S. f. (Morale) comme la nation Française est fort vive, et qu'elle aime beaucoup à parler, il lui a plu de prendre ce mot en mauvaise part ; et d'entendre par taciturnité, l'observation du silence, dont le seul principe est une humeur triste, sombre et chagrine ; mais nous n'adoptons pas cette idée vulgaire, parce qu'elle ne nous parait pas trop philosophique.

La taciturnité, en latin taciturnitas dans Ciceron, est cette vertu de conversation qui consiste à garder le silence quand le bien commun le demande.

Les deux vices qui lui sont opposés dans l'excès, sont le trop parler lorsqu'il est nuisible, et le silence hors de saison, qui est préjudiciable à la communication qu'on doit faire de ses connaissances, et aux principaux services de la société humaine.

La parole étant le principal interprete de ce qui se passe en-dedans de notre âme ; et un signe dont l'usage est particulier au genre humain, la loi naturelle qui nous prescrit de donner à-propos des marques d'une sage bienveillance envers les autres, règle aussi la manière dont nous devons user de ce signe, et en détermine les justes bornes. La taciturnité, par exemple, est requise, toutes les fois que le respect dû à la Divinité, à la religion établie, ou aux hommes mêmes qui sont nos supérieurs, exige de nous cette vertu. Elle est encore nécessaire quand il s'agit des secrets de l'état, de ceux qui regardent nos amis, notre famille, ou nous-mêmes, et qui sont de telle nature, que si l'on en découvrait, on causerait du préjudice à quelqu'un ; sans que d'ailleurs en les cachant, on nuise au bien public. (D.J.)