ou MAGNESE, (Histoire ancienne) substance minérale. Voyez MANGANESE.

MAGNESIE BLANCHE, (Chimie et Matière médicale) c'est le nom le plus usité aujourd'hui d'une poudre terreuse blanche, et qui a été connue aussi auparavant sous les noms de panacée solutive, de panacée anglaise, de fécule alkaline, de panacée anti-hypocondriaque, de poudre du comte de palma, de poudre de sentinelli. Voici la préparation qu'en donne M. Baron dans ses additions au cours de Chimie de Lémery.

Mettez la quantité qu'il vous plaira d'eau-mère des salpétriers dans une terrine de grais ; versez dessus parties égales d'huîle de tartre par défaillance ou de dissolution de cendres gravelées, peu de temps après le mélange se troublera ; mais il reprendra sa limpidité aussi-tôt qu'il aura déposé un sédiment blanchâtre qui le rendait laiteux : décantez alors la liqueur qui surnage le précipité, lavez-le à plusieurs reprises, et mettez-le égoutter sur un filtre ; faites-le sécher ensuite jusqu'à ce qu'il soit réduit en une poudre blanche.

Il y a deux autres procédés pour préparer la magnésie, l'un et l'autre plus anciens que le précédent. Le premier consiste à évaporer jusqu'à siccité de l'eau-mère de salpêtre, à calciner le produit de cette dessiccation, jusqu'à ce qu'il ne donne plus de vapeurs acides, à l'édulcorer ensuite par des lotions répétées avec l'eau bouillante, et enfin à le faire égoutter et sécher selon l'art. La magnésie préparée ainsi est peut-être moins subtile, moins divisée que celle qu'on obtient par la précipitation, ce qui suffit pour rendre cette dernière préférable dans l'usage medicinal ; mais d'ailleurs les produits de ces deux procédés sont parfaitement semblables. L'eau-mère du nitre étant composée du mélange de nitre à base terreuse et de sel marin à base terreuse (Voyez NITRE), qui sont l'un et l'autre des sels neutres éminemment solubles par l'eau, il est clair que la portion de ces sels, qui pourraient avoir été épargnés dans la calcination, est infailliblement enlevée par les lotions réitérées.

L'autre procédé consiste à précipiter l'eau-mère du nitre par l'acide vitriolique : celui-ci est absolument défectueux ; ce n'est qu'un faux précipité qu'on obtient par ce moyen (voyez PRECIPITATION) ; c'est un sel seleniteux produit par l'union de l'acide vitriolique à une partie de la terre qui sert de base aux sels neutres contenus dans l'eau-mère du salpêtre, et dont nous avons déjà fait mention. Je dis une portion, car ce n'est pas une seule espèce de terre qui fournit la base de ces sels. Une portion seulement est calcaire et produit le faux précipité avec l'acide vitriolique ; l'autre portion est analogue à la base du sel de seidlitz et d'ébsham, et elle constitue, avec l'acide vitriolique un sel neutre soluble, et qui reste suspendu par conséquent dans la liqueur. Voyez SEL MARIN, SEL DE SEIDLITZ, SEL D'EBSHAM, sous l'article général SEL.

C'est évidemment à cette terre que j'appelle seidlitienne que la magnésie doit la propriété que Hoffman y a remarquée de fournir une dissolution saline amère et salée, lorsqu'on la dissout dans de l'esprit de vitriol, tandis que les terres purement calcaires ne donnent avec le même acide qu'une liqueur très-peu chargée de sel qui n'est ni amère ni salée, et qui est même presqu'absolument insipide.

La magnésie est donc à mon avis une terre absorbante mélangée d'une portion de terre calcaire et d'une portion de terre analogue à la base du sel de seidlitz.

La comparaison que fait Hoffman de l'eau-mère des salpétriers et de la liqueur saline appelée huîle de chaux, provenant de la décomposition du sel ammoniac par la chaux, relativement à la propriété de produire la magnésie blanche ; cette comparaison, disje, n'est point exacte.

Le D. Black, médecin à Edimbourg, qui a pris comme une matière absolument semblable à la magnésie blanche, la terre qui sert de base au sel d'ebsham (voyez recueil de médecine de Paris, vol. VIII.), a donné dans une erreur opposée. Le précipité de l'huîle de chaux est entièrement calcaire, et celui du sel d'ebsham est entièrement seidlitien ; ni l'un ni l'autre n'est par conséquent la magnésie blanche, quoique leurs vertus medicinales soient peut-être les mêmes, ce qui est cependant fort douteux et qui reste à éprouver.

La magnésie blanche ordinaire, c'est-à-dire le précipité de l'eau-mère de nitre, purge très-bien presque tous les sujets à la dose d'une drachme ou de deux, ou même de demi-once pour les adultes, et à proportion pour les enfants. Il arrive quelquefois, mais rarement, qu'étant prise à la même dose, elle ne donne que des envies inutiles d'aller, et ne purge point du tout. Hoffman attribue cette diversité d'action à la présence ou à l'absence des acides dans les premières voies. Si cette terre, purement absorbante et dépourvue, dit-il, de tout principe purgatif, rencontre des acides dans les premières voies, elle s'unit avec ces acides, et se change par-là en un sel neutre, âcre et stimulant : ce qu'il trouve évident par l'analogie qu'il admet entre ce sel formé dans les premières voies, et celui qui résulte de l'union de cette terre à l'acide vitriolique. Cette explication n'est que du jargon tout pur, qu'une franche théorie à prendre ce terme dans son acception la plus défavorable ; car, 1°. elle suppose tacitement que la présence des acides dans les premières voies est le cas le plus fréquent, puisqu'en effet la magnésie purge le plus grand nombre de sujets ; or cette supposition est démentie par l'expérience : 2°. elle indique l'inadvertance la plus puérîle sur le degré d'acidité réelle des sucs acides contenus quelquefois dans les premières voies : car il est de fait que même dans le degré extrême d'acidité de ces sucs concourant avec leur plus grande abondance, il n'y a jamais eu dans les premières voies de quoi saturer dix grains de magnésie ; et quand même on pourrait supposer qu'il s'y en trouvât quelquefois de quoi en saturer deux gros, cette quantité devrait être la dose extrême, et tout ce qu'on pourrait en donner au-delà serait inutile. Or il est cependant prouvé par l'expérience, que dans tous les cas l'activité de la magnésie est proportionnelle à sa dose : une once purge plus que demi-once. 3°. C'est gratuitement au-moins qu'on estime la nature du sel neutre formé dans les premières voies par celles de celui qui résulte de la combinaison de l'acide vitriolique avec la même base. 4°. Enfin la diversité d'action reconnue même par Hoffman entre la magnésie blanche et les autres absorbans, prouve sans doute qu'il n'est point permis de considérer la magnésie comme un simple absorbant. On a presque regret au temps qu'on emploie à réfuter de pareilles spéculations ; mais comme ce sont principalement les théories arbitraires et frivoles dont la Médecine est inondée, qui déshonorent l'art aux yeux des bons juges, et que celle que nous venons de discuter est défendue par l'appareil des principes chimiques exacts et lumineux en soi, et par une simplicité apparente qui séduit toujours les demi-savants, et dont les vrais connaisseurs se méfient toujours au contraire ; pour toutes ces considérations, dis-je, on s'est permis d'attaquer ce préjugé plus sérieusement et avec plus de chaleur qu'il n'en mérite dans le fond.

Quant à l'utilité absolue de la magnésie, il est sur que l'usage fréquent qu'elle a chez nous depuis quelque temps, a été principalement une affaire de mode, et qu'il a été soutenu principalement par l'avantage d'être un remède moins dégoutant que les autres purgatifs. On doit pourtant convenir qu'on l'emploie avec assez de succès pour purger dans les affections hypocondriaques, et toutes les fois qu'on a à remplir la double indication d'absorber et de purger, comme dans la toux stomachale et l'asthme humide, et quelque cas même d'asthme convulsif. Elle est très-utîle aussi dans la constipation qu'occasionne quelquefois le lait, voyez LAIT. Hoffman remarque, et l'observation journalière confirme, que cette poudre est sujette à causer des ventosités et de l'irritation dans les intestins, si on en fait un trop fréquent usage.

On la donne dans de l'eau, du bouillon, des infusions ou décoctions de plantes laxatives, dans des sucs de plantes émollientes, dans une émulsion, etc. (b)

MAGNESIE OPALINE, (Chimie) ou RUBINE D'ANTIMOINE. Ce n'est autre chose qu'une espèce de foie d'antimoine qui ne diffère du foie d'antimoine ordinaire (voyez foie d'antimoine au mot ANTIMOINE) qu'en ce qu'on a fait entrer dans sa préparation au lieu des deux ingrédiens ordinaires, savoir l'antimoine crud et le nitre employés à parties égales, l'antimoine crud, le nitre et le sel marin employés aussi à parties égales.

Le nom de magnésie opaline lui vient de sa couleur ; elle prouve par sa différence d'avec celle du foie d'antimoine ordinaire, que le sel marin a influé réellement sur le changement que le régule d'antimoine a subi dans cette opération : car d'ailleurs on ignore encore parfaitement la théorie de l'action du sel marin dans cette préparation et dans celle des régules medicinaux préparés avec ce sel. Voyez régule d'antimoine medicinal au mot ANTIMOINE.

La magnésie opaline est regardée comme moins émétique que le foie d'antimoine ordinaire, mais cela ne dépend point de la différence reconnue de l'action du nitre sur le régule dans l'une et dans l'autre opération ; car il n'est pas connu que le sel marin affoiblisse cette action du nitre qui est employé en même proportion dans les deux opérations. (b)

MAGNESIE, (Géographie ancienne) province de la Macédoine, annexée à la Thessalie ; elle s'étendait entre le golfe de Thermée et le golfe Pélasgique, depuis le mont Ossa jusqu'à l'embouchure de l'Amphrise. Sa ville capitale portait le nom de la province, ainsi que son principal promontoire, qu'on appelle à présent Cabo S. Gregorio. Les monts Olympe, Ossa, et Pélion, sont connus des gens les moins lettrés. Aujourd'hui cette province de Magnésie est une presqu'île de la Janna, entre les golfes de Salonique et de Volo. (D.J.)

MAGNESIE, (Géographie ancienne) ville de la Macédoine, dans la province de Magnésie. Pline l'a nommée Pegaza, Pégase, parce qu'elle s'accrut des ruines de cet endroit. Elle était située au pied du mont Pélée. Pausanias la met au nombre des trois villes qu'on appelait les trois clés de la Grèce. Philippe s'en empara, en assurant qu'il la rendrait, et se promettant bien de la garder. Le Duc d'Albe disait à un autre Philippe, que les princes ne se gouvernaient point par des scrupules ; et cet autre Philippe prouva, par sa conduite, que cette maxime lui plaisait. (D.J.)

MAGNESIE sur le Méandre, (Géographie ancienne) ville de l'Asie mineure, dans l'Ionie ; son surnom ad Maeandrum, la distinguait de Magnésie, ville de Lydie, au pied du mont Sipyle : cependant on l'appelait aussi Magnésie tout court, parce qu'elle était beaucoup plus considérable que Magnésie ad Sipylum, qui avait besoin de ce surnom. C'est de cette manière qu'on en a usé dans les médailles qui appartiennent à ces deux villes. Strabon, liv. XIV. pag. 647. nous apprend que la Magnésie d'Ionie n'était pas précisément sur le Méandre, et que la rivière Léthée en était plus près que ce fleuve, vicinior urbi amnis Lethaeus. Scylax donne à Magnésie Ionienne, le titre de ville grecque. Paterculus l'estime une colonie de Lacédémoniens ; et Pline la regarde comme colonie des Magnésiens de Thessalie. Elle a été épiscopale sous la métropole d'Ephese : on la nomme à présent Gusetlissar. (D.J.)

MAGNESIE ad Sipylum, (Géographie ancienne) autrement dite Manachie (on l'appelait encore Héraclée, selon Dionysius dans Eustathe) ville de l'Asie mineure en Lydie, au pied du mont Sipyle, dans un pays assez plat, terminé par une grande plaine, qui mérite un article à part. La victoire que les Romains y remportèrent sur Antiochus, rendit célèbre cette plaine et la ville, et la montagne au bas de laquelle elle est située. Sous l'empereur Tibere, et du temps de Strabon, la ville fut ruinée par des tremblements de terre, et rétablie à chaque fais. Elle avait déjà été pillée antérieurement par Gygès, roi de Lydie, et par les Scythes, qui traitèrent les habitants avec la dernière inhumanité : voici la suite de ses autres vicissitudes.

Après la prise de Constantinople par le comte de Flandres, Jean Ducas Vatatze, successeur de Théodore Lascaris, regna dans Magnésie pendant trente-trois ans. Les Turcs s'en rendirent maîtres sous Bajazet ; mais Tamerlan qui le fit prisonnier à la fameuse bataille d'Angora, vint à Magnésie, et y transporta toutes les richesses des villes de Lydie.

Roger de Flor, vice-roi de Sicile, assiégéa cette place sans succès : Amurat y passa à la fin de ses jours. Mahomet II. son fils, forma des environs de Magnésie une petite province, et le grand Soliman II. y résida jusqu'à la mort de son père. C'est un monsselin et un sardar qui commandent à présent dans Magnésie. Elle n'est pas plus grande que la moitié de la Prusse ; il n'y a ni belles églises, ni beaux caravansérais ; on n'y trafique qu'en coton. La plupart de ses habitants sont Mahométans, les autres sont des Grecs, des Arméniens, et des Juifs, qui y ont trois synagogues. Le serrail y tombe en ruine, et n'a pour tout ornement que quelques vieux cyprès. (D.J.)

MAGNESIE plaine de, (Géographie anc. histor.) plaine à jamais célèbre, aux environs de la ville de même nom, au pied du mont Sipyle.

Quoique cette plaine soit d'une beauté surprenante, dit M. de Tournefort, elle est cependant presque toute couverte de tamaris, et n'est bien cultivée que du côté du levant : la fertilité en est marquée par une médaille du cabinet du roi : d'un côté c'est la tête de Domitia, femme de Domitien ; de l'autre est un fleuve couché, lequel de la main droite tient un rameau, de la gauche une corne d'abondance. Du haut du mont Sipyle la plaine parait admirable, et l'on découvre avec plaisir tout le cours de l'Hermus.

C'est dans cette plaine que les grandes armées d'Agésilaus et de Tisapherne, et celles de Scipion et d'Antiochus, se sont disputées l'empire de l'Asie. Le roi de Lacédémone, étant descendu du mont Sipyle, attaqua les Perses le long du Pactole, et les mit en déroute.

La bataille de Scipion et d'Antiochus se donna entre Magnésie et la rivière Hermus, que Tite-Live et Appien appellent le fleuve de Phrigie. Antiochus était campé avantageusement autour de la ville ; des élephans d'une grandeur extraordinaire brillaient par l'or, l'argent, l'ivoire et la pourpre dont ils étaient couverts. Scipion ayant fait passer la rivière à son armée, obligea les ennemis de combattre, et cette bataille, qui fut la première que les Romains gagnèrent en Asie, leur assura la possession du pays, jusqu'aux guerres de Mithridate. (D.J.)