous en parlerons encore dans la section des polychrestes ; il est tiré de Cramer, part. I. nous en allons décrire d'autres qui en approchent, et qui peuvent en avoir donné l'idée. Voyez celui de Beccher.

Le fourneau de fusion qui doit être placé ici, est celui que nous a donné Beccher dans son laboratoire portatif, que nous avons marqué fig. 71. mais comme cet auteur en a plus fait un polychreste que toute autre chose, et qu'il n'y a presque rien à en dire sur la fusion, que nous n'ayons déjà dit à l'occasion de celui qui précède, ou que nous ne soyons sur le point de dire au sujet de celui de M. Pott, dont nous allons parler, nous n'en ferons mention qu'à la section des polychrestes.

Mais je crois devoir parler avant d'un fourneau qui mérite attention par sa singularité : il est tiré du commerc. litterar. de Nuremberg, ann. 1741. p. 224. et Pl. II. fig. 8. On en parle comme d'un extrait des ouvrages de M. de Kramer de Vienne, qui s'exprime en ces termes : " Je serais fâché de passer sous silence que j'ai connu il n'y a pas longtemps une nouvelle espèce de fourneaux chimiques. Voyez nos Planches de Chimie, fig. 37. n°. 2. Ces sortes de fourneaux sont portatifs, et propres à toutes sortes d'opérations chimiques ; ils ne deviennent jamais rouges à l'extérieur, quoiqu'ils puissent donner intérieurement tous les degrés de chaleur : on peut même y pousser le feu au point d'y mettre en fonte toutes les terres connues ; ils ne font d'ailleurs aucun mal, pourvu qu'ils soient placés sous une cheminée. Ces propriétés sont particulièrement fondées sur trois conditions ; la matière dont on les fait, leur figure, et leur construction. On emploie pour les faire une espèce de pierre tendre et légère, qu'on appelle pierre ollaire ; il est bon d'observer qu'elle est plus légère que la pierre ollaire de Pline, à laquelle les Suisses donnent le nom latin d'appen-zellensis, ou de clarensis, que Scheuchzer a fait connaître dans sa description de la Suisse, et qu'elle est d'une nature bien différente. On en tire beaucoup à Hesse-Cassel, ou plutôt dans la province de Nassau, et dans la Thuringe, tout près d'Ilmeneau, où on l'emploie principalement à la construction des édifices, parce qu'on peut la tailler et la scier. Quand on veut l'employer au fourneau en question, on en façonne plusieurs segments circulaires de la manière que la figure du fourneau et la nécessité de les maçonner exactement ensemble, l'indiquent. D'ailleurs, on arme ces segments depuis le bas jusqu'au haut du fourneau de cercles de fer qui les empêchent de se désunir et de se briser. On en construit un fourneau cylindrique extérieurement à la hauteur d'environ trois pieds ; on le couvre d'un dôme fait de la même pierre, et dont la figure varie selon les différentes opérations ; la grille peut se placer à différentes hauteurs. Pour donner accès à l'air ; il n'est question que de déplacer un ou deux segments circulaires, suivant le degré de feu qu'on veut donner. La cavité de ce fourneau est telle, que dans quelque point qu'on le coupe, pourvu que ce soit horizontalement, on aura une ouverture parfaitement ronde : mais si on l'examine de-haut en-bas, on trouvera qu'il est formé par deux demi-ellipses ; au reste tout est dans l'exactitude. Je ne doute point qu'on ne puisse au moyen de ce fourneau séparer l'argent que je sais faire la moitié du plomb ; car cette opération ne se fait qu'au moyen d'une vitrification excitée par un feu de la dernière violence, et de vaisseaux qui y résistent, qu'on doit faire de cette pierre ".

On trouvera ce fourneau mieux figuré dans de Sgobbis, Pl. II. lettre Z, que dans nos Pl. parce que nous avons voulu prendre la figure trait pour trait, quoique la description la rectifie. Il n'est je crois pas besoin d'avertir que le dôme doit avoir un regitre au milieu, quoiqu'on n'en voie rien dans la figure.

La fig. 38. représente un fourneau de fusion qui produit des effets inconnus jusqu'ici : quoiqu'il soit imité de celui de Beccher, comme son auteur l'avance, nous avons cru que nous devions les prendre tous deux, parce qu'ils ont des différences considérables ; nous les examinerons dans la suite : c'est M. Pott qui parle.

Lorsque j'ai dit dans mon traité de Lithogéognosie, que le feu des cuisines et des fonderies n'était pas assez fort pour les opérations et les fusions que j'ai décrites dans le cours de cet ouvrage, j'ai aussi eu en vue les fourneaux des Apothicaires, et même ceux des verreries et des manufactures de porcelaine, dans lesquels on ne mettra pas en fusion, quoiqu'à l'aide d'un feu de plusieurs jours, les matières que je ferai fondre dans mon fourneau avec un feu de deux heures, comme les grenats orientaux, ceux de Bohème, et même les Hyacinthes.

Mon fourneau est à-peu-près le même que celui dont Beccher a donné la description dans son laboratoire portatif, page 32. il sera facîle d'en voir la différence. Le corps de mon fourneau A A est fait de lames de fer, afin qu'il soit en état de mieux résister à l'action du feu : le dedans est enduit d'argille blanche, crue, mêlée avec parties égales de la même argille, détrempée dans du sang de bœuf.

B B est aussi couvert de lames de fer, et enduit de même en-dedans ; il se met sur le corps A A, et contient la porte D, par laquelle on met le charbon, et le tuyau de fer A, dans lequel on emboitera un autre tuyau H, qui ait au-moins six pieds de long. Plus ce tuyau sera long, et plus le feu agira avec force ; il faut attacher ce tuyau dans la cheminée avec une chaîne de fer, de peur que par son poids il ne vienne à faire pancher le fourneau.

Si on voulait que ce fourneau augmentât encore plus la violence du feu, il faudrait ajouter un tuyau C à l'ouverture B du cendrier, de façon que l'entonnoir C placé hors de la fenêtre, put attirer de fort loin l'air extérieur dans le fourneau.

On ne doit employer dans ce fourneau que des charbons de la grosseur d'un œuf de poule ou d'oie ; ceux qui se trouveront plus petits ou plus gros, doivent être rejetés ; il faut emplir le fourneau de charbon presque jusqu'au-haut, afin que le creuset soit toujours couvert de charbon allumé, et le feu dans toute sa force. Il faut aussi avoir soin de mettre des charbons ardents dans le fourneau au-moins toutes les huit minutes : on doit ensuite fermer promptement et exactement la porte ; par ce moyen tout ce qui est fusible dans la nature sera mis en fusion dans l'espace d'une heure ou deux. Pott, Lithogéognosie, part. I. pag. 421.

Nous n'avons point donné l'échelle de M. Pott, parce qu'elle est particulière à son fourneau ; mais en voici les rapports. Suivant cette échelle divisée en cinq pieds, le cendrier de son fourneau est haut et large d'un pied ; le corps est haut de deux pieds deux pouces, et a un pied neuf pouces de diamètre dans la plus grande capacité de son ventre. On sent bien que le bas a un pied de diamètre, ainsi que le cendrier : son dôme B B, ainsi que l'ouverture supérieure du corps du fourneau, a seize pouces de diamètre, et sept ou huit pouces de haut jusqu'à la naissance de son tuyau, qui a environ cinq pouces de diamètre dans le bas. La porte du cendrier y est trop élevée, devant être de niveau avec le sol. L'on conçoit qu'elle doit être plus large que le tuyau supérieur. Si l'on prévait que l'on soit obligé dans quelque cas d'appliquer le canal e, il faudra la faire ronde, ou boucher les vides avec de l'argille et des platras.

Ce fourneau, comme on le peut voir, a encore beaucoup de ressemblance avec celui de fusion de M. Cramer, fig. 26. et suiv. Néanmoins il y a entre eux des différences essentielles qui nous les ont fait admettre tous les deux. Celui de M. Cramer est plus composé et plus varié, et conséquemment peut être appliqué à plus d'opérations ; mais celui de M. Pott donne le plus fort degré de feu qui ait jamais été produit par aucun fourneau.

La fig. 39-44. trouvera aussi sa place avec les fourneaux de fusion, quoiqu'elle serve plus particulièrement à la vitrification des terres, pierres, etc. qui n'est au fond qu'une fusion de ces mêmes corps. Le fourneau nécessaire à ces sortes d'expériences, se trouve représenté dans la Pl. XI. de l'art de la Verrerie de Kunckel, mise en français par M. le baron d'Holbach. Mais comme M. Cramer s'en est beaucoup servi pour les émaux, etc. il l'a corrigé de façon que le feu peut être donné plus fort aux vaisseaux, qu'on y peut introduire plus de choses, et que les torréfactions et calcinations nécessairement longues en pareil cas, peuvent se faire en même temps que le reste.

Pour le construire, on emploie des pierres capables de soutenir la violence du feu. C'est ce qu'il est aisé de connaître, si l'on se sert d'une pierre pareille pour soutenir un creuset dans lequel on fait une fusion qui demande un feu vif, telle que celle du cuivre ; car si elle n'adhere pas au fond du creuset, quand on le retire ; si elle ne prend point de vernis, à-moins que ce ne soit un très-leger enduit ; si elle ne se gerse point, et si elle garde sa dureté étant refroidie, alors on peut être sur qu'elle a toutes les qualités requises. Il faut rejeter comme mauvaises celles qui, après avoir soutenu un grand feu, se fendent en refroidissant. On peut se servir pour mortier de la composition argilleuse dont on a fait les briques du fourneau, si c'en est qu'on emploie, ou celle dont on a fait les mouffles d'essai. On observera que les pierres joignent si bien entr'elles, que le trait de rustique soit très-petit, c'est-à-dire qu'une légère couche de mortier suffise pour les maçonner.

Il faut qu'il y ait dans le lieu où l'on construira le fourneau en question une cheminée pompant bien la fumée ; que toutes les grandes ouvertures qui s'y trouvent puissent être fermées exactement ; et que le fourneau soit placé près de la cheminée, de façon que l'artiste puisse tourner librement autour.

La figure extérieure d'un fourneau peut être celle d'un cylindre terminé par une voute. Son diamètre sera de 24 pouces, ou plus, selon la différence des pierres : sa hauteur de 48 ; l'épaisseur du mur dans les endroits les plus minces sera au-moins de quatre pouces ou de six : sa cavité intérieure sera divisée en chambres, dont la voute doit suivre la direction d'une ligne parabolique. La plus basse qui sert pour le cendrier, sera haute de 12 pouces, et son plus grand diamètre ou l'inférieur en aura 14, et ainsi l'on voit quelle est la direction de la ligne parabolique. On fera à sa voute une ouverture de 10 pouces de diamètre ; en sorte qu'il ne restera sur son dos qu'un bord circulaire de deux pouces. Ce bord sert à soutenir des barres de fer équarries que l'on met sur cette ouverture, au lieu d'une grille. On scelle ces barres à l'endroit du rebord d'une couche de lut de même épaisseur, qu'on applanit avec soin, pour qu'elle puisse recevoir les vaisseaux qu'on y place de toutes parts. On laisse à la base du cendrier une ouverture ou soupirail en carré long, large de six pouces sur quatre de haut, qui se ferme avec une porte de fer roulant sur des gonds.

La seconde chambre élevée sur la première, est le foyer ou lieu recevant l'aliment du feu. Elle est de même largeur et hauteur que la précédente, excepté que les pierres n'en soutiennent pas si bien l'action du feu. C'est pour cette raison qu'on lui donne quelques pouces de plus en largeur, et qu'on remplit cet excédent d'un garni soutenant la dernière violence du feu. Ce garni se fait, si l'on n'en a point d'autre, de creusets d'ipsen pilés, qu'on mêle avec l'argille la plus réfractaire qu'on peut trouver. Au milieu de la voute est un trou circulaire de six pouces de diamètre, dans la circonférence duquel la voute n'a qu'un doigt d'épais. Sur le dos de cette voute est un emplacement large de quatre pouces, servant à mettre les vaisseaux. Dans la circonférence de cette chambre on fait sept portes arquées, à égales distances les unes des autres, six desquelles sont larges et hautes de six pouces, et dont la septième a deux pouces de plus. Leurs bases sont éloignées de deux pouces de la couche du lut qui assujettit les barres de fer, laquelle doit être regardée comme le pavé de cette chambre. Le mur du fourneau est diminué d'un tiers de son épaisseur, entre la base de chaque porte et le sol de la chambre. Toutes les portes sont garnies de fermetures roulant sur des gonds, faites ainsi que nous venons de le dire, en décrivant la fig. 26. et couvertes d'un garni de deux doigts d'épais ; elles seront reçues dans une feuillure large de quelques lignes, et de même profondeur que l'épaisseur du garni. Chaque fermeture a d'ailleurs à sa partie supérieure un petit trou, à-travers duquel on peut voir aisément ce qui se passe dans le fourneau.

La troisième chambre, supérieure à la seconde, est parfaitement semblable aux deux précédentes, si ce n'est que sa voute est plus basse de deux pouces, et que le trou au moyen duquel elle communique avec la quatrième chambre, est de quatre pouces en carré seulement, et n'est pas dans le milieu.

La quatrième et dernière chambre est de même largeur que les autres ; mais sa voute n'est élevée que de huit pouces. A l'opposite du trou qui établit la communication de cette chambre-ci avec l'inférieure, et à deux pouces de son pavé, est un tuyau cylindrique de tôle de quatre pouces de diamètre, servant à déterminer la fumée et la flamme dans cette chambre. Entre ce trou et ce tuyau ou cheminée, est une ouverture haute et large de six pouces, commençant dès le sol de la chambre. Elle est garnie d'une fermeture de fer, et sert à introduire et retirer les vaisseaux. Ce fourneau est exécuté dans le laboratoire de M. Rouelle.

On se sert de ce fourneau de la manière qui suit. On allume le feu dans la seconde chambre ; il se fait de charbon ou de bois sec, et principalement de hêtre, qu'on y introduit par la maîtresse porte. Mais il est bon d'observer les choses suivantes, quant au choix d'une pâture propre à donner un feu violent en général. Si l'on veut donner la dernière violence du feu à un vaisseau absolument couvert de son aliment, il faut que les charbons soient petits ou d'une grosseur médiocre, et que les tourtes n'aient pas plus de trois doigts de haut, si les vaisseaux sont grands, ni moins d'un, s'ils sont petits. Mais si l'on met les vaisseaux à côté ou dessus l'aliment du feu, comme il arrive d'ordinaire dans ce fourneau, pour leur donner la chaleur et la flamme la plus vive, il faut préférer en ce cas le bois et les gros charbons. Maintenant si l'on fait dans le mur du laboratoire une ouverture un peu grande, ou du moins égale au soupirail, qu'on établisse un canal de tôle ou de planches qui conduise de l'un à l'autre, et qu'on ferme d'ailleurs le laboratoire de tous côtés, pour qu'il n'y entre que peu d'air : alors son action est d'autant plus rapide par ce canal, que la cheminée du laboratoire est échauffée ; de sorte qu'on parvient à donner au feu un degré de la dernière violence. Il sera si vif aux petites portes de la seconde chambre, que quelques onces de cuivre, jetées sans addition dans un creuset rougi, seront fondues au bout d'une minute, bouilliront, et seront beaucoup plus embrasées qu'il n'est nécessaire, pour lui faire prendre dans un moule la figure qu'on veut. On met les vaisseaux par ces petites portes, et on les place sur le lut servant à assujettir les barres de fer faisant l'office de grille. On place autant de vaisseaux dans le pourtour de la chambre, qu'il y a de portes. Les vaisseaux qu'on y introduit, avant que le fourneau soit parfaitement chaud, peuvent se poser sur une tourte épaisse d'un pouce, et difficîle à vitrifier. On peut voir et examiner la matière contenue dans les vaisseaux par le petit trou pratiqué dans cette porte. Comme le sol de la troisième chambre est beaucoup plus large que celui de la précédente, il est capable de tenir un double rang de douze vaisseaux chaque, ou plus s'ils sont de médiocre grandeur. Le feu n'est pas si fort dans celle-ci que dans la précédente, et son degré n'est que celui d'une fonte médiocre. Enfin dans la quatrième et dernière le feu est beaucoup plus doux. Il y est très-propre aux calcinations et grillages, qu'on doit faire à un feu leger ; car les vaisseaux ne font qu'y prendre un commencement de rougeur. Si l'on veut les placer dans le fourneau déjà embrasé, on les chauffera bien d'abord ; ensuite on les mettra dans la quatrième chambre, après quoi ils seront en état, par le rouge médiocre qu'ils auront pris, de passer dans la troisième ou seconde.

Avant que d'allumer le feu, il faut avoir des appareils pour plusieurs opérations. On fait ainsi quantité d'expériences avec très peu de peine, en peu de temps, et à peu de frais. Enfin M. Cramer assure qu'il n'en a jamais fait qui lui aient procuré autant de plaisir que celles qu'il a faites dans le fourneau en question, quoiqu'elles soient d'ailleurs très-ennuyeuses, parce que le feu doit y être très-fort et très-longtemps soutenu dans le même état ; et il affirme qu'il avance peu, en disant que tout en est dix fois plus aisé, si on en sait tirer parti.

Les vaisseaux qu'il emploie pour son fourneau, sont des creusets et des tutes qu'on y place avec ou sans couvercle. Mais si l'on est obligé d'examiner ou d'agiter souvent la matière qu'ils contiennent, et de les garantir en même temps de la chute des cendres qui voltigent, il faut faire une échancrure à leur bord supérieur, puis y appliquer une fermeture qu'on assujettira avec du lut. On peut encore construire exprès des vaisseaux cylindriques fermés par le haut, n'ayant qu'une ouverture par le côté, qu'on aura soin de tourner vers la porte, enfin ce qu'on appelle des creusets de Verrerie. Si l'on se sert de creusets triangulaires, il faut que l'un des angles soit dirigé vers le centre du fourneau, et le côté opposé tourné du côté des portes. Faute de ces précautions, les vaisseaux sont sujets à se fendre.

Au défaut de ce fourneau, M. Cramer s'est servi autrefois, avec assez de succès, de son athanor que nous avons marqué fig. 56. et que nous décrirons plus bas. Il ajustait une trompe à son cendrier comme au précédent ; il plaçait les vaisseaux sur des tourtes dans la chambre voisine de la tour ; il levait tout à fait la plaque de fer destinée à empêcher l'accès du feu de la tour dans la première chambre ; il maçonnait la porte de cette chambre avec des briques et du mortier, laissant pour introduire les vaisseaux deux petites portes qu'il fermait avec des pistons ; il plaçait les vaisseaux qui demandaient le plus grand feu tout près de la fenêtre biaise, au moyen de laquelle le feu passe du foyer dans la première chambre ; ceux à qui un feu plus doux suffisait, au milieu de la chambre, et vis-à-vis la même fenêtre. Mais comme les pierres n'étaient pas des meilleures, et qu'il y avait soutenu pendant deux jours un feu de la dernière violence, le fourneau s'était tout détruit, et les tourtes s'étaient confondues avec les pierres vitrifiées, quoiqu'il ne se fût pas répandu de verre des vaisseaux ; inconvénient qu'on doit prévenir avec tous les soins imaginables ; car s'il arrive un certain nombre de fais, le fourneau est hors d'état de servir davantage.

Des fourneaux d'essai. Ce sont ceux dont nous avons donné la description à l'article ESSAI, et qui dans nos Planch. de Chimie sont marqués fig. 4548. 49-50-53. 54 et 55. leur place naturelle eut été celle-ci. Après les fourneaux de calcination et de fusion, doivent venir ceux qui sont cela tout-à-la-fais ; mais nous nous contenterons d'y faire quelques additions. Voici les proportions que les fournalistes de Paris donnent à ceux qu'ils font en terre, fig. 54. Ils font un sol de 18 ou 20 lignes d'épaisseur, de 12 ou 13 pouces de large, ou d'un côté à l'autre, et de 13 ou 14 pouces de devant en-arrière ; quelquefois ils le font tout à fait carré, et le fourneau en est tout aussi bon. Tantôt il est plus grand, et tantôt il l'est moins ; cela dépend du nombre d'essais qu'on y veut faire à-la-fais, et de la quantité de matière qu'on a à y traiter. Ils élèvent ensuite des murailles à la hauteur de trois pouces ou trois pouces et demi ; et c'est pour lors qu'ils pratiquent le petit rebord qui soutient les barres faisant l'office de grille. Ces murailles ont aussi 18 ou 20 lignes d'épais. Ils pratiquent trois ouvertures ou soupiraux au cendrier, une en-devant et une de chaque côté. Toutes trois ont en largeur quatre pouces et demi d'embrasure réduits à quatre pouces en-dedans sur trois de hauteur. Au-dessus des barres-grilles qui sont posées en losange, et qui, ayant huit lignes d'équarrissage, occupent environ un pouce d'épaisseur horizontale, ce qui fait quatre pouces et demi de haut, ils élèvent encore les murailles de deux pouces, et quelquefois de trois ou quatre, avant que de faire les trous pour placer les barres soutenant la moufle. Ces trous sont au nombre de quatre, deux devant et deux derrière. Ils ont huit ou neuf lignes de diamètre pour recevoir des barres rondes de même grosseur à-peu-près. Comme ces barres terminent la couche de charbon placée entre la grille et la moufle, et que cette couche ne suffit pas à beaucoup près pour la plupart des essais, nous avons déjà remarqué à leur article que c'était un inconvénient à corriger, et qu'il fallait quatre ou cinq pouces, au lieu de deux, entre la moufle et les barres-grilles. Cet espace doit même être plus considérable, quand on veut employer ce fourneau à l'émail, soit tel qu'il est, soit modifié de la façon particulière qui convient à ce genre de travail. Voyez EMAIL. Du-dessus des barres au haut du fourneau, il y a cinq ou six pouces d'espace. Deux ou trois lignes au-dessus de ces mêmes barres, on fait une ouverture demi-circulaire de cinq ou six pouces de large en-bas sur trois ou quatre de haut dans son milieu. C'est la porte de la moufle. Quand celle-ci est un peu longue, et qu'on y place des vaisseaux un tant-sait-peu grands, il manque de l'élévation à sa porte. Ainsi on ne risque rien de la faire d'un pouce ou d'un demi-pouce plus haute. Au-dessus de ce corps qui est en tout haut de quinze pouces, est le dôme en pyramide carrée haute en tout de cinq pouces, et se terminant par une ouverture de quatre pouces aussi carrée. Cette ouverture doit se terminer de façon qu'on y puisse ajuster la buse i ou naissance de tuyau qu'on voit au-dessus de la fig. 54. pour augmenter le feu, et avoir la facilité de continuer cette cheminée. Ainsi la hauteur totale du fourneau est de vingt pouces sans sa cheminée.

On fait encore des fourneaux d'essai sur le champ avec des briques et des barres de fer, ou bien une grille d'une seule pièce. On leur laisse en côté une fenêtre pour observer si le charbon s'affaisse bien sous la moufle et à ses côtés : cette fenêtre est aussi nécessaire dans les autres espèces de fourneaux d'essai.

Le fourneau d'essai sans grille qu'on voit représenté Planche I. Tome I. de Schlutter, et fig. 55. de nos Planches, est celui de Fachs. Ercker en a senti les inconvéniens, et préfère celui qui a un cendrier. Le fourneau de Fachs se trouve dans Libavius et Glaser. Celui de Cramer est pris d'Ercker. Il est précisément le même, si on en excepte peut-être que les deux portes en coulisse du cendrier ont chacune, de même que celles de la bouche du foyer, un trou qui n'y est pas fort nécessaire. Celui qu'on voit dans Rhenanus est aussi le même que celui d'Ercker.

Fachs a fait beaucoup de corrections aux fourneaux d'essai d'Agricola ; mais il les a laissés sans grille. Ceux d'Agricola sont très-défectueux ; ils ressemblent assez à certains fourneaux d'émail qui sont encore aujourd'hui en usage.

Stahl me parait être le premier qui ait demandé pour les fourneaux d'essai, comme pour ceux de reverbere, un tuyau ajusté à leur dôme, fund. chem. p. 44. Il avance p. 157. que l'espèce de fourneau en question ne demande pas, pour être construit, autant de précision qu'on l'a cru, et que c'est s'amuser à des inutilités et à des minuties ; que les qualités que doit avoir un fourneau d'essai se réduisent à ce qu'il pompe bien l'air, et puisse fondre de l'argent. Ces vues sont remplies par des regitres placés à la partie supérieure du fourneau, un cendrier garni de sa porte, et un couvercle pour donner froid, par une juste proportion de la moufle et une distance de deux doigts entr'elle et les parois du fourneau. On verra par la lecture de cet article, si Stahl n'a pas pu se tromper.

Le fourneau d'essai à l'anglaise (fig. 45-49.) en brique, et celui qui est en terre, dont nous avons donné la description, ne se trouvent, que je sache, qu'une fois chacun à Paris.

Le fourneau d'émail qu'on voit dans Haudicquer de Blancourt, est sans grille comme tous les autres. Il est plus que probable que l'émail qui doit son origine à la chimie, lui doit aussi le fourneau qui y est employé. C'est le fourneau d'essai qu'on a pris, mais le fourneau d'essai sans grille. Depuis ce temps les Chimistes ont corrigé ce défaut de grille ; mais les Emailleurs qui en ont été séparés n'ont point profité de cette correction ; et cela n'est point étonnant. La plupart des essayeurs eux-mêmes ne l'ont pas encore admise ; et l'on fait même encore des essais avec une moufle sans sol, comme celle des émailleurs ordinaires : construction qui peut avoir ses avantages pour les essais, mais qui me parait n'avoir que des inconvénients pour l'émail. Voyez MOUFLE.

On n'a mis à l'article ESSAI que ce qui regardait la construction du fourneau de la fig. 50-53. au-moins s'est-on peu étendu sur son usage général. Le voici. Pour faire usage de ce fourneau, l'artiste l'élevera de deux ou trois pieds, de quelque façon qu'il le fasse, afin qu'il puisse voir commodément par l'embouchure de la moufle les progrès de l'opération, sans être obligé de se baisser. Il passera dans les quatre trous inférieurs qui répondent les uns aux autres, deux barres de fer épaisses d'un pouce, et de telle longueur que leurs extrémités débordent un peu les parois du fourneau de chaque côté. Ces barres sont destinées à soutenir la moufle qu'on introduit par l'ouverture supérieure du fourneau, avant que d'y mettre le dôme pyramidal ; on la place de façon que son embouchure ne semble faire qu'une seule et même pièce avec le bord de la porte qu'on appelle de son nom : après quoi on la lute avec ce même bord, parce qu'il faut l'assujettir. La substance qui doit servir d'aliment au feu et la grille se mettent par le haut du fourneau, dont le dôme doit être conséquemment mobîle encore pour cette raison, et assez leger. Les charbons faits de bois dur, et surtout ceux de hêtre, sont les plus propres pour ces sortes de circonstances. On les met par morceaux de la grosseur d'une noix, et l'on en couvre la moufle d'une couche de plusieurs pouces. Nous donnons l'exclusion aux charbons qui sont plus longs ou plus gros, parce qu'ils ne se rangent pas bien autour de la moufle, et ne remplissent pas exactement l'espace étroit qui est entr'elle et les parois du fourneau : d'où il arrive que le feu est, ou inégal, ou trop faible, à cause des vides qui se rencontrent nécessairement pour lors. C'est pour cela que nous avons conseillé de faire une petite porte à côté du fourneau. Il est cependant un juste milieu duquel on ne peut s'écarter ; car si l'on cassait le charbon trop petit, la plus grande partie passerait à-travers la grille, et tomberait dans le cendrier ; ou bien se réduisant trop promptement en cendres, elle boucherait bien-tôt la grille par la quantité en laquelle elle s'y amasserait, et empêcherait le libre passage de l'air, qui est si nécessaire en pareille occasion.

Comme les opérations qu'on fait avec ce fourneau exigent pour l'ordinaire un feu conduit avec exactitude, on fera attention aux circonstances suivantes. 1°. Le fourneau étant plein de charbons allumés, si l'on ouvre entièrement la porte du cendrier, et qu'on approche l'une de l'autre les coulisses de la porte de la moufle, on augmente le feu. Son action deviendra plus forte, si on met le dôme, et qu'on lui adapte le tuyau de deux pieds (fig. 49.) 2°. Mais on aura un feu extrême, si, laissant le fourneau dans l'état dont nous venons de parler, excepté la bouche de la moufle qu'on ouvrira, on lui applique le canal de tôle rempli de charbons ardents. On est rarement obligé d'en venir à cet expédient pendant l'opération ; on n'y a recours que quand on commence à allumer le feu, parce que ce serait en pure perte qu'on attendrait patiemment pendant quelques heures qu'il eut acquis le degré d'activité convenable. On est encore obligé de recourir à cette disposition, quand on a à faire une opération qui exige un feu violent pendant un temps chaud et humide, l'air étant en stagnation, et n'étant plus capable par la diminution qu'il souffre de son ressort, de donner au feu l'activité nécessaire au succès de l'entreprise. On peut déduire de ce que nous avons dit, quels doivent être les moyens de diminuer le feu.

Lorsqu'il a été poussé à la violence qu'il peut avoir dans le fourneau en question, elle devient moindre si l'on retire les charbons du canal de tôle, et si l'on ferme la porte de la moufle ; on lui ôtera encore un degré d'activité en retranchant le tuyau du dôme ; l'action du feu se ralentira encore, si on ne laisse la porte de la moufle fermée que par la coulisse qui a la plus petite ouverture : sa diminution sera plus considérable, si on lui substitue la seconde coulisse dont l'ouverture est plus grande. Le feu enfin sera encore affoibli si l'on ôte le dôme, et s'éteindra ensuite tout à fait, si l'on ferme en tout ou en partie la porte du cendrier, puisqu'on interdit par-là le passage à l'air, dont le jeu est nécessaire à l'entretien et à l'augmentation du feu. On a encore un moyen de diminuer l'ardeur du feu presque tout-d'un-coup si l'on veut, c'est d'ouvrir tout à fait la bouche du foyer ; car l'air froid qui y entre pour lors avec impétuosité, rafraichit tellement les matières qui sont placées sous la moufle, qu'il n'est point d'opération qui demande un degré de feu si faible, puisque l'ébullition du plomb cesse même entièrement. Si l'on voit que le feu commence à manquer, ou même à devenir inégal dans quelque endroit de la moufle, c'est une preuve que le charbon ne s'est pas affaissé à-mesure qu'il a brulé, ou bien même avant qu'il fût allumé, et qu'il a laissé conséquemment des vides entre la moufle et les parois du fourneau : ainsi on les fera tomber à l'aide d'une petite baguette de fer qu'on introduira par l'oeil du fourneau. S'il arrivait que le feu fût plus fort d'un côté de la moufle que de l'autre, on pourrait le diminuer incontinent, si on le jugeait à-propos, avec un instrument ou regitre. On saura en général qu'on n'aura promptement un degré de feu égal et convenable, qu'autant qu'on aura la précaution d'ôter les cendres et de nettoyer le foyer avant que d'y mettre le charbon. Voyez ESSAI, MOUFLE, etc.

Des fourneaux d'affinage et de raffinage. Les fourneaux qui servent à ces deux opérations sont exactement les mêmes ; ce sont ceux que nous avons représentés fig. 17. 18. 19. 20. 21. et 22.

Un fourneau d'essai est bien certainement un fourneau qui peut servir à l'affinage et au raffinage de l'argent ; mais il n'est pas fait pour qu'on y en puisse traiter une grande quantité à-la-fais : ce n'est pas que notre dessein soit de parler de l'appareil en grand qui sert à ces sortes d'opérations ; il n'entre point dans notre plan : mais nous allons donner les fourneaux qui peuvent être nécessaires au chimiste, qu'on trouve dans les monnaies et chez les Orfèvres, et qu'un essayeur ne peut se dispenser d'avoir. Nous n'avons point parlé des fourneaux de liquation qui auraient dû précéder ceux-ci, non-seulement parce qu'ils demandent une grande suite de fourneaux, mais encore parce que cette opération regarde strictement les travaux en grand. On ne liquéfie l'œuvre ou plomb chargé de l'argent du cuivre, qu'après l'avoir fondu avec ce cuivre dans un fourneau à rafraichir ; après quoi on le passe au fourneau de liquation, puis à celui de l'affinage ; pendant que d'un autre côté on desseche les pièces de liquation dans un fourneau de ressuage : toutes opérations qui sont du ressort de la Métallurgie. Dans les essais on détruit le cuivre, et on a d'ailleurs tous les jours beaucoup d'argent allié, de la vaisselle, etc. à affiner et raffiner, comme à départir.

Le fourneau (fig. 17. et 18.) est tiré de Schlutter : cet auteur rapporte qu'en Bohème, en Saxe, en Hongrie, et ailleurs, les fourneaux d'affinage sont construits à-peu-près comme une forge ; mais cette forge est couverte d'une voute au milieu de laquelle il y a une cheminée ; au-dessous est un arceau sur lequel se trouvent deux foyers pour deux tests ou coupelles ; chacun de ces foyers a quatre pieds de long sur trois pieds et demi de large : à côté est un mur à-travers lequel passent deux tuyaux de cuivre jaune, venant du soufflet, et c'est sur ce mur que la voute est portée. Ce mur h, k (voyez la coupe et l'élévation) se fend en deux ou est creusé de chaque côté vis-à-vis les tuyaux du soufflet, pour pouvoir toucher à leurs robinets, et donner le vent du côté qu'il est nécessaire. Le soufflet qui est de bois, est monté sur son châssis ; on en tire la brimbale avec le pied : le vent de ce soufflet entre dans un porte-vent ou boite de bois qui reçoit les deux tuyaux qui vont aux deux foyers. Comme il n'y a qu'un test occupé à-la-fais, on ferme exactement le canal de l'autre.

Les fig. 19-21. représentent un fourneau dont Schlutter se dit l'inventeur, et prétend n'en avoir pas Ve de semblable : il est vrai qu'on n'avait pas encore appliqué le fourneau à fondre les canons, ou prétendu anglais, à l'affinage de l'argent ; mais il n'en existait pas moins, et celui de Schlutter, à ce que je pense, n'en diffère pas beaucoup, s'il n'est pas tout à fait le même, comme on Ve le voir. Ce fourneau se chauffe avec le bois ; il est construit en briques, et le sol en est élevé de trois pieds, avec un cendrier de même hauteur à l'un de ses côtés : on place la grille au haut du cendrier, ou plutôt un peu au-dessous du sol du fourneau, comme on peut la voir en b, fig. 19. C'est sur cette grille qu'on fait le feu, qui par conséquent se trouve à l'un des côtés du fourneau, le test ou coupelle étant à l'autre. L'endroit où se met le bois, et qui est séparé du sol en-bas par un petit mur, s'appelle la chauffe. La chauffe et le sol ou coupelle sont couverts d'une voute commune e, fig. 19. Il y a devant le test une ouverture c (fig. 21.), en-travers de laquelle on met quelques barres de fer qui servent à faire entrer et sortir le test : quand il est placé, on ferme cette ouverture avec des briques, et on n'y laisse qu'une petite embouchure, comme on le voit même fig. 21. il y a pour mettre le bois dans la chauffe b, fig. 20. une autre ouverture a, qu'on ferme avec une porte de fer chaque fois qu'on y a jeté du bois. On place une plaque de fer fondu e, au-devant de ce fourneau ; et près du test d, (fig. 20.) on ménage dans l'intérieur du mur f, un tuyau pour la sortie de la flamme, f, fig. 21. La maçonnerie extérieure du fourneau a cinq pieds de long et trois pieds quatre pouces de large, y compris la plaque de fer. Le fourneau anglais est aussi plus long que large, et cela avec d'autant plus de raison que le sol en est ovale, au lieu qu'ici le sol ou la coupelle sont ronds. Le dedans est de deux pieds de long sur un pied et demi de large. La grille de la chauffe a neuf pouces de large sur un pied six pouces de long. Le petit mur c, (fig. 19.) n'est guère élevé que de l'épaisseur d'une brique ou deux tout-au-plus, parce que l'élévation de la chauffe doit se prendre sur le cendrier pour la place de la quantité de bois nécessaire : au reste, la grille b, (fig. 20.) est composée de barres de fer isolées et portées sur deux autres plus grosses posées en-travers dans des mortaises qui doivent avoir huit ou dix pouces de haut, afin qu'on puisse élever la grille ou la baisser à volonté, suivant la quantité qu'il faudra d'aliment au feu, et la nature de cet aliment. La voute qui couvre tout ce fourneau ne doit être élevée que de quinze pouces ; mais cela doit s'entendre depuis la grille b, (fig. 19.) jusqu'à la voute qui est immédiatement au-dessus ; car elle ne doit pas faire l'arc comme en e, mais aller toujours en baissant jusqu'en f, commencement de la cheminée, pour rabattre la flamme et la déterminer sur le métal : ainsi la courbure de la voute doit être prise dans un autre sens, c'est-à-dire que sa naissance ou chaque extrémité de son arc doit porter sur les murs des côtés, et non sur ceux g g, (fig. 21.) des extrémités ; ce qui est encore indiqué par la situation de la cheminée. Le cendrier est, comme la grille, large de neuf pouces ; son soupirail est de même largeur, et haut d'un pied : les poêles dont on se sert pour former avec des cendres le test où l'on met les matières à affiner, sont de fer fondu. Voyez nos Planches et leur explication ; voyez aussi le fourneau anglais. Ce fourneau doit être très-utîle dans un laboratoire philosophique ; il est meilleur que celui de nos fig. 15 et 16. qui pourtant peut avoir son utilité. Je dirai ici en passant, que les Anglais ont appliqué le fourneau qui porte leur nom à l'affinage ; je ne sai point si c'est depuis Schlutter ou avant ; mais ils y ont fait ce changement. Au lieu du massif qui porte le test dans notre fig. 19. il y a un vide ; et la coupelle, qui est un cercle de fer de trois ou quatre pieds de diamètre, et haut de sept ou huit pouces, est soutenue sur deux grosses barres de fer posées selon la longueur du fourneau. Il y a une petite ouverture au-dessus de la coupelle, comme en c, (fig. 21.) pour laisser passer le vent d'un gros soufflet, et une autre à l'opposite pour la chute de la litharge : c'est ainsi qu'on affine une grande quantité de plomb à-la-fais. J'observerai encore ici une chose que j'ai déjà dite ailleurs ; c'est que Schlutter est tombé dans l'erreur sur l'origine du fourneau anglais : il rapporte, page 114. de l'édition publiée par M. Hellot, qu'on prétend qu'il a été inventé vers l'an 1698 par un médecin chimiste nommé Wrigth : mais ce médecin n'en a pu faire qu'une application à la fonte des mines de plomb et de cuivre d'Angleterre : puisque le fourneau pour la fonte des cloches qui lui est absolument semblable, est très-ancien et remonte peut-être à quelques milliers d'années. Il est vrai qu'on n'en trouve point dans Agricola ; mais Biringuccio, auteur italien traduit en français par Vincent en 1572, l'a figuré et décrit de plusieurs façons. Voyez cet auteur, p. 121. il l'appelle fourneau de réverbere. Wrigth tout au plus y a ajouté la cheminée d'après les tuyaux des poêles et des fourneaux de fusion.

La fig. 22. représente un fourneau à vent à affiner l'argent dans un test sous une moufle ; cette figure est de M. Cramer, et se trouve aussi dans Schlutter : on s'en sert au hartz. On construit plusieurs de ces fourneaux le long d'un mur sur un foyer commun qui non-seulement sert de support, mais encore de tuyaux pour le jeu de l'air : pour cela on y fait des fentes étroites, comme on voit en e pour le passage de l'air ; ces fentes commencent dès le pavé, et sont hautes de trois pieds, comme le foyer ou support. Comme ces fourneaux sont à côté les uns des autres, l'air de chaque soupirail est conduit à leurs foyers par deux tuyaux tant d'un côté que de l'autre ; de sorte qu'un fourneau reçoit par quatre tuyaux l'air de deux soupiraux. Du fond de chaque fourneau s'élève un tuyau de respiration qui a sa sortie près du mur et par-dessus le fourneau, comme on le voit en f ; à cela près que cette sortie est au milieu du dôme, et doit être par le côté ; les bases de ces fourneaux sont construites en briques ; ils le sont aussi en partie, et peuvent l'être en entier : mais on fait ordinairement leur dôme en terre, comme on le voit en B. Chacun d'eux a par le bas un pied huit pouces de large, et la même étendue en long, quand ils sont fermés par des briques ; leur hauteur est de deux pieds, et ils se resserrent vers le haut, où il ne reste qu'onze pouces de large sur quinze pouces de long. Le devant demeure ouvert jusqu'à ce que le test et sa moufle y soient placés, comme on le voit en A, qu'on a représenté ouvert : alors on le ferme avec de méchantes briques, et on ne laisse d'ouvert que l'embouchure ; ou bien on y fait une très-grande porte en tôle g, comme en B, à laquelle on fait un petit guichet h pour le besoin. Le dôme est encore garni d'une autre porte i, roulant sur des gonds, comme la première, qui est l'oeil du fourneau et l'endroit par où l'on jette le charbon : on arme ces fourneaux de cercles de fer et de plaques ; sans quoi il faudrait les rétablir souvent. Les poêles où l'on fait les tests sont de fer à l'ordinaire, et les mouffles sont sans sol. Voyez ces articles.

Des fourneaux de verrerie. Nous n'entendons par-là que ceux qui peuvent être de notre plan, ou entrer, comme nous l'avons déjà répété plusieurs fois dans d'autres occasions, dans le laboratoire du chimiste. Ces sortes de fourneaux ne sont, à proprement parler, que des fourneaux de fusion ; la vitrification n'étant elle-même qu'une fusion, mais une fusion qui demande un degré de feu supérieur à celle des métaux. Cette nuance n'a pu nous déterminer à faire un article séparé des fourneaux de vitrification dont nous avions à parler ; on les a trouvés à la fin de la section des fourneaux de fusion : ce sont ceux du commercium litterarium, fig. 37. n°. 1. celui de M. Pott, fig. 38. et celui de M. Cramer, fig. 39-44 : on peut encore y ajouter le fourneau de fusion, fig. 26.

Des athanors. Nous en avons représenté quatre dans nos Planches ; le premier est la fig. 56-60. celui de M. Cramer : le second est la figure 61. qu'on voit chez M. Rouelle : le troisième est la fig. 62. dont M. Malouin a donné la description, art. athanor : et le quatrième, celui de Rupescissa, qui n'est qu'un fourneau philosophique : nous parlerons de celui-ci en son lieu, et nous donnerons en même temps quelques remarques sur le mot athanor.

L'athanor, le fourneau de la paresse, acedia en latin, tiré du grec , ou qui ne donne aucun soin, est un fourneau où l'on entretient du feu longtemps. On construit 1°. avec des pierres capables de résister à un violent feu de fusion, une tour carrée, (fig. 56. a a a a), dont les murailles épaisses chacune de six pouces, en doivent avoir dix de large dans œuvre, b b b b. On la fait plus ou moins haute, suivant le temps qu'on veut que le feu dure sans être obligé de lui donner de nouvel aliment ; on lui donne pour l'ordinaire cinq ou six pieds de haut. 2°. Dans la partie la plus inférieure de cette tour, on fait une ouverture carrée c, large et haute de six pouces, qu'on ferme exactement à l'aide d'une porte de fer roulant sur deux gonds, excédant le soupirail d'un pouce dans tout son contour, et reçue dans une feuillure ou entaille à angles droits, large aussi d'un pouce, pratiquée tout-autour du bord extérieur du même soupirail. 3°. A dix pouces au-dessus du sol de la tour, on place une grille d, faite de plusieurs barres de fer d'un pouce d'équarrissage, et éloignées de trois quarts de pouces les unes des autres. On les dispose en losange, ou de façon que deux des angles d'une barre, sont opposés à ceux des deux autres barres au milieu desquelles elle est, et que les deux autres sont tournés l'un vers la partie supérieure de la tour, et l'autre vers l'inférieure. Cette disposition sert à favoriser la chute des cendres. 4°. Immédiatement au-dessus de la grille on fait une autre ouverture e, arquée, large de sept pouces, et haute de six, garnie, comme le soupirail, d'une porte de fer suspendue sur deux gonds ; cette porte sera munie intérieurement de crochets de fer et d'un rebord qui remplira exactement l'ouverture de la tour, afin qu'elle puisse soutenir le lut qui la doit garantir de l'action du feu. 5°. On ferme le sommet de la tour avec un couvercle ou dôme de fer f, garni d'une anse, et excédant l'ouverture de la tour de deux pouces dans tout son contour. On fait ce dôme d'une tôle épaisse, dont on forme une pyramide creuse, carrée, ouverte par sa base, et se terminant par un bord presque tranchant qui est reçu dans une feuillure ou rainure d'égal contour, pratiquée dans le bord intérieur de la partie supérieure de la tour : telle est la construction de la principale partie de ce fourneau.

6°. Un pouce et demi ou deux pouces au-dessus de la grille d, on fait à la muraille droite de la tour une ouverture rectangle biaise, c'est-à-dire allant en montant du dedans de la tour en-dehors, g g, haute de quatre pouces et demi sur dix de large. Cette ouverture est faite pour établir une communication entre la tour et la cavité dont nous allons parler.

On construit donc cette cavité ou chambre tout contre la muraille percée de la tour : on la fait de pierre et de façon que sa partie inférieure est un prisme creux h h h h, haut de six pouces, long et large de douze, terminé par une voute i i, décrivant un arc de cercle de six pouces de rayon ; en sorte que la hauteur du milieu de la chambre est en tout de douze pouces ; elle doit être totalement ouverte antérieurement, et garnie d'une porte de fer K, (fig. 59.) au moyen de laquelle on la ferme exactement. La surface intérieure de cette porte sera couverte d'un garni de deux pouces d'épais, qui sera soutenu, comme nous l'avons dit en parlant de la porte du fourneau de fusion, et même de celle de la bouche du feu de la tour. Au milieu de cette porte on fera un trou circulaire ou plutôt ovale l, de quatre ou cinq pouces de diamètre, à la circonférence duquel on attachera perpendiculairement au plan de la porte une bande de tôle saillant en-dedans, également pour contenir l'enduit qu'on y appliquera. L'embouchure de la chambre sera pourvue d'une feuillure large d'un pouce et profonde de deux, pour recevoir la porte lutée. L'usage du trou circulaire l, qui est au milieu, est de donner passage au cou d'une retorte ; et en cas qu'on n'en ait pas besoin, on la ferme à l'aide du piston A. Deux barres de fer horizontales n n, l'une en-haut et l'autre en-bas, tiennent la grande porte en situation, au moyen de quatre crochets de fer o o o o, enclavés dans le mur près du bord de la même partie. 8°. Comme on doit être le maître de diminuer le feu, supposé que faute de l'avoir manié assez fréquemment, on lui ait laissé faire trop de progrès ; il est-à-propos d'établir entre la tour et la chambre que nous venons de décrire, une porte de fer qui ferme l'ouverture oblongue g g, et qui intercepte par conséquent la communication qu'elles avaient entr'elles. On aura donc soin, en construisant la voute de la chambre, de laisser entr'elle et la muraille de la tour une rainure longue d'onze pouces et large d'un demi, laquelle descendra aussi perpendiculairement le long des bords antérieur et postérieur de l'ouverture de la tour g g, et un demi-pouce au-dessous de son bord inférieur. Cette rainure servira à maintenir une plaque de fer (fig. 58.) épaisse de six lignes, longue d'onze pouces et haute de cinq, et débordant par conséquent l'ouverture de toutes parts. A son bord supérieur seront attachées deux chaînes p p, pour l'élever ou l'abaisser. On les tiendra suspendues au moyen de deux clous à crochet * *, scellés dans le mur adjacent de la tour, et posés perpendiculairement sur chaque chaîne, dont on pourra varier l'élévation au moyen des différents chainons qu'on accrochera. La plaque de fer étant mise en place, on bouchera la rainure par laquelle on l'aura introduite, avec des pierres et du mortier, et on ne laissera que les deux petits trous nécessaires pour le passage des chaînes.

9°. Au côté droit de la chambre, à huit pouces de son fond, on construira avec des briques une cheminée q q q q, carrée, haute de quatre pieds, large de trois pouces et demi par le bas, et de trois seulement par le haut ; on la fermera avec une plaque de fer garnie d'un manche r r, (fig. 57.) et encadrée dans une rainure de tôle, s s s s, qui l'assujettira de tous côtés, excepté par-devant, où les deux lames de tôle doivent s'ouvrir pour la laisser mouvoir, ou manquer tout à fait. On scelle cette plaque avec son cadre dans les murs de la cheminée, à la hauteur la plus commode.

10°. Sous cette cheminée on fera une ouverture en carré long t t, semblable à la première g g, allant obliquement de bas en haut, et communiquant avec une autre cavité cylindrique haute de huit pouces u u u u, d'un pied de diamètre, ouverte par sa partie supérieure, et garnie dans son bord intérieur d'un cercle épais d'un pouce et large d'un demi, destiné à soutenir un chauderon de fer. A la partie antérieure de cette cavité, l'on fera une échancrure demi-circulaire, large de cinq pouces, et profonde de trois, allant en talus par-devant, v Ve pour transmettre le cou d'une cornue.

11°. Cette cavité exige un chauderon de fer, (figure 60.) de douze pouces de diamètre, de dehors en-dehors, à-peu-près profond de neuf, entouré à un pouce et demi de son bord supérieur, d'un cercle de fer x Xe large d'un pouce, qui y sera assujetti : ce cercle, au lieu de continuer sa route en ligne circulaire, comme il convient, l'interrompra pour accompagner le bord d'une échancrure aussi demi-circulaire y, large de cinq pouces et profonde de quatre et demi, faite au chauderon, la partie inférieure de laquelle doit être reçue par celle du mur v Ve

12°. Vis-à-vis l'ouverture t t, en carré long, qui établit la communication entre la première cavité et la seconde, on en fera, à deux pouces du fond de celle-ci, une pareille z aux deux autres g g, t t, allant également en montant du côté d'une troisième chambre i i i i, égale et semblable à la seconde u u u u ; afin que le feu puisse passer de celle-ci dans celle-là.

13°. On élevera sur le mur, du côté postérieur de l'ouverture z, une cheminée semblable à la première q q q q, de même hauteur 2 2 2 2, et pareillement garnie d'une plaque de fer, (fig. 57.) pour la fermer.

14°. On fera enfin au côté droit de la cavité i i i i, une troisième ouverture semblable aux précédentes g g, t t, z, mais plus éloignée du fond, laquelle au lieu de communiquer par sa partie latérale droite avec une autre cavité, sera fermée par un mur, et ouverte par sa partie supérieure qui répondra à une troisième cheminée 5 5 5, semblable aux deux premières q q q q, 2 2 2 2. Telle est la construction de ce fourneau, qui est très-propre à un grand nombre d'opérations. Nous en allons détailler une partie, et parler de ses usages et du mécanisme du feu dans l'athanor.

On peut introduire par la bouche du foyer de la tour qui est arquée e, une moufle longue de douze pouces, de même longueur et largeur que cette ouverture, épaisse de trois quarts de pouce, ouverte par-devant et par-derrière, supposé qu'elle puisse être fermée par la partie postérieure de la tour, jusqu'à laquelle elle doit s'étendre. On mettra sur la grille du cendrier d une plaque de terre cuite, pour servir de base à la moufle : cette moufle aura des trous près de son sol, ainsi que les mouffles ordinaires ; on y place des creusets de cémentation, ou d'autres corps, qui exigent pour être calcinés un feu long et violent : néanmoins ces sortes d'opérations peuvent se faire indépendamment de ce secours, quoiqu'avec moins de commodité et de facilité, pour voir ce qu'on fait et pour conduire le feu. 2°. On peut se servir de la première chambre pour faire des distillations, qui demandent un feu immédiat et violent ; car on y peut mettre des retortes ou des cuines ; mais il faut avoir soin de les placer de façon, soit qu'elles portent sur le sol de la cavité, soit qu'on les élève sur des pié-d'estaux particuliers de différente hauteur, selon la grosseur du vaisseau, que leur cou puisse passer librement à-travers l'ouverture l, de la porte k k k. Lorsqu'elle est bien assujettie à la faveur de ses deux barres, on lute toutes les fentes qui se trouvent autour de la porte et du cou de la retorte ; après quoi on lui ajuste une allonge, c'est-à-dire un fuseau ou espèce de cone tronqué, long de dix pouces ou plus, par l'intermède duquel les vapeurs brulantes ont le temps de se rafraichir, avant que d'arriver au récipient, qui est toujours de verre, et qui se casserait sans cette précaution. Cette allonge qui embrasse par sa base le cou de la rétorte, est reçue par son sommet dans celui du récipient, qu'on appuie ou sur le pavé, ou sur un trépié ou piédestal, qu'on élève ou abaisse à volonté, au moyen de trois vis. 3°. Cette même chambre peut encore servir à des cémentations, à des calcinations, et à d'autres travaux qui exigent un feu de reverbere ; et pour lors on ferme le trou l circulaire de la porte avec son bouchon A, et on ne l'ouvre que quand on veut voir ce qui se passe dans la chambre. 4°. La seconde et la troisième chambres sont employées principalement aux opérations qui se font avec le bain de sable, de cendre, ou de limaille. On introduit dans l'une des deux cavités le chauderon de fer fig. 60, et on lute avec de la terre glaise un peu molle, la petite fente qui se trouve entre son cercle et le bord de la cavité sur lequel il est appuyé, ou bien on la bouche avec du sable mouillé qu'on presse bien tout-autour. C'est pour donner un exemple de cet appareil, qu'on a représenté la retorte 9, placée dans le chauderon et ajustée à son récipient. Dans l'autre chauderon de fer, on voit une cucurbite surmontée d'un chapiteau 11, adapté à un ballon ou récipient à long cou 12. 5°. Ces deux dernières chambres peuvent encore servir, ainsi que la première, à des distillations au feu de réverbere ; et quoique le feu n'y soit pas si actif, il ne laisse pourtant pas de faire passer l'eau-forte. Pour cette opération on renverse le chauderon de fer fig. 60, et l'on introduit dans l'embouchure de la chambre son bord supérieur, saillant d'un pouce et demi au-delà de son cercle ; en sorte qu'il résulte de l'assemblage de son échancrure y, et de celle du fourneau v Ve un trou propre à transmettre le cou d'une cornue. 6°. L'appareil étant dressé, quel que soit celui qu'on aura choisi pour faire plusieurs opérations à-la-fais, on introduit d'abord par le haut de la tour quelques charbons allumés ; puis on la remplit de charbons noirs, en tout ou en partie, à-proportion du temps qu'on veut faire durer le feu. On ajoute incontinent son couvercle, et l'on répand tout-autour de son bord du sable, ou des cendres qui valent encore mieux, et on les comprime légèrement. Si on n'avait cette attention, tout l'aliment du feu contenu dans la tour flamberait et brulerait en même temps.

Comme on ne peut avancer rien d'absolument particulier sur le régime du feu dans le fourneau dont il est question, nous ne toucherons ici que quelques généralités sur cette matière : le reste s'apprendra aisément par la pratique, pour peu qu'on soit versé dans la Chimie. On rend très-violent le feu de la première chambre, si la porte du cendrier et la première cheminée sont entièrement ouvertes, et si la plaque de fer est tout à fait levée : au contraire plus cette cheminée et la porte du cendrier sont fermées, plus on y diminue la chaleur ; mais ce phénomène ne se passe jamais plus promptement que quand on abaisse en partie la plaque suspendue par les chaînes, car alors le feu contenu dans la tour ne brule plus que de la hauteur comprise entre la grille du cendrier, et le bord inférieur de la plaque de fer. Si l'on a intention de diminuer un degré de feu trop violent, sans cependant que les vaisseaux cessent d'être rouges, on doit se procurer cet avantage, en fermant autant qu'il convient la porte du cendrier et l'ouverture de la cheminée, la plaque de fer demeurant suspendue aussi haut qu'elle le peut être, et totalement renfermée dans la muraille ; parce que si l'on s'en servait pour remplir ces vues, l'activité du feu aurait bientôt détruit la partie de cette plaque qui lui serait exposée : d'où il suit qu'elle ne doit jamais être employée que lorsqu'il s'agit de régir un feu médiocre ou bien d'en diminuer un grand, au point qu'il ne rougisse que médiocrement les vaisseaux. On observera aussi qu'on ne tiendra ouvert que le moins qu'il sera possible, le trou circulaire de la porte de la première chambre, dans les opérations qui ont besoin d'un grand feu ; parce que l'air qui y entrerait avec impétuosité, aurait eu bien-tôt refroidi les corps qu'on y aurait placés. On peut faire en même temps dans la seconde et troisième chambres les distillations latérales et ascensoires dont nous avons parlé, puisque le feu se communique de la première à la seconde, et qu'on l'augmente dans celle-ci en ouvrant sa cheminée ; observant de diminuer l'ouverture de celle de la première, de la même quantité qu'on ouvrira celle de la seconde. Par la même raison, on peut déterminer l'action du feu sur des corps contenus dans la troisième chambre, et même lui donner issue par sa cheminée seulement, lui interceptant tout passage par les deux premières, ou bien ne lui en laissant pas l'une des deux, ou par les deux ensemble, qu'autant qu'on lui en diminuera par la troisième. Il suit évidemment qu'on ne peut avoir un grand feu dans la troisième chambre, que les deux précédentes n'en aient un semblable, et qu'on peut au contraire le diminuer dans celle-là, en fermant sa cheminée, sans changer son état dans celles-ci ; ce qui s'exécute en donnant la plus grande ouverture à la seconde cheminée. Les phénomènes sont les mêmes pour la seconde chambre, respectivement à la première. Enfin l'on ne peut donner un grand feu à la moufle placée dans le foyer, que la première cavité n'y participe : ce feu s'augmente ou se diminue en fermant ou en ouvrant la porte de la bouche du foyer, changement qui n'empêche pas que les degrés des autres chambres ne soient constants relativement les uns aux autres, quoique susceptibles de différentes nuances. Le reste s'apprendra facilement par l'usage.

Quoique la grandeur qui a été fixée pour l'athanor et les fourneaux d'essai fig. 50, et de fusion fig. 26 et suiv. soit la plus avantageuse pour les expériences en petit et en grand, il n'est pas absolument nécessaire de s'y conformer ; on peut l'augmenter selon le nombre et la nature des travaux qu'on y doit faire, en gardant toutefois les proportions que nous avons établies. On peut aussi faire l'athanor en tôle, si on veut l'avoir portatif.

Il suit donc évidemment qu'un pareil fourneau doit être utîle à un essayeur qui voudrait aller à l'épargne de ces sortes d'ustensiles, puisqu'on peut faire dans celui-ci quantité d'opérations qu'il est obligé de faire lui-même ; il lui convient d'autant mieux que la plupart d'entr'elles exigent un feu longtemps soutenu. Si la quantité de charbon que peut contenir la tour ne suffit pas, on peut en remettre comme dans les autres fourneaux : d'ailleurs le degré de chaleur en est toujours constamment le même, à-moins qu'on ne le change, et on a Ve qu'il pouvait se varier considérablement. Enfin ce fourneau est d'autant plus commode, qu'on peut appliquer facilement par son moyen tous les degrés de feu qu'il peut donner par différentes voies, et qu'on peut faire plusieurs travaux différents en même temps, et avec le même feu.

L'athanor fig. 61. se construit en briques, et reçoit les proportions qu'on lui donne, selon ce qu'on en veut faire. Celui-ci a trois pieds de long, autant de haut, et 18 pouces de large. On élève quatre petits murs de l'épaisseur d'une brique, et en même temps on en fait un qui Ve d'un côté à l'autre, entre les deux portes e et d. Il sert à séparer la cavité du cendrier d d'avec une autre cavité qui est en e, que nous appellerons l'étuve. Quand on a élevé en même temps ces cinq murs de briques à la moitié de la hauteur qu'on veut donner au fourneau, on couvre l'étuve qui occupe une moitié du bas, d'une plaque de tôle afin que la chaleur y pénetre. J'ai dit que les quatre murs du tour étaient épais de la largeur d'une brique, mais il est bon d'avertir que le mur latéral du cendrier est plein jusqu'à sa porte, comme la ligne ponctuée l'indique. Quand la plaque de tôle est posée, on continue tous les murs du contour jusqu'à la hauteur de quatre ou cinq pouces, excepté le mur de refend, qui ne passe pas la première plaque de tôle : d'ailleurs au lieu de continuer le mur à gauche du cendrier de la même épaisseur, on le fait en talud jusqu'au-haut que commence la tour, où il n'a d'épais que la largeur d'une brique. La ligne ponctuée indique ce trajet. On peut voir la même chose dans Charas et le Fêvre dont l'athanor est le double de celui-ci. Cet auteur couvre le talud d'une plaque de tôle unie, afin que le charbon coule mieux. La porte du foyer c ne s'ouvre qu'au besoin, mais celle du soupirail doit l'être continuellement, sans quoi le fourneau n'irait pas. A 4 ou 5 pouces de la première plaque de tôle, on en met une autre aussi de tôle ou de fonte, qu'on encastre pareillement dans le mur : celle-ci est destinée à soutenir le sable ; on laisse cependant aux quatre coins la place de quatre regitres, qui sont quatre tuyaux de tôle d'un pouce de diamètre, qu'on diminue si l'on veut avec des bouchons percés de différente grandeur. On élève ensuite les murs et le massif qui doit porter la tour à la hauteur d'un pied environ ; ensuite de quoi on fait la tour en terre, ou en tôle, ou en briques, cela est indifférent : on lui fait aussi un couvercle, qui la ferme bien juste, comme nous l'avons déjà dit du précédent athanor, dont la description ne sera pas inutîle pour celui-ci, quoique inapplicable dans bien des cas. La tour et son dôme dans notre figure 61 sont de terre. On conçoit aisément que la porte f de la chambre du feu, et la porte e de l'étuve, doivent être continuellement fermées, et particulièrement la porte f, car la porte e s'ouvre de temps en temps pour ce qu'on a à faire sécher à l'étuve.

Quoique l'invention des athanors, dont le feu brule dans la tour, soit effectivement bien commode, on a inventé après eux une sorte de tour, de laquelle le charbon tombe dans le foyer des fourneaux qui lui sont joints, et qui contiennent les matières, lesquelles par ce moyen en sont bien plus échauffées qu'elles ne seraient par une chaleur qui ne viendrait que de la tour.

Si après avoir allumé le feu dans les foyers des fourneaux de l'athanor de Charas (ce sont ses remarques), on remplit les canaux de la tour de charbon qui ne soit ni trop gros ni trop menu, et si ensuite on bouche les ouvertures de la tour et les portes des foyers des fourneaux, car la tour n'en a point du tout, non plus que de soupirail, on peut être sur d'avoir un feu égal, qui continuera du-moins pendant vingt-quatre heures ; ce feu chauffera très-doucement, si on bouche encore les soupiraux des fourneaux adjacens, et qu'il n'y ait d'ouvert que leurs regitres.

Quelquefois on fait carrée la tour de l'athanor, afin qu'elle communique sa chaleur à un plus grand nombre de fourneaux. On en voit un dans Libavius, dont la tour est hexagone ; en sorte qu'elle est environnée de cinq fourneaux, et a ses portes à son sixième côté. Ces sortes d'athanors se placent pour lors au milieu du laboratoire ; mais ils doivent marcher difficilement.

Le Fêvre et Glaser disent que le dôme de la tour de l'athanor peut être converti en un appareil utile, et qu'il suffit pour cela de mettre une terrine à sa place. L'intermède qu'on y mettra, déterminera la nature du bain auquel elle servira ; mais je croi que la chaleur de ce bain doit être bien faible : au reste c'est un essai qu'on peut faire aisément d'après le Fêvre qui en parle comme par expérience ; et peu importe que le dôme ferme la tour par sa partie convexe ou concave. Voyez-en l'appareil, page 144. de Biringuccio.

Nous pourrions citer ici avec le Fêvre, Glaser et Charas, une foule d'auteurs qui ont toujours mis quatre regitres aux quatre coins de leur athanor, comme on le voit dans notre figure 61. mais les deux regitres voisins de la tour ne me paraissent faits que pour ralentir l'action du feu ; et cela doit être évident pour ceux qui auront lu attentivement la description de l'athanor de Cramer, et qui considéreront le jeu du feu dans le grand fourneau anglais, ou dans notre figure 19-21. qui est la même chose, ou dans tous ceux qui approchent de leur structure.

Outre la grille du foyer de la tour de l'athanor, fig. 61, il faut qu'il y en ait encore une autre horizontale, comme celle des artistes qui font la cire d'Espagne. Charas n'en a rien dit, et il ne le pouvait pas ; il voulait que le charbon de sa tour tombât dans le foyer des fourneaux adjacens, et les remplit : mais il n'en est pas de même de notre figure 61, le charbon ne doit pas passer la grille de la tour, mais il la passerait nécessairement s'il n'était pas retenu par une grille horizontale qu'on ne voit pas, mais que la raison supplée aisément. Quand il y a deux fourneaux et qu'il n'y a qu'une tour, il faut nécessairement une plaque à l'une et à l'autre, comme à celui de Cramer, pour gouverner le feu. Cette plaque se trouve dans quantité d'auteurs, et est fort ancienne. Par ce moyen on peut se servir de leurs foyers sans allumer le charbon de la tour ; parce qu'on n'a pas toujours occasion de faire marcher deux fourneaux à-la-fais, et de faire des opérations qui demandent un feu de vingt-quatre heures ; mais pour lors les quatre regitres doivent être ouverts.

La tour de notre athanor, fig. 61, est conique. Cette figure est exigée par la plupart des auteurs. Voyez Charas, etc. Mais M. Cramer, comme on peut le voir, a cru pouvoir négliger cette précaution qu'on ne prend que pour empêcher que deux charbons se rencontrant par l'une de leurs extrémités, ne viennent à s'arcbouter par l'autre contre les parois de la tour, et à empêcher la chute de ceux qui se trouveraient par-dessus : mais il est bien aisé de voir que cet inconvénient n'aura jamais lieu dans une tour dont les parois verticales seront bien polies, et qu'il pourrait très-bien arriver même dans une tour de figure conique, dont les parois seraient raboteuses. On peut éviter cet inconvénient, soit que la tour soit conique ou pyramidale, en cassant le charbon comme pour les fourneaux ordinaires, avant que de le mettre dans la tour.

Il suit donc que si M. Cramer n'est pas le premier qui ait senti la nécessité de bien construire un athanor, il est au-moins le premier qui y ait remédié et qui l'ait bien figuré et expliqué. Son athanor Ve comme il le dit. On en a construit un à Paris d'après sa description, qui le prouve. Le mécanisme de ce fourneau doit être fondé sur ce que le feu veut monter, et non descendre. M. Cramer l'a bien vu, et c'est une remarque qui ne doit pas échapper à ceux qui examineront son fourneau : mais il me semble qu'il y a encore quelque chose à y mettre de plus ; c'est l'inclinaison dont nous venons de parler au sujet de la figure 61, afin que le charbon de sa tour, au lieu de descendre perpendiculairement comme il fait, descende obliquement pour s'approcher de la première chambre, et rende par-là le canal du feu plus droit. Nous appelons ici le canal du feu, la ligne que nous faisons passer par le soupirail, le cendrier, la grille, le foyer, la fenêtre biaise et la première cheminée, ou par la dernière cheminée aussi si l'on veut, et nous remarquons que plus cette ligne sera droite et ira de bas en-haut, mieux l'athanor marchera : mais comme cette première chambre a pour regitre une plaque de fer, il faudrait de toute nécessité à son fourneau la grille horizontale dont nous avons parlé, pour empêcher que le charbon venant à tomber sous cette plaque, ne s'oppose à la liberté qu'elle doit avoir de jouer dans ses coulisses, et de fermer tout à fait la fenêtre biaise de communication. Cette grille et l'inclinaison dont nous parlons, peuvent même être prises dans l'épaisseur du mur de la tour de M. Cramer.

L'athanor de Gellert ou celui de Ludolf, qui sont presque la même chose, ne sont quant au fond que celui de Cramer, augmenté de plusieurs chambres qui ne doivent pas beaucoup servir, si ce n'est d'étuve, peut-être, ou à empêcher que le fourneau n'aille bien, ou à y faire faire un feu si violent pour qu'il puisse être de quelqu'effet à l'autre bout, que le fourneau ne pourrait manquer de couler. Il y a pourtant cette différence commune entre les athanors de Cramer et de Gellert, et celui de Ludolf, que ce dernier auteur a construit le sien de façon qu'il faut que le feu descende au lieu de monter. Voyez le même défaut, Planche III. de Barchusen, page 77. de Barner, et Planche IV. de Manget. Au reste, on peut bien ne pas regarder les dernières chambres que Ludolf et Gellert ont ajoutées au fourneau de Cramer, comme tout à fait inutiles ; au-moins peuvent-elles n'être pas nuisibles entre les mains d'un bon artiste ; la longueur de l'athanor pouvant être considérée ainsi que nous l'avons déjà avancé, comme le canal qui sert à augmenter la vivacité du feu dans les fourneaux de fusion, et par cette raison-là étant dirigé obliquement de bas en-haut : il s'ensuit donc que la chaleur qui règne dans les chambres les plus éloignées, peut servir à quelques opérations, quoiqu'elle y soit faible. Je sens bien qu'en raisonnant sur les principes de la construction de quelques fourneaux en grand, comme du fourneau à l'anglaise, on croira que la chaleur dans le canal de l'athanor doit être semblable à celle de la cheminée de ces grands fourneaux, mais on serait dans l'erreur si l'on se fondait sur cette idée. Il y a une très-grande différence entre la flamme du bois qu'on brule dans le fourneau anglais, et la flamme du charbon, qui est peu de chose.

On peut considérer les fourneaux à lampe comme des athanors différents des autres par la forme et la pâture du feu. Il y a une certaine analogie entre la pompe d'une lampe et la tour d'un athanor.

Des fourneaux polychrestes. Ce sont des fourneaux qui, comme on le peut conjecturer par la signification du mot grec composé dont on les qualifie, servent à plusieurs opérations. Il y a même des auteurs qui prétendent qu'avec un pareil fourneau bien construit, on peut se dispenser d'avoir tous les autres, pourvu toutefois qu'on n'ait pas plusieurs opérations à faire à-la-fais. Examinons ces prétentions.

Les Chimistes ont observé que le même fourneau servait à plusieurs opérations. La nécessité en a étendu l'usage, et est devenu un principe. On a donné des preuves de sa sagacité en mettant les fourneaux à la torture ; mais on a fait voir qu'on n'en connaissait point la mécanique. Ceux qui ont appliqué les fourneaux à plus d'objets, ont été regardés comme les plus habiles ; et en effet, il a fallu de l'imagination. De-là est venu l'axiome, qu'un bon artiste avait besoin de peu d'instruments. Mais cela ne prouve que de l'analogie dans l'esprit de l'artiste, et de la sagacité si l'on veut, et non point-du-tout que les instruments soient bons à exécuter son idée ; de façon qu'elle ne pourrait l'être en moins de temps, de peine, de dépense, et avec plus de facilité par un autre. Malgré cela les plus habiles se sont exercés à chercher des fourneaux qui puissent servir à toute sorte d'usages, et il faut avouer qu'ils y ont réussi jusqu'à un certain point. Cependant on ne peut se dissimuler qu'ils sont partis d'après un principe erroné ; et quel principe ne l'est pas, ou peut être général ? Ils ne se seraient pas donné tant de peine s'ils eussent été bien convaincus que l'art des fourneaux n'était et n'est encore que dans son enfance ; et que leurs bonnes ou mauvaises qualités dépendent d'un rien qui n'a point été connu, et qui vraisemblablement ne le sera jamais. La connaissance des fourneaux serait certainement plus avancée, s'ils ne l'eussent pas retardée par leurs idées de vouloir prévenir la nature. Il fallait commencer par faire un fourneau simple parfait pour un seul usage, avant que de le vouloir appliquer à plusieurs ; et sans-doute qu'ils eussent été guéris de cette demangeaison. Ce n'est pas que je regarde la chose comme aisée et même comme possible ; car il me semble que l'exécution d'un pareil ustensîle dépend de la connaissance composée de la nature des matériaux qu'on y emploie, du feu qui y exerce son action, des vaisseaux et des corps qu'ils contiennent, et de l'espace à parcourir ; comme celle d'une machine dépend de la raison composée de la flexibilité des leviers, de leur poids, densité, frottement, etc. mais on peut au-moins tenter d'approcher de l'une et de l'autre.

Nous avons à donner des exemples particuliers de fourneaux polychrestes, sans compter que nous considérerons sous ce point de vue la plupart de ceux dont nous avons déjà parlé. Il ne faut pourtant pas croire qu'il faille autant de fourneaux que d'opérations, et que le même fourneau ne puisse et ne doive servir à plusieurs du même genre. Il faut donc entendre par polychreste, celui qui pourra servir à plusieurs opérations disparates, comme par exemple, distillation et fusion, etc. Nous avons à parler en premier lieu du fourneau de Dornaeus, fig. 75. et de celui de Beccher, fig. 71. le plus polychreste de tous, si l'on peut parler ainsi, ou celui qui se prête le mieux à la plus grande quantité d'opérations. Nous ferons revenir ensuite comme tels ceux qui nous paraissent plus précaires que ce dernier. Au reste, nous ne voulons point prevenir l'esprit du lecteur. Nous allons le mettre à portée d'examiner.

Les esprits fourmillent quelquefois d'inventions singulières qu'ils varient sans aucune nécessité jusqu'à l'intempérance. Quelquefois la nécessité ou l'économie cherchent à abréger les travaux, sans faire attention que, quand on veut faire à-la-fais deux choses différentes, on ne fait souvent ni l'une ni l'autre. Un bon artiste ne cherchera point à abréger mal-à-propos, et il évitera avec le même soin de prodiguer ses peines. Il sait employer les fourneaux et les instruments nécessaires, quoiqu'il voie qu'il faudra plus de temps et de dépense. Ceux qui voudront essayer de faire plusieurs travaux en même temps et au même feu, peuvent consulter Dornaeus. Ce chimiste donne un fourneau où l'on peut distiller de trois façons : par ascension au bain de sable et de cendres ; par le côté à la retorte ; et enfin par descension, dans le même temps, avec le même feu, sans beaucoup plus de peine, et dans peu d'espace ; car son fourneau est élevé et étroit ; et il ne lui était pas même difficîle d'augmenter son fourneau et ses vaisseaux, au cas que l'élévation de l'endroit le lui eut permis, pour distiller aussi au bain-sec, au bain-marie, et à ceux de vapeurs, de cendres, et de sable.

Il élève deux murs de briques, fig. 75. à un pied et demi l'un de l'autre. Ils ont aussi un pied et demi de haut, et autant de large ; ainsi le premier étage du fourneau est ouvert par-devant et par-derrière. Il pose sur ces deux murs deux barres de fer en-avant, et autant en-arrière, pour soutenir les murailles et le sol du second étage. Ces barres, comme on peut juger, ne paraissent qu'en-dessous. Elles sont à la hauteur de O ; on peut toutefois s'en passer en faisant un petit arc de voute entre les deux murs latéraux, comme on voit dans la partie antérieure du premier corps A. On laisse dans le sol qui sépare le premier du second étage B, un trou circulaire de 4 pouces de diamètre, pour passer le col d'un matras descensoire : ensuite on élève trois murs d'un pied et demi de haut ; à angles droits sur les barres O, pour former le second étage. Le devant est ouvert par une grande porte arquée. Sur les murs de ce second étage, on met des barres de fer à un doigt de distance les unes des autres ; c'est ce qu'on voit sous la retorte, dans l'espace I. On élève après cela trois murs nouveaux sur la grille pour former le troisième étage C. Mais quand on en est à la moitié de l'élévation, on place dans les deux murs latéraux deux barres de fer arquées au milieu, comme nous l'avons dit du fourneau d'Evonymus, fig. 45. à la sect. des fourneaux pour la distillation latérale ; ces barres servent à soutenir la retorte. Dans l'un de ces murs, au-dessous des barres de fer, on laisse une ouverture pour passer le col de la cornue. Le mur antérieur est toujours ouvert, et on ne le ferme que quand la cornue est placée ; seulement on y laisse deux petites ouvertures pour remuer le charbon. On met encore des barres de fer sur ce troisième étage pour soutenir les murs et le pavé du quatrième O. Mais avant on voute la chambre de la cornue pour en faire un reverbere, et on laisse au milieu de la voute un trou pour y jeter le charbon. On le ferme avec une brique, s'il est nécessaire. On élève ensuite les murs de la quatrième chambre, qu'on couvre aussi d'une voute au milieu de laquelle on laisse le trou S. On fait une porte arquée R dans la partie antérieure. Au trou S on met une grille pour soutenir un bain, si l'on veut se servir du trou T ; enfin on élève les derniers murs d'un pied et demi comme les précédents, pour former le cinquième étage E, en laissant encore ouverte une porte arquée pour donner la facilité de fermer le trou S d'une brique. On ferme la partie supérieure de ce cinquième étage avec de l'argille, mais on laisse encore un trou T au milieu pour une capsule de terre ou de cuivre. Aux quatre angles sont quatre regitres capables d'admettre le doigt, qu'on ferme avec des bouchons quand il est nécessaire. Telle est la structure de ce fourneau. Libavius, p. 168.

La capsule X contient du sable, au moyen duquel on distille de l'esprit-de-vin ou de l'eau-de-vie. Le récipient Y est dans cet auteur une cornue appesantie par un cercle de plomb à la manière d'Ulstadius, pour empêcher qu'elle ne flotte dans le bacquet Z plein d'eau froide. On voit encore une cornue servant de récipient dans la seule figure du laboratoire de Kunckel. Dornaeus se servait de ce fourneau pour tirer des huiles de végétaux et des animaux, comme il l'apprend, liv. III. chap. IVe de sa Chimie ; sans-doute qu'il faisait quelque digestion dans la quatrième chambre.

Je ne vois nul inconvénient à se servir d'un pareil fourneau. Je ne présume pas qu'on y puisse faire toute sorte d'opérations indistinctement ; mais je crois qu'il peut s'en trouver qui s'accordent assez bien pour aller ensemble, avec toutefois les restrictions que nous avons déjà mises. Au reste, on n'y dépense pas plus en charbon pour un vaisseau seul, que dans un autre plus simple. On peut, je crois, le regarder comme un fourneau de distillation latérale, dont la troisième chambre est l'ouvroir, les deux inférieures le cendrier, et les deux supérieures le tuyau de cheminée. Il semble que Glauber y ait pris l'idée des chambres qu'il met à côté du tuyau de son fourneau de fusion, fig. 6. et que Kunckel l'ait imité dans son fourneau de verrerie que nous avons donné, corrigé par Cramer, fig. 39. Ces derniers vont bien, celui-ci doit aller de même.

Le fourneau du laboratoire portatif de Beccher, fig. 71. dont nous avons renvoyé ici la description, à la section de ceux qui servent à la fusion, a 3 pieds 3 pouces de haut, 16 pouces de large dans la plus grande capacité de son ventre, et 9 de diamètre dans le bas. Ainsi c'est une figure conique ou entonnoir qui est vouté ou elliptique supérieurement. On le fait de tôle forte, et on lui donne un pouce et demi d'épais ; car c'est jusqu'à-ce point qu'on le couvre d'un garni fixe au feu, qu'on soutient avec des crochets de fer ; et on met aux bords supérieurs et inférieurs des différents corps, des anneaux de fer qui servent aussi à le soutenir ; ainsi que nous l'avons dit du fourneau de fusion de Cramer, fig. 26.

Ce fourneau est composé de quatre parties ; 1°. d'un dôme, 2°. d'un cercle ou couronne, 3°. de son corps, 4°. de son fond, piédestal, ou cendrier.

Ce dôme, à l'ordinaire, sert à couvrir l'orifice du fourneau, soit que la couronne y soit ou n'y soit pas. Les dimensions de l'un et de l'autre sont les mêmes, et la couronne est parfaitement cylindrique. Il sert à concentrer et reverbérer la flamme, comme cela est nécessaire dans les essais à la coupelle, la cémentation, la reverbération, et la distillation à la cornue, qui se font à feu ouvert. Ce dôme est aussi garni en-dedans, pour supporter le feu. Il a un trou supérieurement, qu'on peut tenir ouvert ou fermé jusqu'à un certain point. Non-seulement il est d'un grand usage pour gouverner le feu, il sert encore à recevoir les pots ou les ballons sublimatoires qu'on lui peut ajuster pour faire toutes les sublimations des fleurs, des minéraux, et les distillations abondantes des esprits salins ; c'est-à-dire toutes les opérations de Géber et de Glauber ; voyez nos fig. 5. 66. 67. et 98. en jetant les matériaux sur les charbons ardents, par la porte du corps, qu'on ferme sur le champ. On ôte les grilles de fer, et pour lors le feu tombe dans le cendrier D 1 ; on l'anime avec le soufflet ; et ainsi la matière quoique fixe en quelque sorte, est obligée de monter ou sous la forme de fleurs, ou sous celle d'esprit ; et le feu ne s'éteint point comme dans les fourneaux de Glauber. Le corps est muni de deux anses.

Vient ensuite le cercle ou la couronne, qui n'a que deux variétés dans nos Planches, comme on voit en B 1, et B 2, et qui dans Beccher en a cinq que nous avons cru inutîle de représenter, parce qu'elles peuvent s'entendre sans ce secours. La couronne B 1, sert à amplifier le fourneau, et à donner le feu de suppression dans la distillation et le coupellage ; à la cémentation, au reverbere, à l'ignition, et à la calcination. Pour donner le feu de suppression, on met donc ce cercle B 1 sur le corps C, et on lui adapte le dôme A avec la seconde grille seulement ; car il en faut trois pour ce fourneau. La première est celle qui se met en-bas tout près du cendrier ; la seconde, celle du milieu ; et la troisième, celle qui se met sur le corps C au-dessus de sa porte. Ces trois grilles tiennent par la seule figure du fourneau. C'est leur largeur qui fixe leur place, parce que le fourneau est un cone renversé. Il est à-propos, quand le garni est fait, d'y enfoncer un peu chaque grille, de façon qu'elle y fasse une petite gouttière, qui, quand il sera sec et dur, la soutiendra plus exactement. Dans cette circonstance où l'on emploie la seconde grille, on met le piédestal ou trépié D 2, s'il ne faut pas un grand feu, ou D 1, s'il le faut vif ; auquel cas on emploie le soufflet dont nous nous sommes contentés de représenter le muffle e. Pour lors on ajuste une cornue de terre ou de verre, de façon que son col passe par la porte ou échancrure du corps C, qu'on lute tout-autour de la cornue : ou bien on y met une moufle dans la même situation ; mais en sorte qu'on puisse fermer la porte. Les choses étant ainsi disposées, on jette par le trou du dôme, d'abord des charbons ardents, si l'on veut distiller de l'eau-forte ; ou bien si l'on veut un feu de suppression, on ne mettra les charbons ardents que les derniers. On laissera le feu s'allumer par les degrés qu'on voudra, et l'on continuera l'opération de même avec un feu plus ou moins violent. A l'aide de cet appareil, on pourra distiller à la cornue de l'eau-forte, de l'huile-de-vitriol, et autres esprits concentrés à la violence du feu. Mais si l'on veut calciner, cimenter, ou réverbérer, on ôtera la grille du milieu : on mettra la première au-dessous, et on ajoutera la troisième ; après quoi on adaptera le dôme après le cercle ou couronne B 1. On met les vaisseaux cémentatoires sur la troisième grille. On peut examiner les degrés du feu par la porte du cercle. Dans ce cas on se sert du piédestal en trépié. On peut gouverner la flamme par le regitre du dôme. On met les charbons par la porte du corps ; ainsi la flamme surpasse la grille la plus haute, leche et rougit les vaisseaux que cette grille soutient. Si la matière à cémenter, à reverbérer, ou à calciner était volatile, et qu'on voulut en retenir la partie la plus subtîle et la plus mobile, il faudrait mettre au regitre du dôme des vaisseaux sublimatoires, comme on en voit dans la figure. On voit évidemment l'utilité qu'on peut retirer d'une opération qui se fait sur un corps qui demande la troisième grille et le dôme. On peut encore essayer et réduire des mines dans des petits pots de cémentation, avec le flux noir ou un autre, à l'imitation des Métallurgistes. On peut mettre plusieurs vaisseaux en même temps dans ce fourneau.

Le second cercle B 2 s'ajuste avec le corps, de la même manière que le cercle B 1 ; avec cette différence qu'on n'emploie ni la troisième grille, ni le dôme. On a par ce moyen trois bains secs, à l'aide desquels on peut distiller dans des cornues de verre non lutées, sans observer les degrés de feu. Et il ne faut pas craindre malgré cela qu'elles se brisent. On peut même pousser le feu au point de les faire fondre, pourvu qu'elles restent dans leur entier ; l'opération n'en est pas moins sure, et elle en Ve plus vite ; car il ne faut que trois heures pour l'achever. Beccher dit qu'une pareille opération avait été admirée du roi d'Angleterre, qui l'avait vue avec le prince Rupert ; qu'il avait fait quantité d'expériences par cette méthode ; qu'on était surpris qu'il les fit avec tant d'exactitude en si peu de temps, avec si peu de dépense et de charbon ; et qu'il lui eut été impossible de s'en tirer à l'aide de son fourneau, de quelque genre qu'elles eussent été. On peut examiner les retortes tant qu'on veut, en levant le couvercle des bains secs. Tout ce cercle est aussi de fer avec les bains, mais il n'est pas couvert d'un garni en-dedans ; parce qu'il n'exige pas un feu si violent. Les trois petits couvercles qu'on voit dessus, ferment autant de regitres. On en voit un quatrième ouvert.

Le troisième cercle dont parle Beccher, et qu'il représente même, est un chauderon de cuivre ou de laiton, qui ne diffère en rien quant à sa figure du cercle B 1. Il sert pour les décoctions différentes, l'extraction, l'évaporation, l'inspiration. On l'ajuste à l'orifice du corps, dont on ouvre la porte pour laisser sortir les vapeurs ignées ; c'est aussi par-là qu'on jette les charbons sur la 1ere ou 2e grille. Ainsi l'on voit que ce chauderon doit avoir les mêmes dimensions, du-moins du côté du diamétre, que le cercle B 1, pour s'appuyer sur les bords du corps sans y entrer. Le corps du fourneau alors est porté sur son trépié. On peut de même employer pour toute sorte de décoctions un feu de la force requise. D'ailleurs si l'on a travaillé tout le jour, il conserve sa chaleur toute la nuit, et l'on peut en profiter pour la digestion de quelque corps, en y mettant un bain-marie, ou de cendre, ou de sable. Si on met la troisième grille dans le cercle B 1, sur ce cercle le vaisseau digestoire dont nous avons parlé, et si on introduit une lampe par la porte de ce cercle, on a un très-bon fourneau de lampe. Quelques artistes, comme le docteur Dinckinson, se sont fait construire ce fourneau pour faire des digestions seulement, parce qu'ils le trouvaient très-propre à ces sortes d'opérations.

Le quatrième cercle dont parle Beccher, et qu'il représente aussi, est une capsule de plomb, aussi semblable au chauderon et au cercle B 1 ; elle est conséquemment à large fond ; elle est garnie d'un alembic d'étain, ayant à-peu-près la même forme que les cucurbites qu'on vendait publiquement à Londres de son temps. Celles du nôtre peuvent y aller tout de même. Cette capsule distillatoire se met sur le corps immédiatement. On donne le feu, comme on l'a dit, au sujet du chauderon digestoire ; et l'on peut ainsi distiller très-commodément au-bain-marie des eaux de toute espèce, qui demandent cet intermède ; telles que les eaux et les huiles essentielles des plantes aromatiques, etc. On peut encore dissoudre avec cet appareil l'or des sables qui en contiennent, et autres corps dont Glauber fait mention, et dit qu'il retirait son dissolvant. Ce quatrième cercle n'est pas si bon qu'un chauderon de cuivre. Il n'a nul avantage qui doive le faire préférer, et il peut être sujet à un inconvénient qui doit le faire rejeter : c'est celui de se fondre.

Le cinquième cercle est une forte poêle de fer qu'on met sur le corps monté sur le trépié. On allume le feu sur la première ou seconde grille. Par ce moyen on peut ensoufrer et calciner pour la vitriolisation, faire des cendres d'étain et de plomb pour le minium, l'ochre et la litharge, décrépiter du sel marin, sécher la frite, fondre de l'alun, calciner du vitriol, et faire plusieurs autres opérations qui demandent un feu plus fort ; telles, par exemple, que celles qui conduisent à la vitriolisation et à la mercurification des métaux et minéraux. Toutes ces préparations peuvent être exécutées très-commodément avec cette méthode.

Jusqu'ici nous avons donné les usages raisonnés du dôme et des cinq cercles, ou plutôt cinq corps ou vaisseaux dont il était inutîle de représenter les trois derniers que tout le monde connait ; nous avons aussi parlé assez en général du corps du fourneau, et spécialement de ses trois grilles ; actuellement nous allons l'examiner en particulier. Il ne varie point, il est toujours le même pour tous les appareils. Il ne sert qu'à une seule opération, c'est la fusion, qui se divise en deux espèces : car il faut remarquer qu'il s'en fait avec et sans grille, avec et sans creuset, ce qui peut s'exécuter supérieurement dans le corps C. Dans ces deux cas, il ne faut ni le dôme, ni le cercle B 1. Le corps sera ouvert par le haut et par le bas, il n'aura que le piédestal D 1 avec le soufflet portatif monté sur son châssis. Si l'on veut fondre d'abord dans le creuset, il faut le mettre sur la grille du milieu, ou quelque massif de fer, ou un morceau de pierre apyre, dont la largeur sera déterminée par celle du pied du creuset ; car il ne faut pas qu'il soit à nud sur la grille, il se refroidirait. Le creuset étant couvert, ou avec du fer ou de la terre, jetez les charbons dessus, et faites jouer le soufflet, après avoir préalablement fermé la porte du corps : et la matière se fondra ; pourvu toutefois que le soufflet soit animé par une puissance active. Il y a trois avantages à considérer dans cette méthode. 1°. L'air ou la colonne supérieure de l'atmosphère ne peut frapper le creuset, ni conséquemment le casser, comme il arrive communément à ceux qui fondent le fer ; et l'on peut régler le feu à volonté : cela dépend du jeu qu'on donne au soufflet ; ce qui est impossible dans les fourneaux à vent. 2°. S'il arrive que le creuset flue, la matière tombe dans le piédestal D 1, et n'est pas perdue. 3°. On peut toujours regarder dans le creuset pour examiner le progrès de l'opération, et remuer la matière ; et l'on peut modérer le feu aisément par la facilité qu'on a de ne mettre que si peu de charbon qu'on veut, beaucoup mieux que dans les fourneaux de Glauber, ou semblables.

En second lieu, si l'on veut fondre sans creuset et sans grille, comme en Métallurgie, on ne saurait avoir d'appareil qui remplisse mieux ces vues ; et c'est même un très-bon moyen de faire un essai exact. Il ne faut pourtant pas vouloir travailler de la sorte en grand ; car les amateurs en ont été dégoutés par les sommes considérables que cela exigeait : malgré cela, on y fait par la réduction, des opérations très-utiles et des alliages de métaux peu connus jusqu'ici des artistes, à cause des difficultés de l'opération : on le fait même commodément et pas trop en petit ; car on y peut traiter à-la-fais jusqu'à dix livres de métal ou de mine, et de fer même. Or la disposition du fourneau est telle pour cette circonstance qu'elle l'était dans la précédente, c'est-à-dire pour la fusion dans le creuset ; à cette différence près, qu'on n'emploie ni creuset ni grille : seulement on conserve le soufflet et le piédestal D 1. On allume le feu par degrés, ensuite de quoi l'on jette alternativement des charbons et de la matière à fondre. Ce qui est fondu tombe dans le piédestal. Nous parlerons de cette opération en dernier lieu : enfin ce fourneau, dans cette circonstance, revient au même que celui de M. Cramer (fig. 26.).

Nous voici enfin parvenus à la dernière pièce de notre fourneau, c'est son fond ou fondement, ou piédestal, ou cendrier, qui est de deux espèces, comme nous l'avons déjà dit, et qu'on peut encore le voir en D 1. et D 2. Le premier est un cylindre dont on voit assez la grandeur et la figure, pour qu'il soit inutîle d'en parler ; on le remplit de brasque pesante : quand elle est un peu seche, on y enfonce un hémi-sphère de bois au point qu'on juge nécessaire, pour que la cavité pratiquée puisse contenir la matière fondue. On fait au fond un trou d'un pouce de diamétre qui Ve sortir à l'un des côtés du piédestal ; on est le maître de le tenir ouvert ou fermé. Le soufflet donne son vent vis-à-vis, directement à la superficie de la matière ; les scories et les charbons nagent sur son bain ; elle coule si-tôt qu'on ouvre le trou. En un mot Beccher assure avoir trouvé par ce moyen plusieurs mines, et fait des observations singulières au sujet de cette fusion : quant à la précédente, il est avantageux qu'on puisse toujours voir le creuset. Ici quand la matière est fondue, on ôte le corps, et elle reste dans le catin, ou bien on la verse au moyen d'un manche qu'on lui ajuste dans un crampon qu'on y attache exprès, si on ne la veut pas faire couler par le canal qui perce dans le milieu de sa cavité. Nous nous sommes déjà étendus là-dessus en parlant du fourneau de fusion de M. Cramer, fig. 26. et suiv.

D 2. est un trépié qui permet l'accès de l'air libre au fourneau pour différentes opérations, dans les cas où il ne faut pas un grand feu, c'est-à-dire l'appareil du soufflet et du piédestal D 1. car quand on emploie la fig. D 2. il faut aussi se servir de la première ou seconde grille. Il donne pourtant une grande flamme avec la fig. D. 2. et la pousse à quelques coudées par-dessus l'orifice. Il est pour lors d'un usage admirable dans plusieurs opérations où il n'est pas besoin de soufflet ; mais il faut encore faire remarquer une autre décomposition et assemblage de ce trépié D 2. Mettez dessus le dôme renversé, et par-dessus le cercle B 1. et vous aurez un très-beau fourneau descensoire. Vous pourrez mettre ou une cucurbite ou une retorte dans cette cavité, en faisant passer son cou à-travers le regitre du dôme ; lutez tout-autour et ajustez un récipient : allumez le feu par-dessus, et vous aurez le résultat que vous pouvez désirer, si vous employez toutefois les matières qui sont propres à être traitées par cette voie. En voici assez sur la structure et les applications de ce fourneau ; les Planches et leurs explications doivent y avoir suppléé.

Il faut avouer que Beccher épuise la matière par l'étendue de l'application qu'il donne à son fourneau ; on ne peut qu'admirer ses vues, et l'on ne doit pas douter qu'il ne dise vrai. MM. Cramer et Pott ne l'auraient pas imité et n'auraient pas fait les merveilles qu'ils racontent, si ce fourneau ou ses imitations n'avaient un mérite réel ; mais il doit user une quantité considérable de charbon, souvent pour peu de chose, ce qui est un grand inconvénient ; sans compter qu'il y a encore des opérations qui ne s'y font pas, et qu'il doit être fort incommode pour d'autres. Cependant nous croyons qu'il peut être exécuté avec beaucoup de fruit, et qu'il peut être très-utîle : au reste, on apercevra aisément entre les trois fourneaux en question les différences qui nous les ont fait admettre tous trois. On trouve quelque analogie entre ceux de Beccher et de Glauber.

Le fourneau de fusion de M. Cramer (fig. 26. et suiv.), que nous avons décrit à sa section, peut encore servir aux distillations et sublimations ; opérations très-utiles et même nécessaires ; en sorte qu'un essayeur, par exemple, qui n'aurait point l'athanor, pourrait se servir de celui-ci, pour y faire une partie des opérations qu'il exécute au moyen de l'athanor. Ce dernier lui est pourtant moins nécessaire qu'un fourneau de fusion ; car il peut faire dans celui-ci tout ce qu'il fait dans l'autre, à l'exception du coupellement qu'il fait dans son fourneau d'essai, et même encore le peut-il par la nouvelle variété suivante. Pour le rendre propre à tous ces usages, on n'a qu'à pratiquer au corps du fourneau une ouverture garnie d'une porte roulant sur deux gonds a (fig. 30.), semblable à celle du dôme. Sa base sera éloignée de trois pouces de l'anneau inférieur ; elle sera arquée, large de quatre pouces par le bas, et haute d'autant dans son milieu. La cavité elliptique en question recevra son complément du dôme (fig. 31.), garni de deux poignées au moyen desquelles on pourra le manier aisément. Ce dôme destiné à recevoir le chauderon de fer (fig. 60.), muni d'une échancrure, en aura pareillement une c, qui répondra à la première. Cette échancrure sera fermée d'une porte quand il faudra faire des opérations auxquelles le chauderon de fer ne devra point avoir de part. Pour favoriser le jeu de l'air et la conduite du feu, l'on pratiquera, tant dans le cercle supérieur du dôme, que dans le bord du chauderon, quatre trous ou regitres à égale distance les uns des autres ; et l'on fera autant de couvercles pour fermer le passage à l'air, quand on le jugera à-propos, quoique la porte du cendrier (fig. 28.), employée avec le fourneau dont il s'agit, puisse servir aux mêmes fins : les figures et l'explication que nous en avons données répandront de nouvelles lumières sur ce que nous venons d'exposer.

La variété dont nous venons de parler peut être employée dans la place de la fig. 26. et lui est même semblable, excepté qu'elle est séparée en deux corps, et qu'elle a des portes que l'autre n'a pas, mais qui ne préjudicient absolument à aucune opération, si ce n'est peut-être en donnant moins de chaleur et en s'échauffant plus lentement que la fig. 26.

Depuis fort longtemps on a pensé aux fourneaux polychrestes, comme on l'a Ve par celui de Dornaeus : depuis ce temps-là, et peut-être même avant, tous les auteurs en ont donnés et se sont exercés pour en trouver : Libavius, Béguin, Rhénanus, Glauber, Glaser, le Fêvre, Charas, le Mort, Beccher, Barner, Lémery, Manget, Barchusen, M. Teichmeyer, Boerhaave, Juncker, Cramer, Cartheuser, et Vogel, dont la succession est indiquée par l'ordre que je leur donne, en ont parlé les uns plus, les autres moins : il n'y a pas jusqu'au fourneau de notre fig. 1. qui ne se mêle aussi d'être polychreste ; car on peut s'exprimer de la sorte après avoir parcouru la description de celui de Beccher. Le premier que je sache qui l'ait donné, et donné comme polychreste, est Béguin, comme je l'ai déjà dit en son lieu ; je dis comme polychreste. Voyez la section suivante des philosophiques ; il est intitulé, pag. 80. de cet auteur, servant à toutes les opérations de Chimie. Il en dit ce qu'on peut penser là-dessus, et moins même quand on se rappelle le détail de Beccher.

Voici ce qu'on peut dire en particulier sur les fourneaux de décoction proprement dite, où l'on expose la matière dans une bassine, un chauderon, une cuillière de fer, etc. avec l'eau exposée à l'air libre. Ce sont les mêmes qui servent pour la distillation à feu nud, si le chauderon est surmonté d'un chapiteau ; au bain-marie, si l'on met dans ce chauderon un vaisseau d'étain qui baigne dans l'eau contenant la matière à distiller, soit à sec, avec l'eau ou l'esprit-de-vin ; au bain de vapeur, si ce même vaisseau d'étain n'étant pas assez profond pour baigner dans l'eau, qui en même temps n'est pas en assez grande quantité pour y atteindre, n'en reçoit que la vapeur. Voyez les artic. VAISSEAUX, ALEMBIC, POLYCHRESTE, BAIN-MARIE, et BAIN DE VAPEUR. Si l'on change l'intermède des bains, ils seront pour lors des bains de cendre, de sable, de limaille de fer, de farine de briques, qui y sont placés dans une poêle de fer ou capsule : ils servent encore aux calcinations qu'on y fait dans des capsules de terre ou de fer. On les emploie aux distillations dans la cucurbite basse ou chapelle des anciens, en passant une barre de fer ou deux dans des trous faits exprès, et lutant le contour de la cucurbite. Si les regitres ne sont point au-dessous du bord, on en laisse en lutant, et on les détourne du vaisseau distillatoire au moyen du lut ; ainsi c'est une peine de moins quand ils sont au-dessous du bord et non dans le bord intérieur. Les mêmes fourneaux servent encore pour les sublimations du soufre, du benjoin, etc.

Les fourneaux de lampe qui sont encore des polychrestes, ne sont, comme nous l'avons dit, que des fourneaux de décoction ou de distillation ascensoire et latérale, et par conséquent de bain-marie, de vapeurs, de cendres, de sable, ou de limaille, et de farine de briques, qui, au lieu d'être chauffés par des charbons, le sont par une ou plusieurs meches de lampe, parce qu'on a pour but d'y soutenir le degré fixe d'une chaleur modérée. Voyez les fig. 64. et 65. On ne fait plus guère d'usage aujourd'hui des fourneaux de lampe en Chimie ; le second peut servir pour la distillation latérale à feu nud. Voyez la section des philosophiques. Le premier est un de ces petits instruments qui ne sert plus guère qu'à ceux qui ne sont point chimistes de profession ; quelques physiciens, les gens du monde, et des femmes l'emploient à distiller quelques onces d'esprit-de-vin, d'eau-de-vie, d'eau-de-lavande, de thym, de romarin, de fleurs-d'orange, simples ou spiritueuses, de roses, de mirthe, de lait, de miel, etc. (voyez ABDEQUER) ; à faire chauffer du bouillon, de la tisane, etc.

On peut regarder à juste titre les athanors comme des polychrestes ; mais on ne peut pas dire l'inverse : c'est pour cette raison que nous avons mis les polychrestes après.

Le fourneau de verrerie de M. Cramer (fig. 39. 44. voyez la section des fourneaux de fusion) est aussi un polychreste ; les fourneaux d'essai, et les fourneaux de fusion en sont aussi : mais il ne faut pourtant pas abuser de ce terme au point de l'étendre à un fourneau où l'on fait deux opérations de même genre, comme on l'a déjà dit, comme les bains-marie et tous les bains, les fourneaux de décoction, etc. car il n'est point de fourneau où il ne se fasse qu'une seule opération ; et de la sorte tous les fourneaux seraient des polychrestes. Au reste il serait peut-être bon que cela fût ; la manie d'en faire de particuliers pourrait cesser.

J'ai dit qu'on avait étendu la nécessité de faire servir un fourneau à plusieurs opérations de différents genres, et ce sont sans-doute celles d'un même genre qui y ont conduit ; la preuve en est que les premiers fourneaux qui ont été employés dans ce dessein, ont pris le nom de polychrestes, que l'enthousiasme a ensuite converti en celui de catholiques ou universels. Cependant celui de Beccher, qui est le plus en droit de prétendre à cette prérogative, n'atteindra jamais à cette universalité ; et les enthousiastes du polychrestisme seront obligés de convenir qu'il laisse les autres bien loin derrière lui, comme plus précaires ; tels que les athanor et fourneau de fusion de Cramer : mais il y a toute apparence qu'il ne fond pas des corps d'aussi difficîle fusion que celui de M. Pott.

Des fourneaux philosophiques. On donne ce nom aux fourneaux qui sont particulièrement consacrés au grand œuvre, quoiqu'il s'entende aussi de tous ceux qui sont du ressort de la chimie philosophique, ainsi qu'on peut s'en convaincre par le titre de nouveaux fourneaux philosophiques, donné par Glauber au traité qu'il a fait sur cette matière. Ces sortes de fourneaux différent peu des autres, et ils peuvent être employés à la plupart des mêmes usages ; de même que les autres peuvent presque tous être employés à la confection de la pierre philosophale (voyez PHILOSOPHIE HERMETIQUE), en les ajustant toutefois à ce sujet.

Nous n'avons donné qu'un exemple de fourneaux philosophiques, à-moins qu'on ne comprenne au même rang les fourneaux à lampe (fig. 64. et 65.) les fourneaux de Géber (fig. 5. et 98), qui sont aussi des fourneaux philosophiques ; c'est celui de la Roquetaillade, plus connu sous le nom de Rupescissa, que la coutume pédantesque de son temps lui avait fait prendre : la coupe de ce fourneau que nous avons prise seule, se trouve pag. 48. de son livre in-4 °. intitulé liber lucis ; ouvrage qui, pour le dire en passant, n'a point été mis au nombre de ceux de ce cordelier, dans la notice que nous en a donné Bayle. Voyez son diction. critiq. art. Roquetaillade, note E. Ce chimiste appelle ce fourneau son athanor : athanor à la verité, est nn nom qu'Abulcasis donne indifféremment à toutes sortes de fourneaux chimiques, comme on peut le voir dans son liv. II. où il traite du vinaigre distillé. Mais il est bon de savoir que ceux qui ont traité de la pierre philosophale, ont entendu particulièrement sous ce nom le fourneau qui leur servait à cet usage, où ils convertissent, par ex. leur mercure préparé en lait de la Vierge, c'est-à-dire le dissolvent, le coagulent, et l'exaltent. Ce fourneau des arcanes, ce fourneau d'Hermès et des philosophes, ce fourneau enfin qui portera tel beau nom qu'il plaira à MM. les adeptes de lui donner, doit être construit de façon qu'il puisse fournir trois degrés de chaleur à la volonté de l'artiste, et sans que le feu frappe immédiatement la matière du grand-œuvre, ni le vaisseau qui la contient ; il faut qu'il ne donne précisément qu'une vapeur chaude qu'on soit le maître de modérer. Il faut donc qu'il ait un foyer et même une grille de cendrier, en cas qu'on veuille le chauffer avec le charbon, comme cela se fait d'ordinaire ; car on peut avoir recours au ventre de cheval ou au feu de lampe ; l'ouvroir y est nécessaire : c'est pour éloigner le vaisseau du feu, qu'on a fait le foyer élevé, et pour reverbérer la chaleur qu'on a mis un dôme ; en sorte que ce fourneau est fait de quatre pièces. Ce dôme est concave, parce que le ciel a cette figure (ou parait l'avoir) ; ce qui lui a fait donner le beau nom d'Uraniscus. Il a des trous autour pour regitres ; celui du milieu sert à observer le degré de chaleur : Libavius qui a représenté ce fourneau, pag. 166. de son alchimie, dit l'avoir fait exécuter en terre, s'en être servi, y avoir Ve ce noir qu'on appelle la tête du corbeau, et y avoir fait toute la putréfaction et séparation ou dissolution.

La hauteur du fourneau sera de trois pieds et demi, et la largeur d'un pied et demi inclusivement : le cendrier sera haut d'un pied, y compris la grille et le sol du fourneau. Le foyer sera terminé à la hauteur de neuf pouces par un diaphragme de fer ou de terre, ayant dans son milieu un trou rond de quatre pouces de diamétre, pour la communication de la chaleur. On aura trois regitres ou lames de tôle plus larges que le trou ; ces lames de tôle seront percées et auront, la première une ouverture de trois pouces de diamétre, la seconde une de deux, et la troisième une d'un seul ; on appliquera sur le diaphragme celle qu'il faudra ; cela dépendra du degré de chaleur qu'on voudra donner. L'ouverture aura quinze pouces de haut de puis le diaphragme jusqu'au dôme : sur ce diaphragme on placera un trépié de terre ou de fer, de trois pouces et demi de diamètre, et de six de haut ; c'est sur ce trépié qu'on place l'œuf philosophique : le tout est surmonté d'un dôme de fer hémisphérique, haut de six pouces. Le regitre du milieu est d'un pouce de diamètre, on en approche la main pour régler le feu ; on place sur le trépié une sphère creuse partagée en deux hémi-sphères : cette sphère a sept pouces de diamètre ; on y enferme un œuf philosophique de terre.

Le trou du diaphragme sans regitre étant de quatre pouces de diamètre, passe pour donner une chaleur de quatre degrés. Si l'on ne veut que le troisième degré, on a recours au regitre ayant un trou de trois pouces de diamètre, et ainsi de suite. La grille est de beaucoup trop grande pour le premier et second degré : ainsi il faut la changer ou mettre dessus une feuille de tôle qu'on puisse graduer à volonté : Libavius en a fait faire de différentes pour les divers degrés de feu, percées comme la grille d'une rape. Quelques artistes ont un catin où ils mettent du feu ; ce catin est percé de petits trous, et placé sur la grille dont il fait les fonctions ; on lui fait de grands bords. Quand on a fixé le regitre l, on lute bien les vides qu'il laisse. Dans Libavius il y a un tuyau de quelques doigts de haut, attaché au bord du trou du diaphragme ; et le regitre se glisse néanmoins entre deux : le trépié l'embrasse et porte dessus à la place des œufs partagés en hémi-sphères. On met encore une cucurbite dans laquelle on renferme l'œuf philosophique, et qu'on scelle quelquefois hermétiquement ; car si la figure de Rupescissa a été faite selon son intention, il y a toute apparence que tantôt il a scellé ainsi sa cucurbite, et tantôt il l'a laissée ouverte. Ce fourneau est portatif et peut être divisé en moins de corps ; on peut encore le faire de différentes grandeurs ; quelques artistes l'ont voulu transporter, comme il arrive aux faux-monnoyeurs de transporter avec eux tous leurs ustenciles : mais le vrai chimiste sera un philosophe sédentaire, pag. 165. de la Scevastique de Libavius. On trouve encore la description et la figure de ce fourneau, pag. 87. tom. I. de la bibliothèque chimique de Manget.

Le fourneau de lampe est appelé fourneau secret des philosophes, et aussi fourneau des arcanes. Ceux qui en voudront davantage là-dessus pourront consulter les descriptions qui en ont été données par Isaac le Hollandais, Paracelse, Despagnette, Raimond Lulle, Bernhard, etc.

Il est évident que le fourneau donné par la Roquetaillade, qui vivait au quatorzième siècle, a dû fournir tout naturellement la construction du fourneau de notre fig. 1. qui n'en diffère qu'en ce qu'au lieu d'un diaphragme ouvert, elle a deux barres de fer et un trou pour passer le cou de la cornue ; on observe encore qu'il n'y a qu'un regitre au dôme.

Nous aurions peut-être dû placer les fourneaux polychrestes après ceux-ci, comme étant censés servir aussi au grand-œuvre par la généralité qu'ils affectent ; mais nous aurions par-là confondu la philosophie hermétique avec la Chimie positive ; ce que nous avons voulu éviter.

Généralités sur la division des fourneaux. Il est évident que tous les fourneaux qui précédent tirent leur dénomination des opérations auxquelles ils sont destinés.

On eut peut-être souhaité que cette division eut été déduite des qualités intrinseques de chaque espèce de fourneau, de même qu'on a distingué les plantes par les pétales, par exemple, etc. mais les fourneaux sont un acte de la raison humaine ; ils sont tous construits sur le même principe, l'action de l'air et du feu ; et leurs accessoires dépendent du corps à traiter ou du vaisseau qui le contient, ou bien de tous les deux ensemble. Ainsi quoiqu'ils puissent absolument être considérés en eux-mêmes, et abstraction faite de ces différentes conditions, elles cessent en quelque sorte de leur être étrangères, puisqu'elles sont le principe de leur structure ; et l'on ne peut les en séparer, qu'on ne sépare les moyens de la fin qui leur a donné naissance, et qu'on ne réduise alors les fourneaux à de simples êtres chimériques et devant leur origine au hasard, quoique capables de servir à quelques usages. On n'en peut pas dire autant des vertus des plantes, qui ne sont pas des productions humaines ; il a donc fallu diviser les fourneaux, non d'après l'action combinée de l'air et du feu, qui n'y exige par elle-même aucune différence, mais d'après les corps auxquels on veut appliquer le feu.

Telle est la division que nous avons cru devoir établir pour mettre quelque ordre dans ce que nous avions à dire : on la regardera peut-être comme un système de plus qui ne servira qu'à charger la mémoire ; mais il est aisé de ne faire attention qu'aux faits.

Nous avons fait onze sections des fourneaux, d'après l'usage dont ils sont dans les opérations ; ce n'est pas qu'elles se bornent à ce nombre, mais il y en a quantité et même de très-différentes, qui se font dans les mêmes ; et nous entendons parler de celles qui demandent quelque changement particulier dans la construction d'un fourneau, quoiqu'elle soit presque la même quant au fond ; il est bon d'avertir qu'il se trouve dans la plupart d'entr'eux des diminutions ou additions qui les rendent plus propres à remplir les vues qu'on se propose. Si nous n'avons point parlé des fourneaux de cémentation, par exemple, c'est que cette opération ressemble à une fusion, quant à l'appareil, et que les fourneaux de celle-ci servent à celle-là ; car quoi de plus semblable qu'un creuset à fondre, et un creuset ou pot de cémentation ? cependant on ne confondra pas aisément ces deux opérations.

Les derniers fourneaux n'ont été mis avec les vaisseaux, qu'afin que l'appareil fût complet, c'est-à-dire pour accompagner les vaisseaux et figurer avec eux, de même que ceux-ci ont été représentés au commencement pour accompagner les fourneaux ; avec cette différence toutefois, que les fourneaux sont faits pour les vaisseaux, quoi qu'en dise Manget, qui appelle ceux-ci vaisseaux secondaires. L'utîle nous a conduits, l'agréable s'y est trouvé.

Autant que nous avons pu, nous avons fait dessiner d'après nature les fourneaux représentés dans nos Planches ; mais il en est un certain nombre qui ne se trouvent que dans les ouvrages des Chimistes. On s'attend bien de trouver surtout parmi nos ustenciles, ceux qui sont aujourd'hui en usage ; on pensera même tout naturellement que nous avons dû consulter le laboratoire de M. Rouelle, qui est très-bien fourni en ce genre. Nous n'avions garde de négliger cette ressource, et il nous a été ouvert avec cet empressement qui nait du désir de contribuer au progrès des Sciences. Nous lui devons les figures 1, 2, 3, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 54, 61, 73, 74 et 161. Nous aurons soin en parlant des vaisseaux et ustensiles, de reconnaître aussi ceux que nous aurons fait dessiner chez lui. Par-tout nous avons indiqué nos sources, et nous avons cité de notre mieux en parlant des différents auteurs où l'on peut voir la même figure, afin de satisfaire ceux qui seront curieux d'y recourir, et de reconnaître en même temps ce que nous devons à autrui. Tout devient intéressant pour ceux qui aiment et cultivent une science ; non contens d'être parvenus à ses bornes, ils aiment encore à en examiner les progrès, et savoir à qui l'on est redevable de ceux qui l'ont amenée au point où ils la trouvent. Nous ne devions pas épuiser les matières, mais nous avons fait en sorte de piquer la curiosité de ceux qui voudraient en savoir autant qu'il est possible.

On ne voit pas, au moins que je sache, que les chimistes qui ont écrit avant Géber, aient eu soin de nous parler des ustensiles qu'ils ont employés pour leurs opérations ; c'est cependant par-là qu'ils devaient commencer. Est-ce mystère ou ignorance de la vraie méthode ? On peut dire qu'ils font l'extrême de quelques auteurs modernes, qui pour lier un fait à ce qui a été inventé avant eux, commencent leur narration dès les éléments de la science, dont leur découverte doit reculer les bornes.

Quoiqu'on puisse faire quantité d'opérations chimiques dans le même fourneau, et qu'il y en ait quelques-uns de ceux qui sont représentés dans nos Planches qui reviennent presqu'au même, nous avons cru devoir rassembler tous ceux qui pouvaient entrer et être nécessaires dans un laboratoire philosophique qu'on voudrait rendre complet, et dans lequel on serait obligé de faire plusieurs opérations à-la-fais dans différents genres, afin que ceux qui voudraient s'occuper de ce travail, pussent choisir de quoi se satisfaire. La plupart des auteurs s'accordent sur six, qu'ils regardent comme nécessaires et suffisans : ceux de distillation latérale, le grand fourneau de décoction pour la cucurbite de cuivre, un fourneau à capsule, un fourneau de fusion à vent, un fourneau d'essai, et un athanor.

Nous avons cru devoir nous étendre sur cette matière avec d'autant plus de raison, qu'on n'en trouve rien dans les autres dictionnaires. Trévoux n'en dit que très-peu de chose, et même ce qu'il y en a n'est pas exact. Le grand dictionnaire de Médecine, où l'on aurait dû trouver cet article très-détaillé, avec de nombreuses planches, n'en donne qu'une mauvaise définition de quatre lignes. MM. Boerhaave et Cramer ont fait l'un et l'autre une faute contre la vraie méthode, en commençant l'un sa chimie et l'autre sa docimastique par la théorie, ou la partie la plus abstraite de ce qu'ils traitaient, et en comprenant dans cette théorie, et encore à la fin, la partie des fourneaux et des vaisseaux, qui sont un sujet très-pratique. On doit écrire comme on doit enseigner ; et dans un livre et un cours de Chimie faits méthodiquement, on doit débuter d'abord par les vaisseaux et fourneaux.

Si quelques personnes croient que nous avons trop insisté sur le détail de la description de chaque fourneau en particulier, nous les prions de considérer que nous avons cru ne pouvoir être utiles qu'en nous comportant de la sorte ; que tel qui veut construire un fourneau aime à en trouver la description à son article, sans être obligé de l'aller chercher par comparaison dans celle d'un autre fourneau différent, ou dans des généralités inutiles à ceux qui ne savent point et à ceux qui savent ; par la raison que les premiers n'en sauraient faire l'application à des cas particuliers qu'ils ignorent, et que les derniers n'en ont pas besoin, parce qu'ils les savent. Enfin je serais presque tenté de dire que ceux qui trouveront que nous en avons trop dit, sont précisément ceux pour qui nous n'en avons pas dit assez, et qui seraient incapables d'exécuter la plus étendue de nos descriptions, même quand nous l'augmenterions encore. Une pareille description doit être jugée sur la facilité de son exécution ; il faut pourtant supposer que ceux qui l'entreprendront soient artistes, au-moins en général. Nous ne parlons point des autres.

Nous avons rejeté comme insuffisantes les distinctions qui ont été faites des fourneaux en fixes et portatifs, en ronds et carrés, en simples et composés, en fourneaux à vent, à soufflet, à tour, ainsi que celles qui ont été tirées du vaisseau dans lequel on y traite les corps ; de la manière dont le feu y est appliqué, du nom de l'auteur, de l'effet de leur matière, figure, de leur grandeur : ces différents noms doivent être connus ; mais comme ils ne sont dû. qu'à quelques accessoires, à des conventions ou à des qualités communes à quelques fourneaux seulement, ils n'ont pu se prêter à la méthode que nous avons voulu suivre par les raisons que nous allons détailler.

Il n'y a peut-être point d'auteur qui ait parlé des fourneaux, qui n'ait repété machinalement la plupart des divisions que nous venons de proscrire, sans en mentionner les avantages ni les inconvéniens. Il n'était pas étonnant qu'ils ne parlassent point des avantages, nous ne pouvons y en trouver ; mais nous allons indiquer les inconvénients que nous y voyons.

Les moindres sont un fatras de noms qui ne servent qu'à charger la mémoire. Voici les autres.

1°. La division en fixes et en portatifs n'est d'aucune utilité, en ce qu'elle ne change point la nature du fourneau ; car le même exactement peut être fixe et portatif dans bien des cas. On peut comparer nos figures première et trois dans tous les cas où il ne faudra que le degré de feu que le fourneau de la figure première pourra supporter ; car alors on pourra toujours se servir de la figure troisième, comme de la figure première : d'ailleurs il n'est pas toujours nécessaire qu'un fourneau soit fixe pour soutenir la violence du feu ; celui de Pott qui est en tôle, en est la preuve.

2°. Que veut dire la distinction entre fourneau rond et fourneau carré ? La figure extérieure, car c'est d'elle qu'il s'agit ici, influe-t-elle sur les qualités du dedans ? C'est faire trop d'honneur à des distinctions aussi frivoles, que d'en parler.

3e. Celle des simples et des composés a d'abord un air spécieux : mais que signifie-t-elle au fond ? veut-on mettre en comparaison des fourneaux qui servent à plus d'opérations, ou qui ont plus de parties, ou qui ont plus de variétés que d'autres ? Nous avons fait voir que tous les fourneaux pouvaient servir à plusieurs opérations, plus ou moins ; ainsi on ne peut rien dire que de vague sur cet article. En second lieu s'agit-il ici de la différence qui peut être entre un athanor et un fourneau de distillation, quant à la quantité des pièces ? il est vrai qu'il y a de ces derniers qui n'en ont qu'une ; mais il y en a aussi qui en ont quatre et cinq, comme il y a des athanors qui n'ont que la tour et un petit fourneau de décoction pour lequel seul elle a été construite ; et d'ailleurs l'athanor est d'une seule pièce.

4°. En fourneaux à vent et fourneaux à soufflet. Sous le nom de fourneaux à vent, on entend tous ceux dont le feu n'est point animé par les soufflets, mais seulement par le jeu de l'air ; en sorte qu'il serait plus à-propos de les appeler fourneaux à air, si l'usage n'en avait autrement décidé : ainsi tous ceux que nous avons mentionnés doivent être placés dans ce rang, hors ceux-ci seulement ; la forge qu'on peut voir dans les Planches du Fondeur en cuivre, qui est le seul vrai fourneau à soufflet, et qui ne Ve jamais sans cela ; les fourneaux de fusion, fig. 26, 36, 37 n°. 1. et 71, mais seulement quand ils vont par le moyen du soufflet, car ils sont plus souvent animés par le jeu de l'air. Ainsi ce que nous pourrions avoir à dire actuellement sur les fourneaux à soufflet, s'entend assez par la distinction que nous venons de faire. La Chimie philosophique n'emploie le soufflet que dans un petit nombre de circonstances, si l'on considère le nombre total de ses opérations, et ce n'est guère que pour le règne minéral qu'elle en fait usage. Il s'ensuit donc qu'on ne doit regarder que comme un nom, l'expression qui ne tombe vraiment que sur la forge seule, ou tout-au-plus encore sur notre fourneau d'affinage (figure 17), qui n'est au fond qu'une forge ; cette expression étant équivoque pour les autres fourneaux que nous avons exceptés, par la raison qu'ils sont tantôt à vent, et tantôt à soufflet.

5°. En fourneaux à tour : ceci n'est encore qu'une expression qui ne tombe que sur un seul fourneau qui est l'athanor.

6°. On a encore nommé quelques fourneaux du nom du vaisseau dans lequel on y traite les corps, tels sont les fourneaux à capsule ; mais on a dû remarquer qu'en ôtant leur vaisseau on leur ôtait aussi leur nom, et qu'ils n'étaient plus pour lors que des fourneaux de décoction ou de distillation ascensoire, ou même latérale. Voyez nos figures 5, 12, 13, 14, et 161. Il est vrai qu'il y en a qui ne servent qu'à cet usage, comme par exemple notre athanor, fig. 61, en supposant qu'il n'eut point de tour ; mais ce sera un bain de sable tout simplement ; et s'il a une tour, ce sera un athanor à bain de sable ; autrement il faudrait dire un fourneau à tour et à capsule.

7°. D'autres ont été nommés fourneaux de reverbere, d'après la manière dont le feu y est appliqué. Toutes les fois qu'on a Ve un fourneau où la flamme ne pouvant s'échapper librement, et réfléchie par leurs parois ou d'autres obstacles, retomber sur elle-même, ou se frapper continuellement, se reverberat, verberibus in se agit ; d'où ce terme est venu, on a appelé ce fourneau de reverbere : mais comme on n'a Ve ou cru voir ce phénomène que dans quelques fourneaux seulement, il n'y en a eu aussi que quelques-uns qui ont été décorés de ce titre. On a encore appelé de la sorte ceux où la flamme n'était que réfléchie sur le corps sans circuler autour, comme celui de notre figure 15, et le grand fourneau anglais, ainsi que nous l'avons dit à la section de ceux qui sont employés à l'affinage. Mais il me semble qu'il y a plus de fourneaux de reverbere qu'on ne pense, et qu'il n'y en a peut-être pas un seul en Chimie, où la qualité reverbératrice ne se rencontre. Nous la voyons dans les fourneaux de distillation ascensoire, où la chaleur est certainement obligée de circuler et de se réfléchir sur elle-même et autour de la cucurbite, avant que de sortir par les regitres ; et nous ne voyons pas un individu dans cette section toute entière qui fasse exception. Ceux de distillation latérale sont ceux qui ont été nommés plus généralement fourneaux de reverbere, mais ils ne le sont pas plus que les autres ; il est vrai que le vaisseau y est entouré de la chaleur, mais il l'est bien mieux encore dans une forge, etc. et ce n'est pas du vaisseau environné de la chaleur que ce nom est tiré, mais de l'action de la flamme ; car le fourneau (fig. 15.) à calciner la potasse, et le fourneau anglais, sont des reverberes. Les fourneaux de distillation descensoire seront certainement des reverberes, si on les couvre par le haut. Tous les fourneaux de fusion sont éminemment dans le même cas, comme nous le verrons plus particulièrement dans la suite, et cependant on n'a jamais pensé à joindre ces deux mots ensemble, fusion et reverbere. Enfin les fourneaux d'essai, d'affinage, de verrerie, les athanors, les fourneaux polychrestes et philosophiques, sont tout autant de reverberes. La forge, surtout quand on la couvre d'un carreau, les fourneaux à lampe, de décoction, et généralement tous les fourneaux, peuvent être appelés des fourneaux de reverbere ; et ce n'est pas abuser des termes, comme on a fait en ne nommant ainsi que quelques fourneaux : car soit que la chaleur y circule par une construction particulière, ou par un dôme, ou par un vaisseau, qui en fait en quelque façon l'office, ou un carreau, ou une plaque de tôle, la chose revient au même, et c'est une qualité qui entre dans la définition d'un fourneau. C'est pour cette raison que nous avons fait plus d'usage de ce mot dans nos descriptions, comme signifiant une action dont la flamme était susceptible, que nous ne l'avons employé comme une qualification ; et si nous l'avons employé quelquefois dans ce dernier sens, c'est parce que nous n'avons pu renoncer tout-d'un-coup à l'usage reçu. La division des fourneaux d'après les opérations, prouve ce qu'on avance. Il s'ensuit donc qu'on peut rejeter et admettre ce mot dans le sens que nous avons expliqué.

8°. Quelques fourneaux ont retenu le nom de leur auteur, et il faut avouer que cela apprend quelque chose, et qu'il est juste que ceux à qui l'on a ces obligations, en retirent tout l'honneur qu'ils méritent ; mais ce n'est qu'un trait historique qui ne désigne point la nature du fourneau. Les noms de Beccher, Glauber et Dornaeus qui servent à distinguer leurs fourneaux dans l'usage, ne veulent point dire que celui de Beccher est un fourneau de fusion qui sert à quantité d'opérations, etc. au reste je crois qu'il vaudrait mieux que tous les fourneaux portassent le nom de leur auteur, et n'eussent que celui-là ; ce serait un embarras de moins, et on n'en connaitrait pas moins tous les usages auxquels ils peuvent s'étendre.

9°. On s'attend bien que nous aurons de l'indulgence pour ceux qui ont nommé les fourneaux d'après leur effet ; mais nous aurions souhaité qu'ils eussent été plus conséquents. De tous les auteurs que nous avons parcourus sur cette matière, et qui ont parlé de cette distinction, nous n'en avons pas trouvé un seul qui n'en ait admis d'autres en même temps ; elles se trouvent parmi celles que nous proscrivons.

10°. Les différentes matières employées à la construction des fourneaux, leur ont encore mérité des noms qu'on a cru pouvoir apprendre quelque chose. Il est vrai que dans leur description on doit dire, s'ils sont fixes, ronds ou carrés, en terre, en brique, en tôle ou en fonte ; mais je ne vois pas que ces noms doivent leur rester ; ils n'y apportent aucune différence, le même fourneau pouvant être construit de diverses matières.

11°. La figure des fourneaux (on entend ici l'intérieure) a été trop vague aussi pour qu'on ait pu s'en servir comme d'un signe pour les reconnaître. Un fourneau elliptique n'est pas plus un fourneau de fusion que de distillation, etc.

12. Leur grandeur n'a pas dû non plus constituer leurs noms ; ce n'est une distinction bonne tout-au-plus qu'à s'entendre dans un laboratoire, soit pour les fourneaux du même laboratoire, soit pour ceux des travaux en grand.

13°. La qualité de fourneau à dôme est encore applicable à plusieurs espèces, et par conséquent trop vague.

14°. Les fourneaux domestiques ne font rien à la Chimie ; à la bonne-heure que l'économie les ait admis, de même que la Chimie a profité de l'économie domestique. Nous dirons néanmoins que ce sont pour l'ordinaire des fourneaux de décoction, comme ceux des figures 12, 13, etc. plus ou moins mal-faits, et criblés de trous. Il y en a d'autres cependant qui ont leur utilité, et qui sont très-bien construits pour ce à quoi ils sont destinés. Qu'on s'imagine qu'au fourneau de la décoction de la figure 12, il y a à l'opposite de la bouche du foyer un trou d'un pouce et demi de diamètre environ, auquel on fait un petit tuyau de terre qui se termine aux bords du fourneau, et Ve quelquefois un peu plus haut, pour être reçu dans un tuyau de poêle ; ils servent à la cuisine. Quant aux autres fourneaux de cuisine, ils n'entrent point dans notre plan, quoiqu'ils soient de notre compétence. Nous n'en parlons ici que pour dire qu'ils sont très-mal faits pour l'ordinaire.

On fait mal-à-propos synonymes fourneaux domestiques et d'apothicaire.

15°. On a pu voir par ce que nous avons dit des fourneaux de lampe, que l'aliment du feu n'y apportait pas une différence bien considérable ; car c'est du feu de la lampe qu'il est ici question, et non de sa figure, soit qu'on y brule de l'esprit-de-vin ou de l'huîle : on aurait dû par la même raison dire fourneaux à bois, à charbon, à tourbe, etc.

Tout fourneau a son cendrier, sa grille et son foyer, disent Stahl, le Fêvre, Charas, et quantité d'autres ; mais il existe un fourneau d'essai qui n'a ni grille ni cendrier, ou dont le cendrier et le foyer sont confondus : d'ailleurs le fourneau à lampe n'a pas de grille ; mais on peut dire, je crois en général, comme le même Stahl, qu'il n'y a point de fourneau qui n'ait une partie dont la figure est la même dans tous, et que chacun en a outre cela au-moins une qui lui est propre.

Nous ne parlerons point des autres distinctions en ouverts et fermés ; en fermés par une fermeture plate ou convexe ; en droits et renversés ; à canaux ; perpétuels et extemporanés ; composés de parties contiguès et continues ; paresseux et vigilans ; libres et fixés au mur ; elles ne servent de rien, et ne méritent pas qu'on s'y arrête.

Nous n'avons encore rien dit des regitres qu'en passant et en particulier ; nous ne les avons, pour ainsi dire, encore guère considérés que comme des trous qu'on faisait au-haut d'un fourneau, excepté en parlant de l'athanor (fig. 56.), du fourneau de fusion (fig. 26), et de quelques autres. Voici ce que nous avons à ajouter sur cette matière.

Des regitres. Un regitre est une ouverture pratiquée à la partie supérieure des fourneaux, pour servir de passage aux vapeurs fournies par l'aliment du feu, et au torrent de l'air qui l'anime. Ce nom vient de régir, parce qu'on gouverne le feu par ce moyen. On n'a point encore de règles certaines pour la proportion que ces regitres doivent avoir avec le reste du fourneau. Glauber demande un tiers de son diamètre pour le regitre : Boerhaave n'en veut qu'un quart pour le même fourneau de fusion. Il est fort peu question des autres.

On avait fait des fourneaux de décoction, etc. ayant pour regitre des échancrures dans le bord qui touche le vaisseau, et il faut avouer que c'était-là la meilleure place qu'on put leur donner ; mais on est revenu à faire quatre trous au-dessous de leur bord supérieur. Voyez nos figures 2, 12, 13. C'est la méthode ancienne ; voyez notre figure 76, qui est de Libavius.

Quand on met un bain au lieu de dôme dans le fourneau de distillation latérale fig. 1, les regitres se trouvent faits tout naturellement par les échancrures des barres inutiles pour lors.

Il y a des regitres qui méritent vraiment ce nom par l'espèce de ressemblance qu'ils ont avec ceux des orgues ; tels sont ceux de la forge et du fourneau de fusion fig. 8. Au reste c'est leur usage, et non la figure qui décide. On appelle encore regitres les instruments, ou ces petits parallélipipedes de terre cuite, qu'on met devant les soupiraux de la moufle.

Une ouverture seule au milieu du dôme fait que la chaleur est par-tout égale dans le fourneau, et plus concentrée ; d'ailleurs il est plus aisé de la fermer. Quand il y en a trois ou quatre, il faut les tenir toujours ouverts, ou si on les ferme dans la suite, ne les pas rouvrir ; car il arrive que la partie de la retorte qui est vis-à-vis, et qui s'est refroidie pendant qu'ils ont été fermés, parce que la chaleur n'a plus été déterminée de ce côté-là, se fend parce qu'elle est frappée d'une chaleur subite : cet inconvénient arrive d'autant mieux qu'elle est plus épaisse, par la raison que la table interne ne peut pas être dilatée en même temps que l'externe. Cet usage d'un seul regitre au milieu du dôme est fort ancien, comme nous l'avons remarqué à la section des fourneaux philosophiques. Peu d'auteurs en ont mis quatre. Il n'y a eu que quelques mauvais artistes ou fournalistes qui en ont introduit ce nombre de temps-en-temps.

Si les regitres sont au nombre de quatre, et tout-autour du dôme du fourneau servant à la distillation du vinaigre, de la manne, du miel, etc. fig. 74. c'est qu'on ne peut pas les placer ailleurs, qu'on les laisse ouverts continuellement, et qu'il ne faut qu'une chaleur douce pour ces sortes d'opérations.

Quoiqu'il soit vrai qu'on augmente le feu en ouvrant les regitres, cela n'a pourtant lieu qu'à l'égard de ceux qui ne sont pas trop grands ; car plus on en ouvrirait, et plus on devrait augmenter le feu, au lieu qu'on le diminue réellement si on en ouvre trop ou s'ils sont trop grands : ainsi il n'est question dans cet axiome que des regitres qui sont en proportion avec le reste.

Les regitres doivent être au plus un tiers ou un quart du diamètre du cendrier, dont je crois qu'on peut régler la porte sur le diamètre du fourneau. Celui de Glauber, par ex. a un pied de diamètre, ainsi égale dimension suffira pour son soupirail, et le tiers ou le quart, comme on a dit, pour le tuyau. Quant au soupirail, je pense qu'il suffit qu'il fournisse au foyer ; mais le foyer n'a que cette largeur, et elle est même diminuée par la grille et les charbons : ce sera donc assez pour le soupirail, ce sera même trop ; mais dans le cas où l'on ne peut apprécier au juste la quantité convenable, il vaut mieux pécher par cet excès que par le contraire ; et je crois qu'on doit s'en tenir à cette dimension, une plus grande ne serait pas fondée en raison, comme on voit au fourneau de Boerhaave ; elle est même nuisible, comme il est aisé de le penser, et comme nous le dirons en parlant des athanors. Mais il n'en est pas de même du tuyau ou cheminée, il ne doit pas avoir le même diamètre que le fourneau : ceci au reste est une affaire d'expérience, sur laquelle on n'a pas encore fait beaucoup d'observations. On peut néanmoins assurer, qu'en faisant un fourneau de manière qu'il aille toujours en retrécissant, il admettra plus d'air qu'il ne lui en faut.

Au reste, si l'on pense qu'un soupirail de même diamètre que le fourneau ne suffise pas, il faudrait, non l'élever ni faire plusieurs portes tout-autour du sol du cendrier, cela serait inutile, mais agrandir le diamètre du cendrier lui-même, et par ce moyen on aurait une porte plus large ; car il est aussi inutîle de la faire plus haute que large quand elle est de la largeur du cendrier, que d'en mettre plusieurs tout-autour, de cette même largeur. Cela ne peut avoir lieu que quand chacune d'elles n'a qu'une partie du diamètre du cendrier, et en ce cas elles ne doivent faire entr'elles que la somme de sa largeur.

Des degrés du feu. C'est par le moyen des regitres et du soupirail, comme nous l'avons déjà dit en plus d'un endroit, qu'on règle les différents degrés du feu. Voyez ce qu'on en a dit à l'article FEU.

Les Chimistes se sont un peu plus donné de peine pour régler les degrés du feu, que pour la construction des fourneaux ; et cependant l'un et l'autre devaient aller ensemble.

Les anciens avaient distingué quatre degrés de feu ; le premier était le bain de vapeur, le second l'eau bouillante, le troisième la rougeur des métaux, et le quatrième la fusion. Ils avaient fait encore une autre gradation, dont les distances étaient moindres : le premier degré était le bain de vapeur, le second l'eau bouillante, le troisième le bain de cendres, le quatrième le bain de sable, le cinquième le bain de limaille, etc. Nous nous contentons de les exposer pour en montrer l'insuffisance.

Ils avaient encore distingué les premiers degrés de feu par le tact ; mais cette méthode était extrêmement incommode, et n'allait pas bien loin ; d'ailleurs on sait en Physique qu'elle est très-incertaine.

Vanhelmont compte quatorze degrés du feu d'après l'intensité qu'il doit avoir dans son application, et l'augmentation exacte de cette intensité.

Le degré des bains de vapeur et marie sont les mêmes, et approchent beaucoup, selon la remarque de Czwelfer, de celui de l'eau bouillante, qui est le seul constant ; ainsi il ne faut pas les donner dans toute leur étendue, si on veut qu'ils approchent, par exemple, de la chaleur animale.

Le bain de vapeur s'appelle encore bain de rosée ; et le bain-marie a d'abord été nommé bain d'immersie ou de mer ; &, par une corruption introduite par Basîle Valentin, bain-marie, en l'honneur de la Vierge.

Les cendres, qui doivent être criblées, donnent un degré presque aussi fort que celui du sable, et s'échauffent plus lentement : mais comme il serait à craindre qu'elles ne fissent casser le vaisseau en conséquence de l'humidité que prend leur sel, il les faut dessaler avant. Elles ne retiennent pas non plus la chaleur si longtemps que le sable, etc. par cette même raison qu'elles sont plus rares.

On peut donner le même degré de chaleur à une cornue au bain sec, comme nous l'avons Ve en parlant du fourneau de Beccher, et peut-être plus fort qu'au bain de sable ou de limaille, par la raison que les particules ignées ne se dissipent point en l'air.

Il faut que le sable soit pur et criblé ; s'il était mêlé de grosses pierres, il s'échaufferait inégalement et casserait les vaisseaux. Il doit aussi être sec ; s'il était mouillé, il casserait encore les vaisseaux, ou, s'il avait le temps de se sécher, il formerait des pelotes qui reviendraient au même que les pierres ; et ainsi de la limaille et des cendres dans le même cas. Il faut que la capsule de ces bains soit couverte d'une autre pour éviter le contact de l'air froid.

D'autres ont évalué les degrés de feu par les différentes ouvertures des regitres ; d'autres au moyen du thermomètre de mercure divisé en degrés très-petits, comme on peut le voir par la chimie de Boerhaave. Cette méthode est assez exacte, et serait préférable à toutes les autres ; mais l'application de cet instrument est quelquefois très-difficile, d'autres fois tout à fait impossible ; car on peut à peine aller jusqu'au mercure bouillant ; d'ailleurs on est sujet à en casser une prodigieuse quantité. Nous croyons cependant qu'on en peut faire usage, et que cet usage peut avoir son utilité dans les travaux qui ne demandent qu'un leger degré de chaleur. Vogel, d'après Boerhaave, divise le feu en cinq degrés : le premier est celui de la chaleur animale, et il s'étend depuis le trente-quatrième jusqu'au quatre-vingt-quatorzième degré du thermomètre de Fahrenheit ; le second depuis le quatre-vingt-quatorzième jusqu'au deux-cens-douzième degré de l'ébullition ; le troisième depuis le deux-cens-douzième jusqu'au six-centième, et c'est celui de la combustion, et qui rend les vaisseaux d'un rouge obscur ; le quatrième degré depuis le six-centième jusqu'à la fonte du fer ; et le cinquième celui des miroirs catoptriques et dioptriques. Telle est la preuve que nous avions à donner des difficultés de trouver les degrés du feu.

On peut voir dans la physique souterraine de Beccher, page 500. l'application des thermomètres aux fourneaux.

Mais puisque les thermomètres ne peuvent aller que jusqu'à un certain point, et que la plupart des chimistes veulent avoir une connaissance des degrés du feu qui ne me parait pas fort importante ; car le degré de feu nécessaire à fondre de l'or, est celui où ce métal se fond ; ne pourrait-on pas mettre en œuvre la dilatation de certains corps solides, du fer, du cuivre, par exemple ? On en ferait passer une barre à-travers un fourneau, et on pourrait mesurer sa raréfaction ou son allongement, comme on le fait en Physique, au moyen d'une machine graduée ; et dans les cas où l'on passerait la fusion du fer, ne pourrait-on pas avoir recours à un cylindre de pierre apyre ? Il est vrai que je propose ici des machines embarrassantes, et peut-être même impraticables ; j'invite les savants à nous donner quelque chose de plus satisfaisant.

On ne connait point encore les bornes du feu produit par les miroirs ardents, à cause de la difficulté de s'en servir. Voyez les Mém. de l'acad. des Sciences, les élém. de chim. de Boerhaave, page 121. et l'article LENTILLE de Tschirnaus. Avant M. Pott, on ne savait pas que le feu ordinaire s'étendit au-delà de celui des fourneaux de verrerie ordinaires. Voyez ce que nous avons dit à la fin des fourneaux de fusion. On peut toutefois établir cette gradation entre les feux les plus violents, en commençant 1°. par le fourneau de M. Pott, au-dessus duquel sont encore les feux ; 2°. la lentille de Tschirnaus, connue sous le nom de lentille du palais royal ; 3°. le miroir de Vilette, ou concave du jardin du Roi ; et enfin 4°. celui du Briquet, qui est le plus vif de tous, puisqu'il scorifie le fer dans un instant presque indivisible.

Nous avons dit qu'il était difficîle de conserver un thermomètre de mercure en l'introduisant dans un fourneau ; car il ne peut pas toujours l'être dans le vaisseau, quoique cela fût mieux, et qu'on risquât qu'il ne s'y rompit. Nous avons aussi laissé penser que les progrès d'une opération étaient le meilleur thermomètre sur lequel un artiste exercé pouvait se régler. Mais dans le cas où il serait possible d'employer cet instrument, ne pourrait-il pas se faire que la même opération précisément demandât un degré de feu différent, parce qu'elle se ferait dans un fourneau et un vaisseau plus ou moins épais, ou avec une quantité de matière différente ? Au reste, la connaissance de ces degrés de feu, n'est qu'une curiosité de plus, et n'est pas d'une grande utilité.

De l'aliment du feu. Les différentes matières combustibles avec lesquelles on entretient le feu dans les fourneaux ont été mentionnées à l'article FEU. Cet élément est le principal instrument des Chimistes, comme il l'est de la nature ; ils ne font rien que par le feu ; aussi ont-ils pris le titre vrai et sublime de philosophes par le feu. Les Romains avaient fait une divinité de certains fours. Voyez les fastes d'Ovide. Si les Chimistes eussent été moins philosophes, ils auraient peut-être fait le même honneur à leurs fourneaux ; mais ils les ont imités à bien plus juste titre en déïfiant le feu, leur agent universel. Le feu s'entretient dans les fourneaux, non-seulement de la pâture qu'on lui donne, mais encore de ce que l'air nécessaire à son mouvement lui porte. Le concours de l'air est nécessaire pour l'embrasement, comme tout le monde sait, et comme le seul Stahl l'a bien expliqué dans ses trecenta, et autres ouvrages : en sorte qu'on pourrait définir le feu une matière qui fait effervescence avec l'air, et qui tire sa force du mouvement qui nait de ce mélange. Mais l'air n'anime pas seulement le feu par ses parties propres, il augmente encore son aliment par les corps qu'il y porte. Tels sont le feu élémentaire qui est peut-être nécessaire pour le rendre fluide ; l'acide sulphureux volatil qui s'y trouve (Voyez STAHL, trecenta) ; la transpiration des animaux, les sels volatils, les huiles, les semences, les poussières, les odeurs, l'eau, les sels, et peut-être des minéraux et des métaux. Boerhaave. Il ne fait donc pas juger le feu des fourneaux par sa simple qualité de vapeur élastique ; peut-être même produit-il ce phénomène plus par l'eau qu'il contient, que par lui-même, soit que cette eau agisse directement comme un corps mu, ou indirectement en le condensant ; ce qui est prouvé par l'action de l'air qu'on tire d'un endroit frais, comme de la rue ou d'une cave, par le moyen d'une trompe.

Il y a un choix à faire dans le charbon ; les plus durs et les plus sonans doivent être préférés : ils conservent la chaleur plus longtemps, et la donnent plus vive. Ceux qui sont faits de bois plus durs que le chêne, valent encore mieux. Tels sont ceux de gayac, par exemple, qui rendent un son clair, et sont très-compactes et pesans. Les plus mauvais de tous sont ceux de tilleul et de sapin ; ils sont mous, brulent vite, et donnent peu de chaleur. On doit rejeter les fumerons ou charbons mal cuits, parce que la suie ou l'humidité acido-huileuse qu'ils exhalent, peut nuire aux opérations où l'on ne peut pas employer le bois ; cet inconvénient a fait quelquefois tomber en apoplexie le fameux distillateur Glauber. Les charbons doivent être tenus dans un lieu sec ; ceux qui ont pris de l'humidité pétillent et s'écartent de toutes parts en conséquence de l'explosion que leur cause l'humidité dont ils sont impregnés, explosion qui brise souvent les vaisseaux.

Le charbon de terre donne une chaleur plus vive et plus durable ; mais il donne de mauvaises exhalaisons, même quoiqu'on l'ait calciné. Barner, Stahl.

La tourbe qui est composée de pédicules et de racines de plantes entrelacées et impregnées d'une terre bitumineuse, conserve aussi le feu assez longtemps, et elle donne une flamme claire : mais elle donne encore des exhalaisons nuisibles. Quand on en veut chauffer un fourneau, on en prend un morceau, on le fait flamber dans le feu, et on l'éteint dans l'eau : quand on en veut allumer d'autres morceaux, on met celui-ci dans le feu ; il s'embrase promptement, et sert à mettre le feu aux autres. Stahl, fund. page 46.

Tout le monde sait quel est le meilleur bois pour l'usage, et de quelle grosseur il doit être pour ce qu'on en veut faire.

L'huîle et l'esprit-de-vin sont très-commodes, en ce qu'ils fournissent en abrégé un aliment qui entretient longtemps le feu, quand il le faut doux sans-doute : mais Vogel y trouve cet inconvénient, que l'esprit-de-vin est trop cher, et que l'huîle donne un charbon qui retombe aisément et souvent sur les meches, s'allume tout-d'un-coup et occasionne une explosion ; il dit encore que quelquefois elles sont éteintes par le charbon ou le champignon qu'elles forment ; en sorte qu'outre la dépense on court du danger, si l'explosion se fait quand on en est près. Mais je ne crois pas qu'on doive se laisser aller à ces craintes : en premier lieu, on ne ferait pas au même prix avec le charbon ce qu'on fera avec l'huîle ; si cet aliment coute beaucoup, c'est qu'il faut qu'il brule longtemps ; il a raison au sujet de l'esprit-de-vin, il est beaucoup plus cher et dure moins que l'huîle : en second lieu, si les lampes ont fait beaucoup de charbon, c'est qu'il en a mal arrangé les meches, et qu'il a brulé de l'huîle très-épaisse. Quand le lumignon d'une lampe est bien fait (voyez Leutmann,) on peut le laisser bruler quatre heures sans y toucher : de toutes les huiles qu'on brule la plus mauvaise, sans contredit, pour la poitrine, est celle de navette ; cette huîle contient un alkali volatil qui échappe au-moins en partie à la déflagration, ou qui s'élève de la lampe échauffée.

Généralités sur le jeu de l'air et du feu, et sur son aliment dans les fourneaux. On chauffe pour l'ordinaire les grands fourneaux de décoctions, ou servant à la courge, au grand alembic de cuivre de quelques pieds de diamètre ; enfin ces fourneaux que nous avons dit ressembler à notre fig. 3. excepté qu'ils sont un peu moins élevés à-proportion ; on les chauffe, dis-je, avec le bois, pour épargner la dépense. Ils ont un tuyau de poêle pour la sortie de la fumée : mais s'ils sont mal construits, c. à d. si le cendrier et le foyer ne sont distingués que par leur grille, qui ne laisse entrevoir au-dehors qu'une seule et même porte, comme on le voit dans quantité de laboratoires, et par notre fig. 84. tirée de la Pl. III. de Lémery, où il y en a deux l'un contre l'autre ; la fumée est sujette à sortir par la porte du cendrier, sans qu'on puisse l'en empêcher, à-moins que le tuyau qui dérive la fumée ne soit bien fait et bien exposé, et encore y a-t-il des temps où il fume. Il faut donc que ces deux portes soient éloignées l'une de l'autre, sinon comme dans notre fig. 3. au-moins à-peu-près autant : on peut la citer comme un exemple de ces sortes de fourneaux, au-moins quant au fond ; car les autres n'ont besoin ni d'échancrure ni de dôme. Il s'ensuit donc nécessairement que le fourneau de décoction aura une grille, et ils n'en ont pas tous ; ce qui est un défaut ; et cette grille est nécessaire pour remédier à l'inconvénient en question. Par-là la bouche du foyer étant exactement fermée avec une brique qui aura l'épaisseur de la paroi du fourneau, et lutée, s'il est nécessaire, la fumée sera obligée d'enfiler son tuyau de poêle, ou de descendre dans le cendrier ; et elle ne peut pas s'échapper par ailleurs : car on suppose que le fourneau n'ait pas de crevasses, et que la cucurbite de cuivre soit bien lutée tout-autour. Mais la fumée ne pourra descendre dans le cendrier, qu'elle ne passe à-travers la flamme ; et elle n'a pas le temps de faire ce trajet, qu'elle est toute consumée et qu'on n'en voit rien ; car on n'a jamais Ve de fumée sortir du cendrier, pourvu toutefois que la grille soit bien garnie de braise. Ce phenomene qui existe particulièrement dans le poêle sans fumée, et qui est le principe de sa construction, pourrait être appliqué aux poêles ordinaires ; nous en parlerons encore dans la suite. On aurait plus de chaleur avec la même quantité de bois, surtout si on y joignait la disposition du poêle à l'italienne, imité de ceux de Keslar et des ventouses de Gauger, quant au tuyau seulement, et non quant à la circonvolution de la flamme : on y a, dis-je, plus de chaleur, parce que la fumée s'y brule ; ce qui est autant de perdu pour l'aliment du feu ; et il n'en faut pas nettoyer le tuyau si souvent.

Que la fumée devienne la pâture du feu toutes les fois qu'elle est soumise au mouvement de ce principe, c'est ce que nous n'entreprenons point de prouver ici : on peut voir les articles FUMEE, HUILE, et PHLOGISTIQUE : au reste il est aisé de comprendre que la suie n'est qu'une fumée concrete, et l'on ne sait que trop qu'elle est capable de bruler. Nous nous bornons donc à parler des cas où la chose arrive. La fumée du four du boulanger n'est plus humide, plus blanche, ne blesse moins la vue, et enfin ne sent mieux celle du foin mouillé qu'on commence à allumer, que parce que l'huîle qui en fait une grande partie est presque toute consumée avant que de sortir du four où elle était renfermée, où elle a circulé et a été forcée de passer à-travers une étendue de flamme assez considérable ; ce qui fait qu'on n'en nettoie que rarement les cheminées, et qu'on n'y trouve qu'une petite quantité de noir de fumée, qui ne se voit point dans les cheminées des cuisines.

La flamme du grand fourneau anglais ne ressemble point à la flamme ordinaire ; je puis même avancer qu'on n'en a aucune idée si on ne l'a vue : cette singularité n'est dû. qu'à la fumée, qui étant exposée à l'ardeur de la flamme dans un long canal (car ce fourneau a souvent une cheminée de vingt à trente pieds de haut, au-dessus de laquelle on voit la flamme la nuit), brule en vapeurs, c'est-à-dire étant divisée en des molécules très-fines qui forment autant de petits points lumineux très-rouges : pour en donner une idée qui en approche, je la comparerai à du carmin en poudre fine qu'on agiterait rapidement dans un vase de verre crystallin, ou aux vapeurs formées de l'acide nitreux le plus concentré, qui auraient l'éclat du feu ; car la flamme de ce fourneau est obscure, tant elle est chargée ; ce qui peut venir de la cendre qu'elle entraîne. On a encore quelque chose d'approchant dans quelques compositions de feux d'artifice. Il ne doit donc point ou presque point sortir de fumée par la cheminée de ce fourneau : la chose est démontrée par l'art qu'on a de mettre au sommet de la flamme d'une chandelle ou d'une lampe, un petit tuyau métallique où la lumière monte et consume le peu de fumée qu'elle laisse échapper. Nous avons Ve qu'on peut se dispenser d'employer ce tuyau pour la meche de la lampe par l'arrangement qu'on lui donne ; ce qui est encore appliquable à ce dont il est ici question.

On pourrait m'objecter que les fourneaux des cloches et des canons remplissent l'atmosphère du hangard qui les couvre d'une matière fuligineuse, tendre, et légère, comme on peut voir à l'arsenal de Paris, etc. mais c'est prêter de nouvelles forces à ce que j'ai avancé. Cette matière fuligineuse ne blesse point la vue ; elle est en petite quantité, malgré celle du bois qu'on brule pendant plusieurs heures, et si légère qu'elle se soutient dans l'air sans paraitre tomber, semblable à celle de la chandelle qui ne se repose que dans les endroits les plus tranquilles et les plus à couvert de l'agitation de l'air ; avec cette différence pourtant, que celle-ci est plus charbonneuse, plus noire, et plus nuisible ; d'ailleurs ces sortes de fourneaux sont sans cheminée ; ils n'ont pour regitres que trois ou quatre ouvertures de six ou huit pouces en carré, selon la grandeur du fourneau, horizontalement disposées contre la chute des corps. Que deviendra donc cette matière fuligineuse, quand elle aura été encore exposée pendant la longueur de vingt ou trente pieds, à l'action d'une flamme beaucoup plus vive et plus rapide, en conséquence de la longueur qu'elle a à parcourir ? elle doit être résoute en ses éléments, et être invisible comme le noir de fumée que Stahl a brulé dans un creuset.

Si on approche deux chandelles l'une de l'autre, la petite atmosphère lumineuse qui paraissait à-peine d'abord, étant vue à un pouce ou deux de distance, devient sensible, soit en conséquence de l'augmentation de mouvement, soit parce que le charbon qui s'en échappe peut être brulé.

Une chandelle allumée n'en allume une autre inférieure mal éteinte et qui fume encore, que parce que la fumée ou les parties grasses et charbonneuses qui s'élèvent encore de celle-ci, fournissent un aliment qui touche la flamme de la supérieure, et que celle-ci suit.

L'auteur ingénieux du poêle sans fumée, focus acapnos, est M. Dalesme, qui le publia en 1686, comme on peut le voir pag. 116. du journal des Savants de la même année. M. Justelius, anglais, fut le premier qui en rendit la figure publique ; il la donna presque en même temps dans les memoires de la société royale de Londres : comme nous n'en avons point représenté la figure, nous prendrons parmi nos fourneaux de quoi nous faire entendre. Sait donnée la fig. 37. n°. 1. on fait un cylindre creux en tôle, au milieu duquel on met une grille, comme à un fourneau : la partie supérieure est aussi ouverte ; on peut encore le faire cubique de cinq lames de tôle, dans le goût de la fig. 36. et cela est même plus aisé. par-dessous la grille on ajuste un tuyau elliptique au cendrier : on fait ce tuyau le plus gros qu'il est possible, et même on fait l'axe de l'ellipse égal au diamètre du foyer, et conséquemment horizontal. Il est dans la même position précisément que notre tuyau b, à cela près qu'il est plus gros, comme nous l'avons dit, recourbé à angles droits, et deux ou trois fois plus haut que le corps du fourneau : on commence par échauffer la partie horizontale du tuyau ; on met des charbons ardents sur la grille du foyer, et ensuite quelque matière combustible, comme du bois, de la tourbe, etc. La flamme passe à-travers la grille, descend dans le cendrier, et enfîle le tuyau b ; et toute la chaleur sort par son orifice b. Mais la fumée est obligée de suivre le même chemin, c'est-à-dire d'enfiler aussi le tuyau b, et de passer à-travers la flamme qui remplit tout ce tuyau : en sorte qu'elle perd sa consistance et son caractère de fumée, se convertit en flamme, et sort sous cette apparence par l'extrémité du tuyau b, sans donner aucune marque de sa nature ; car elle est devenue insensible : ce que nous venons de donner est plus la correction qui se trouve dans les remarques que M. de la Hire a ajoutées dans l'endroit cité du journal des Savants, que la première ébauche qui en a paru. Peu importe qu'on chauffe la partie horizontale du tuyau avant que de mettre des charbons sur la grille ; si-tôt qu'ils y sont, l'air s'échauffe au commencement de ce tuyau, et on n'y met des charbons ardents que pour l'échauffer plus vite ; ainsi on peut se dispenser de cette peine. Voyez plus bas ce que nous rapporterons des expériences de Gauger. A mesure que l'air s'échauffe sous la grille dans le tuyau, la chaleur qu'on sentait sur la grille diminue : en sorte qu'à la fin on voit la flamme passer par l'extrémité b, et qu'on ne sent plus aucune chaleur au-dessus de la grille. Quand les choses en sont à ce point, si on jette de la paille sur le charbon, la flamme passe rapidement sous la grille, et sort par l'extrémité du tuyau sans donner de fumée : mais elle y produit une vive chaleur, tandis que le froid continue au-dessus de la grille. Le bois, la tourbe, le soufre, les huiles, donnent le même phénomène, et le tuyau s'échauffe au lieu de rougir ; on y entend même siffler la flamme, tant sa rapidité est grande. On observe que les corps qui répandent en brulant une puanteur insupportable ou un parfum agréable, ne donnent ni bonne ni mauvaise odeur dans ce poêle, et ne laissent d'autres vestiges de leur combustion, que des cendres. Enfin tous les corps combustibles subissent le même sort ; leur flamme est également chassée par l'air qui presse le foyer plus bas que l'extrémité du tuyau, dans toute la longueur duquel réside la chaleur : c'est pour cette raison que la fumée y devient flamme ; elle s'y atténue enfin à un point que tout ce qui était combustible ou capable de prendre le mouvement igné, ne laisse plus aucune trace de sa première existence. Ainsi la matière du feu se résout en ses éléments, et ne parait point sous une espèce d'agrégation, comme dans le noir de fumée ; tant le mouvement qui lui est imprimé est considérable. Boerhaave, element. chem. pag. 163.

Ne pourrait-il pas se trouver des occasions où il serait nécessaire d'employer une flamme qui n'aurait que très-peu ou point-du-tout de fumée, et conséquemment d'avoir recours à la construction du poêle sans fumée ? La fumée est nuisible, par exemple, dans les fourneaux de verrerie, où les creusets demeurent toujours ouverts. Elle gâte le verre, et l'empêche de se perfectionner. Néri, préf. page 17. Le fourneau qui serait le plus approchant de ce poêle, celui auquel il y aurait moins de changement à faire, serait le grand fourneau anglais, ou notre fig. 19. On m'objectera que la fumée ou partie charbonneuse fine du bois qui échappe à l'embrasement, y est nécessaire pour le succès de certaines opérations, comme, par exemple, du minium, de la fonte des mines, de celle du cuivre, etc. mais on peut répondre à cela, que si cette partie charbonneuse est consumée dans le commencement de son trajet à-travers la flamme, ce qui n'est pas démontré, il s'ensuit que cette méthode ne sera pas bonne dans les circonstances où la partie charbonneuse est nécessaire ; et en effet on parle de celles où elle serait nuisible. On pourrait donc en ce cas, au lieu de mettre la grille en b au-dessous du sol, la placer au niveau de la voute qui est immédiatement au-dessus ; on ouvrirait un espace au-dessus de la grille, comme dans celui du poêle sans fumée, capable de contenir l'aliment nécessaire au feu ; et sous la grille on condamnerait le cendrier qui pour lors serait inutîle et nuisible, et on le mettrait au niveau du sol du fourneau ; en sorte qu'on aurait un vrai poêle sans fumée en toutes les règles, mais en grand. Mais il faut observer que la cheminée, comme celle des fourneaux anglais, serait nécessaire en ce cas, et qu'on ne pourrait pas faire ce changement aux fourneaux des canons de l'arsenal de Paris, à-moins que d'y en construire une.

Nous avons encore observé, en parlant du fournaliste, que dans sa cheminée on trouvait des cendres noires, ou une matière noire et seche qui n'était pas onctueuse comme le noir de fumée. On trouve encore la même matière à la partie supérieure que les fourneaux y ont dans son four, c'est-à-dire dans cet endroit qui y est le moins exposé à l'action du feu ; et cette matière y est encore moins noire et fuligineuse que celle de la cheminée.

Le four du potier de terre est beaucoup plus large et plus long que celui du fournaliste ; mais sa cheminée est derrière, et la flamme n'est pas obligée de s'y réfléchir, ce qui la rend d'autant plus vive : aussi n'aperçoit-on ni sur les pots ni dans la cheminée pas le moindre vestige de suie. J'ai aussi remarqué que l'endroit le plus vitrifié, celui qui avait le plus éprouvé l'action du feu, c'était l'extrémité du four et le commencement de la cheminée.

On peut profiter de tous ces exemples pour la Chimie et l'Economie domestique : ce n'est pas que nous conseillions de faire des poêles sans fumée dont le tuyau serait ouvert dans les appartements ; nous ne connaissons que trop les accidents qui arrivent tous les jours de la part de la vapeur du charbon ou matière du feu, quoiqu'invisibles, encore associées à des corps qu'on ne connait pas, comme les gas de Van-Helmont ; mais il n'y aurait rien à craindre, si les tuyaux avaient une issue au-dehors ; et s'il restait encore des doutes sur l'ouverture de la partie supérieure de la grille, on pourrait la fermer et dériver l'air, qui lui serait nécessaire, par un tuyau recourbé qui percerait dans une chambre inférieure, ou même qui serait horizontal et viendrait du dehors. Nous en parlerons dans la suite.

Quand on allume les fourneaux, on sent pour l'ordinaire une odeur de foie de soufre, et quelquefois de soufre brulant ; on en trouvera les raisons aux articles SOUFRE et PHLOGISTIQUE.

Quand on les veut allumer lentement, on met, comme nous l'avons déjà dit à l'art. ESSAI, les charbons ardents par le haut sur les charbons noirs dont on les a eu remplis. Les soupiraux et les regitres étant ouverts, le feu descend ; c'est de la sorte qu'on allume ordinairement la tour des athanors, et qu'il faut nécessairement allumer celle qui n'a point de bouche du feu, comme dans Charas, à moins qu'on ne veuille se donner la peine d'ôter le charbon dont elle peut être pleine. Son dôme et son soupirail étant ouverts, le feu descend de haut-en-bas, à-peu-près dans la même quantité qu'on l'y a mis ; c'est-à-dire que les charbons allument de proche en proche pareille quantité de charbons à-peu-près, et perdent l'ignition qu'ils ont communiquée, jusqu'à-ce que l'embrasement étant parvenu au fond du charbon ou du fourneau, il se communique enfin à tout celui qui est dans la tour, si on n'a soin de fermer sa partie supérieure : voilà le fait ; cherchons-lui quelque application. L'air passe par le soupirail ou par les regitres qui sont inférieurs à la partie supérieure de la tour, pour se mettre en équilibre avec celui qui étant raréfié par le feu, doit déterminer son action par en-haut ; puisque le feu étant plus leger que l'air, il doit s'élever au-dessus de celui-ci : ou, ce qui revient au même, que l'air chaud, qui est plus rare et plus leger, doit s'élever au-dessus de celui qui est froid : en sorte que le feu, au-lieu de s'étendre par en-bas, s'éteindrait faute de pâture au-dessus de lui. Quelle est donc la cause qui produit ce phénomène, et qui change le cours de l'air, non-seulement dans la circonstance présente, où il est tout le contraire de ce qu'il est ordinairement ; mais encore dans la suite, où le charbon de la tour étant allumé par le bas, l'air reprend son jeu ordinaire ? serait-ce par un mécanisme approchant de celui du poêle sans fumée ? La chose ne s'y passe de la sorte que parce qu'il y a un tuyau qui est supérieur à son foyer : ainsi il ne serait pas étonnant que la même chose arrivât dans l'athanor de M. Cramer, en supposant que l'une de ses petites cheminées fût plus haute que la partie supérieure de la tour, et ouverte aussi, selon les expériences de Gauger. Si l'on expose un tuyau au feu horizontalement, il donne une vapeur chaude à chaque extrémité : si on l'incline, le côté supérieur soufflera un air chaud capable d'éteindre la flamme d'une bougie ; et cet air le sera d'autant plus, qu'on l'élevera davantage. La chose sera la même, si l'on change de bout ; celui qui était supérieur d'abord se refroidira, et celui qui est devenu le supérieur, d'inférieur qu'il était avant, s'échauffera à son tour ; et quoiqu'on bouche l'extrémité inférieure, l'air ne laissera pas de sortir, quoiqu'avec moins de vivacité ; par la raison qu'il fait pour lors comme dans un tuyau d'orgue à vent fermé, où il a une colonne entrante et une colonne sortante. Ainsi une moufle d'essai pourra n'avoir point de soupiraux ; et l'agitation de l'air, malgré cela, ne laissera pas d'entraîner ses vapeurs, quoique plus faiblement. Au reste, il y a au-moins certainement une vapeur ignée comme autour des poêles, etc. qui produit le phénomène qu'on attribue peut-être mal-à-propos à l'air : d'où il s'ensuit que l'air le plus chaud est le plus leger et prend le dessus, et qu'une chambre doit être plus chaude en-haut qu'en-bas, etc. Mais si au lieu du tuyau droit dont nous venons de parler, on en emploie un courbé comme un syphon, la chose sera précisément la même, c'est-à-dire que l'air sortira pour lors par la plus longue branche. On pourrait comparer la tour de l'athanor de Cramer avec son foyer et une de ses cheminées à un syphon.

Mais on observe que la petite flamme que donne le charbon se porte en-haut pendant que l'ignition prend le bas ; en sorte que si on répète l'expérience même dans un petit fourneau bien fait, le fond en est plutôt rouge que le corps qu'on mettra dessus. Il faut donc qu'un fourneau ne s'allume bien que quand la partie inférieure, et sans-doute les parais, en sont bien échauffées : et en effet qu'on allume du feu dans une cheminée qu'on n'a pas chauffée depuis quelque temps, le bois ne brulera jamais bien qu'elle ne soit échauffée. Il est vrai que l'humidité y contribue ; mais la chose est la même sans humidité. Qu'on jette un tas de charbons embrasés dans un coin très-sec ; comme ils ont beaucoup à échauffer, ils s'éteindront, non pas faute d'air, mais parce qu'ils ne sont pas en assez grande quantité pour échauffer l'endroit qu'ils occupent, et pour se consumer ensuite. Il résulte delà que la matière des fourneaux est d'un choix plus important qu'on ne pense communément ; son épaisseur aussi doit être considérée : il s'ensuit encore que la structure y doit entrer pour beaucoup, et que les fourneaux en tôle avec un garni, méritent peut-être la préférence sur les autres : nous examinerons cela bien-tôt. Qu'on se rappelle ici ce que nous avons dit, article ESSAI, que des charbons noirs mis à l'entrée de la moufle du fourneau de coupelle, s'allumaient d'eux-mêmes ; que Glauber a dit qu'ils s'allumaient aussi d'eux-mêmes dans son fourneau ou notre fig. 67. que Beccher a dit que la chaleur se conservait très-longtemps dans le sien, ou notre fig. 71. Non-seulement la construction des fourneaux épargne le charbon, mais encore on peut conserver le feu avec peu d'aliment, quand le fourneau et les vaisseaux sont échauffés ; mais il faut avoir eu soin pour cela de fournir du charbon : car si l'on n'en a mis que peu-à-peu, il brule de même, et fait peu d'effet, en sorte qu'il ne faut presque plus compter que sur la chaleur qu'on en tire. Il suit conséquemment que, si l'on voulait manier le feu à volonté, et être maître de passer tout-à-coup d'un extrême à l'autre, il ne faudrait pas employer des fourneaux épais ; ils conserveraient leur chaleur trop longtemps. Il serait à-propos qu'en pareil cas ils fussent minces et métalliques. Les vases de métal ne conservent pas longtemps leur chaleur, et l'ébullition, p. ex. cesse si-tôt qu'ils sont hors du feu ; au lieu que les vaisseaux de terre non-seulement la conservent longtemps, mais encore en donnent une plus considérable, le moment d'après qu'ils sont ôtés de dessus le feu. Une pareille espèce de fourneau peut être nécessaire en certains cas. On aura beau fermer tous les regitres du fourneau massif qui sera bien échauffé, le feu s'y éteindra à la vérité ; mais il n'en est pas de même de l'embrasement des briques, etc. le concours de l'air ne lui est pas nécessaire pour subsister.

On conçoit aisément comment le charbon brule dans le foyer d'un athanor ; il se trouve placé, ainsi qu'on l'a déjà dit, comme dans un canal placé dans un courant d'air qui s'étend depuis la porte du cendrier jusqu'à l'extrémité des regitres : plus ces regitres seront élevés, et mieux l'athanor ira. Aussi le grand art de M. Cramer est-il d'avoir élevé ses regitres par les petites cheminées qu'il y a faites ; sans compter qu'il a encore disposé sa porte de communication entre la tour et la première chambre, dans les mêmes vues, c'est-à-dire selon l'idée qu'il avait qu'il était de la nature du feu de monter et de ne pas descendre.

On peut encore croire que l'air monte et descend dans la tour de l'athanor fermée et allumée, comme il fait dans un tuyau d'orgue à vent fermé, quoique par une cause différente : car il est très-certain que l'air qui remplit les interstices du charbon, est raréfié par la chaleur, comme on a dû le conjecturer par le conseil de Glaser et le Fêvre, etc. de mettre un bain sur le haut de la tour ; que l'air du dehors doit se mettre en équilibre avec lui, et conséquemment le chasser et s'introduire à sa place ; en sorte qu'il y aura une colonne d'air nouveau qui montera continuellement et fera descendre une autre colonne d'air raréfié.

D'ailleurs on peut encore penser que le feu descend dans la tour ouverte d'un athanor, comme celui de notre fig. 61. parce que la partie inférieure de cette tour et le corps de l'athanor font ensemble un canal dans lequel l'air est raréfié comme s'il était dessus, ou, comme il arrive au poêle sans fumée, dans lequel le feu ne peut pas être déterminé à passer par son canal, quoique plus long, qu'il n'ait une cause, qui est la raréfaction de l'air dans ce canal qu'il doit conséquemment échauffer avant : en sorte que l'air tendant à se mettre en équilibre avec lui-même, il ne pourra manquer de descendre, au-moins en partie. Il est vrai qu'un tuyau qu'on chauffe au milieu à-peu-près, peut donner l'air chaud constamment à sa partie supérieure ; mais si on le chauffait à cette extrémité supérieure, même ouverte, nécessairement l'air chaud devrait passer par le bas. Dans les réchaux où le feu n'a de tuyau ni par le haut, ni par le bas, il est longtemps à s'allumer, parce qu'il ne peut presque se déterminer d'aucun côté ; et il faut qu'il ait rougi sa grille pour être agité par l'air : et cela est si vrai, que si on le comble de charbon, ce qui en excède les bords, et même un peu au-dessous, ne s'allume jamais qu'après la rougeur de la grille, et même n'est jamais parfaitement allumé. On m'objectera peut-être que du moment que je mets des charbons allumés dans le haut de la tour, sa partie inférieure n'est pas plus échauffée que la supérieure ; mais il est aisé de voir que la chaleur se répandant de toutes parts, raréfiera plus la colonne d'air inférieure que la supérieure ; par la raison que celle-là est renfermée : ce qui, je crois, n'a pas besoin de preuves. Ainsi donc l'air pourra tendre à se mettre en équilibre en allant de haut en-bas. C'est sans-doute par la même raison en partie qu'une trompe qui communique avec un cendrier, augmente la rapidité de l'air et la vivacité du feu. Car non-seulement on tire de l'air frais du dehors par son moyen, mais encore on en accélere la vitesse, parce qu'il y est certainement raréfié.

Il y a des bains-marie faits d'un grand chauderon, au milieu duquel passe une tour de fonte qui contient le feu comme une tour d'athanor. On en a une image en petit dans les bouilloires en cuivre qui servent ordinairement au thé, ou dans ces appareils destinés aux bains, à laver la vaisselle. Si la grille est de même niveau que le fond du chauderon, il faut que le haut de la tour soit ouvert, ou ait un tuyau de poêle, voyez the art of distillation et Leutmann ; mais on peut le fermer si la tour est prolongée, et même un peu enflée en-dessous ; car alors on y fait des regitres qui, non-seulement font bruler l'aliment du feu jusqu'à l'endroit où ils sont ouverts, mais qui échauffent encore le fond du chauderon ; et on a par ce moyen un vrai athanor. La tour peut encore être fermée, la grille étant de niveau avec le fond du chauderon, si on élève à fleur-d'eau de petits tuyaux servant de regitres, qu'on fera de la longueur qu'on voudra, et qu'on détournera à sa commodité ; et pour lors l'aliment du feu ne brulera que de la hauteur des regitres, et ce sera encore un athanor. Il est aisé de concevoir que les tours qui ont un tuyau de poêle, doivent ressembler à un poêle à cloche.

En Pharmacie, on est dans l'usage de sécher les plantes, et de tenir seches les drogues qui ne doivent point prendre d'humidité, avec un athanor, notre fig. 61. par exemple, dont le bain de sable est dans la petite chambre servant d'étuve, et la tour est dehors au moyen d'une petite cloison de planches, ou d'un petit mur de briques bâti entre la tour et le bain de sable. Par cette précaution on a pour but de garantir ce qui est dans l'étuve, de la poussière du charbon, qui gâte et noircit tout. Mais si on n'a pas la commodité d'y introduire un tuyau de cheminée comme ceux de Gauger, il vaut mieux se servir du poêle à l'italienne, qui peut aussi servir d'athanor.

Ce poêle communiqué à M. Duhamel par M. Maréchal, se trouve dans le traité de la conservation des grains du premier, pag. 173. On en peut prendre une bonne idée en suivant ce que nous allons changer à la coupe de celui de la calcination de la potasse, fig. 15. de nos Planches. La cavité inférieure a, où le foyer en est plus élevé, c'est-à-dire qu'il y a plus de distance entre le sol et le plancher intermédiaire, à-peu-près autant que dans un poêle ordinaire. Le sol en est fait d'une plaque de fonte sous laquelle il y a une petite chambre de même largeur, et de quelques pouces de haut seulement. Cette petite chambre a en devant une ouverture qu'on peut fermer avec une porte de fer ; et en-arrière elle communique avec le trou inférieur d'un autre petit poêle de fonte en cloche, dont la porte ordinaire est fermée et lutée, lequel occupe précisément la place du mur de derrière de notre fourneau, et ferme une partie du fond. Au-dessus de ce sol est une voute qui, comme le plancher de notre fig. 15. laisse un passage à la flamme par-derrière en d : en sorte qu'elle est obligée de revenir en-devant où elle enfîle un tuyau placé comme la cheminée c de notre fourneau. Le reste de la partie postérieure du poêle est fermé par un mur, qui met par ce moyen presque tout le petit poêle de fonte en-dedans, et ne laisse paraitre que son tuyau, qui passe à-travers. Ce tuyau est allongé de quelques pouces, et est ouvert dans l'étuve pour lui donner sa chaleur. Cette chaleur y est déterminée d'abord par son propre mouvement ; mais on y joint encore l'air. C'est à son accès et pour l'échauffer, qu'est destinée la chambre située sous le foyer. Le grand poêle est terminé supérieurement par une autre plaque de fonte garnie de sable, pour donner une chaleur plus douce ; et il a son ouverture hors de l'étuve. Les murs des côtés sont en briques ; et quand le feu est tombé, les différents massifs qui le constituent donnent encore de la chaleur pendant longtemps. Telle est cette machine ingénieuse. Nous omettons bien des particularités qui ne sont pas de notre objet ; mais nous y reconnaissons un mérite réel, quoiqu'il eut été à souhaiter qu'il s'y fût trouvé un peu plus de simplicité, et que nous y voyions de la ressemblance avec les cheminées de Gauger, qui existaient même avant cet auteur, comme on le voit par l'architecture de Savot, qui dit qu'il y avait au Louvre une cavité sous l'atre et derrière le contre-cœur de la cheminée du cabinet des livres.

On croira peut-être qu'un poêle ordinaire peut revenir au même pour les petites étuves ; il se trouve tout fait à la vérité, mais il sera plus dispendieux ; et il n'aura pas l'avantage qui se trouve dans le poêle italien, ou les ventouses de Gauger. Dans le poêle à l'italienne, les surfaces se trouvent multipliées ; l'étuve n'en reçoit que de la chaleur, et point de fumée, ni de vapeurs ; et ce qui est capital, c'est que l'air y est renouvellé continuellement, et comme il est très-chaud, il en desseche d'autant plus vite. D'ailleurs la flamme y fait un trajet qu'elle devrait faire dans tous les poêles, pour donner plus de chaleur avec moins de bois. Pour cela il ne serait question que d'une plaque de fer de plus, et de mettre le tuyau sur la porte directement. Par-là on aurait moins de fumée, parce que le feu en consumerait plus : et il faudrait nettoyer le tuyau plus rarement. Il est encore d'autres moyens de corriger les poêles, et de les appliquer aux étuves. Mais cette correction peut être appliquée aux poêles simples dont M. Duhamel propose l'usage pour les petites étuves à sécher le blé.

Un pareil poêle sera préférable aux athanors servant à l'étuve des apothicaires, par la raison qu'il renouvelle l'air et ne porte point dans l'étuve la vapeur charbonneuse qui sort des quatre regitres de l'athanor ; vapeur qui peut changer la couleur et la saveur de bon nombre de plantes, quoiqu'elle ne fasse point de tort au blé, selon M. Duhamel. On peut donc renvoyer les regitres, même dans l'athanor, au moyen d'une plaque de fonte qui fera circuler la flamme ou la chaleur comme dans le poêle, à un tuyau commun, ou à plusieurs qui monteraient le long de la paroi interne du mur de séparation, et serviraient encore par-là à l'étuve.

Une chose digne de curiosité, ce serait de savoir si on a imaginé les poêles d'après les fourneaux, ou ceux-ci d'après les poêles ; ou peut-être encore les premiers indépendamment des seconds, et réciproquement. Ce qu'il y a de vrai, c'est qu'on y trouve le même mécanisme. L'observation du feu de la cheminée, et peut-être de la lumière de la chandelle, a pu donner lieu à ce mécanisme. Peut-être aussi l'idée réfléchie n'en est-elle venue que d'après quelques ébauches de l'ustensîle en question, employé peut-être par hasard. Quoiqu'il en sait, on a vu, soit dans les premiers fourneaux, soit dans les premiers vaisseaux qui pouvaient en approcher, ou dans la cheminée, et la chandelle, qu'un corps embrasé était un fluide qui tendait de bas en-haut ; que ce fluide était moins actif quand il ne recevait pas d'air par ses parties inférieure ou supérieure. C'est d'après ces connaissances réflexives qu'on a Ve qu'il fallait toujours construire les fourneaux de façon que l'air put avoir accès à la partie inférieure de l'aliment embrasé, et suivre son trajet. Mais on a encore remarqué qu'il fallait qu'il y eut une proportion entre la grandeur du fourneau, la quantité de la pâture du feu, et ses ouvertures inférieures et supérieures. C'est ce qui a fourni les principes généraux ou les réflexions ultérieures qui ont éclairé la pratique des artistes déjà instruits des particularités qui concernent la même matière.

On voit de l'analogie entre nos fourneaux et les ventouses, les tambours physiques, et le poêle sans fumée. C'est peut-être dans les fourneaux qu'on a puisé l'idée de construire un grenier à travers le blé duquel il se fait un courant d'air, au moyen d'une espèce de pavillon ou trémie, exposée au nord, et d'une issue au midi ; celle d'allumer du feu à une ouverture pratiquée dans le plafond des salles d'un hôpital, etc. pour renouveller l'air aux malades ; celle d'allumer du feu dans les mines, ou auprès d'un de leurs puits, pour en changer aussi l'air. Voyez AGRICOLA. Mais les ventouses de Gauger valent mieux, pour renouveller l'air, au-moins en hiver ; elles le donnent chaud ; au lieu que ce foyer allumé sur un plafond donne du froid, qui peut incommoder les malades.

Au reste, il pourrait bien se faire que l'économie domestique eut aussi fourni à la Chimie. Au-moins est-il vrai que c'est d'elle que cette science a tiré ou pu tirer la meilleure construction de ses fourneaux ; car les poêles de Keslar ont paru 30 ou 40 ans avant le fourneau de fusion de Glauber. Le fourneau de Beccher est pris d'ouvriers qui s'en servaient pour remettre des pieds de fonte à des marmites de fer. Ils mettaient un manche au piédestal D 1, au moyen d'un crampon dont ce piédestal était muni, à-peu-près comme certaines caffetières, sans-doute ; et ils s'en servaient comme d'un vase avec lequel ils auraient puisé. Ne pourrait-on pas ajuster ce fourneau de façon qu'on put s'en servir pour fondre des canons pendant une campagne ? mais voyons où Glauber a pu trouver son fourneau.

Les poêles de Keslar ont beaucoup de ressemblance avec notre fig. 15. que nous prendrons encore pour pièce de comparaison. Qu'on se rappelle ce que nous en avons déjà dit. Mais ces sortes de poêles, au lieu de deux étages qu'a notre fourneau, en ont jusqu'à huit les uns sur les autres. Ils ont une grille et un cendrier. Nous croyons devoir nous dispenser d'entrer dans un grand détail là-dessus, parce qu'il en faudrait une figure ; quoiqu'il soit possible d'en donner une idée sans cela. Keslar, par exemple, sépare ses corps ou étages les uns des autres pour multiplier les surfaces. On peut s'en former une idée en s'imaginant qu'au niveau de l'extrémité de la cheminée c de la fig. 15. commence un autre plancher de briques qui porte sur de petites colonnes de quelques pouces de haut ; qu'à l'extrémité de ce plancher opposé à la cheminée, on fasse une autre cheminée, et ainsi de suite. D'ailleurs après avoir élevé son foyer un peu plus qu'il ne faut pour le bois, il n'en emploie que la moitié postérieure pour communiquer la chaleur au premier plancher, dont l'extrémité antérieure est d'un pied plus longue que le cendrier, et est conséquemment soutenue par deux colonnes qui portent des barres de fer. L'autre moitié est couverte d'un bain de sable. Mais ce qu'il y a de mieux, c'est que le soupirail tire son air du dehors par une trompe, et que la fumée y est aussi dérivée par un tuyau. Ces deux tuyaux ont chacun une soupape ou fermeture en-dehors pour le gouvernement du feu dont Keslar a très-bien connu la mécanique ; car sa raison de préférence en tirant l'air du dehors, était qu'on n'en attirait point d'air froid, ni mauvais. Il a cependant Ve qu'on ne purifiait pas celui de la chambre ; aussi conseille-t-il de faire deux soupiraux à son cendrier ; l'un pour la trompe, et l'autre qui soit ouvert dans la chambre, afin d'en renouveller l'air. Gauger a encore mieux remédié à cet inconvénient, et il a peut-être connu l'ouvrage de Keslar. Quoique celui-ci usât du bois dans son poêle, il était rarement obligé de le nettoyer.

Il a aussi donné quantité d'autres poêles domestiques, dont on peut tirer parti. Il dit encore qu'on en faisait de tôle, qu'on enduisait d'un garni.

Mais Gauger a rendu un service important par les nouvelles cheminées qu'il a publiées. Il en fait l'atre, la tablette, et le contre-cœur de plaques de fonte. Derrière ces plaques sont des canaux de 5 ou 6 pouces de large, qui communiquent entr'eux. Ces canaux tirent l'air du dehors, et se terminent dans la chambre à côté de la cheminée, par une ouverture qui a sa fermeture. Le feu étant allumé, l'air des cavités se raréfie, est poussé par celui du dehors, entre dans la chambre, et l'échauffe ; il en renouvelle l'air, et fournit celui qui est nécessaire à faire monter la fumée, et empêche que l'air froid du dehors n'y puisse entrer. Cette méthode renferme tout-à-la-fais l'avantage des poêles, et n'en a point les inconvéniens.

Il prouve par plusieurs expériences bien faites, que, quand il tirait son air de la chambre même, par une ouverture qui communiquait comme celle du dehors avec les canaux des ventouses de la cheminée, et par laquelle on pouvait fermer celle du dehors, sa chambre ne s'échauffait pas si rapidement, était sujette à fumer, et attirait des vents coulis.

Il part d'après cette expérience pour ces ventouses. Si on met dans le feu un tuyau de quatre pouces de diamètre, fait en syphon, et que ce tuyau ait une de ses extrémités en-dehors, celle du dedans donne un air très-chaud avec quelque rapidité qu'il passe dans ce tuyau. Mais comme ceux qu'on met derrière les plaques des cheminées ne peuvent s'échauffer que par une petite surface, relativement à leur circonférence, il arrive qu'ils ne donnent jamais la même chaleur, quelque longueur qu'on leur donne ; mais ils en donnent toujours assez et même plus qu'il ne faut pour échauffer une chambre.

On peut par ce moyen échauffer l'air d'une chambre supérieure, inférieure, ou latérale, en y conduisant le tuyau ouvert au haut de la cheminée ; mais soit que l'air soit tiré du dehors ou de la chambre qu'on veut échauffer, il faut toujours que celui qui doit donner la chaleur, soit plus élevé que l'autre, selon une expérience que nous avons rapportée.

Pour plus d'élégance, il n'a pas voulu placer ses tuyaux dans le feu ; il les a cachés sous l'atre, la tablette, et derrière le contre-cœur ; mais il me semble qu'il était bien-aisé de le faire sans se départir de son principe. Il n'était question que de faire servir les chenets à cet usage. Il faudrait qu'ils fussent un peu plus gros qu'à l'ordinaire, doubles, et fixes. Enfin je voudrais appliquer cette idée à tout. Je voudrais ajuster dans le même goût les barres de fer qui soutiennent une cornue, et qui servent de grille dans un fourneau fixe. On pourrait encore faire passer de pareils tuyaux à-travers un poêle ordinaire, et échauffer ainsi plusieurs chambres ; et l'on pourrait alors en dériver l'air du dehors, selon la méthode de Keslar.

Ainsi donc si les Apothicaires n'échauffent pas bien leurs étuves, s'ils y font passer des vapeurs nuisibles, et s'ils font trop de dépense pour cela, c'est qu'ils ne savent pas tirer parti de choses très-avantageuses, et déjà assez anciennes pour être bien connues.

Il est aisé de voir l'analogie qu'il y a entre ces cheminées de Gauger, et le poêle à l'italienne. On y trouve aussi quelque ressemblance avec le bain-sec de Glauber. Voyez VAISSEAU. Gauger met encore d'après quelques autres une petite trape devant l'atre qui donne l'air du dehors pour souffler le feu. Cette invention vient encore originairement des poêles de Keslar.

Il est une espèce de fourneaux en Chimie, à la figure desquels on dispute son mérite, quoique les auteurs et l'expérience aient assez parlé en sa faveur. C'est des fourneaux de fusion elliptiques et paraboliques qu'il est question. Béguin en est pour la figure cylindrique et l'elliptique ; je place la cylindrique avec, parce qu'elle doit avoir le même sort. On conçoit aisément qu'elle ne peut s'entendre que d'un fourneau qu'on ne voudra pas faire elliptique ; et qu'on préfére cette figure à la carrée. La figure cylindrique doit être aussi essentielle pour réflechir les rayons horizontalement vers un même centre, que l'elliptique pour les réfléchir en haut et en bas. Barchusen se déclare pour la forme ovoïde, et dit que par son moyen on peut exciter un grand feu. Il veut aussi la ronde au sujet de son fourneau universel, qui est celui du reverbere de Glaser. Teichmeyer n'en veut qu'à l'elliptique, et il faut avouer qu'il a outré les choses ; car il aime tant à ne rien perdre de l'ellipse, que les grilles placées à leur sommet ont à peine le quart du diamètre de ses fourneaux. Vogel, qui est vraisemblablement celui qu'il appelle son disciple chéri, dit que c'est la meilleure pour les fourneaux, et qu'elle est d'un avantage bien supérieur à son épaisseur, comme on le peut voir par le fourneau de M. Pott. Enfin Charas, le Mort, Barner, et Juncker demandent tous la figure ronde et l'elliptique. Glauber l'admet pour son fourneau. Le fourneau de Beccher, fig. 71. en approche. Boerhaave s'en sert non-seulement pour le fourneau de Glauber, mais encore pour son fourneau de distillation latérale ; et il est aisé de voir par l'explication qu'il en donne, qu'il y croyait ; et l'on sait quel homme c'était que Boerhaave dans une pareille matière. M. Pott a fait un fourneau qui devrait imposer silence aux ennemis de la figure elliptique. M. Cramer, encore bon juge dans cette matière, l'a admise pour son fourneau de fusion ; et la parabolique pour celui de verrerie ; et il est aisé de voir que s'il n'y compte pas tout à fait, il la croit au-moins la meilleure de toutes, par les soins qu'il a pris d'ajouter quantité de variétés au fourneau de fusion dont il se sert. Enfin tous les Chimistes ont admis pour couvrir leurs fourneaux, un dôme qu'ils n'ont peut-être pas regardé comme elliptique, mais qui ne l'est pas moins, ou qui en approche. Voici cependant les objections qu'on fait contre cette figure.

On ne doit pas être d'une exactitude scrupuleuse quand il s'agit de donner aux fourneaux dans lesquels on doit faire un feu violent, une figure qui tende à ramasser en un centre les rayons ignés réfléchis.

1°. Parce que le garni qu'on leur donne n'est pas fort propre à recevoir le poli : et que, quand bien même il serait possible de le lui donner, il ne pourrait manquer d'être bien-tôt altéré.

2°. Sans compter que les rayons du feu donnés par les charbons ne suivent pas des lois si constantes que les rayons solaires et les sonores, et ne peuvent conséquemment être déterminés sur le corps qui en doit éprouver l'action.

3°. Et que les vaisseaux qui contiennent la matière à fondre, ou cette matière même mise à feu nud, sont entourés de charbons de toutes parts.

4°. D'ailleurs un foyer de peu d'étendue serait presque inutile, puisque le feu ne pourrait agir que sur une très-petite partie du corps qui lui serait exposé.

5°. Une pareille figure ne sert qu'à ramasser les cendres, et à nuire au jeu de l'air et à l'action du feu.

Telles sont les objections, excepté la dernière, que fait M. Cramer contre la figure qu'il adopte ; il faut donc croire qu'il a des raisons contraires qui sont plus fortes, qu'il n'a pas dites : essayons d'y suppléer.

On ne doit pas être d'une exactitude scrupuleuse, etc. A la bonne heure ; mais s'ensuit-il de-là qu'on n'y doive pas apporter tous ses soins, et que si on pouvait y réussir, la chose en irait plus mal : et d'ailleurs n'y a-t-il que cette raison de préférence ? c'est la principale à la vérité ; mais les accessoires doivent-elles être négligées ? La sphère est la figure qui contient le plus de matière sous la même surface ; mais un fourneau ne peut avoir cette figure, et l'elliptique qu'on lui donne est celle qui en approche le plus ; ainsi donc celui qui sera construit de la sorte, contiendra le plus de charbon autour du vaisseau qu'on y place. C'est un avantage qu'on ne contestera pas.

1°. Parce que le garni, etc. Mais ce garni ne sera pas plus poli dans un autre fourneau ; et s'il s'altère plus dans celui-ci, ce qui doit être, c'est une preuve que le feu a été plus fort.

2°. Sans compter que les rayons, etc. Cela est très-vrai ; mais ces rayons qui se réfléchissent à droite, à gauche, et en tous sens, sont-ils autant de perdus pour la somme totale du degré de feu qui règne dans le fourneau ? non sans-doute. Ils doivent concourir à augmenter le mouvement sur quelque endroit qu'ils tombent. Il devrait s'ensuivre par la même raison que les miroirs ardents ne devraient produire aucuns effets, parce qu'ils ne produisent pas tous ceux qu'ils pourraient, ainsi que tout le monde le sait ; car s'ils sont vus de plusieurs endroits, c'est qu'ils y réfléchissent des rayons de lumière.

3°. Et que le vaisseau, etc. Il serait à souhaiter à la vérité que le charbon produisit son effet, sans nuire par sa présence ; mais de ce que tous les rayons ignés ne parviennent pas au vaisseau, s'ensuit-il qu'il n'en vienne aucun, et en viendrait-il davantage, si le fourneau n'était pas elliptique ? Il s'ensuit au-moins, selon M. Cramer même, que la figure elliptique doit être conservée dans les endroits où le charbon ne sera point un obstacle entre le rayon igné réfléchi, et le corps qui doit subir son action, et par la même raison la parabolique : tel est le principe de structure du dôme, du four du Boulanger, de tous les fours quelconques, et de la plupart des fourneaux en grand, comme le fourneau à l'anglaise, ceux d'affinage et de raffinage, etc. où la voute ne doit pas être regardée comme une simple commodité de construction.

4°. D'ailleurs un foyer, etc. Quand ce foyer ne serait qu'un point indivisible, devrait-il être négligé ?

5°. Une pareille figure, etc. Oui quand elle est fermée par le bas, ou terminée par une grille de la petitesse de celles de Teichmeyer ; mais si on suit les exemples donnés par MM. Boerhaave, Cramer et Pott, et que d'ailleurs on veuille se ressouvenir des pitons ou des barres soutenant la grille, et de sa distance des parois des fourneaux, on les verra tomber comme à l'ordinaire. L'angle n'est point assez considérable pour qu'elles puissent s'y soutenir. Ceci nous donne occasion de remarquer une particularité du fourneau de M. Pott qui pourrait échapper aisément ; c'est que son fourneau s'élève presque cylindriquement au-dessus du cendrier ou piédestal, et que l'ellipse ne commence qu'à une certaine distance de ce même cendrier. Par-là, si la figure elliptique retient les cendres, comme pourraient toujours le prétendre contre toute raison les détracteurs de cette figure, ces cendres ne peuvent manquer d'en être précipitées par les charbons, à-mesure qu'ils s'affaissent en brulant ; ensuite de quoi elles se trouvent auprès d'une paroi perpendiculaire qui n'en fera certainement pas un amas.

Enfin quand il serait vrai qu'on ne saurait pas comment l'ellipse donne un feu plus fort que les autres figures, s'ensuit-il qu'il faudrait se refuser à l'expérience de Pott, par exemple, qui est la meilleure raison qu'on puisse donner ; il est bon d'avertir qu'elle est postérieure aux objections de M. Cramer. Il ne faut pas s'imaginer avoir épuisé l'art des fourneaux à beaucoup près ; il en est de cette partie de la Chimie la plus nécessaire et la plus maniée cependant, comme de toutes les autres opérations, où il y a toujours plus de découvertes à désirer, qu'il n'y en a de faites. La plupart des grands artistes ont négligé de nous donner des idées étendues à ce sujet, quoiqu'elles fussent du détail de leurs opérations, que presque tous aient parlé des fourneaux, et qu'ils fussent assez philosophes pour ne trouver rien de petit en Physique. L'illustre M. Pott mérite particulièrement ce reproche, lui qui a donné un fourneau qui peut passer pour un chef-d'œuvre, puisqu'il donne un degré de feu supérieur à tout ce qu'on connaissait de la part de cette sorte d'ustensile. On eut donc souhaité, et il faut espérer qu'il le fera ; on eut donc souhaité, dis-je, qu'il nous en eut donné une description très-circonstanciée, et les raisons de ce qu'il prescrit. On désirerait de savoir p. ex. quelque chose de plus sur la nature de son garni, quels en sont les avantages et les désavantages, quelle en est l'épaisseur, s'il est après la première opération tel qu'il sera après la vingtième, s'il est demi-vitrifié, ou s'il l'est tout à fait ; à quelle hauteur il met sa grille ; quel est le corps qui soutient son creuset, et sa hauteur ; de quelle composition est ce creuset. Si sa grille est posée, comme on peut le soupçonner, à un pied du sol du cendrier, il faut que le soutien de son creuset soit très-haut, comme on peut l'inférer de ce qu'il dit, qu'il faut emplir le fourneau de charbon presque jusqu'au-haut, pour l'en couvrir. On sent bien qu'il prescrit d'y mettre des charbons ardents, parce que les noirs refroidiraient : mais il me parait que l'intervalle de huit minutes est bien long pour un pareil feu, et qu'il faut vraisemblablement mettre des charbons noirs très-souvent, encore de crainte de refroidissement ; cependant il n'est point question de ceux-ci. S'il y a des cendres dans le cendrier autant qu'il doit y en avoir à-peu-près ; s'il en passe beaucoup par le tuyau de fer ; quelle est l'épaisseur de ce tuyau ; jusqu'à quelle hauteur il rougit ; s'il parait un jet de flamme au-dessus ; quelle est communément sa hauteur, et ce qu'il est capable de faire ; enfin quels sont les inconvénients qu'il a éprouvés avant que de parvenir à ce point, qu'on peut appeler de perfection. Toutes ces questions bien éclaircies de la part de M. Pott, et quantité d'autres encore que cet illustre chimiste est capable de se faire, ne pourraient manquer de répandre une grande lumière sur la théorie des fourneaux qui éclairerait sur leur construction. Il pourrait encore ajouter à cela une docimastique de terres et de pierres, dans les vues de les employer à la construction des fourneaux et vaisseaux ; ce qui abregerait peut-être bien des tâtonnements.

Il est aisé de voir que son fourneau n'est guère destiné qu'à ce à quoi il l'a employé, et il n'en vaut certainement que mieux : on peut cependant y mettre une grille de treize pouces de diamètre, si on veut élever le foyer ; celle qui sera à la partie inférieure du corps près du cendrier, n'en peut avoir que neuf, en comptant un pouce et demi d'épaisseur pour son garni. J'ai dit que ce fourneau n'en valait que mieux de ne servir qu'à un usage ; et en effet il y a toute apparence que cet illustre artiste ne l'a divisé en différents corps le moins qu'il a pu, que parce qu'il a Ve que c'était autant de perdu pour la chaleur : delà l'inconséquence de ceux qui veulent tout faire avec le même. On ne disconvient pas que cela ne fût mieux si cela pouvait être, et qu'on ne réussisse même jusqu'à un certain point ; mais on n'a recours à ces sortes de fourneaux abrégés qu'en cas de nécessité, preuve certaine de leurs défauts en bien des circonstances ; et je ne crois point du tout que celui de Beccher, par exemple, put fondre les corps qui se fondent dans celui de M. Pott : le fourneau de Beccher peut cependant être appelé un chef-d'œuvre dans le genre des polychrestes, comme celui de M. Pott l'est en fait de fusion.

Le maréchal reverbere la flamme avec l'eau dont il arrose son charbon, et l'expérience lui dit qu'il a raison : mais la concentration qu'on se procurera de toutes parts sans éteindre une partie du charbon, et avec des parois qui l'allumeraient s'il était éteint, ne doit-elle pas l'emporter infiniment sur celui de la forge ? Les rayons ignés doivent toujours être comptés pour quelque chose, quelque direction qu'ils aient ; soit qu'ils soient droits, qu'ils aillent vers un centre commun, qu'ils soient réfléchis vis-à-vis d'un charbon, ou d'un autre rayon igné ou non, ils doivent toujours augmenter le mouvement : ainsi donc il n'importe peut-être pas tant qu'on le croit que le garni ait le poli du miroir parabolique ; d'ailleurs il faut remarquer que, comme on ne craint point de casser ce garni par une chaleur subite, on a la commodité de le faire, et on le fait aussi d'une composition qui donne un verre opaque, qui réfléchit beaucoup plus de rayons ignés que la composition des autres fourneaux qu'on est obligé de faire poreux, de crainte qu'ils ne se cassent. Nouvelle raison de faire les fourneaux de fusion elliptiques en tôle, et les fourneaux de tôle elliptiques ; mais si la figure elliptique est celle qui approche le plus de la sphérique, la cylindrique approche aussi plus de l'elliptique que la carrée : d'où il suit que cette dernière est la plus mauvaise de toutes.

Si les fourneaux en tôle coutent plus que les autres, on en est bien dédommagé par ailleurs ; outre les avantages considérables que nous venons de parcourir, ils ont encore celui de la durée : on croirait peut-être qu'ils seraient détruits par la rouille ; mais cet inconvénient n'arrive qu'avec l'aide de l'humidité, et un fourneau par sa nature n'est pas destiné à y être exposé : il est vrai qu'il a à essuyer celle du garni, mais pour lors il est neuf, il la supporte mieux, elle n'est pas de longue durée, et d'ailleurs on peut le vernir pour l'en garantir. On sait que le fer résiste longtemps au feu ; nous en avons exposé les raisons, article FLUX. Voyez aussi PHLOGISTIQUE et REDUCTION. A la vérité le garni empêche que la carcasse du fourneau ne jouisse de cet avantage ; mais il se trouve toujours de petites crevasses, à-travers desquelles il se fait jour : au reste il est d'expérience que ces sortes de fourneaux sont les plus durables, ils ne se cassent pas comme ceux de terre ; et on doit remarquer que les artistes les plus exercés, tels que les Allemands, les préfèrent à tous les autres. Si l'on craignait encore la rouille malgré ce que nous venons de dire, on pourrait avoir recours au cuivre ; mais il couterait bien plus cher, et pourrait se calciner.

Il y a des fourneaux dont la figure parait être d'abord précisément le contraire de celle qui donne le feu le plus violent ; je veux parler de ceux de décoction, qui sont en entonnoir : mais il ne faut pas un grand feu pour faire bouillir de l'eau, et en second lieu il faut qu'ils reçoivent un vaisseau large : cependant si l'on considère, comme on le doit faire, le fourneau avec son appareil, on verra que son ouverture est réduite aux quatre regitres ; ce qui corrige leur défaut apparent : je dis apparent, et en effet il n'est que cela. Les fourneaux coniques sont des espèces de fourneaux elliptiques ; ils donneraient certainement moins de chaleur s'ils étaient cylindriques, tout étant égal d'ailleurs, c'est-à-dire s'ils avaient une ouverture de même diamètre pour recevoir le même vaisseau, et si la quantité du charbon était la même. On observe qu'on les fait souvent trop élevés de foyer. Quoique la chaleur monte tout naturellement, et soit poussée en-haut par l'air qui frappe la grille, on ne doit pas laisser de faire un fourneau elliptique ou conique par le bas ; parce qu'il faut moins d'aliment pour le feu, que la même quantité y est plus à l'étroit, et fait un tas plus élevé, ce qui est capital, et que le feu en est plus fortement réfléchi vers le haut. Enfin un fourneau de fusion doit être elliptique, par la même raison que ceux de décoction sont coniques. Je ne crois pas qu'on soit tenté de nier que le feu acquierre de nouvelles forces par l'augmentation de quantité, par la réflexion ; il n'est question pour apercevoir la vérité de ce fait, que de se rappeler qu'il est plus fort dans un fourneau qui ne prend point l'air par les côtés, que dans celui qui le prend ; et qu'un charbon seul perd peu-à-peu son mouvement igné, pendant que ce mouvement se conserve entre plusieurs, et est d'autant plus rapide, qu'il est entretenu par un plus grand nombre de corps qui se le communiquent et se le réfléchissent. On sait que plusieurs fils d'archal liés ensemble comme une gratte-bosse et soufflés vivement, se fondent. Ce feu réfléchi de toutes parts doit augmenter de vivacité, par la même raison que quand il est animé par plusieurs soufflets placés circulairement Mais si le mouvement constitue l'action du feu, comme il n'y a pas lieu d'en douter, il doit y avoir quelques endroits du fourneau où ce mouvement sera le plus considérable, comme à un certain espace du foyer, au milieu ou à l'extrémité supérieure du fourneau. Cette conjecture est tirée du rapport que parait avoir le feu qui y est contenu avec celui de la lampe de l'émailleur : ne devrait-elle pas exciter les artistes à placer dans leurs fourneaux, à diverses distances de l'aliment du feu, des vaisseaux contenant des matières qui pourraient leur donner de nouvelles lumières sur son action ?

Nous n'avons point examiné si le feu était plus fort par la structure des fourneaux, qu'avec plusieurs soufflets. On ne trouve point de comparaison là-dessus dans les auteurs, qui la plupart ont dit ouï et non. Je crois qu'il n'est pas nécessaire d'avertir que, si les soufflets ne peuvent donner un feu plus violent que celui que donne le fourneau de M. Pott par sa structure, il s'ensuit qu'il faut s'en tenir à cette dernière ; elle épargne les soufflets et leur embarras.

Mais les figures elliptiques et paraboliques n'ont pas été seulement appliquées aux fourneaux, Gauger en a encore fait usage pour ses cheminées ; il en a fait les jambages paraboliques, ou en quart d'ellipse, parce qu'il n'est question d'y réfléchir la chaleur que vers leur partie inférieure, afin qu'elle entre dans la chambre : ainsi elles diffèrent des fourneaux, en ce que ceux-ci contenant le vaisseau qui doit subir l'action du feu, ils peuvent être coniques ou elliptiques par le bas, pour réfléchir la chaleur vers leur milieu. Ce n'est pourtant pas qu'il n'y en ait aussi dans le goût des cheminées, c'est-à-dire de paraboliques seulement par le haut ; mais ils ne doivent pas être aussi bons par les raisons que nous avons alléguées, quoique l'air pousse le feu en-haut et supplée en quelque sorte aux fonctions des courbes. Mais le tuyau des cheminées de Gauger est trop large ; son contre-cœur devrait être parabolique comme ses jambages, sans qu'on put craindre la fumée. Ses cheminées sont imitées en quelque sorte dans les cheminées à la Nanci, qui sont en tôle et qu'on dit ne pas fumer ; ce que je crois volontiers. Leur tuyau est bien, en ce qu'il n'a guère qu'un demi-pié de long sur quatre ou cinq pouces de large : mais si elles ont cet avantage sur celles de Gauger, en revanche elles ne sont pas si bien par le devant, qui fait une hotte à-peu-près parabolique comme les côtés. Ce devrait être le derrière ; il est vrai qu'elles n'auraient pas tant de grâce, mais ce qui est bon doit être beau. Les jambages paraboliques de Gauger empêchent encore la fumée conjointement, avec ses ventouses et son soufflet ; on pense bien que c'est parce que cette fumée est concentrée sur la flamme, et en est brulée en partie : c'est ce qui doit arriver dans les cheminées à la Nanci, dont le tuyau est encore plus étroit ; et je crois que cette méthode doit être admise, parce que ces sortes de cheminées peuvent encore chauffer considérablement par leur tuyau, qu'il faut prolonger en tuyau de poêle.

Généralités ultérieures. Il faut que les corpuscules du feu dégagés de leur combinaison, passent à-travers les pores du fer, d'un poêle par exemple, tels qu'ils sortent à-peu-près du charbon ; car on voit sur un poêle et même sur un fourneau, le même fourmillement dans l'air que sur un réchaud dont les charbons ou la braise sont à l'air libre. On peut s'assurer de ce phénomène en fixant la vue sur un mur blanchi, un peu au-dessus du foyer qu'on voudra examiner ; on aperçoit un fourmillement qui fait vaciller la vue sur le mur, soit que la direction des rayons de lumière qui en viennent soit troublée, ou que la vapeur qui en est la cause soit visible ou fasse cette illusion. De quelque façon que cela sait, on appelle ce phénomène fourmillement, parce qu'il parait que la sensation est la même à-peu-près que dans la maladie qui porte ce nom. Enfin qu'elle soit dû. ou à l'air, ou au feu, ou à une action particulière de l'un et de l'autre, elle n'en existe pas moins, et elle est même plus visible, si le soleil éclaire l'endroit où l'on fait l'expérience. Tout le monde connait l'effet qu'elle produit sur les spirales qu'on attache aux poêles ; mais il faut qu'un chimiste sache que l'air qui monte avec cette vapeur, est autant de perdu pour l'intérieur de ses fourneaux : cet inconvénient n'est jamais plus sensible que quand on en allume plusieurs les uns près des autres. Le feu y est en partie suffoqué, en conséquence de la raréfaction et de la legereté de l'air environnant. La chose a également lieu quand le soleil, surtout en été, éclaire l'endroit où le fourneau est situé. On retient l'air qui est entrainé par cette vapeur, en fermant la cheminée et n'y laissant que le tuyau du fourneau, en sorte que tout l'air du laboratoire ne peut passer que par son soupirail.

L'effet n'est pas toujours le même de la part du même appareil, quoiqu'on gouverne le feu avec la même exactitude : ces différences viennent de celle de l'atmosphère : car comme il est vrai à n'en pouvoir douter que tout charbon est d'autant plus animé que l'air est plus dense et le frappe avec plus de rapidité, ce qui est prouvé par le vent des soufflets ; il est évident que le feu des fourneaux sera beaucoup moins actif lorsque le temps sera chaud et mou, et que l'air de l'atmosphère sera plus leger. Barner remédie à cet inconvénient d'après Keslar et Glauber, en mettant au soupirail de ses fourneaux une trompe qui descend dans la cave ; et Charas en construisant son fourneau près d'un puits, dans lequel il descend tout près de l'eau un pareil tuyau qui aboutit à son soupirail.

Tout corps qui passe d'un milieu plus large dans un plus étroit, disent quelques physiciens, prend une accélération de mouvement ; et l'on croit expliquer par-là pourquoi une rivière est plus rapide quand son lit s'étrécit, et pourquoi l'air qui passe à-travers un fourneau acquiert une rapidité qu'il n'avait pas. On croit aussi par la même raison que ces deux cas sont précisément les mêmes. Nous allons tâcher de faire voir que c'est comme on dit, le feu et l'eau.

En premier lieu, nous croyons qu'une rivière ne devient plus rapide quand son lit s'étrécit, que parce que l'eau ne pouvant plus couler avec la même facilité, s'arrête, s'élève et retarde celle qui est derrière, laquelle étant aussi devenue plus élevée, a nécessairement plus de poids, et doit pousser avec plus de violence l'eau qui est devant elle. Peu importe que ce soit à une écluse, ou à un pont, ou dans son lit, la chose est la même ; et il faut croire qu'elle perd encore de cette rapidité par le frottement que M. Bouchu a découvert qu'elle éprouvait en passant dans un canal étroit ; mais elle peut gagner du terrain en-dessus, au lieu que l'air ne peut pas faire la même chose dans un tuyau dont toutes les parois ne lui laissent aucune ressource pour s'étendre : l'eau d'ailleurs reste la même, et l'air se raréfie.

En second lieu, s'entend-on bien quand on dit que l'air accélere son mouvement, parce qu'il passe d'un lieu plus large dans un lieu plus étroit ? Si l'on approche la main du tuyau d'un fourneau horizontal qui n'est point allumé, on n'y sent point d'air du tout ; cependant l'air n'est jamais tranquille, et on devrait le sentir sans feu comme avec du feu dans un fourneau. Gauger n'a dû sentir l'air sortir du tuyau de cuivre de quatre pouces de diamètre, que quand il l'a exposé au feu, et point avant. Je sens qu'on me répondra que rien ne détermine l'air à enfiler un tuyau froid, et qu'il faut pour cela le concours du feu : mais le tuyau de Gauger était cylindrique ; d'ailleurs m'étant trouvé devant le soupirail d'un grand fourneau anglais, j'ai senti l'air frais qu'il attirait, et cet air n'avait certainement pas passé d'un endroit plus large dans un plus étroit, car il n'était pas encore entré dans le fourneau ; et quand il fait du vent, est-ce que l'air de l'atmosphère passe d'un endroit plus large dans un plus étroit ?

C'est donc uniquement à la raréfaction de l'air par le feu, qu'il faut attribuer le jeu qu'il éprouve dans les fourneaux. L'air le plus chaud est le plus leger, et l'air le plus leger et le plus chaud est le plus élevé dans une chambre, comme Gauger l'a éprouvé par le thermomètre et par le tuyau exposé à une chandelle, et d'autres physiciens avant et après lui. Ainsi toutes les fois qu'il y a du feu allumé quelque part, il raréfie l'air en tout sens, et le rend plus leger ; mais cet air plus leger monte au-dessus de celui qui est plus pesant, et d'autant plus rapidement qu'il est plus leger : plus le feu est violent, plus il raréfiera l'air et le fera monter rapidement ; mais cette raréfaction sera d'autant plus considérable, que l'air sera plus longtemps exposé au feu, et il le sera plus dans un long tuyau que s'il n'y en avait point du-tout ; et d'ailleurs ce tuyau lui-même est fort chaud, puisque la flamme le surmonte encore. Ainsi le tuyau mis sur un dôme servant à la raréfaction de l'air qu'il enferme, occasionnera nécessairement l'abord rapide de celui qui tend à se mettre en équilibre en frappant le cendrier, lequel traversera le charbon avec d'autant plus de vivacité qu'il trouvera moins d'obstacles ; et il en trouve très-peu, parce que l'air y est très-rare, et que la colonne est très-longue : il devra donc monter avec d'autant plus de rapidité, qu'il a plus de place à occuper ; mais il ne peut passer lui-même à-travers ce canal embrasé, qu'il ne subisse la même raréfaction, et une raréfaction plus considérable dans le second instant que dans le troisième. Il passera donc plus rapidement, et augmentera conséquemment le mouvement ou la chaleur ; en sorte que la colonne qui lui succédera, sera encore plus raréfiée et suivie d'une autre plus rapide, et ainsi de suite. Tels sont les accroissements successifs et rapides de la chaleur dans les premiers instants qu'on met un tuyau sur un dôme : mais cela ne Ve que jusqu'à un certain point.

Les descriptions particulières que nous avons mises à la tête de cet article, peuvent apprendre à construire des fourneaux, qui sont des objets particuliers : voici actuellement les corollaires généraux qu'on en peut tirer, qui ne servent guère qu'à satisfaire la curiosité ; parce qu'on ne bâtit point de fourneau en général, et qu'il est impossible de les appliquer à des objets qu'on ne connait pas. La partie la plus essentielle d'un fourneau, celle pour qui toutes les autres sont faites, c'est le foyer, ou le lieu où le feu est tenu, animé, et déterminé. Mais comme le feu qui a besoin d'un aliment continuel ne peut subsister sans une cheminée qui dérive la fumée, et un soupirail qui donne passage à l'air, et enfin une porte pour introduire sa pâture ; on a dû voir aisément quelles réflexions on pourrait tirer de leur construction. En second lieu, quand on a bâti un fourneau, on y a toujours eu en vue d'y conserver l'énergie du feu animé, de façon qu'elle ne put se dissiper en vain, et que tout au contraire elle fût déterminée dans les endroits où elle est nécessaire pour y exercer son action. En troisième lieu, on y a ménagé un endroit propre à contenir les vaisseaux chargés de la matière à altérer, afin qu'ils pussent y subir l'action du feu uniformément, et dans le degré qui convient, jusqu'à ce que l'opération fût finie.

Le meilleur fourneau dans son genre sera donc celui qui sera capable de produire les effets qu'on en attend, avec le moins de frais qu'il sera possible, autant de temps qu'on le voudra, avec toute l'égalité qu'on peut souhaiter, et de façon qu'on puisse le gouverner aisément, c'est-à-dire sans trop de peine de la part de l'artiste, et sans qu'il soit obligé à une présence continuelle. La première condition est remplie, si le fourneau est construit de façon que la chaleur excitée soit toute appliquée au corps à changer, sans trop de dépense. On obtient cet avantage si le fourneau est fait d'une matière très-solide, et si la surface intérieure est figurée de façon à déterminer dans le lieu destiné les forces qui se développent et sont dardées par la pâture du feu. La fabrique pourra aussi en être telle que l'artiste soit sujet à peu d'assiduités, pour fournir de quoi entretenir le feu. On remplit la seconde, quand la matière combustible bien choisie se consume le plus lentement qu'il est possible, en fournissant toutefois la chaleur nécessaire. On a cet avantage quand le foyer, la cheminée, et les regitres sont entr'eux dans des proportions convenables. C'est en conséquence de ce que nous avons dit, que d'habiles artistes remplissent leur fourneau de charbon ; en sorte qu'ils ne sont obligés d'y en remettre de longtemps. La troisième condition, et la plus nécessaire de toutes, c'est qu'on puisse soutenir longtemps le feu sans augmenter ni diminuer son degré. La Chimie prouve qu'un degré de feu donné produisait un effet déterminé sur chaque corps ; et que quand l'action du feu était forte ou faible, les produits étaient différents ; en sorte que ce mélange confus de produits chimiques, était le résultat de ces alternatives d'augmentations et de diminutions. D'ailleurs on sait qu'elles changent la nature d'un corps, de façon qu'il n'est plus le même à chaque degré de feu déterminé. Car s'il arrive qu'en se servant du même feu pour les opérations chimiques, on confonde ses degrés d'une façon dans une opération, et d'une autre manière dans une autre, le même corps ne donnera pas le même produit. C'est ce qui donne lieu à des erreurs souvent dangereuses. On a Ve que l'artiste en construisant ses fourneaux, avait pensé d'abord à la quantité de matière combustible que le foyer devait recevoir, contenir, entretenir. En second lieu, à l'espèce de matière qu'il y voulait mettre pour ce qu'il avait à faire. En troisième lieu, à la force du feu requise pour chaque opération en particulier ; par la raison qu'égale quantité de la même matière peut produire dans le foyer du même fourneau toutes les nuances de chaleur qui s'étendent depuis le plus faible degré jusqu'au plus fort, et cela d'une façon soutenue. En quatrième lieu, à se ménager la facilité de donner à son foyer l'accès de tout l'air qui lui est nécessaire ; il faut encore qu'il soit en état d'apprécier la force avec laquelle il frappe le foyer, soit qu'il y soit déterminé par le jeu ordinaire que lui donne ce foyer, soit qu'il y soit poussé par les soufflets : et enfin qu'il examine les différents états de l'athmosphère, comme la pesanteur, la legereté, l'humidité, la secheresse de l'air, sa froidure et sa chaleur. Car quand le baromètre annonce que sa pesanteur est considérable, que cette pesanteur est accompagnée d'une grande secheresse, et qu'en même temps un froid vif roidit tous les corps, on peut s'attendre que le feu sera de la plus grande vivacité. Cinquiemement enfin, on a fait attention à l'issue qu'il fallait donner au feu qu'on voulait allumer dans le foyer. On a Ve qu'il ne fallait pas compter sur une grande activité de la part de celui qui aurait pu s'échapper aisément de toutes parts, et par de grandes ouvertures : mais qu'on pouvait tout se promettre de l'action du feu, dont les forces réunies étaient déterminées vers le point auquel l'artiste avait intention de faire subir ses effets. Nous avons indiqué en détail les circonstances particulières, où tout ce que nous venons de dire en général ou d'une manière vague, pourra trouver son application et ses exceptions ; et nous finirons par ce corollaire ultérieur, qu'un usage aveugle nous a obligé de changer en une définition inutîle dans la place qu'elle occupe ; qu'un fourneau est un vaisseau au moyen duquel on peut tenir du feu, le gouverner, et l'appliquer comme instrument et quelquefois comme principe, aux corps qu'on veut changer par le feu.

En citant les auteurs dans cet article, on a eu pour but de faire voir à qui appartenait ce dont il y était question. Voici donc par ordre chronologique la plupart des ouvrages dont on s'est servi. Ce catalogue servira pour les articles Ustensiles et Vaisseaux, qui sont nécessairement liés avec celui-ci, et pour tous ceux où il sera question des mêmes auteurs, qui n'ont guère traité les fourneaux que proportionnellement au reste.

Gebri regis Arabum philosophi perspicacissimi summa perfectionis magisterii, &c Gedani, 1682. in-12. p. 278. Géber était grec, et a écrit en arabe. On trouve dans cet ouvrage des traits qui feraient honneur à des chimistes d'aujourd'hui.

Joannis de Rupescissa liber lucis, 4°. Colon. Agripp. 1679. Nous avons dit que Rupescissa vivait au XIVe siècle.

Agricola de re metallica, lib. XII. fol. Basil. 1521. Cet auteur mériterait encore de notre temps tous les éloges que lui donne Boerhaave.

Thesaurus Evonymi Philiatri, de remediis secretis, liber physicus medicus et partim etiam chimicus, etc. Tiguri, 1552.

Fachs a écrit en 1567.

La Pyrotechnie ou l'art du feu, contenant dix livres, etc. composée par le sieur Vanoccio Biringuccio, Siennais, et traduite d'italien en français par feu Jacques Vincent, 8°. Paris, 1572. C'est le livre d'un homme qui parait instruit de ce qu'il traite, et qui le décrit si mal, qu'on a de la peine à y entendre ce qu'on sait de mieux.

Ercker, aula subterranea, etc. 1574. Voyez l'article ESSAI sur cet auteur et l'avant-dernier.

Alchymia Andreae Libavii, etc. fol. Francofurti, 1606. Dans sa compilation, ce médecin a rassemblé au sujet des fourneaux et vaisseaux presque tout ce qui avait existé avant lui. C'est celui qui a le plus écrit sur cette matière, et il a quelquefois bien écrit.

Epargne-bois, c'est-à-dire nouvelle et par-ci-devant non-commune ni mise en lumière, invention de certains et divers fourneaux artificiels, etc. par François Keslar, peintre et habitant à Francfort, maintenant publiée en français pour le bien et profit public de la France, et de tous ceux qui usent de cette langue, par Jean-Théodore de Bry, marchand libraire et bourgeois d'Oppenheim, qui est sur le Rhin, 1619. petit in 4°. de 72 pages.

Les éléments de Chimie de M. Jean Béguin, etc. troisième édition, in 12. Paris, 1624.

Rhenani opera chimiatrica, in-12. Francof. 1635. Cet auteur contient peu de chose.

Furni novi philosophici, etc. per Joannem Rudolphum Glauberum, Amstel. 1658. et suiv.

Kunckel laborat. chim. 1670.

Traité de la Chimie, par feu Christophe Glaser, etc. in-12. Paris, 1673.

Le Fêvre, seconde édition, in-12. 2. vol. Paris, 1674.

Pharmacopée royale de Charas, 4°. 1676. Charas est celui des français qui a le mieux écrit sur les fourneaux, et qui a le mieux connu la nécessité d'en donner des descriptions détaillées.

Le Mort, Chimia rationalis et experiment. in-12. Lugd. Bat. 1688.

J. Joac. Beccheri tripus hermet. seu laborat. portat. etc. in-12. Francof. 1689.

Barneri chimia philosophica perfecté delineata, etc. in-12. Noribergae, 1689.

Cours de chimie, par Nicolas Lémery, 8°. Paris, 1701. M. Baron n'a rien ajouté à la partie des fourneaux.

Mangeti bibliotheca pharmaceutica, etc. fol. 2. vol. 1703. Il est bon d'avertir que, quand nous avons cité Manget sans nom d'ouvrage, c'est celui-ci que nous avons entendu. La sixième et septième planche de cet auteur qui sont contenues dans la même page, sont de Barner ; les autres sont toutes les figures de Charas, et quelques-unes de celles de le Fêvre.

Mangeti Bibliotheca. chem. curiosa. fol. 2. vol. 1705.

La mécanique du feu, etc. par M. Gauger, Paris, 1713. ouvrage excellent qui n'est pas assez connu.

Barchusen, element. chim. 4°. Lugd. Batav. 1718. C'est la seconde édition de l'ouvrage que l'auteur donna en 1698. sous le titre de pyrosophia.

Vulcanus famulants ou mécanique du feu, ouvrage destiné à l'épargne du bois, et utîle aux Fondeurs, Brasseurs, Chimistes, Fumistes, etc. par. Joh. Georg. Leutmann, in-8°. troisième édit. 1735. La première est de 1723. Ce livre qui est en allemand, embrasse dans 53 Planches et 154 pages, tout ce qui est du ressort de la mécanique du feu. L'auteur a profité des poêles de Keslar, des cheminées à ventouses de Gauger, qu'il a augmentés et appliqués à d'autres objets. Il traite aussi des lampes. Il a exécuté ce que Gauger annonce dans sa préface au sujet des brasseries, etc. Enfin il contient en général sur cette matière tout ce qu'il y a de plus excellent, de plus vrai, de plus ingénieux, et de plus savant. Teichmeyer y a pris quelques-unes de ses figures ; et il y a toute apparence que c'est-là qu'il a puisé l'affectation de la figure elliptique dans laquelle Leutmann est trop tombé. Ceux qui voudront varier les poêles à l'infini, pourront consulter son ouvrage, dont ils font la partie dominante, et ils n'auront plus rien à prendre dans l'obscur galimathias de Keslar.

Teichmeyeri, institut. chim. dogmat. experiment. 4°. 1729, auteur versé dans les parties de la Médecine, et par conséquent dans la Physique. Nous avons encore de lui des éléments de cette dernière science.

Junckeri conspectus chimiae, 4°. 1730.

Boerhaavii elem. chem. 2 vol. in-4°. Paris, 1752. L'édition de Leyde est de 1731.

De la fonte des mines de Schlutter. Ce livre parut en allemand en 2 vol. in-fol. Brunswick, 1738. L'édition française publiée par M. Hellot est en 2 vol. in-4°. Le premier parut en 1750, et le second en 1753. La première partie en français, ou la seconde en allemand traitent de la Docimastique.

Crameri ars docimastica, Lugd. Batav. 1739. et la seconde édition en 1744. C'est l'auteur qui a le mieux écrit sur les fourneaux, comme sur l'art des essais.

Lithogéognosie de Pott ; la première partie parut en allemand en 1746, et la seconde en 1751. Il a donné quelque chose sur les fourneaux dans les Miscell. berolin. dont nous parlerons article LUT.

Cartheuseri, elem. chim. dogmat. experim. edit. secunda, in-12. 1753.

Rudolphi Augustini Vogel, M. D. etc. 8°. Gott. 1755. C'est un professeur de Gottingue qui a beaucoup de lumière, mais qui n'est peut-être pas assez stahlien.

On peut encore consulter sur la même matière les auteurs dont nous avons parlé à la section des fourneaux philosophiques ; les descriptions de Sennert, 1641. Horstius auteur des notes sur Gauger ; Strumphii dissertatio nonnulla de sublimationis apparatu exhibens, Halae 1745. c'est un ouvrage qui a été fait au sujet d'un fourneau de Teichmeyer, qu'on appelle le pot, et dont Vogel donne une haute idée ; la verrerie de Kunckel ; les ouvrages de Stahl ; les laboratoires des chimistes ; les distillateurs et les fournalistes de Paris ; Dornaeus, Mullerus et Crollius ; Ludolf pour les figures élégantes, et les éléments de Chimie théorique de M. Macquer. Vitruve ne parle que de quelques fourneaux en grand, qu'on peut voir dans Libavius, et on ne trouve rien de satisfaisant là-dessus dans l'Antiquité expliquée du P. Montfaucon. Cet article est de M. DE VILLIERS.




Affichages : 2516