(Histoire ancienne) c'était une action du préteur qui, après avoir Ve sur les tablettes des juges, quelles étaient leurs opinions, se dépouillait de sa prétexte, et disait, videtur fecisse ; ou, non jure videtur fecisse. Les juges qui devaient déterminer le préteur, lorsqu'ils croyaient l'accusé coupable, ne mettaient qu'un C sur leurs tablettes, ce qui signifiait condemno ; le préteur était obligé d'énoncer le crime et la punition ; par exemple, videtur vim fecisse, at que eo nomine aquae et igni, illi interdico. On appelait aussi condamnation ce qu'on faisait payer au coupable. Voyez l'article suivant. La condamnation des édifices, condemnatio aedium, consistait à détruire la maison du coupable, après lui avoir ôté la vie.

CONDAMNATION, (Jurisprudence) est un jugement qui condamne quelqu'un à faire, donner, ou payer quelque chose, ou qui le déclare déchu de ses prétentions.

Passer condamnation, c'est se désister de sa demande.

Subir sa condamnation, signifie être condamné, quelquefois c'est acquiescer au jugement, quelquefois c'est subir la peine portée par le jugement ; c'est en ce dernier sens qu'on l'entend ordinairement en matière criminelle.

On entend quelquefois aussi par le terme de condamnations, les choses même auxquelles la partie est condamnée, telles qu'une somme d'argent, les intérêts et frais. C'est en ce sens que l'on dit, offrir et payer le montant des condamnations, acquitter les condamnations.

C'est un axiome commun, qu'on ne condamne personne sans l'entendre, c'est-à-dire sans l'avoir entendu, ou du-moins sans l'avoir mis en demeure de venir se défendre ; car en matière civîle on donne défaut contre les défaillans, et en matière criminelle il y a des défauts et jugements par contumace contre ceux qui ne se présentent pas ; on peut même condamner un accusé absent à une peine capitale s'il y a lieu, en quoi notre usage est différent de celui des Romains, dont les lois défendaient expressément de condamner les absens accusés de crime capital. L. 1. cod. de requir. reis. l. 1. ff. eod. l. 6. c. de accus. et l. 5. ff. de poenis. Ce qui était autrefois observé en France, comme il parait par les capitulaires de Charlemagne, lib. VIII. cap. 202. et 354. mais depuis l'usage a changé.

Toute condamnation est donc précédée d'une instruction, et l'on ne doit prononcer aucune condamnation même contre un défaillant ou contumace, qu'il n'y ait des preuves suffisantes contre lui ; et dans le doute en matière criminelle, il vaut mieux absoudre un coupable que de condamner un homme qui peut être innocent.

On prononce néanmoins quelquefois en Angleterre une condamnation sans formalité et sans preuve juridique ; mais cela ne se fait qu'en parlement, et pour crime de haute trahison, que nous appelons ici de lese-majesté : il faut même que le cas soit pressant, et qu'il y ait des considérations importantes pour en user ainsi ; car c'est l'exercice le plus redoutable de l'autorité souveraine : par exemple, si les preuves juridiques manquent, quoiqu'il y ait d'ailleurs des preuves moralement certaines ; ou bien lorsque l'on veut éviter un conflit entre les deux chambres, ou si l'on ne veut pas apprendre au public certains secrets d'état, etc. dans tous ces cas sans témoins ouis, sans interrogatoire, on déclare cet homme atteint et convaincu du crime : l'acte qui contient cette déclaration et condamnation, s'appelle un atteinder. Voyez la seconde suite des réflex. pour la maison d'Hanovre ; à Lancastre, 1746.

Il n'y a que les juges qui puissent prononcer une condamnation proprement dite, car c'est improprement que l'on dit qu'un homme a été condamné par les avocats qu'il a consultés, les avocats ne donnant qu'un avis par lequel ils approuvent ou improuvent ce qui leur est exposé ; mais des arbitres choisis par un compromis peuvent condamner de même que des juges ordinaires.

En Bretagne et dans quelques autres provinces, les notaires se servent du terme de condamnation, pour obliger ceux qui contractent devant eux : après la reconnaissance ou promesse de la partie, le notaire ajoute ces mots, dont nous l'avons jugé et condamné ; ce qui vient de ce qu'autrefois tous les actes publics étaient rédigés sous les yeux du juge par les notaires qui faisaient en même temps les fonctions de greffiers ; c'est pourquoi les actes passés devant notaire sont encore intitulés du nom du juge ; les notaires sont même appelés juges chartulaires, et ont une juridiction volontaire sur les contractants ; ce qui a encore pu leur donner lieu de se servir du terme condamner.

Tout juge qui a pouvoir de condamner quelqu'un, a aussi le pouvoir de le décharger ou absoudre de la demande ou accusation formée contre lui.

On présume toujours que la condamnation est juste, jusqu'à ce qu'elle soit anéantie par les voies de droit, et par un juge supérieur.

Les condamnations portées par des jugements rendus à l'audience, sont prononcées à haute voix aux parties, ou à leurs avocats et procureurs. A l'égard des affaires qui se jugent à la chambre du conseil, il faut distinguer les affaires civiles et les affaires criminelles.

Dans les affaires civiles, autrefois on devait prononcer les jugements aux parties aussi-tôt qu'ils étaient mis au greffe, à peine de nullité, même sans attendre le jour ordinaire des prononciations, si l'une des parties le requérait ; cette formalité a été abrogée comme inutîle par l'ordonnance de 1667.

Dans les affaires criminelles on prononce le jugement aux accusés qui sont présents, et les condamnations à peine afflictive doivent être exécutées le même jour.

L'accusé doit tenir prison jusqu'à ce qu'il ait payé les condamnations pécuniaires, soit envers le Roi, ou envers la partie civile.

Les condamnations sont ordinairement personnelles ; cependant en matière de délits, les pères sont responsables civilement des faits de leurs enfants étant en leur puissance ; les maîtres, des faits de leurs domestiques, en l'emploi dont ils les ont chargés.

Il y a même quelques exemples en matière criminelle, que la peine a été étendue sur les enfants du condamné, et sur toute sa postérité, en les dégradant de noblesse ou autrement ; ce qui ne se pratique que dans des cas très-graves, comme pour crime de lese-majesté. Du temps de Louis XI. lorsque Jacques d'Armagnac duc de Nemours eut la tête tranchée le 4 Aout 1477 aux halles, on mit de l'ordre du roi les deux enfants du coupable sous l'échafaud, afin que le sang de leur père coulât sur eux.

Les condamnations à quelque peine qui emporte mort naturelle ou civile, n'ont leur effet pour la mort civile, que du jour qu'elles sont exécutées réellement si l'accusé est présent ; ou s'il est absent, il faut qu'elles soient exécutées par effigie s'il y a peine de mort, ou par l'apposition d'un tableau seulement si c'est quelqu'autre peine afflictive qui n'emporte pas mort naturelle.

Mais les condamnations à mort naturelle ou civîle annullent le testament du condamné, quoique antérieur à sa condamnation ; parce que pour tester valablement, il faut que le testateur ait les droits de cité au temps du décès.

Les lettres de grâce empêchent bien l'exécution de la sentence, quant à la peine afflictive, mais elles ne détruisent pas la condamnation ni la flétrissure qui en résulte ; il n'y a qu'un jugement portant absolution, ou bien des lettres d'innocentation, qui effacent entièrement la tache des condamnations.

Lorsque les condamnations sont pour délit militaire, et prononcées par le conseil de guerre, elles n'emportent point de mort civile, ni de confiscation, ni même d'infamie. Voyez ARRET, CONDAMNE, JUGEMENT, SENTENCE, PEINE.

CONDAMNATION CONSULAIRE, est celle qui est portée par une sentence des consuls, et qui emporte la contrainte par corps. Voyez CONSULS et CONTRAINTE PAR CORPS.

CONDAMNATION CONTRADICTOIRE, est celle qui est prononcée contre un défendeur, qui a été oui par lui ou par son avocat ou procureur, ou en matière criminelle contre un accusé présent.

CONDAMNATION PAR CONTUMACE, est celle qui est prononcée contre un accusé absent. Voyez CONTUMACE.

CONDAMNATION PAR CORPS, est celle qui emporte la contrainte par corps, telles que celles qui sont prononcées en matière civîle contre les fermiers des biens de campagne, lorsqu'ils s'y sont soumis par leurs baux ; en matière de stellionat, pour dépens montants à 200 livres et au-dessus, pour dettes entre marchands, et en matière criminelle pour les intérêts et réparations civiles.

CONDAMNATION FLETRISSANTE, est celle qui imprime quelque tache au condamné, quoiqu'elle ne lui ôte pas la vie civile, et même qu'elle n'emporte pas infamie, comme lorsqu'un homme est admonesté.

CONDAMNATION INFAMANTE, est celle qui prive le condamné de l'honneur qui fait une partie de la vie civîle ; toutes les condamnations à peine afflictive sont infamantes. Voyez INFAMIE.

CONDAMNATION ad omnia citra mortem, c'est lorsque quelqu'un est condamné au fouet, à être marqué et aux galeres.

CONDAMNATION PECUNIAIRE, est celle qui ordonne de payer quelque somme d'argent, comme une amende, une aumône, des intérêts civils, des dommages et intérêts, des réparations civiles ; ce terme est principalement usité en matière criminelle pour distinguer ces sortes de condamnations de celles qui tendent à peine afflictive.

CONDAMNATION A PEINE AFFLICTIVE, voyez PEINE AFFLICTIVE.

CONDAMNATION SOLIDAIRE, est celle qui s'exécute solidairement contre plusieurs condamnés, comme pour dette contractée solidairement, ou pour dépens en matière criminelle. (A)