adj. f. (Grammaire) on appelle articulations et consonnes liquides, les deux linguales l et r. Voyez LINGUALES.

LIQUIDE, adj. pris subst. (Physique) corps qui a les propriétés de la fluidité, et outre cela la qualité particulière d'humecter ou mouiller les autres corps qui y sont plongés. Cette qualité lui vient de certaine configuration de ses parties qui le rend propre à adhérer facilement à la surface des corps qui lui sont contigus. Voyez FLUIDE, HUMIDE, UIDITEDITE.

M. Mariotte au commencement de son traité du mouvement des eaux, donne une idée peu différente du corps liquide. Selon lui liquide, est ce qui étant en quantité suffisante, coule et s'étend au-dessous de l'air, jusqu'à ce que sa surface se soit mise de niveau ; et comme l'air et la flamme n'ont pas cette propriété, M. Mariotte ajoute que ce ne sont point des corps liquides, mais des corps fluides. Au lieu que l'eau, le mercure, l'huile, et les autres liqueurs, sont des corps fluides et liquides. Tout liquide est fluide, mais tout fluide n'est pas liquide ; la liquidité est une espèce de fluidité.

Les liquides, selon plusieurs physiciens, sont dans un mouvement continuel. Le mouvement de leurs parties n'est pas visible, parce que ces parties sont trop petites pour être aperçues ; mais il n'est pas moins réel. Entre plusieurs effets qui le prouvent, selon ces philosophes, un des principaux est la dissolution et la corruption des corps durs causée par les liquides. On ne voit, par exemple, aucun mouvement dans de l'eau-forte qu'on a laissé reposer dans un verre ; cependant si l'on y plonge une pièce de cuivre, il se fera d'abord une effervescence dans la liqueur : le cuivre sera rongé visiblement tout-autour de sa surface, et enfin il disparaitra en laissant l'eau-forte chargée par-tout et uniformément de ses parties devenues imperceptibles, et teintes d'un bleu tirant sur le verd de mer. Ce que les eaux fortes sont à l'égard des métaux, d'autres liquides le font à l'égard d'autres matières ; chacun d'eux est dissolvant par rapport à certains corps, et plus ou moins, selon la figure, l'agitation, et la subtilité de ses parties. Or il est clair que la dissolution suppose le mouvement, ou n'est autre chose que l'effet du mouvement. Ce n'est pas le cuivre qui se dissout de lui-même ; il ne donne pas aussi à la liqueur l'agitation qu'il n'a pas ; le repos de ses parties, et le repos des parties du liquide joints ensemble ; ne produiront pas un mouvement. Il faut donc que les parties du liquide soient véritablement agitées, et qu'elles se meuvent en tous sens, puisqu'elles dissolvent de tous côtés et en tous sens des corps sur lesquels elles agissent. Quoiqu'il y ait des corps tels que la flamme, dont les parties sont extrêmement agitées de bas en haut, ou du centre vers la circonférence par un mouvement de vibration ou de ressort, ils ne sauraient néanmoins être appelés liquides, et ce ne sont que des fluides, parce que le mouvement en tous sens, le poids, et peut-être d'autres circonstances qui pourraient déterminer leurs surfaces au niveau, leur manquent.

Un liquide se change en fluide par l'amas de ses parcelles lorsqu'elles se détachent de la masse totale, comme on voit qu'il arrive à l'eau qui se résout en vapeurs ; car les brouillards et les nuages sont des corps ou des amas fluides, quoique formés de l'assemblage de parcelles liquides ; de même un fluide proprement dit, peut devenir liquide, si l'on insere dans les intervalles des parties qui le composent, quelque matière qui les agite en tous sens, et les détermine à se ranger de niveau vers la surface supérieure.

Les parties intégrantes des liquides sont solides, mais plus ou moins, disent les Cartésiens, selon que la matière subtîle les comprime davantage, ou par la liberté et la vitesse avec laquelle elle se meut entr'elles, ou par la quantité et la qualité des surfaces qui joignent entr'eux les éléments ou parties encore plus petites, qui composent les premières. Ces parties intégrantes sont comme environnées de toute part de la matière subtîle ; elles y nagent, y glissent, et suivent en tous sens les mouvements qu'elle leur imprime, soit que le liquide se trouve dans l'air, soit qu'il se trouve dans la machine pneumatique. C'est le plus ou le moins de cette matière enfermée dans un liquide, selon qu'elle a plus ou moins d'agitation et de ressort, qui fait principalement, selon ces philosophes, le plus ou le moins de liquidité : mais le plus ou le moins d'agitation de cette matière dépend de la grosseur, de la figure, de la nature des surfaces planes ou convexes, ou concaves, polies ou raboteuses, et de la densité des parties intégrantes du liquide. Si dix personnes autour d'une table peuvent y être rangées de 3628800 manières différentes, ou faire 3628800 changements d'ordre, on doit juger, ajoutent les Cartésiens, quelle prodigieuse quantité de liquides différents pourront produire toutes les combinaisons et toutes les variétés des circonstances dont on vient de parler.

On demande comment se peut-il que les parties intégrantes des liquides étant continuellement agitées par la matière subtile, elle ne les dissipe pas en un moment ; sait, par exemple, un verre à demi-plein d'eau, on voit bien que cette eau est retenue vers les côtés et au-dessous, par les parois du verre ; mais qu'est-ce qui la retient au-dessus ? Si l'on dit que le poids de l'athmosphère ou la colonne d'air, qui appuie sur la surface de cette eau, la retient en partie ; le même liquide qui se conserve dans l'air, ne se conservant pas moins dans la machine pneumatique, après qu'on en a pompé l'air, il faut avoir recours à une autre cause. D'où vient encore la viscosité qu'on remarque dans tous les liquides plus ou moins : cette disposition que les gouttes qu'on en détache ont à se rejoindre, et cette légère résistance qu'elles apportent à leur séparation ? De plus, il n'y a point d'apparence que la matière subtîle enfermée dans les interstices d'un liquide, non plus que les parties qui le composent, se meuve avec la même vitesse que la matière subtîle extérieure ; de même à-peu-près que les vents qui pénètrent jusques dans le milieu d'une forêt, s'y trouvent considérablement affoiblis, les feuilles et tout ce qu'ils y rencontrent y étant beaucoup moins agitées qu'en rase campagne. Or comment se conserve l'équilibre dans ces différents degrés de vitesse, des parties intégrantes d'un liquide, de la matière subtîle du dedans, et de la matière subtîle du dehors ?

Voici les réponses que l'on peut faire à ces questions selon les Cartésiens. 1°. Les parties d'un liquide ne sont pas exemptes de pesanteur, et elles en ont de même que tous les autres corps, à raison de leur masse et de leur matière propre ; cette pesanteur est une des puissances qui les assujettit dans le vase où elles sont contenues. 2°. Il ne faut pas croire que la matière subtîle environne les parties intégrantes d'un liquide, de manière qu'elles ne se touchent jamais entr'elles, et ne glissent jamais les unes sur les autres, selon qu'elles ont des surfaces plus ou moins polies, et qu'elles sont mues avec plus ou moins de vitesse. Il est très-probable au contraire que les parties intégrantes des liquides, telles que l'eau, l'huîle et le mercure ne se meuvent guère autrement. Or ces parties présentent d'autant moins de surface à la matière subtîle intérieure, qu'elles se touchent par plus d'endroits ; et celles qui se trouvent vers les extrémités lui en présentent encore moins que les autres. Elles en présentent donc davantage à la matière subtîle extérieure, et comme cette matière a plus de liberté, et se meut avec plus de vitesse que l'intérieure, il est clair qu'elle doit avoir plus de force pour repousser les parties du liquide vers la masse totale, que la matière subtîle intérieure n'en a pour les séparer. Ainsi le liquide demeurera dans le vaisseau qui le contient, et de plus il aura quelque viscosité, ou resistera un peu à la division. Pour les liquides fort spiritueux, dont les parties intégrantes sont apparemment presque toutes noyées dans la matière subtile, sans se toucher entr'elles que rarement, et par de très-petites surfaces, ils sont en même temps et l'exception et la preuve de ce que nous venons de dire, puisqu'ils s'exhalent et se dissipent bientôt d'eux-mêmes, si l'on ne bouche exactement le vaisseau qui les renferme. 3°. Enfin pour comprendre comment les parties des liquides se meuvent avec la matière subtîle qu'ils contiennent, et comment l'équilibre se conserve entr'elles, cette matière et la matière subtîle extérieure, il faut observer, que quoique chaque partie intégrante de certains liquides soit peut-être un million de fois plus petite que le plus petit objet qu'on puisse apercevoir avec un excellent microscope, il y a apparence que les plus grosses molécules de la matière subtîle sont encore un million de fais, si l'on veut, plus petites que ces parties ; l'imagination se perd dans cette extrême petitesse, mais c'est assez que l'esprit en aperçoive la possibilité dans l'idée de la matière, et qu'il en conclue la nécessité par plusieurs faits incontestables. Or, cent de ces molécules qui viennent, par exemple, heurter en même temps, selon une même direction et avec une égale vitesse, la partie intégrante d'un liquide un million de fois plus grosse que chacune d'elles, ne lui communiquent pourtant que peu de leur vitesse ; parce que leur cent petites masses sont contenues dix mille fois dans la grosse masse, et qu'il faut pour y distribuer, par exemple, un degré de vitesse, qu'elles fassent autant d'effort contre elle, que pour en communiquer dix mille degrés à cent de leurs semblables ; car cent de masse multiplié par dix mille de vitesse, et 1 de vitesse multiplié par un million de masse, produisent également de part et d'autre un million de mouvements. Mais ces cent molécules de matières subtiles sont bientôt suivies de cent autres, et ainsi de suite, peut-être de cent millions ; et comme celles qui viennent les dernières sur la partie du liquide, lui trouvent déjà une certaine quantité de mouvements, que les premières lui ont communiqué, elles l'accélèrent toujours de plus en plus, et à la fin elles lui donneraient autant de vitesse qu'elles en ont elles-mêmes, si la matière subtîle pouvait toujours couler sur cette partie avec la même liberté, et selon la même direction. Mais la matière subtîle se mouvant en divers sens dans les liquides, et la vitesse que plusieurs millions de ces molécules peuvent avoir donné à une partie intégrante du liquide, par une application continue et successive de cent en cent, vers un certain côté, étant bientôt détruite ou retardée par plusieurs millions d'autres qui viennent choquer la même partie selon des directions différentes ou contraires ; il est évident que cette partie intégrante du liquide n'aura jamais le temps de parvenir à leur degré d'agitation, et qu'ainsi la supériorité de vitesse demeurera toujours à la matière subtile. Cependant il n'est pas possible que cette vitesse ne soit fort diminuée par-là, et ne se trouve bientôt au-dessous de ce qu'elle est dans la matière subtîle du dehors, qui rencontre bien moins d'obstacles à ces divers mouvements, obstacles d'autant plus considérables, que la densité du liquide est plus grande, que ses parties intégrantes sont plus grosses, qu'elles ont plus de surface, et que ces surfaces sont moins glissantes. Mais ce que la matière subtîle perd de vitesse entre les interstices d'un liquide, est compensé par une plus grande tension du ressort de ces molécules, lequel augmente sa force, à mesure qu'il est plus comprimé ; et c'est par-là que l'équilibre se conserve entre les parties intégrantes du liquide, la matière subtîle intérieure, et la matière subtîle du dehors. C'est par l'action et la réaction continuelles et réciproques entre les parties du liquide, et la matière subtîle qu'il contient, et entre ce tout et la matière subtîle extérieure, que les vitesses, les compressions et les masses multipliées de part et d'autre, donneront toujours un produit égal de force ou de mouvement : ce mouvement et cet équilibre subsisteront tant que le liquide perséverera dans son état de liquidité.

On voit donc que les parties intégrantes d'un liquide sont ce qui s'y meut avec le moins de vitesse, ensuite c'est la matière subtîle qui coule entr'elles, et qui est plus agitée qu'elles ; et enfin vient la matière subtîle extérieure, dont l'agitation passe celle de tout le reste, et de la vitesse de laquelle on peut se faire une idée par les effets qu'elle produit dans la poudre à canon et dans le tonnerre.

Ceci est tiré de la Dissertation sur la glace par M. de Mairan, imprimée dans le Traité des vertus médicinales de l'eau commune, Paris, 1730. tome II. pag. 523 et suiv. Article de M. FORMEY.

Nous n'avons pas besoin de dire que tout ceci est purement hypothétique et conjectural, et que nous le rapportons seulement, suivant le plan de notre ouvrage, comme une des principales opinions des Physiciens sur la cause et les propriétés de la liquidité. Car nous n'ignorons pas que ce mouvement prétendu intestin des particules des fluides, est attaqué fortement par d'autres physiciens. Voyez FLUIDE et FLUIDITE.

LIQUIDE, (Jurisprudence) se dit d'une chose qui est claire, et dont la quantité ou la valeur est déterminée ; une créance peut être certaine sans être liquide. Par exemple, un ouvrier qui a fait des ouvrages, est sans contredit créancier du prix ; mais s'il n'y a pas eu de marché fait à une certaine somme, ou que la quantité des ouvrages ne soit pas constatée, sa créance n'est pas liquide, jusqu'à-ce qu'il y ait eu un taisé, ou état des ouvrages et une estimation.

On entend aussi quelquefois par liquide ce qui est actuellement exigible ; c'est pourquoi, quand on dit que la compensation n'a lieu que de liquide à liquide, on entend non-seulement qu'elle ne peut se faire qu'avec des sommes ou quantités fixes et déterminées, mais aussi qu'il faut que les choses soient exigibles, au temps où l'on veut en faire la compensation. Voyez COMPENSATION. (A)