CANAL ARTIFICIEL, (Histoire et Architecture) lieu creusé pour recevoir les eaux de la mer, d’une ou plusieurs rivières, d’un fleuve, etc. Les rivières ne contribuent pas seulement à la richesse naturelle des campagnes en les arrosant, elles font encore la richesse artificielle des provinces, en facilitant le transport des marchandises. Plus leur cours est étendu dans un état, et plus elles communiquent les unes avec les autres, plus les parties du corps de cet état sont liées et disposées à s’enrichir mutuellement. Si la nature, comme il arrive toujours, n’a pas fait pour les hommes tout ce qu’il y avait de plus avantageux à faire, c’est à eux à achever ; et les Hollandais, ou pour prendre sur la foi des voyageurs un exemple considérable, les Chinois qui ont un pays d’une étendue sans comparaison plus grande, ont bien fait voir jusqu’où peut aller, en fait de canaux et de navigation, l’industrie humaine, et quelle en est la récompense. Mais l’avantage des canaux est une chose très-anciennement connue. Les premiers habitants de la terre ont travaillé à rompre les isthmes et à couper les terres, pour établir entre les contrées une communication par eau. Hérodote rapporte que les Cnidiens, peuples de Carie dans l’Asie mineure, entreprirent de couper l’isthme qui joint la presqu’île de Cnide à la terre ferme, mais qu’ils en furent détournés par un oracle. Plusieurs rois d’Egypte ont tâché de joindre la mer Rouge à la Méditerranée. Cléopatre eut le même dessein. Soliman II. empereur des Turcs, y employa 50000 hommes, qui y travaillèrent sans effet. Les Grecs et les Romains projettèrent un canal à-travers l’isthme de Corinthe qui joint la Morée et l’Achaïe, afin de passer ainsi de la mer Ionienne dans l’Archipel. Le roi Démétrius, Jules-César, Caligula, et Néron, y firent des efforts inutiles. Sous le règne de ce dernier, Lucius Verus, un des généraux de l’armée Romaine dans les Gaules, entreprit de joindre la Saone et la Moselle par un canal, et de faire communiquer la Méditerranée et la mer d’Allemagne par le Rhône, la Saone, la Moselle et le Rhin ; ce qu’il ne put exécuter. Charlemagne forma le dessein de joindre le Rhin et le Danube, afin d’établir une communication entre l’Océan et la mer Noire, par un canal de la rivière d’Almutz qui se décharge dans le Danube, à celle de Reditz qui se rend dans le Mein, qui Ve tomber dans le Rhin près de Mayence : il fit travailler une multitude innombrable d’ouvriers ; mais différents obstacles qui se succédèrent les uns aux autres, lui firent abandonner son projet. Bernard propose, dans son traité de la jonction des mers, une communication entre la mer de Provence et l’Océan, vers la côte de Normandie, en joignant l’Ouche à l’Armanson. On traverserait ainsi la France par le Rhône, la Saone, l’Ouche, l’Armanson, l’Yonne, et la Seine.
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