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Catégorie : Jurisprudence
S. f. (Jurisprudence) est l'adjudication qui se fait d'une chose au profit du fisc, ou de ceux qui en ont les droits ; c'est une peine prononcée par les lois contre ceux qui sont coupables de quelque délit, et qui est plus ou moins étendue selon la nature du délit : cette peine s'étend sur les héritiers du criminel qui sont privés de ses biens ; ce que l'on a ainsi établi pour contenir d'autant plus les hommes dans le devoir par la crainte de laisser leur famille dans l'indigence.

C'est un usage reçu chez toutes les nations, mais pratiqué diversement selon les temps, les lieux, et les circonstances.

Chez les Romains, la confiscation fut inconnue dans l'âge d'or de la république, comme le remarque Cicéron dans l'oraison, pro domo suâ : Tam moderata judicia populi sunt à majoribus constituta, ut ne poena capitis cum pecunia conjugatur.

Ce fut pendant la tyrannie de Silla que l'on fit la loi Cornelia, de proscript. qui déclarait les enfants des proscrits incapables de posséder aucune dignité, et déclarait les biens confisqués.

Sous les empereurs la confiscation des biens avait lieu en plusieurs cas, qui ne sont pas de notre usage : par exemple, tous les biens acquis par le crime étaient confisqués ; la dot de la femme était confisquée pour le délit du mari ; celui qui avait accusé (sans le prouver) un juge de s'être laissé corrompre dans une affaire criminelle, perdait ses biens ; il en était de même de l'accusé qui avait laissé écouler un an sans comparaitre, et ses biens ne lui étaient point rendus, quand même par l'évenement il aurait prouvé son innocence : la maison ou le champ dans lesquels on avait fabriqué de la fausse monnaie étaient confisqués, quoique le délit eut été commis à l'insu du propriétaire. On confisquait aussi les biens de ceux qui n'étaient pas baptisés, de ceux qui consultaient les aruspices, d'un curateur nommé par collusion aux biens d'un mineur ; d'un décurion qui avait commerce avec sa servante ; les maisons où l'on avait tenu des assemblées illicites, et où l'on faisait des sacrifices prohibés ; celles où l'on jouait aux chevaux de bois, qui était un jeu défendu ; les biens de ceux qui souffraient que l'on commit fornication dans leur maison, ou dans leur champ, de ceux qui étaient condamnés aux mines, et de ceux qui fréquentaient les spectacles un jour de Dimanche.

On voit par ce détail, que les lois romaines étaient plus sévères que les nôtres dans bien des occasions ; mais la plupart des empereurs ne se prévalaient pas de la rigueur de ces lais. Trajan remettait entièrement la peine de la confiscation ; ce qui lui a mérité ce bel éloge de Pline : quae praecipua tua gloria est, saepius vincitur fiscus, cujus mala causa nusquam est nisi sub bono principe.

Antonin le pieux en faisait don aux enfants du condamné ; Marc Antonin leur en remettait la moitié. Il est fait mention dans le digeste de bonis damnat. l. 7. §. 3 d'une loi par laquelle Adrien avait ordonné, que si un homme condamné à mort laissait un enfant, on donnât à cet enfant la douzième partie des biens de son père ; et que si le condamné laissait plusieurs enfants, alors tous les biens du père leur appartinssent, sans que la confiscation put avoir lieu.

Valentinien en fit grâce entière aux enfants, ce que Théodose le grand étendit aux petits-enfants ; et au défaut de descendants, il accorda le tiers aux ascendants : enfin Justinien par sa novelle 17, abolit entièrement le droit de confiscation ; il excepta seulement par sa novelle, le crime de lese-majesté.

En France la confiscation a été établie dès le commencement de la monarchie. Dagobert I. dans un édit de l'an 630, concernant l'observation du Dimanche, défend entr'autres choses de voiturer aucune chose par terre, ni par eau, à peine à l'égard des voitures par terre, de la confiscation du bœuf attaché du côté droit ; on trouve une semblable ordonnance de Pepin, dont l'année est incertaine, mais que l'on croit être de l'an 744.

Du temps de Philippe V. et même avant, les confiscations qui échéyaient au roi, devaient être employées à payer les aumônes dû.s sur le trésor. Il n'en pouvait faire don à héritage, c'est-à-dire à perpétuité que dans son grand-conseil ; il fut même réglé depuis que l'on ne donnerait plus les biens confisqués, mais seulement une somme préfixe sur ces biens, lesquels seraient vendus. Le roi devait mettre hors de sa main dans l'an et jour les biens confisqués dans les terres des seigneurs, et les remettre à des personnes qui pussent s'acquitter des devoirs féodaux, ou en indemniser les seigneurs ; et quand il les indemnisait, ses officiers faisaient hommage pour lui. La confiscation des monnaies étrangères fut accordée aux seigneurs hauts-justiciers dans leurs terres, lorsque c'étaient leurs officiers qui avaient saisi : le roi s'en réserva seulement la moitié, déduction faite sur le total du quart accordé au dénonciateur. Le chancelier ne devait sceller aucun don de confiscation, qu'il n'eut déclaré au conseil ce que la chose donnée pouvait valoir par an.

A Limoges, la confiscation appartenait au vicomte, à moins que quelques habitants ne fussent depuis 30 ans en possession de les percevoir.

A Ville-franche en Périgord, les biens d'un homicide condamné à mort appartenaient au roi, ses dettes préalablement payées ; mais lorsqu'un homme y était pendu pour vol, ses dettes payées, le roi prenait dix francs sur ses biens, et le reste passait à ses héritiers.

A Langres, la veuve d'un homme exécuté à mort pour crime reprenait ses biens et son douaire, et partie dans les acquêts et dans les meubles, comme elle eut fait si son mari fût mort naturellement. Si c'était une femme qui fût exécutée à mort pour crime, l'évêque de Langres avait par droit de confiscation la portion des biens du mari, que les héritiers de cette femme auraient eue si elle fût morte naturellement avant lui.

Lorsqu'un bourgeois ou habitant de Tournay blessait ou tuait un étranger qui l'avait attaqué, il n'était point puni, et ses biens n'étaient point confisqués ; parce que les biens d'un étranger qui en se défendant aurait tué un bourgeois ou un habitant de Tournay, n'auraient pas été confisqués, ainsi que cela est expliqué dans des lettres de Charles V. du 20 Janvier 1370.

A Avesnes où la seigneurie était partagée entre le dauphin et d'autres seigneurs, en cas de contravention par rapport au vin, l'amende était pour les seigneurs particuliers ; et le vin était pour le dauphin.

Il y avait aussi un usage singulier à Saint-Amand-en-Peule, diocèse de Tournay : anciennement les maisons des bourgeois qui étaient condamnés à mort étaient brulées, au moyen de quoi leurs biens n'étaient pas confisqués ; mais il fut ordonné en 1366 que les maisons ne seraient plus brulées, et que leurs héritiers ou ayans cause, pourraient les racheter, payant dix livres pour une maison de pierre, et 60 sols pour une maison de bois ou d'autre matière.

Les confiscations avaient été destinées pour les dépenses de l'ordre de l'Etoile, et pour les réparations du palais ; mais en 1358 Charles V. lors régent du royaume, ordonna qu'elles seraient employées pour la rançon du roi Jean.

L'usage n'est pas encore uniforme dans tout le royaume.

Dans les pays de droit écrit, la confiscation n'a pas lieu, si ce n'est pour crime de lese-majesté divine et humaine. Il faut aussi en excepter le parlement de Toulouse, dans tout le ressort duquel la confiscation a lieu suivant le droit commun ; mais ce parlement réservait autrefois la moitié des biens du condamné à ses enfants. Présentement il ne leur en accorde que le tiers : la femme du condamné est admise au partage de ce tiers avec les enfants ; et quand il n'y a point d'enfants, elle profite seule de ce tiers ; elle n'en perd pas même la propriété en se remariant.

A l'égard du pays coutumier, on distingue les coutumes en cinq classes, par rapport à la confiscation.

La première est composée de quelques coutumes, qui ne l'admettent que dans le cas du crime de lese-majesté divine et humaine : telles sont les coutumes de Berry, Touraine, Laudunais, la Rochelle, Angoumais, Calais, Boulenais, Lille, Tournay, Cambray, Bayonne, Saint-Sever.

La seconde est, des villes d'Arras, Lille et Saint-Omer, où par un privilège particulier la confiscation n'a lieu qu'en deux cas, savoir pour hérésie et lese-majesté.

La troisième est des coutumes qui admettent la confiscation pour les meubles seulement, et non pour les immeubles, telles que les coutumes de Normandie, Bretagne, Anjou, Maine, Poitou, Ponthieu, le Perche.

La quatrième comprend la coutume de Paris, et les autres coutumes semblables qui forment le plus grand nombre, lesquelles posent pour maxime que, qui confisque le corps confisque les biens.

La cinquième classe enfin est composée des coutumes qui n'ont point de disposition sur cette matière, et dans lesquelles la confiscation n'a point lieu, à moins qu'elle ne soit prononcée dans les pays où la confiscation est admise : elle a lieu au profit du roi pour les biens situés dans l'étendue des justices royales, et au profit des seigneurs hauts-justiciers, pour les biens qui sont situés dans l'étendue de leur haute-justice, quand même la condamnation aurait été prononcée par le juge royal ; de manière que les biens d'un condamné peuvent appartenir partie au roi, et partie à différents seigneurs, chacun d'eux n'ayant droit de prendre que ce qui est situé dans sa haute-justice ; mais sur les confiscations qui appartiennent aux seigneurs hauts-justiciers, on lève une amende au profit du roi, pour réparation du crime envers le public.

On prélève aussi les dettes du condamné sur les biens confisqués.

Lorsqu'un usufruitier jouit de la haute-justice, il a les confiscations, attendu qu'elles font partie des fruits.

Il est encore à remarquer que dans cette matière, les dettes actives suivent le domicîle du condamné : mais les meubles ne suivent pas la personne ni le domicîle du condamné ; ils appartiennent au roi, ou autre seigneur dans la justice duquel ils se trouvent de fait ; de sorte que s'il y en a dans plusieurs justices appartenantes à différents seigneurs, chacun ne prend que les meubles situés dans sa justice, comme cela se pratique pour les immeubles.

On trouve cependant une décision du conseil du premier Décembre 1742, qui adjugea au fermier du domaine de Paris tous les meubles d'un condamné domicilié à Paris, même ceux qu'il avait à Versailles, à l'exclusion du fermier du domaine de Versailles ; mais cela fut sans-doute fondé sur ce que le roi est également seigneur de Paris et de Versailles, ainsi cela ne détruit point le principe que l'on a posé, qui n'a lieu qu'entre deux seigneurs différents.

Il y a seulement une exception pour le crime de lese-majesté, où la confiscation appartient toujours au roi seul sans aucun partage avec les seigneurs ; elle est même dévolue au roi, omisso medio, c'est-à-dire, à l'exclusion du seigneur dans la justice duquel le procès aurait été fait.

La confiscation des condamnés pour fausseté commise au sceau des lettres de chancellerie, appartient à M. le chancelier.

Dans les pays où la confiscation est admise, et où l'on suit la maxime, qui confisque le corps confisque les biens, toute condamnation qui emporte mort naturelle ou civile, emporte aussi de plein droit la confiscation.

Mais pour que la confiscation ait lieu, il faut que le jugement soit irrévocable, et que la mort civîle soit encourue, et pour cet effet que le jugement soit commencé à être exécuté ; ce qui se fait, pour les jugements contradictoires, par la prononciation à l'accusé et pour les jugements par contumace, par le procès-verbal d'effigie, s'il y a condamnation à mort naturelle ; et par l'apposition d'un simple tableau, s'il n'y a pas peine de mort portée par le jugement.

Quand il y a appel de la condamnation, l'état du condamné est en suspens, tant pour la confiscation que pour les autres peines, jusqu'à ce que l'appel soit jugé.

Si le condamné meurt dans la prison avant d'avoir été exécuté, ou bien dans le transport des prisons du juge supérieur au premier juge, la confiscation n'a point lieu.

Si par l'évenement la sentence est confirmée, la confiscation aura lieu du jour de la sentence.

A l'égard des sentences par contumace, au bout de cinq ans elles sont réputées contradictoires, et la mort civîle et par conséquent la confiscation sont encourues du jour de l'exécution de la sentence de contumace : le condamné peut néanmoins obtenir des lettres pour ester à droit ; et si le jugement qui intervient en conséquence porte absolution ou n'emporte pas de confiscation, les meubles et immeubles sur lui confisqués lui seront rendus en l'état qu'ils se trouveront, sans pouvoir néanmoins prétendre aucune restitution des fruits des immeubles, etc.

Dans le cas d'une condamnation par contumace, les receveurs du domaine du Roi, les seigneurs ou autres auxquels la confiscation appartient, peuvent pendant les cinq années percevoir les fruits et revenus des biens des condamnés, des mains des fermiers et autres redevables ; mais il ne leur est pas permis de s'en mettre en possession ni d'en jouir par leur mains, à peine du quadruple applicable moitié au Roi, moitié aux pauvres du lieu, et des dépens, dommages et intérêts des parties.

Le Roi ni les seigneurs hauts-justiciers ne peuvent aussi, pendant les cinq années de la contumace, faire aucun don des confiscations, sinon pour les fruits des immeubles seulement.

Après les cinq années expirées, les receveurs du domaine, les donataires et les seigneurs auxquels la confiscation appartiendra, sont tenus de se pourvoir en justice pour avoir la permission de s'en mettre en possession ; et avant d'y entrer, ils doivent faire faire procès-verbal de la qualité et valeur des meubles et effets mobiliaires ; ils en jouissent ensuite en pleine propriété.

Dans le cas de crimes d'hérésie, lese-majesté humaine, péculat, concussion, fausse monnaie, sacrilege et apostasie, la confiscation est acquise du jour du délit.

Le mari ne confisque que ses propres et la moitié des meubles et conquêts, quand il y a communauté. Il en est de même de la femme, si ce n'est dans quelques coutumes, où sa part de la communauté demeure au mari, comme dans celle d'Auxerre, article 29.

Sur la confiscation des biens des criminels, voyez au digeste, liv. XLVIII. tit. xx. et au code, liv. IX. ubique passim ; Carondas, liv. VII. rep. 115. Despeisses, tom. II. p. 694. et tom. III. p. 116. Le Maitre sur Paris, art. 183. Coquille sur Nivernais, ch. IIe

Il y a encore plusieurs autres sortes de confiscations qui ont lieu au profit de différentes personnes, savoir,

1°. Celle qui a lieu au profit des traitants, comme subrogés à cet égard aux droits du Roi.

Il en est de même de la confiscation qui a lieu au profit des fermiers des messageries, contre ceux qui entretiennent sur leur privilège et exploitation, et de la confiscation qui a lieu au profit des communautés des Marchands, d'Arts et Métiers, contre ceux qui entreprennent sur leur état.

Dans toutes ces matières, la confiscation n'est pas de tous biens, mais seulement des effets trouvés en contravention, tels que les marchandises et effets prohibés, les instruments et outils qui ont servi à les fabriquer, et les charrettes, chevaux, et autres voitures et instruments qui servaient à les transporter lorsque l'on a procédé à la saisie des effets trouvés en contravention.

Ceux auxquels ces sortes de confiscations appartiennent, ne les ont pas jure proprio, mais seulement par concession du Roi, et en vertu des statuts et règlements par lui autorisés sur les marchandises et effets trouvés en contravention aux règlements.

2°. En matière féodale le vassal confisque son fief, c'est-à-dire que son fiel est confisqué au profit du dominant, lorsqu'il le fait tomber en commise pour cause de félonie ou de désaveu.

3°. La commise de l'héritage taillable, celle de l'héritage donné à titre d'emphitéose, la commise censuelle dans les coutumes où elle a lieu sont aussi une espèce de confiscation de l'héritage qui a lieu au profit du seigneur. Voyez COMMISE. (A)




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