S. m. serpens, (Histoire naturelle) animal qui n'a point de pieds, et qui rampe. Voyez REPTILE. On divise les serpens en deux classes ; la première contient ceux dont la morsure n'est pas venimeuse, et que l'on nomme couleuvres ; ils font des œufs qu'ils déposent dans les endroits chauds, et il en sort au bout d'un certain temps de petits serpens, voyez COULEUVRE, et la fig. 3 de la Pl. XVI. où on a représenté un petit serpent dans son œuf. Les serpens de la seconde classe sont appelés viperes ; leur morsure est très-dangereuse ordinairement, même elle cause la mort, si on n'y apporte un prompt remède ; ils font leurs petits tout vivants. Voyez VIPERE. il y a peu d'endroits où il n'y ait des serpens, ils aiment le chaud, et ils sont en plus grand nombre dans les pays méridionaux que dans les septentrionaux ; ils varient beaucoup pour la grandeur et la couleur. Dapper, hist. de l'Amérique, fait mention d'un serpent que l'on trouve au Brésil, et qui a vingt-quatre pieds de longueur ; et Chrétien Mentzelius dit qu'il y en a dans les Indes orientales qui dévorent et qui avalent un bufle tout entier. Les auteurs qui ont écrit sur les serpens se sont contredits les uns les autres dans la plupart de leurs descriptions, de façon qu'il est très-difficîle de déterminer les différentes espèces de ces animaux.

SERPENT AMPHISBENE, on a donné ce nom aux serpens dont la queue est aussi grosse que la tête ; on prétend qu'ils marchent en avant et en arrière comme les écrevisses, c'est pourquoi on les appelle aussi doubles-marcheurs.

SERPENT des îles Antilles, dans le nombre des îles Antilles, les seules îles de la Martinique et de Sainte-Alousie nourrissent dans leurs forêts et sur leurs montagnes une multitude de serpens venimeux dont la morsure est mortelle. Ce reptîle tient de la nature des vivipares ; la femelle produisant à-la-fais jusqu'à soixante et quatre-vingt petits ; on rencontre des serpens de huit à dix pieds de longueur sur quatre pouces de diamètre et même plus, couverts sur le dos d'une peau écaillée de couleur grise ou noire marquetée, quelquefois verdâtre ou d'un jaune-brun ; le dessous du ventre est toujours plus pâle et presque blanc, couvert d'écailles plus grandes que celles du dos ; leur tête, qui est de forme triangulaire, un peu arrondie sur les angles, parait comme écrasée, ils ont les yeux petits, vifs, la gueule demesurément fendue et garnie de petites dents ; sur les côtés de la mâchoire supérieure sont deux longs crocs un peu courbes, fort pointus, creux à leur naissance, mobiles dans l'alvéole, et percés d'un petit trou latéral au-dessus de la gencive, qui, dans cette partie, parait gonflée, renfermant une vessicule remplie d'un venin des plus funestes à ceux qui ont le malheur d'en éprouver les effets, principalement si la piquure rencontre une veine ou une artère, on ne doit point alors espérer de remède. Les serpens s'élancent avec une extrême rapidité, ils piquent de leurs crocs les parties qu'ils touchent, et y seringuent leur venin au moyen du petit trou latéral dont on a parlé. Le parti le plus convenable dans ces occasions est de se faire une sorte de ligature à sept ou huit doigts au-dessus de l'endroit piqué, et de prendre promptement un bon coup d'eau-de-vie, ou, à son défaut, d'avaler, de l'urine toute chaude ; si on a tué l'animal, il est à propos d'en écraser la tête et de l'appliquer sur le mal, ayant grande attention de ne pas rester en place, mais de courir très-vite, chercher du secours avant que l'enflure et l'assoupissement dont on est pris aient fait des progrès. Quoique dans un pays chaud, on fait toujours du feu auprès du malade, on le couvre bien, et on l'agite un peu pour l'empêcher de dormir au-moins pendant vingt-quatre heures ; la soif qui le tourmente ne doit point être étanchée par de l'eau fraiche qui serait pernicieuse ; il ne faut pas non plus qu'il prenne de nourriture, mais on lui fait avaler une forte dose de thériaque délayée dans de l'eau-de-vie, et on opère sur la blessure en y faisant des scarifications, et y appliquant les ventouses à plusieurs reprises jusqu'à ce qu'on juge qu'il ne reste plus de venin ; alors on met sur la plaie un cataplasme composé d'ail pilé dans un mortier de bois avec une sorte d'herbe appelée mal-nommée, quelques autres plantes connues dans le pays et un peu de poudre de tête de serpent. Avant d'appliquer ces drogues, on en exprime le suc pour le faire boire au malade, lequel, au bout de trois ou quatre jours, doit être hors de danger.

Les negres piayes, médecins ou sorciers, font usage de la succion au-lieu de ventouses, ayant soin de se rincer la bouche à chaque fois avec de l'eau-de-vie ; ils appliquent ensuite sur la blessure plusieurs simples et drogues, dont ils se réservent la connaissance ; c'est un secret qu'on n'a jamais pu tirer d'eux.

Comme l'espèce de serpent, dont on vient de parler, n'est autre chose qu'une très-grosse vipere, on pourrait sans-doute avec succès faire usage du remède que M. de Jussieu a employé si heureusement sur un homme qui, en herborissant, fut piqué au bras par un de ces animaux. Ce remède consiste à faire prendre au malade dix à douze gouttes d'eau-de-luce dans du vin, le bien couvrir ensuite, et répéter ce traitement de demi-heure en demi-heure, jusqu'à ce que les sueurs abondantes ayant emporté la cause du mal.

La chair du serpent étant rôtie sur le gril et accommodée comme celle de l'anguille est très-bonne au gout, mais il n'en faut pas faire un long usage, l'expérience ayant appris qu'elle subtilisait trop le sang.

Les serpens changent de peau tous les ans ; ils se nourrissent de rats sauvages, de volailles, de grenouilles et d'insectes, ils s'endorment aussi-tôt qu'ils sont repus, jusqu'à ce que ce qu'ils ont avalé se soit entièrement corrompu et consommé, car ces animaux n'ont pas une autre façon de digérer.

Serpent tête de chien. Cette espèce se trouve communément dans l'île de la Dominique ; sa longueur est d'environ huit à neuf pieds, et sa grosseur est plus forte que le bras ; il a la tête ramassée, ayant quelque rapport à celle d'un chien ; sa gueule est fendue, bien garnie de dents, sans crocs ni venin. La peau de ce serpent est couverte de petites écailles grises et comme argentées sur les flancs ; le dos étant varié de grandes marques noires bordées de jaune, et le dessous du ventre, dont les écailles sont presque aussi larges que l'ongle et fort minces, tire sur la couleur de nâcre de perle. La graisse des tête-de-chiens est estimée un souverain remède contre les rhumatismes ; on prétend qu'étant appliquée un peu chaude elle apaise les douleurs de la goutte ; la façon la plus ordinaire de s'en servir est de la mêler avec partie égale d'eau-de-vie ou de taffia.

SERPENT AVEUGLE. Voyez ORVET.

SERPENT CORNU, CERASTE. Ce serpent a sur la mâchoire supérieure une corne dure et pointue, d'où lui vient le nom de serpent cornu. Seba donne la description et la figure de plusieurs espèces de ces serpens.

SERPENT ESCULAPE. Ce serpent est très-commun en Allemagne, en Italie, en Espagne, en Pologne, en Asie, en Afrique et en Amérique. Ruysch dit que la face supérieure de ce serpent est d'un verd tirant sur la couleur de poireau, à l'exception du dos qui a une couleur noirâtre : la face inférieure est d'un blanc verdâtre. Seba donne la description de sept espèces de serpens esculapes.

SERPENT A LUNETTE, ou SERPENT COURONNE. (Pl. XVI. fig. 4.) Il est ainsi nommé parce qu'il a sur la tête une tache dont la figure ressemble beaucoup à celle d'une paire de lunettes à mettre sur le nez. On trouve ce serpent dans l'Amérique méridionale, au Pérou, à Siam, aux grandes Indes, etc. Seba donne la description et la figure de plusieurs espèces de serpens à lunettes, qui diffèrent les uns des autres par la grandeur et la couleur.

SERPENT A SONNETTES, boicininga, vipera caudisona. (Pl. XVI. fig. 2.) On a donné le nom de serpent à sonnettes à ce reptile, parce qu'il a l'extrémité de la queue composée de plusieurs anneaux larges et mobiles, qui en frottant les uns contre les autres, font un bruit semblable à une sorte de cliquetis, ou au son d'une sonnette fêlée. La morsure de ce serpent passe pour très-venimeuse. Seba donne la description et la figure de plusieurs espèces de serpens à sonnettes qui diffèrent par la grandeur et par les couleurs. On en trouve en Amérique, dans les Indes orientales et dans les Indes occidentales. Il est fait mention, dans les transactions philosophiques, d'un serpent à sonnettes qui avait près de cinq pieds et demi de longueur : c'est le plus grand de tous ceux dont les auteurs ont parlé.

SERPENT MARIN, poisson de mer auquel on a donné ce nom, parce qu'il a beaucoup de ressemblance avec le serpent. Il devient long de trois ou quatre coudées ; il a le corps plus rond que celui de l'anguille ; la tête ressemble à celle du congre ; la mâchoire supérieure est plus longue que l'inférieure, et elles sont garnies de dents toutes les deux comme celles de la murene ; il y a aussi des dents au palais, mais en petit nombre. La couleur de ce poisson est jaune en entier, à l'exception du ventre et du bec qui sont cendrés. Il a deux petites nageoires auprès des ouies ; les yeux ont une couleur jaune. Rondelet, hist. nat. des poissons, première partie, liv. XIV. chap. VIe

Le même auteur fait mention, au chap. VIIe du livre déjà cité, d'une autre espèce de serpent marin rouge, dont les côtés sont traversés par des lignes qui s'étendent depuis le dos jusqu'au ventre. Ce poisson a sur le dos une nageoire et une autre sur le ventre, qui s'étendent toutes les deux jusqu'à la queue ; elles sont composées de deux petits poils très-minces et tous séparés les uns des autres. Il y a un trait sur les côtés du corps depuis la tête jusqu'à la queue qui est terminée par une nageoire. Voyez POISSON.

SERPENT VOLANT. Seba donne la description de deux espèces de serpens volans ; comme il ne parle pas de leurs ailes, c'est sans-doute des espèces d'acontias qui se tiennent sur les arbres, et qui s'élancent sur ceux qui passent dessous avec une impétuosité si grande, qu'on croirait qu'ils volent. Voyez ACONTIAS. Cependant Vesputius assure avoir Ve des serpens qui avaient des ailes, et Artus dit qu'il y a à la Côte d'or des serpens ailés qui volent assez bien pour prendre des oiseaux en l'air. Voyez DRAGON.

SERPENT, rampement du, (Physique) j'ai déjà parlé, au mot RAMPEMENT, de ce mouvement progressif des serpens ; mais je ne puis m'empêcher d'ajouter encore deux lignes sur la justesse et l'exactitude presque géométrique qui se rencontre dans les mouvements sinueux que les serpens font en rampant. Les écailles annulaires qui les assistent dans cette action, sont d'une structure très-singulière. Sur le ventre, elles sont situées en travers, et dans un ordre contraire à celles du dos et du reste du corps : non-seulement depuis la tête jusqu'à la queue, chaque écaille supérieure déborde sur l'inférieure, mais les bords sortent en dehors ; en sorte que chaque écaille étant tirée en arrière, ou dressée en quelque manière par son muscle, le bord extérieur s'éloigne un peu du corps, et sert comme de pied pour appuyer le corps sur la terre, pour l'avancer, et pour faciliter son mouvement serpentin.

Il est aisé de découvrir cette structure dans la dépouille, ou sur le ventre d'un serpent, quel qu'il sait. Mais ce n'est pas tout, il y a encore ici une autre mécanique admirable, c'est que chaque écaille a son muscle particulier, dont une extrémité est attachée au milieu de l'écaille suivante. Le docteur Tyson a découvert cette mécanique dans le serpent à sonnettes ; et selon les apparences, elle existe de même dans les autres serpens, ou du moins dans les gros serpens des Indes orientales et occidentales. (D.J.)

SERPENS, pierres de, (Histoire naturelle) nom donné par quelques auteurs aux coquilles fossiles pétrifiées, connues sous le nom de cornes d'ammon.

SERPENS, langues de, (Histoire naturelle) nom que l'on donne quelquefois aux dents de poissons pétrifiées. Voyez GLOSSOPETRES.

SERPENT-FETICHE, (Histoire moderne, Superstition) les negres d'Afrique prennent pour objet de leur culte le premier objet, soit animé, soit inanimé, qu'ils rencontrent en sortant de chez eux pour exécuter quelque entreprise ; tantôt c'est un chien, un chat, un insecte, un reptîle ; tantôt c'est une pierre, ou un arbre, etc. Lorsque les negres ont fait choix d'une divinité qu'ils nomment fétiche, ils lui font une offrande, et font vœu de continuer à lui rendre un culte, s'il les favorise dans le projet qu'ils méditent ; lorsqu'ils réussissent, ils attribuent leur succès à la divinité dont ils font choix ; si au contraire l'entreprise manque, le fétiche est oublié ; de cette manière ces peuples font et défont leurs divinités à volonté. Ces superstitions si grossières, n'empêchent point ces negres d'avoir des idées assez justes d'un être suprême, qu'ils regardent comme le souverain du ciel et de la terre ; ils lui attribuent la justice, la bonté, l'omniscience ; c'est un esprit qui réside dans les cieux et qui gouverne l'univers ; malgré cela leurs hommages sont réservés pour les fétiches dont nous avons parlé.

C'est surtout un serpent qui est la divinité la plus révérée des negres de la côte de Juidah ; ils l'invoquent dans les temps de sécheresse, dans les calamités publiques, dans la guerre, etc. On lui offre alors de l'argent, des pièces d'étoffes de soie, des marchandises précieuses, des bestiaux vivants et des mêts délicieux ; toutes ces offrandes tournent au profit des prêtres. Le serpent qui est l'objet de ce culte est très-familier ; sa peau est de la plus grande beauté par la variété de ses couleurs. Il n'est point venimeux, mais est d'une espèce qui fait la guerre aux autres et qui les détruit efficacement ; il est même facîle de les distinguer par leur forme et leurs couleurs. Le respect que l'on a pour le grand serpent-fétiche, s'étend à tous les serpens de son espèce. Un capitaine anglais fut massacré impitoyablement, parce que les matelots de son équipage avaient eu le malheur de tuer un de ces serpens qui était venu se loger dans leur magasin. Comme les cochons se nourrissaient de serpens, on a pris le parti d'en détruire l'espèce, de peur qu'ils ne continuassent à manger les divinités favorites de la nation. Le grand serpent-fétiche, que les negres croient immortel, a un temple magnifique, des prêtres auxquels la crédulité des souverains a fait accorder des terres et des revenus considérables : de plus tous les ans on consacre à ce dieu un certain nombre de vierges choisies destinées à ses plaisirs, ou plutôt à ceux de ses ministres. Ces imposteurs sont parvenus à persuader au peuple qu'il est un temps dans l'année pendant lequel les serpens saisissent toutes les jeunes filles qui leur plaisent, et les jettent dans une espèce de délire qui suit leurs embrassements ; les parents de ces filles, pour les faire guérir de cette frénésie, les mettent dans des hôpitaux sous la direction des prêtres, qui travaillent à leur cure, et qui se font payer un prix considérable à titre de pension ; de cette manière ils savent se faire payer même des plaisirs qu'ils se procurent. Ces pensions et les présents qui les accompagnent, font un produit immense, que les prêtres sont pourtant obligés de partager avec le souverain. Les filles qui ont été guéries dans ces sortes d'hôpitaux, sont obligées de garder un secret inviolable sur les choses qu'elles y ont vues ; la moindre indiscrétion serait punie de mort. Cependant on nous dit que les prêtres imposteurs parviennent à fasciner tellement ces victimes de leur brutalité, que quelques-uns croient réellement avoir été honorées des embrassements du grand serpent-fétiche. Bosman raconte que les filles d'un roi furent obligées de subir les mêmes épreuves que les autres. Rien ne serait plus dangereux que de révoquer en doute la probité des prêtres et la certitude des amours de leurs dieux. Ces prêtres se nomment fétichères ; ils ont un chef ou souverain pontife qui n'est pas moins révéré que le roi, et dont le pouvoir balance souvent celui du monarque. Son autorité est fondée sur l'opinion du vulgaire, qui croit que ce pontife converse familièrement avec le dieu, et est l'interprête de ses volontés. Les fétichères ont une infinité de moyens pour s'engraisser de la substance des peuples qui gémissent sous leurs cruelles extorsions ; ils font le commerce, ont un grand nombre d'esclaves pour cultiver leurs terres ; et la noblesse, qui s'aperçoit souvent de leur manège, est accablée de leur crédit, et gémit en silence des impostures de ces misérables.

Le grand serpent-fétiche a aussi des prêtresses, appelées betas, qui se consacrent à son service ; les anciennes en choisissent tous les ans un certain nombre parmi les belles filles du pays. Pour cet effet, armées de bâtons, elles vont courir dans les villes, elles saisissent toutes les jeunes filles qu'elles rencontrent dans les rues ; et secondées des prêtres, elles assomment quiconque voudrait leur opposer de la résistance. Les jeunes captives sont conduites au séjour des prêtresses, qui leur impriment la marque du grand serpent. On leur apprend à chanter des hymnes en son honneur, à former des danses autour de lui, enfin à faire valoir leurs charmes, dont elles partagent les revenus avec les vieilles prêtresses qui les instruisent. Cela n'empêche point que l'on n'ait pour elles la plus profonde vénération.

SERPENT, en terme d'Astronomie, est une constellation de l'hémisphère boréal, qu'on appelle plus particulièrement serpent ophiuchus.

Les étoiles de la constellation du serpent, sont au nombre de 17 dans le catalogue de Ptolémée, de 19 dans celui de Ticho, et de 59 dans celui de Flamsteed. Chambers. (O)

SERPENT D'AIRAIN, (Histoire judaïque) figure d'airain qui représentait un saraph, ou serpent volant, et que Moïse fit mettre au-dessus d'une pique, assurant que tous ceux qui le regardaient seraient guéris de la morsure des serpens ailés qui désolèrent les Israélites dans le désert, comme il est rapporté dans le livre des Nombres, chap. xxj. Ve 9.

Jesus-Christ, dans S. Jean, ch. IIIe Ve 4. nous avertit que ce serpent ainsi élevé, était une figure de sa passion et de son crucifiement : sicut Moyses exaltavit serpentem in déserto, ita exaltari oportet Filium hominis. Ce serpent d'airain fut conservé parmi les Israélites jusqu'au règne d'Ezéchias, qui ayant appris qu'on lui rendait un culte superstitieux, le fit mettre en pièce, et lui donna par dérision le nom de nohestan. Voyez NOHESTAN.

Marsham s'est imaginé que le serpent d'airain était une espèce de talisman, c'est-à-dire de ces pièces de métal qui sont fondues et gravées sous certaines constellations, d'où elles tirent une vertu extraordinaire pour guérir certaines maladies. Les uns attribuent ces effets au démon, d'autres à la nature du métal, d'autres aux influences des constellations. Marsham pense donc que ce serpent d'airain élevé par Moïse, guérissait les hébreux mordus des serpens, de la même manière que les talismants guérissent certaines maladies, par la proportion qui se rencontre entre les métaux dont ils sont composés, ou les influences des astres sous lesquels ils sont formés, et la maladie dont on dit qu'ils guérissent ; mais c'est attaquer un miracle par des suppositions chimériques, puisque rien n'est plus incertain que ces prétendues qualités qu'on attribue aux talismants. Voyez TALISMAN.

Buxtorf le fils au contraire dans son histoire du serpent d'airain, croit que cette figure devait naturellement augmenter le mal des blessés au-lieu de le guérir, en leur retraçant l'image des monstres qui les avaient si cruellement déchirés, et que Dieu fit éclater doublement sa puissance en guérissant par un moyen qui devait produire un effet contraire. Mais il est aussi inutîle de grossir ce miracle qu'il est téméraire de le réduire à un effet purement naturel.

On prétend montrer à Milan, dans l'église de S. Ambraise, un serpent d'airain qu'on dit être le même que celui de Moïse. L'Ecriture raconte trop positivement la destruction de ce dernier par Ezéchias, pour qu'on ajoute foi à la tradition populaire des Milanais. Calmet, Dict. de la Bible, tome III. pages 542 et 543.

SERPENT, dans l'Ecriture, se prend aussi pour le démon. Le serpent invisible qui tenta Eve par l'organe du serpent sensible, était le démon, comme l'Ecriture et tous les commentateurs le remarquent. Quelques-uns expliquent aussi du démon ce que dit Job du serpent tortueux, chap. xxvj. Ve 13. S. Jean dans l'Apocalypse, ch. XIIe Ve 9 et 14. marque clairement que le serpent ancien est le démon et satan : draco ille magnus, serpens antiquus, qui vocatur diabolus et satanas, et seducit universum orbem. Les Juifs appellent aussi le démon l'ancien serpent.

SERPENT, (Mythologie) cet animal est un symbole ordinaire du soleil. Dans quelques monuments il se mord la queue, faisant un cercle de son corps, pour marquer le cours ordinaire de cet astre. Dans les figures de Mithras, il environne quelquefois Mithras à plusieurs tours, pour figurer le cours annuel du soleil sur l'écliptique, qui se fait en ligne spirale.

Le serpent était aussi le symbole de la Médecine, et des dieux qui y président, comme d'Apollon, d'Esculape. Mais Pausanias nous dit que quoique les serpens en général soient consacrés à ce dernier dieu, cette prérogative appartient surtout à une espèce particulière dont la couleur tire sur le jaune ; ceux-là ne font point de mal aux hommes, et l'Epidaurie est le pays où il s'en trouve davantage. Le serpent d'Epidaure qui fut transporté à Rome pour l'Esculape, était de cette espèce. C'était peut-être aussi de ces sortes de serpens dont les bacchantes entortillaient leurs tyrses, ou les paniers mystiques des orgyes, et qui ne laissaient pas d'inspirer tant de crainte aux spectateurs.

Les Egyptiens ne se contentaient pas de mêler le serpent avec leurs divinités ; les dieux-mêmes étaient souvent représentés chez eux, n'ayant que leur tête propre avec le corps et la queue du serpent. Tel était pour l'ordinaire Sérapis, qu'on reconnait dans les monuments, à sa tête couronnée du boisseau, mais dont tout le corps n'est qu'un serpent à plusieurs tours. Apis se voit aussi avec une tête de taureau, ayant le corps et la queue de serpent retroussée à l'extrémité.

Les génies ont été quelquefois représentés sous la figure d'un serpent. Deux serpens attelés tiraient le char de Triptolème, lorsque Cérès l'envoya parcourir le monde pour apprendre aux hommes à semer le blé. Quelques poètes ont imaginé que les serpens étaient nés du sang des Titants, et d'autres en attribuent l'origine au sang de Python ou de Typhon. (D.J.)

SERPENT, (Luther.) instrument de musique à vent que l'on embouche par le moyen d'un bocal. Cet instrument est du genre des cornets, et leur sert à tous de basse. Il forme l'unisson du basson de hautbais ou de huit pieds. Voyez la table du rapport de l'étendue des instruments de Musique. Cet instrument, ainsi nommé à cause de sa figure ployée comme les serpens reptiles, est composé de deux pièces de bois de noyer ou autre propre à cela, que l'on creuse après avoir tracé le contour B C D E F G en demi-cylindre concave, lesquelles on colle ensuite l'une dessus l'autre, et qu'on réduit ensuite par-dehors avec des rapes à bois à environ une ligne ou une ligne et demie au plus d'épaisseur ; puis on le couvre d'un cuir mince ou de chagrin pour le conserver. Avant de mettre le cuir, on met sous les plis, dans la partie concave, du nerf de bœuf battu pour le renforcer en cet endroit, et l'empêcher de rompre lorsqu'on le prend par la partie B C. Voyez la fig. Pl. de Luth. Cet instrument a six trous notés, 1 2 3 4 5 6, par le moyen desquels et du vent que l'on inspire par le bocal A B, on lui donne l'étendue d'une dix-septième.

Le bocal A B s'emboite dans une frette de cuivre ou d'argent, selon que le col du bocal est de l'un ou l'autre métal. Ce col est recourbé, comme on voit dans la figure, pour présenter plus facilement le bocal (lequel on emboite dans le col) à la bouche de celui qui joue de cet instrument. Le bocal est une petite cuvette ou hémisphère concave, laquelle est ordinairement d'ivoire ; au milieu de cette cuvette, qui peut avoir 1 1/2 pouce de diamètre, est un petit trou qui communique par le collet a fig. suiv. dans le col de métal du serpent dans lequel il entre.

Pour jouer de cet instrument, il faut le prendre des deux mains, en sorte que les trois doigts, index, medius et annulaire de la main gauche bouchent les trous 1 2 3, le pouce de cette main étant placé à l'opposite des trous, pour pouvoir avec les autres doigts tenir l'instrument en état. Les trois mêmes doigts de la main droite servent à boucher les trous 4 5 6, vis-à-vis desquels le pouce de cette main est placé pour la même raison.

Après avoir posé les doigts sur les trous, on présente le bocal à la bouche, et on l'applique sur les lèvres, en sorte que l'air que l'on inspire dans le serpent ne puisse trouver aucun passage entre les bords du bocal et les lèvres, mais qu'il soit contraint de passer dans le corps de l'instrument ; pour cela on mouille avec la langue les bords du bocal, qui s'applique mieux par ce moyen sur les lèvres pour faire les tons graves sur cet instrument, particulièrement ceux qui se font tous les trous bouchés. Il faut bien ménager le vent, et souffler également ; pour les autres tons où il y a quelques trous de débouchés, ils sont plus faciles à faire : il s'en trouve cependant quelques-uns qui ont le même doigté, lesquels par conséquent ne différent que par les différents degrés de vitesse du vent qui anime l'instrument ; tels sont la plupart des dièses, des tons naturels, que l'on peut faire cependant en ne débouchant que la moitié du trou supérieur, ou en croisant les doigts, c'est-à-dire en débouchant le trou de la note supérieure, et en bouchant celui de l'inférieure de la note dont on veut faire les diéses. Voyez la tablature suivante, où les notes de musique font voir quelle partie et quelle étendue forme le serpent. Voyez aussi la table du rapport de l'étendue des instruments. Les zéros noirs et blancs qui sont au-dessous des notes, lesquelles correspondent aux trous du serpent, font voir quels trous il faut tenir ouverts ou fermés pour faire les tons des notes qui sont au-dessus.