PIERRE DE, (Histoire naturelle) Thracia gemma. Pline donne ce nom à une pierre dont il dit qu'il y avait trois espèces ; la première était entièrement verte et d'une couleur très-vive ; la seconde était d'un verd plus faible ; la troisième était remplie de taches de couleur de sang. Cette description parait convenir au jaspe.

Les anciens appelaient encore pierre de Thrace, thracius lapis, une substance noire et inflammable que l'on croit être le jais ou jayet, ou le charbon de terre.

THRACE, (Géographie ancienne) en grec , en latin, Thracia ou Thracé, grande contrée de l'Europe, renfermée entre le mont Hémus, la mer Egée, la Propontide et le Pont-Euxin. La borne septentrionale du côté du Pont-Euxin, est cependant assez incertaine.

Les anciens géographes, comme le Périple de Scylax, Pomponius Méla et Pline, étendent la Thrace jusqu'à l'embouchure du Danube ; de sorte qu'ils y renferment Istropolis, Tomi et Catalis. Pline a suivi en cela Pomponius Méla ; et peut-être celui-ci a-t-il suivi le périple de Scylax.

Les historiens au contraire, mettent ces trois villes et quelques autres du voisinage dans la Scythie, en-deçà du Danube, ou les marquent simplement sur la côté du Pont-Euxin. Strabon lui-même divise ce quartier-là en côtes pontiques ; savoir, celle qui prend depuis l'embouchure sacrée du Danube, jusqu'aux montagnes qui sont près du mont Hémus ; et celle qui s'étend depuis ces montagnes jusqu'à l'embouchure du Bosphore, près de Bysance.

Les bornes que Ptolémée donne à la Thrace paraissent plus naturelles. Ce qui est au-delà du mont Hémus, il l'attribue à la basse Moesie ; et du côté du Pont-Euxin, il ne pousse pas la Thrace au-delà de la ville Mesembria. En effet, on ne voit pas comment Pline, après avoir marqué le mont Hémus pour la borne de la Thrace dans les terres, a pu le long de la côte, l'étendre si fort au-delà de cette montagne, et la pousser jusqu'au Danube.

La Thrace a été extrêmement peuplée autrefois ; ses habitants étaient robustes et pleins de valeur ; leur fleuve Strymon servit longtemps de bornes entre la Thrace et la Macédoine ; mais Strabon dit qu'aussi - tôt que Philippe eut réduit sous sa domination, plusieurs villes entre le Strymon et le Nessus, on s'accoutuma à confondre sous le nom de Macédoine, le pays conquis nouvellement.

Les poètes grecs et latins ne nous font pas un beau portrait de la Thrace. Callimaque, Eschile, Euripide et Aristophane l'appellent la patrie de Borée, le séjour des aquilons et le pays des frimats. Virgile, Horace, Ovide et Catulle tiennent le même langage. Sénéque la nomme la mère des neiges et des glaçons ; et Lucain appelle les grands hivers, des hivers de Thrace. Pomponius-Méla, l. II. c. IIe n'en parle pas plus avantageusement. Regio, dit-il, nec caelo laeta, nec solo, et nisi qua mari propior est, infaecunda, frigida, eorumque servatur maximè admodùm patiens. Rarò usquam pomiferam arborem, vitem frequentiùs tolerat, sed nec ejusquidem fructus maturat ac mitigat, nisi ubi frigora objectu frondium, cultores arcuere.

Celui qui a civilisé ces peuples, et qui leur a donné le premier des lais, a été un disciple de Pythagore nommé Zamolxis. Hérodote rapporte les noms d'une multitude infinie de différents peuples qui ont habité la Thrace. Il dit, que s'ils eussent pu, ou se réunir sous un seul chef, ou se lier d'intérêts et de sentiments, ils auraient formé un corps de nation très-supérieur à tout ce qui les environnait.

Les Thraces avaient eu divers rois depuis Térès, qui eut deux fils, Sitalcée et Sparado. Il y eut de grandes brouilleries entre leurs descendants, qui tour-à-tour se détrônèrent, jusqu'à ce que Seuthès reconquit une partie des états de son père Moèsadès, et transmit sa succession paisible à Cotys, père de Chersoblepte. A la mort de Cotys, les divisions recommencèrent, et au lieu d'un roi de Thrace, il y en eut trois, Chersoblepte, Bérisade et Amadocus. A la fin Chersoblepte déposséda les deux autres : après quoi Philippe, roi de Macédoine, le dépouilla lui-même.

La république d'Athènes, après les victoires de Salamine et de Marathon, ne commanda pas seulement dans la Grèce, mais conquit beaucoup de villes vers la Thrace, et dans la Thrace même ; entr'autres Pidne, Potidée et Méthone. Ces villes secouèrent le joug, dès que Lacédémone à la fin de la guerre du Péloponnèse, eut abattu la puissance d'Athènes ; mais Thimothée l'athénien, les remit encore sous l'obéissance de sa patrie. Le roi Philippe les leur enleva, et se rendit maître de trente-deux villes de la Thrace.

Alexandre acheva la conquête entière de ce pays, dont les peuples ne recouvrèrent leur liberté, qu'après sa mort. Un autre Seuthès, fils ou petit-fils de Chersoblepte, entra aussi-tôt dans les droits de ses ancêtres, et il livra deux sanglantes batailles à Lysimachus, un des capitaines et des successeurs d'Aléxandre.

A quelque temps de-là une partie des Gaulois, qui sous la conduite de Brennus, ravageaient la Grèce, se détacha du gros de la nation, et alla s'établir en Thrace. Le premier roi de ces Gaulois thraces s'appela Commontorius, et le dernier Clyaeus, sous qui les Thraces naturels exterminèrent les Gaulois, transplantés chez eux, et remirent sur le trône Seuthès, issu de leurs anciens rais. Ce prince et ses descendants régnèrent sans interruption jusqu'à Vespasien, qui à la fin, réduisit la Thrace en province romaine.

Depuis ce temps-là, la Thrace a eu le même sort que le reste de la Grèce, jusqu'à ce qu'elle soit demeurée sous la puissance des Turcs, que la prise de Constantinople a rendu maîtres du pays.

La Thrace des anciens se nomme aujourd'hui la Romanie de Thrace, pour la distinguer de la Romanie de la Morée ; c'est la province la plus orientale de la Turquie européenne, entre la mer Noire, la mer de Marmora, l'Archipel, la Macédoine et la Bulgarie.

Le P. Briet divise l'ancienne Thrace en Thrace, en-deçà de Rhodope, et Thrace en-delà de Rhodope. La première comprend la Thrace médique, grecque ou macédonienne ; la Thrace drausique, sapaïque, corpialique ; la province de Bysance, la Thrace cénique, sellétique et samaïque. La seconde Thrace au-delà du Rhodope, comprend la Thrace usdicestique, la Thrace bennique, danthelétique, bessique ; et enfin la Quersonnèse de Thrace.

La notice de l'empire, depuis Constantin jusqu'à Arcadius et Honorius, renferme dans la Thrace six provinces, qui sont l'Europe, Rhodope, la Thrace, l'Hémimont, la seconde Moèsie, et la Scythie.

Les Thraces étaient naturellement féroces, violents, emportés et cruels ; cependant ceux qui venaient des colonies de Phénicie, et qui demeuraient au voisinage de la Grèce, se policèrent, et se rendirent célèbres dans les arts et dans les sciences ; leur pays produisit Orphée, Linus et Musée, dont j'ai déjà parlé dans cet ouvrage.

Phèdre était aussi de Thrace ; il fut réduit à l'esclavage, ensuite affranchi sous Auguste, et exposé sous Tibere à toutes les persécutions de Séjan, jusqu'à la mort de cet indigne favori d'un tyran odieux. Il ne se soucia jamais d'amasser du bien, et met cette raison entre les choses qui devaient lui faciliter la promotion au rang de poète. Ses fables sont admirables, et l'on a raison d'être surpris qu'un ouvrage plein d'autant d'agrément et de pureté, que l'est celui de Phèdre, ait été si peu connu pendant plusieurs siècles. Nous avons outre la belle édition d'Hoogstraten, mise au jour à Amsterdam en 1701, in-4 °. celle de Burmann, imprimée dans la même ville en 1727, in -4°. (D.J.)

THRACE, la mer de, (Géographie ancienne) Thracium mare. Strabon donne ce nom à la partie de la mer Egée, qui baigne les côtes de la Thrace. (D.J.)

THRACE, bosphore de, (Géographie moderne) autrement dit le canal de Constantinople, qui sépare l'Asie d'avec l'Europe. C'est un canal de 15 milles de long, sur environ deux de large, en des endroits plus, en d'autres moins. Sa promenade est agréable, et son aspect est charmant, voyez les détails au mot BOSPHORE de Thrace. (D.J.)

THRACé, s. f. (Mythologie) nymphe de la fable ; elle était fille de Titan, et eut de Saturne Doloneus qui donna son nom aux Dolones ; et de Jupiter elle eut Bithy, qui donna le sien aux Bithyniens. (D.J.)