PETITE, (Histoire de la Médecine) il ne s'agit ici que de l'historique de cette étrange maladie, qui est aujourd'hui répandue dans tout le monde connu, et qui saisit tôt ou tard toutes sortes de personnes, sans avoir égard au climat, à l'âge, au sexe, ni au tempérament du malade. Sait que les ravages de cette maladie procedent de la violence qui lui est propre, ou des mauvaises méthodes dont on se sert pour la traiter, elle ne cede point à la peste par les désastres qu'elle cause.

On a tout lieu de présumer que la petite vérole a été inconnue aux Grecs et aux Romains, puisqu'aucun médecin de ce temps-là ne nous en a laissé la description. Des auteurs tels qu'Hippocrate, Aretée, Celse, Coelius l'Africain, et Soranus d'Ephese, qui réussissaient si bien dans les descriptions des maladies, qu'on peut les regarder plutôt comme des peintures achevées que comme des histoires, car les anciens n'excellaient pas moins dans les descriptions que dans la poésie, la sculpture et la peinture, n'auraient pas négligés de nous parler de la petite vérole, si elle eut existé de leur temps. Il peut cependant se faire qu'elle ait été connue dans quelques autres parties du monde, et il s'est trouvé des médecins qui l'ont fait naître dans les Indes pour la transporter dans l'Arabie.

On sait seulement que les Arabes l'apportèrent en Egypte lorsqu'ils en firent la conquête sous le calife Omar ; qu'elle se répandit avec eux dans tous les lieux où ils portèrent leurs armes, leur religion et leur commerce, savoir dans l'Egypte, dans la Syrie, la Palestine, la Perse, la Lycie, le long des côtes de l'Afrique, et de-là en Espagne, d'où elle passa avec les Européens dans toutes les autres parties du monde connu. Rhazès, syrien de naissance, arabe d'origine, et mahométan de religion, qui vivait dans le neuvième siècle, est le premier de tous les auteurs qui nous restent, qui ait traité de cette maladie avec exactitude. Il faut lire pour s'en convaincre l'extrait qu'en a fait l'illustre Freind, et dont il nous suffira de donner le précis le plus abrégé.

Rhazès, qui écrivait dans l'ardent climat de la Perse, observe que la petite vérole y est plus épidémique au printemps qu'en automne. Les enfants et les adultes y sont les plus sujets ; les vieillards en sont rarement attaqués, à-moins que la saison ne soit fort contagieuse. Les corps qui abondent en humeurs prennent aisément l'infection, et les tempéraments secs en sont attaqués le plus violemment. Rhazès nomme en syriaque la petite-vérole chaspé ; le mot caphe ou capheph en arabe signifie une éruption de pustules.

Les symptômes qui précédent cette maladie sont, selon le médecin arabe, une fièvre aiguë, un mal de tête violent, des douleurs dans les lombes, la sécheresse de la peau, la difficulté de respirer ; les yeux deviennent rouges ; on sent des picotements par tout le corps ; on est agité de songes affreux durant le sommeil ; enfin on a des maux de cœur avec des envies de vomir. Il nomme sublimia les pustules qui s'élèvent en pointe, et lata celles qui sont larges et plates, comme dans la petite vérole confluente.

Rhazès s'étend beaucoup sur les pronostics de la petite vérole. Si, dit-il, l'éruption se fait aisément, que les pustules viennent bien à maturation, et que la fièvre cesse, il n'y a point de danger ; il en est de même quand les pustules sont grosses, distinctes, en petit nombre, mûrissant bien, et ne causant au malade ni oppression, ni chaleur immodérée.

Mais si les pustules sont pressées, cohérentes, se répandant comme des herpes, rongeant la peau, et ne contenant point de matière, c'est une espèce de petite vérole très-maligne, surtout si la fièvre augmente après l'éruption, et qu'alors de nouvelles pustules viennent encore à sortir.

Si l'éruption, continue-t-il, se fait le premier jour de la maladie, cela marque trop d'impétuosité dans les humeurs ; si elle arrive le troisième jour, c'est un meilleur signe ; et si c'est le septième jour, la maladie est encore plus heureuse.

Quand les pustules sont fort petites, dures, de couleur violette, verte, d'un rouge noirâtre, c'est un mauvais présage. Si les pustules continuent dans cet état, que la fièvre ne diminue pas, et qu'elle soit accompagnée de syncopes ou de palpitations, on ne doit attendre qu'une prompte mort.

La méthode curative vient ensuite. Rhazès conseille de saigner d'abord ou d'appliquer les ventouses. La chambre doit être tenue fraiche, et tout le régime consister dans une diete acide et rafraichissante. La tisane d'orge doit être la nourriture. Les rafraichissants et les acides seront proportionnés à l'ardeur plus ou moins grande de la maladie. Si le ventre est resserré, il faut le tenir libre par quelques infusions laxatives, qu'on prendra deux fois par jour. Lorsque les pustules sont toutes sorties, on fera recevoir au malade les vapeurs de l'eau. Il usera pour délayans d'eaux d'orge, de grenade, de melon, et autres semblables liqueurs tempérées. Si l'oppression est fort grande, il conseille le bain d'eau tiede pour procurer l'éruption. Il prescrit les opiates lorsque le malade ne peut pas dormir, ou qu'il est attaqué d'une diarrhée sur la fin de la maladie. Il conseille aussi d'avoir recours aux remèdes calmants, lorsqu'il parait quelques symptômes terribles qui empêchent les pustules de venir à suppuration.

Sur le déclin de la maladie, lorsque la nature était prête à succomber sous le poids de la matière morbifique, il se servait dans ce cas de nécessité de la saignée, et de la purgation pour secourir le malade.

Il faut convenir que cette description est si fidèle, que depuis le temps de Rhazès jusqu'au notre on n'a presque rien découvert de nouveau à ajouter à la bonne pratique des Arabes. On a au-moins un millier d'auteurs qui ont publié des ouvrages sur cette maladie sans aucune utilité pour le public, ou plutôt au grand détriment du public, car on ne peut dire combien de malades ont été tués par les cordiaux et les irritants qui ont été mis en usage, soit pour accélérer l'éruption, soit pour l'amener à suppuration après qu'elle était faite.

Enfin Sydenham prit la nature pour guide, et détruisit par sa conduite la durée de si longues erreurs. Sa description de la maladie est d'une vérité et d'une élégance qu'on ne saurait trop admirer. Il sut prédire les dangers qu'il était incapable d'éviter, et indiqua les écueils où lui et les autres avaient échoué.

On peut comparer à cet égard Sydenham avec le lord Verulam, un des plus exacts observateurs de la nature qui ait jamais été ; non-content des découvertes surprenantes qu'il avait faites, il marqua le plan que ceux qui viendraient après lui devaient suivre, pour continuer avec succès l'histoire naturelle, étant impossible à un homme seul, Ve la briéveté de la vie, de recueillir tous les matériaux que la nature fournit pour en composer un corps d'histoire. Le fameux Boyle commença où l'autre avait fini, et vint à bout d'exécuter le plan que le premier philosophe avait laissé.

Sydenham qui avait déjà fait tant de découvertes sur la petite vérole, regardait cette maladie comme une vraie fièvre inflammatoire, et chaque pustule comme un phlegmon ; il gouvernait très-bien son malade jusqu'à l'approche de la fièvre secondaire ; mais lorsque celle-ci venait à augmenter, que la matière était mal digérée, que le visage se desenflait, que les crachats s'épaississaient et s'arrêtaient, alors semblable à un prophète, il annonçait le danger dont le malade était menacé, sans pouvoir le prévenir malgré toute l'étendue de son savoir en cette partie.

Helvetius introduisit ensuite la purgation dans le dernier état de la petite vérole, ce qui est, selon moi, un des meilleurs moyens dont on puisse se servir pour apaiser la fièvre. Il est vrai que ce médecin admit la purgation sans savoir pourquoi, mais Freind démontra les raisons de cette méthode, et en établit la nécessité par la théorie et l'expérience.

Enfin Boerhaave écrivit expressément sur cette maladie avec sa sagacité ordinaire ; il en développa la nature et le traitement qui lui convient. Ce qu'il ajoute sur ce traitement est bien remarquable, vulgata quippè methodo, dit-il, nullus nisi spontè emergit : si quelqu'un échappe par la méthode que l'on suit ordinairement, c'est plutôt à la nature qu'il en est redevable, qu'aux efforts de celui qui le traite. Ce jugement me parait si vrai, que je ne doute point que les Médecins qui voudront parler de bonne foi, n'en conviennent avec franchise. (D.J.)

VEROLE, PETITE, (Médecine) maladie fort commune parmi les enfants, et qui attaque aussi les adultes dans tous les âges ; elle est ordinaire en France, en Angleterre et dans d'autres pays.

Cette maladie parait sur la peau, qu'elle couvre de pustules ; son origine est incertaine, on ne trouve pas que l'on en ait fait mention avant les Médecins arabes, elle ressemble beaucoup à la rougeole ; de sorte qu'il est difficîle de les distinguer pendant les trois premiers jours.

L'une et l'autre procede d'un sang impur et chargé de miasme putride ; le levain de la rougeole est plus âcre et plus subtil, plus chaud et plus bilieux ; on prétend que l'une et l'autre ne reviennent pas, quand une fois on les a eues, mais l'expérience démontre le contraire en France.

Quant à la façon dont se produit cette maladie, les uns, comme Dolaeus, veulent que nous apportions sa cause avec la naissance, et qu'elle ne se manifeste que quand elle a eu occasion de se développer ; on ajoute que presque tous les hommes ont la petite vérole, et qu'il n'y en a peut-être pas un entre mille qui lui échappe.

Drake compare la petite vérole à la lepre des Arabes, et prétend que c'est une lepre passagère et critique produite par une sérosité saline, qui excite une fièvre au moyen de laquelle le sang se dépure.

Il y a deux espèces de petite vérole, la distincte et la confluente ; dans la première, les pustules sont séparées et une à une ; dans la seconde, les pustules se touchent, et sont entassées de façon qu'elles ne forment qu'une croute.

M. Sydenham observe que la petite vérole distincte et régulière, commence par un tremblement et une froideur suivis d'une grande chaleur, de douleur de tête et du dos, de vomissement, d'assoupissement et souvent d'accès épileptiques, les éruptions arrivent ordinairement le quatrième jour. Les pustules paraissent d'abord au visage, ensuite au col, puis à la poitrine, au commencement elles sont rougeâtres, puis elles augmentent et blanchissent par degré, l'onzième jour l'enflure et l'inflammation du visage s'évanouissent, et les pustules commencent à se flétrir, c'est environ ce temps qu'est la fin du temps critique et dangereux ; alors les pustules commencent à se sécher, et vers le quinzième jour, elles paraissent diminuer et commencent à tomber, et alors on croit qu'il n'y a plus de danger.

La petite vérole distincte suit cette tournure, à moins qu'il ne survienne des cours de ventre ou d'autres symptômes qui dérangent le cours ordinaire de la maladie.

La petite vérole confluente a les mêmes symptômes, mais dans un degré plus violent, les pustules paraissent ordinairement le troisième jour, non pas séparées comme dans la précédente, mais les unes dans les autres, et à la fin elles paraissent comme une petite pellicule blanchâtre sur toute la peau ; et tout le corps, et surtout la tête sont considérablement enflés ; ensuite cette pellicule devient noirâtre ; cette espèce de petite vérole est accompagnée dans les adultes, de salivation et de diarrhée dans les enfants, la salivation vient souvent immédiatement après l'éruption, mais la diarrhée vient plus tôt. Cette espèce de petite vérole est bien plus dangereuse, elle est ordinairement compliquée avec le pourpre et le charbon, elle emporte souvent les malades le onzième jour.

Cette maladie est épidémique, commence au printemps, augmente vers l'été, et se ralentit vers l'automne, et recommence de nouveau vers le commencement ou le milieu, et la fin de l'hiver suivant.

On la divise après M. Morton, en quatre temps ; 1°. la préparation que l'on nomme la couve ou l'ébullition ; c'est le premier temps de l'infection.

2°. L'éruption qui dure quatre jours, comme le premier temps et où les pustules poussent successivement, à commencer par le visage, ensuite le col, puis la poitrine, et enfin par-tout le corps ; il faut remarquer que les éruptions se font au-dedans comme au-dehors.

3°. La suppuration ou les grains s'arrondissent, s'élèvent, blanchissent et mûrissent, et ensuite se remplissent de pus, et se couvrent d'une croute plus ou moins sale et terne.

4°. Le desséchement où les pustules se flétrissent et s'affaissent, se desséchent, tombent, et laissent à leur place une cavité superficielle et rouge qui reste encore longtemps après que tous les symptômes ont disparu.

Il y a quatre degrés de malignité ; 1°. quand les pustules sont universellement confluentes et entassées ; 2°. particulièrement confluentes, 3°. distinctes, mais très-petites et cohérentes, bordées de noir ou d'un rouge vif et enflammé ; 4°. lorsque les pustules sont distinctes, mais avec éruption pétéchiale, le pourpre ou le millet.

Causes ; comme cette maladie attaque dans tous les âges les hommes et les femmes, les enfants et les vieillards, et qu'elle survient dans différents pays tout à-la-fais, il parait qu'elle vient par contagion, et qu'elle se gagne par communication d'une personne qui l'a eu auparavant ; les voies qui servent à communiquer cette espèce de contagion sont l'air, qui s'en charge et qui la porte avec lui dans la bouche, le nez et les poumons, l'oesophage, l'estomac, les intestins, et dans ce même temps la contagion n'a pas encore beaucoup de partie venimeuse ; mais elle se fomente dans nos humeurs, au moyen des crudités ou de la corruption qui s'y trouvent, et ce venin peut se garder longtemps sans se manifester.

La cause éloignée sera donc une infection qui nous est transmise, ou qui est développée en nous-mêmes. On ne sait en quoi elle consiste, elle a du-moins beaucoup d'analogie avec nos humeurs et la limphe qui se sépare dans les glandes de la peau ; est-ce une humeur analogue à la lepre ? est-ce un virus que nous apportons en naissant ? c'est ce qu'on ne peut décider.

Les causes occasionnelles peuvent être ; 1°. quelque altération ou quelque changement dans l'air, puisque la petite vérole arrive plus fréquemment vers le printemps, et qu'elle est en Europe comme ailleurs, plus épidémique et plus mortelle dans des temps particuliers, et surtout vers le printemps.

2°. La peur qui se fait plus sentir qu'il n'est facîle de l'exprimer ; on ne sait que trop par expérience, quel est l'effet des passions sur le corps et nos humeurs. La peur a causé la petite vérole à des personnes qui s'étaient trouvées sans y penser ou s'y attendre, dans des endroits où il y avait des malades attaqués de petite vérole.

4°. Par les indigestions, les crudités, la pourriture des premières voies, l'usage des liqueurs trop chaudes, qui alkalisent et putréfient, ou fondent le sang.

Toutes ces causes suffiront pour déterminer un levain contraire à produire son effet, et à se développer.

Symptomes. Lorsqu'une fois ce levain s'est manifesté, il est suivi des signes suivants ; l'horreur, le frisson, la fièvre aiguë et inflammatoire, une chaleur brulante et continue, les yeux brillans, étincelans, et larmoyans, différentes douleurs qui attaquent la tête, le dos, les extrémités, et surtout l'estomac ; car il survient des cardialgies, des faiblesses, des nausées, des vomissements, ce qui est surtout ordinaire aux enfants, une in quiétude, un engourdissement, une somnolence, un assoupissement.

Ces symptômes se compliquent avec d'autres qui appartiennent à différentes maladies, telles que la douleur de côté, la toux, le crachement de sang, la respiration génée, tremblante et convulsive, une stupeur avec un embarras dans la tête, des soubresauts dans les tendons, un météorisme dans le bas-ventre, une dureté dans ses différentes régions, une colique inflammatoire, des suppressions d'urine, des tenesmes, d'autres fois le dévoiement et la dyssenterie se mettent de la partie, et empêchent l'éruption, ou font rentrer le venin au-dedans, lorsqu'il était déjà sorti par les pores de la peau.

Prognostic. Plus la petite vérole parait de bonne heure dans le printemps, et plus l'air est disposé à favoriser la maladie, plus elle devient dangereuse.

2°. La confluente est dangereuse tant dans les enfants, que dans les adultes ; et plus dans ceux-ci que dans ceux-là. Mais le danger est bien plus grand s'il y a suppression d'urine, nausées, délire, taches de pourpre, crystalline, urine sanglante.

3°. Le ptyalisme ou la salivation s'arrêtant subitement, et ne revenant pas dans les 24 heures, marque un grand danger ; mais cela n'a lieu que dans la confluente, et encore dans les adultes. Dans cette espèce le malade n'est pas hors de danger avant le 20e jour.

4°. Si la petite vérole est distincte, ronde, grosse, que les pustules s'emplissent et croissent en pointe par le bout ; si le vomissement, le mal de tête, la fièvre cessent ou diminuent beaucoup après l'éruption ; si d'ailleurs le malade a l'esprit tranquille et sans appréhension, le danger est ordinairement passé vers le dixième jour. Les convulsions sont fort dangereuses.

En général lorsque la petite vérole suit quelque débauche ou excès, soit de liqueurs, soit d'aliments, soit autrement, elle est fort dangereuse et mortelle pour l'ordinaire.

Traitement. Les sentiments sont fort partagés sur cette matière ; le vulgaire veut que l'on donne les cordiaux pour aider l'éruption ; les médecins sensés, tels que Boèrhaave et autres, regardent cette maladie comme inflammatoire, et veulent qu'on la traite comme telle. Mais ce traitement doit varier selon les espèces, les temps, et les degrés que l'on distingue dans la petite vérole. Sur quoi il faut se ressouvenir de ce que nous avons dit en parlant des fièvres éruptoires.

Dans le premier temps, qui est celui de la couve ou de l'ébullition, on doit généralement saigner pour détendre et relâcher la peau, et aider l'éruption ; mais on saignera moins que dans une inflammation ordinaire. On ordonnera ensuite un émétique ou un purgatif dans le dessein d'évacuer les premières voies, ou des lavements légérement purgatifs.

La boisson sera délayante, humectante ; les bouillons seront légers et peu nourrissants pour ne pas augmenter la fièvre. Voyez INFLAMMATION.

Dans le deuxième temps, on aidera l'éruption par une légère tisane de scorzonnaire, de lentilles, de dompte-venin, ou autre, ou de l'eau rougie, ou de la corne de cerf bouillie.

L'air sera tempéré : le malade prendra des bouillons moins légers.

Dans le troisième temps on aidera la suppuration par la continuation du même régime ; on poussera encore plus par la peau au moyen de légers diaphorétiques.

Enfin sur la fin on poussera par de plus forts sudorifiques : la nourriture sera plus forte. On pourra alors détourner une partie de l'humeur par les selles.

On doit purger après que les croutes sont tombées, ou lorsqu'elles commencent à tomber ; et cela à plusieurs reprises, pour empêcher le reflux de la matière purulente au-dedans. On emploiera des tisanes détersives, balsamiques et fortifiantes ; on ordonnera des liniments détersifs sur les pustules, ou une simple onction avec l'onguent rosat, ou la pommade simple.

La meilleure façon pour empêcher les boutons de creuser est de ne les pas toucher, ou de les piquer légérement afin d'en évacuer le pus, et qu'il ne corrode pas la peau par-dessous les croutes.

On ne peut absolument donner de règles générales sur le traitement de la petite vérole ; comme sa cause nous est inconnue, on ne peut à cet égard seul la traiter que par empirisme : les symptômes seuls nous donnent des indications. On voit des malades périr après la saignée ; on en voit beaucoup qui en reviennent sans saignée, ni autres préparations.

M. Freind et d'autres sont pour la saignée ; les Allemands saignent peu. Alsaharavius dans le premier degré de la petite vérole, prescrit la saignée jusqu'à défaillance et jusqu'à l'évanouissement. M. Lister a trouvé que dans la petite vérole maligne le sang est excessivement tendre et friable, en sorte que la plume la plus molle diviserait facilement ses globules.

Ettmuller dit que l'on doit avoir par-dessus tout une attention particulière à l'haleine, à la respiration et à la voix ; et que quand ces deux choses sont bonnes, c'est un bon signe. Il ajoute que la fiente de cheval est un excellent médicament, en ce qu'il provoque la sueur, et qu'il garantit la gorge.

Le vulgaire est dans un préjugé que toutes les boissons doivent être rouges, à cause de la chaleur qu'on prétend être seule nécessaire dans cette maladie.

Quelques auteurs ont proposé les mercuriaux dans le commencement, en établissant une analogie entre la grosse et la petite vérole.

Inoculation. On nous a apporté des Indes et de la Mingrelie, une autre méthode de traiter la petite vérole, qui est l'inoculation. Elle consiste à donner la petite vérole, en communiquant son venin à un malade en lui faisant entrer le pus d'une pustule vérolique, par quelque ouverture qu'on lui fait à la peau, ou en lui mettant dans le nez un grain de ce levain qui soit assez considérable : on traite ensuite le malade méthodiquement. Voyez INOCULATION.

Petite vérole volante. Cette maladie a beaucoup de rapport avec la petite vérole vraie ; mais elle est bien plus légère, plus superficielle. On y remarque les quatre temps comme dans la vraie, quoique moins marqués. Ceux qui nient que l'on puisse avoir cette maladie deux fais, disent que la vérole volante n'arrive que par un défaut d'éruption suffisante de petite vérole, au moyen de quoi il reste encore suffisamment de levain pour produire une nouvelle éruption, et que la petite vérole vraie détruit les glandes et le tissu de la peau quand elle est abondante, ce qui l'empêche de revenir. Cette raison ne peut avoir lieu lorsque la petite vérole est médiocre, et qu'on n'en voit que quelques grains qui poussent çà et là.

On pense donc communément que cette dernière est causée par un reste de levain de petite vérole qui n'a pu se faire jour, ou qui n'a pas eu assez le force n'ayant pas trouvé de causes occasionnelles assez énergiques pour produire la petite vérole vraie. Cette matière étant dans le sang, soit dès la naissance, soit par une communication contagieuse, y reste et n'y produit pas ses effets autant que dans une autre occasion, faute d'y trouver des causes qui aident son développement et son exaltation. La force particulière du tempérament, la qualité louable des humeurs feront que les pointes du virus seront émoussées ou engagées, et perdront leur énergie. Si donc une cause de la petite vérole, mais affoiblie ou moins énergique, existe dans le sang, elle pourra à l'occasion de l'air, ou d'une légère fermentation dans les humeurs, produire quelques effets légers, ou achever la dépuration de l'humeur virulente qui ne s'était pas faite d'abord ; elle se séparera du sang, et paraitra sous la forme de petite vérole volante.

Il arrivera de-là qu'une personne qui aura eu la petite vérole vraie, pourra encore avoir la petite vérole volante ; et que d'autres qui n'auront point eu la première, auront cependant la seconde.

Le traitement de cette vérole volante doit être le même que de la vraie, à quelque petite différence près. Ainsi on saignera moins, on purgera moins, on ordonnera une diete moins sévère. Voyez PETITE VEROLE VRAIE.

La petite vérole volante, ainsi que l'autre, laissent souvent des reliquats ou suites fâcheuses ; sur quoi il faut remarquer que cela vient d'une dépuration imparfaite de l'humeur qui était trop abondante, et qui s'est jetée sur différentes parties, comme il arrive dans quelques personnes qui restent aveugles, d'autres sont estropiées, d'autres tombent dans la phtisie et le marasme. Voyez ces articles.

Le vrai moyen de prévenir tous ces désordres, c'est d'aider la nature et d'achever ce qu'elle n'a pu faire elle seule, je veux dire que l'on doit employer les purgatifs, les apéritifs, les fondants mercuriaux, les bains, les sudorifiques, les eaux minérales, le lait, et enfin tous les secours qui sont indiqués pour détourner la consomption imminente, ou des maladies chroniques dont on craint les suites et la longueur. Voyez CHRONIQUE. Voyez PHTHISIE.

Le lait coupé avec les sudorifiques, l'exercice, le changement d'air, et enfin les nourritures louables, avec un régime convenable, seront d'excellents prophilactiques contre la phtisie imminente à la suite d'une petite vérole, ou mal traitée, ou rentrée, ou qui sera mal sortie.

VEROLE, grosse, maladie vénérienne. Voyez VENERIEN.

Pour former un traité de la maladie vénérienne, voici le plan qu'il faudrait suivre.

Maladie vénérienne inflammatoire chronique. La première comprend la gonorrhée, les chancres vénériens, tumores testium inflammatos : bubones qui suppurantur, vel non suppurantur : faucium vel penduli palatini, ossium nasi, cranii ulcera depascentia, cariem : artuum dolores nocturnos : universae cutis morbos inflammatorios : mariscas, hemorrhoïdes tumentes inflammatas.

Je ne traiterai présentement ni de la cause, ni de la guérison de cette première espèce.

Je communiquerai seulement mes pensées et observations, et celles de plusieurs auteurs sur la maladie vénérienne chronique.

On l'observe dans le corps humain produite par trois causes.

La première : les reliquats de cette maladie qui n'a pas été guérie radicalement, ce qui arrive très-souvent.

La seconde : les différentes manières de contracter cette maladie, les constitutions faibles par le tempérament, par l'âge, ou par les infirmités.

La troisième : les enfants issus de pères infectés de la même maladie.

La pratique constante dans la guérison de la maladie vénérienne nous montre que très-rarement elle est parfaite, et principalement dans le sexe ; les praticiens gémissent de ne pouvoir guérir radicalement dans les femmes les gonorrhées vénériennes, et quelquefois dans les hommes. Quand la maladie vénérienne est tellement avancée, qu'elle attaque la gorge ou le scrotum avec des tumeurs dans les cordons, et que les malades ont été guéris par la salivation ou par autres compositions mercurielles, il arrive rarement qu'ils soient guéris radicalement ; quelquefois les médecins en sont la cause, ordinairement les malades, et bien souvent le degré exalté du virus vérolique.

Dans la supposition même que celui qui a été infecté par la maladie vénérienne, ait été parfaitement guéri, il est constant que son corps restera toujours plus faible et plus susceptible de recevoir ce virus, qu'il n'était avant l'infection. Le mercure détruit toujours cette huîle animale, cet humide radical, cause de l'élasticité et vigueur de nos fibres.

Le corps dans cet état de faiblesse reste disposé à contracter le virus vérolique à la prochaine cohabitation avec une personne infectée.

Il est à remarquer que celui qui a été infecté de petite vérole suppuratoire, ne gagnera point cette maladie, quoiqu'il soit inoculé avec le même virus, comme le docteur Matty l'a expérimenté en son propre corps, et que ceux qui ont été affectés de la maladie vénérienne, gagneront cette maladie autant de fois qu'ils cohabiteront avec des personnes vérolées : signe certain, ou que la maladie vénérienne ne se guérit pas si radicalement que la petite vérole, ou que ces deux virus sont d'une nature tout à fait différente.

L'expérience nous enseigne chaque jour que toutes les personnes qui cohabitent avec une femme infectée, ne gagnent pas son mal, au moins en apparence. Si la personne la plus saine et robuste en est infectée, la nature agira avec toutes ses forces à chasser et à dompter le stimulum vénérien ; elle produira chaleur, douleur dans la partie ; il se formera de nouveaux fluides, à l'aide desquels se domptera le virus, qui finalement sera chassé, et le malade souvent, avec l'aide de l'art ou sans son secours, restera guéri ; quelquefois aussi il se formera un ulcère ou une inflammation qui se terminera en pus.

Mais celui qui faible par sa constitution, par son âge, ou par d'autres maladies, aura cohabité avec une femme gâtée, ne ressentira rien ; le virus entrera dans le corps, attaquera le plus intime et le plus subtil, y restera, et ne viendra à se manifester que par la suite du temps, et par des signes qui sont les mêmes qui caractérisent les maladies chroniques.

Ceux qui contractent cette maladie dans ces dernières circonstances, par les voies naturelles ou par libidines vagas, ne ressentent aucun de ces signes qui caractérisent la maladie vénérienne inflammatoire ; au contraire ils sentent quatre ou cinq jours après, une lassitude, une pesanteur, principalement dans les reins, quelques vertiges, une respiration de temps-en-temps gênée ; ils deviennent tristes, le visage pâle ; quelques jours après il parait un ou quelques boutons sur le visage, des ophtalmies plus ou moins inflammatoires, mais sans ardeur ni douleur, aussi rares qu'aux véritables.

Par la suite du temps les digestions de l'estomac deviennent lentes et imparfaites ; on y sent du poids, des vents, quelquefois des douleurs ; à d'autres ce sont des tranchées dans le ventre, qui ordinairement est paresseux ; cet état alors est si analogue avec la maladie hypocondriaque, hystérique ou de vapeurs, qu'il faut un médecin bien expérimenté pour reconnaître ces sortes de symptômes, et aller à leur véritable cause.

Cette maladie invétérée a produit l'épilepsie, la manie, la cataracte, la surdité et les polypes du nez et d'autres parties du corps humain.

C'est aussi de cette manière que cette maladie dans de telles circonstances infecte le genre nerveux, et toute l'étendue de la membrane celluleuse où résident les liqueurs les plus fines et les plus actives de notre corps.

Mais cette maladie se manifeste par d'autres signes tels qu'ils seraient produits par les maladies simples qui naissent du dérangement de la bîle et du sang.

Il parait une jaunisse plus ou moins foncée ; à d'autres, crachement de sang, douleur de poitrine, sans la moindre toux au commencement.

Dans les pays méridionaux cette maladie se montre souvent par phtisie, qui se termine par une diarrhée mortelle ; les frictions mercurielles données avec modération sont le remède qui les guérit parfaitement.

Bien souvent on est attaqué d'asthme convulsif ; ordinairement alors les gencives sont pâles, et tout l'intérieur de la bouche et la gorge même, ou de la couleur du sang de bœuf parsémée de points comme de suif ; les gencives quelquefois tumefiées et rongées ; bien souvent douleurs de dents qui pourrissent peu-à-peu.

Si ceux qui ont contracté cette maladie, sont plus robustes, et que leur genre de vie les oblige à s'exercer, alors tout le mal se montre dans la superficie du corps.

Les rhumatismes, les sciatiques, la goutte aux genoux et au pied, plus comme un oedeme, que comme une inflammation ; avec ces maladies naissent toutes les maladies de la peau depuis les éphelides jusqu'aux impetigines (dartres). On a Ve les ongles devenir si raboteux, si épais et si difformes, que les mains en étaient inutiles.

Dans ces constitutions l'effet principal du virus vénérien est d'endurcir la bîle dans la vessie du fiel, et l'urine dans les reins ; il s'y forme des pierres et de la gravelle, et il n'y a que le mercure accompagné d'autres remèdes légèrement purgatifs qui en soit le véritable remède.

On a observé une difficulté opiniatre d'avaler, même les liquides, et les remèdes mercuriels ont seuls pu vaincre ce terrible symptôme.

Mais dans le sexe cette sorte de virus vénérien est plus terrible, tant par les embarras de le guérir, que par le ravage qu'il y cause.

Il produit, comme dans les hommes, tous les symptômes des maladies hypocondriaques, les fleurs blanches de différentes couleurs ; on a Ve après la mort les ovaires pourris ou pleins d'hydatides ; il se forme des polypes dans le vagin et dans l'uterus, des tumeurs dans les mamelles, dans le temps encore qu'elles sont réglées, et quoiqu'irrégulièrement, quelquefois avec des tranchées insupportables avant de paraitre. Les migraines et tous les maux des glandes engorgées ont montré bien souvent que ces dérangements provenaient de la cause mentionnée.

S'il était permis de révéler ici dans la langue vulgaire tous les maux que causent à l'espèce humaine les iniquittés qui se commettent en contractant cette maladie, je pourrais augmenter malheureusement leur catalogue ; mais en faveur des médecins je citerai un passage de Levinus Lemnius, de occultis naturae mirac. Antverpiae 1574, p. 174 et 175, dans lequel on verra que les soupçons ci-dessus indiqués sont fondés sur l'observation de 200 ans.

Tres sunt morbi inter se affines et cognati, non tam lethales, quam faedi, ac contagiosi, quorum alter in alterum transit, ac permutatur : lues venerea, seu morbus gallicus, elephantiasis, seu vulgaris lepra, quae in scrophis grando dicitur, quorum genus est icteritia nigra. Hi superioribus annis intolerandis modis homines excarnificabant, nunc prorsus mitescère caeperunt, minusque infesti sunt....

Et il continue, en parlant ainsi de la maladie vénérienne.

Semper tamen vestigia inhaerescunt, veterisque morbi reliquiae relinquuntur, quae si in pulmonem decumbunt, raucos illos esse, atque anhelosos perspicis. Si in articulos podagrae, ac chiragrae, et quae subinde recurrit ischiatico dolori obnoxios. Sic omnes ficosi articulari morbo laborant. At non omnes podagrici, aut coxendicis cruciatu affecti, morbi gallici labe affecti sunt : quod si in extimam cutem suffunditur humorum colluvies, scabra cute afficiuntur, ac corticosa, lichenibus, impetigne, mentagra, ac porrigine deformati, non sine capillorum defluvio, &c.

On peut très-facilement prévoir les maladies des enfants nés de parents attaqués et tourmentés de la maladie vénérienne chronique. Si ces victimes de la lubricité sont assez bien constitués pendant les premières années de leur enfance, il leur sort par la superficie de tout le corps, et particulièrement par toute la tête, de ces excrétions et croutes qui suintent une matière âcre et corrosive, si dangereuse à guérir ou à supprimer.

S'ils sont faibles et avec assez de vigueur pour vivre de la troisième jusqu'à la neuvième année, ils sont attaqués du rachitis, du spina ventosa, scrophules, et exostoses.

A l'âge de puberté paraissent les toux, les raucedines, les crachements de sang, qui se terminent par la phtisie et la mort ; le lait et les bouillons de tortues sont inutiles dans les maladies de génération infectée.

Généralement ces enfants sont nés pour punir les pères de leur lubricité, per libidines vagas : ils sont spirituels, aimables et caressants ; mais ils sont nés pour mourir au plus tard dans l'âge de l'adolescence, puisque rarement ils passent à l'âge de 28 ans.

Toutes ces expériences et raisonnements seraient inutiles, s'ils ne contribuaient point à soulager la misere humaine, et comme cet ouvrage est destiné pour le bien des mortels en société, ou hors de ces pénibles avantages : on communiquera le remède connu jusqu'à présent, le plus utîle pour vaincre ces maux.

Mercur. purissimi crudi, iv ; mellis puriss. sem. terantur mortario ferreo ad extinctionem, subinde adde, camphorae, iv ; butyri cacao, viii, vel axungiae porcinae ; terantur simul per lxx horas jugiter. Fricentur tibiae ad talos usque cum uncia semisse singulis noctibus post tenuissimam coenam : crastina die ad meridiem usque bibat ad libram decocti sarsae parillae, jejuno stomacho : prandeat ex assis carnibus juniorum animalium : sub his pergat per menses, vel tandiu donec symptomata evanescant.

Plerumque oris fluxus salivalis frictiones non succedunt : accidit tamen aliquando : tunc, vel intermittendae frictiones, vel alvus aperta servatur, avertitur fluxus.

Dum sub his degit corpus ita sit ab humiditate, frigore tutum, ut perspiratio auctior diu noctuque fiat. Quae hic desiderari, à perito medico facillime in usum adhiberi poterunt. Mémoire de M. le docteur Sanchez, tel qu'il nous l'a communiqué.